Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 13 juin 2022 par lesquelles la préfète de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a déterminé le pays de destination en cas de reconduite.
Par un jugement n° 2205285 du 11 octobre 2022, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 14 novembre 2022, M. C..., représenté par Me Mopo Kobanda, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 11 octobre 2022 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler les décisions susmentionnées du 13 juin 2022 ;
3°) de mettre à la charge de l'État, une somme de 1 500 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa requête est recevable ;
- il peut prétendre à une régularisation de visa auprès de l'Office Français de l'immigration et de l'intégration ; ainsi, c'est à tort que la préfète de l'Ain affirme qu'il doit d'abord quitter le territoire national et solliciter un visa dans son pays d'origine pour pouvoir revenir en France ;
- compte tenu de sa vie commune avec une compatriote titulaire d'une carte de séjour avec laquelle il a eu un enfant, la préfète a méconnu les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la préfète a également entaché ses décisions d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle, ainsi que d'une erreur de droit compte tenu de la possibilité qu'il a de demander la régularisation d'un visa d'entrée sur le territoire français ;
- la préfète a méconnu l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire enregistré le 27 décembre 2022, la préfète de l'Ain conclut au rejet de la requête.
Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., né le 30 juin 1988, ressortissant de la République démocratique du Congo, est entré en France le 19 mai 2019 selon ses déclarations. Sa demande d'asile a été rejetée en dernier lieu par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 10 mai 2021. Le 2 juin 2021, il a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. Le 2 avril 2022, il a présenté une demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L.423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par décisions du 13 juin 2022, la préfète de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. C... relève appel du jugement du 11 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions du 13 juin 2022.
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 436-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sans préjudice des dispositions de l'article L. 412-1, préalablement à la délivrance d'un premier titre de séjour, l'étranger qui est entré en France sans être muni des documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ou qui, âgé de plus de dix-huit ans, n'a pas, après l'expiration depuis son entrée en France d'un délai de trois mois ou d'un délai supérieur fixé par décret en Conseil d'État, été muni d'une carte de séjour, acquitte un droit de visa de régularisation d'un montant égal à 200 euros, dont 50 euros, non remboursables, sont perçus lors de la demande de titre. (...) Le visa mentionné au premier alinéa tient lieu du visa de long séjour prévu au dernier alinéa de l'article L. 312-2 si les conditions pour le demander sont réunies ".
3. Si la décision du 13 juin 2022 fait état de ce qu'un retour de M. C... en République démocratique du Congo n'entraînerait qu'une séparation temporaire de la cellule familiale, le temps " le cas échéant de la délivrance d'un visa de long séjour auprès des autorités consulaires françaises " de ce pays, il ne ressort pas des pièces du dossier et des termes de cette décision, que la préfète de l'Ain aurait entendu opposer une absence de visa, pour refuser à l'intéressé, la délivrance d'un titre de séjour. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit au regard de ce que le requérant pourrait obtenir, sur place, un visa de régularisation sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 436-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits de libertés d'autrui ".
5. M. C... fait valoir qu'il est présent en France depuis trois ans, qu'il a épousé une compatriote, titulaire d'une carte de séjour avec laquelle il a eu un enfant et qu'il contribue également à l'entretien d'un premier enfant de son épouse. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant justifierait d'une intégration particulière en France, ni qu'il existerait des obstacles à ce que la vie familiale de l'intéressé se poursuive en République démocratique du Congo. Au vu de l'ensemble de ces éléments et au regard notamment de l'inexécution de la précédente mesure d'éloignement dont l'intéressé a fait l'objet, la décision litigieuse n'a pas porté au droit de ce dernier au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
6. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5 du présent arrêt, la préfète de l'Ain n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision portant refus de séjour sur la situation personnelle de M. C....
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
7. En premier lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 5 et 6 du présent arrêt, la préfète de l'Ain n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision faisant obligation à M. C... de quitter le territoire français.
8. En second lieu, le requérant ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, au regard des risques qu'il encourrait en cas de retour dans son pays d'origine, la décision en litige n'ayant pas pour effet à elle seule de l'éloigner vers son pays d'origine.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
9. Si le requérant soutient qu'il serait exposé à un risque sanitaire lié à la pandémie de Covid-19 en République Démocratique du Congo, et évoque également les difficultés liées à l'actualité politique de ce pays, il n'établit pas qu'il serait lui-même exposé à un risque de traitement inhumain ou dégradant en cas de retour dans ce pays. Les moyens tirés de ce que la préfète de l'Ain n'aurait pas procédé à un examen sérieux et personnalisé de sa situation avant de fixer le pays de renvoi et aurait méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent donc être écartés.
10. Il résulte de ce tout qui précède que M. C... n'est pas fondé à demander l'annulation des décisions du 13 juin 2022 par lesquelles la préfète de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie du présent arrêt en sera adressée à la préfète de l'Ain.
Délibéré après l'audience du 6 juillet 2023 à laquelle siégeaient :
M. Hermitte, président de la cour ;
M. B..., premier vice-président ;
Mme Dèche, présidente assesseure.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 août 2023.
La rapporteure,
P. Dèche
Le président,
G. Hermitte
La greffière,
A.-C. Ponnelle
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 22LY03293
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