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22/06/2023 | FRANCE | N°23LY00939

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 22 juin 2023, 23LY00939


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 13 février 2023 par lequel le préfet de la Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de six mois et l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 2301145 du 20 février 2023, la magistrate désignée par la présidente du tribunal a rejeté cette demande.

Procédures devant la cour

I - Par une

requête enregistrée le 16 mars 2023 sous le n° 23LY00939, M. B..., représenté par Me Vray, demande ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 13 février 2023 par lequel le préfet de la Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de six mois et l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 2301145 du 20 février 2023, la magistrate désignée par la présidente du tribunal a rejeté cette demande.

Procédures devant la cour

I - Par une requête enregistrée le 16 mars 2023 sous le n° 23LY00939, M. B..., représenté par Me Vray, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement de la magistrate désignée par la présidente du tribunal et l'arrêté susmentionné ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Loire, sous astreinte de 50 euros par jour de retard dans le délai de huit jours de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir de réexaminer sa situation administrative en application de l'application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative ;

3°) de mettre à la charge de l'État, au profit de son conseil, la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier ; le premier juge a entaché sa décision d'une contradiction de motif et d'une erreur de droit en relevant des faits démontrant que M. B... participe effectivement à l'entretien et à l'éducation de ses enfants, avant d'en conclure le contraire et le manque d'ancrage de sa vie privée et familiale en France ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'un défaut de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation particulière ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de six mois méconnaît les dispositions de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il présente des circonstances humanitaires ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale.

La requête de M. B... a été communiquée au préfet de la Loire qui n'a pas présenté d'observations.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 avril 2023.

II - Par une requête enregistrée le 16 mars 2023 sous le n° 23LY00940, M. B..., représenté par Me Vray, demande à la cour :

1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Loire sous astreinte de 50 euros par jour de retard dans le délai de huit jours de le de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'État, au profit de son conseil, la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- son éloignement du territoire français, rendu possible par le jugement dont il sollicite le sursis à exécution, risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables ;

- les moyens qu'il présente dans le cadre de sa requête enregistrée sous le n° 23LY00939 sont sérieux et de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué et des décisions contestées.

La requête de M. B... a été communiquée au préfet de la Loire qui n'a pas présenté d'observations.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 avril 2023.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Djebiri, première conseillère ;

- et les observations de M. B... ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 8 juin 2023, présentée pour M. B... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant malien, est entré en France en 2016 selon ses déclarations. Par arrêté du 13 février 2023 le préfet de la Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé le pays de destination, l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de six mois et l'a assigné à résidence. Par les deux requêtes visées plus haut, qu'il y a lieu de joindre pour qu'il y soit statué par un seul arrêt, M. B..., relève appel du jugement de la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Lyon portant rejet de sa demande d'annulation de l'arrêté du 13 février 2023 et demande également le sursis à exécution de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. La circonstance que le tribunal, au prix d'une contradiction de motifs sur la contribution à l'éducation et à l'entretien de ses enfants, aurait à tort écarté le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, intéresse le fond du litige et non la régularité de ce jugement.

Sur la légalité de l'arrêté du 13 février 2023 :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

3. En premier lieu, le préfet de la Loire a indiqué les motifs de droit et de fait de sa décision, qui est ainsi régulièrement motivée.

4. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de la décision qu'elle a été prise après examen effectif de la situation de M. B....

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ". M. B... se prévaut de sa résidence en France depuis 2016 et de la présence, sur le territoire national, de ses deux enfants mineurs, nés en 2019 et 2022 pour l'un né d'une mère guinéenne titulaire d'un titre de séjour, dont il est séparé, et pour l'autre née d'une mère malienne qui a présenté une demande d'asile. Il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier qu'il vivrait avec cette dernière compagne, mère de sa fille trisomique alors qu'il s'est déclaré célibataire lors de son audition par les services de police le 13 février 2023. M. B..., n'a pas exécuté la mesure d'éloignement prise à son encontre par le préfet du Rhône le 16 septembre 2018 et n'a cherché à régulariser sa situation qu'à compter du 18 janvier 2023 en déposant une pré-demande de titre de séjour. S'il fait valoir qu'il entretient des liens avec ses enfants, il ne justifie pas avoir contribué à leur entretien et leur éducation par la production notamment de transferts d'argent destinés à son fils et d'un courrier adressé à son domicile concernant sa fille. M. B... n'est par ailleurs pas dépourvu d'attaches personnelles et familiales au Mali, où il a vécu jusqu'à l'âge de seize ans et où résident son père et ses demi-frères. Dans ces conditions, eu égard aux conditions de son séjour en France, il n'apparaît pas que l'obligation litigieuse de quitter le territoire aurait porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise.

6. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Les deux mandats de transferts d'argent, le courrier adressé à son domicile concernant sa fille, les achats de lait infantile et l'attestation qu'il accompagne sa fille à des rendez-vous médicaux, produits par M. B..., ne permettent ni d'établir qu'il contribuerait effectivement à l'entretien et à l'éducation de ses enfants, ni même qu'il vivrait sous le même toit. En outre, le préfet de la Loire n'a prononcé à l'encontre de l'appelant, qui ne pouvait ignorer la précarité de sa situation lors de son engagement dans des relations conjugales, qu'une interdiction de retour sur le territoire français de six mois, si bien que la mesure d'éloignement ne peut en tout état de cause être regardée comme ayant pour effet d'entraîner une séparation de longue durée entre les enfants et leur père. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations citées au point précédent doit donc être écarté.

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :

7. M. B... réitère en appel sans y ajouter de nouveau développement son moyen tiré de la violation par la décision portant interdiction de retour sur le territoire de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en ce qu'il présente des circonstances humanitaires au sens des dispositions de l'article L. 612-6 du même code, son moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences sur sa situation personnelle dont cette décision serait entachée, et son moyen relatif à la disproportion de la mesure. Il convient de les écarter par adoption des motifs circonstanciés retenus par le premier juge.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Sa requête enregistrée sous le n° 23LY00299 doit donc, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée.

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :

9. Le présent arrêt statuant sur l'appel de M. B... dirigé contre le jugement n° 2301145 de la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Lyon, les conclusions de la requête n° 23LY00940 tendant ce qu'il soit sursis à son exécution ont perdu leur objet et il n'y a donc plus lieu d'y statuer.

10. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées par le conseil de M. B..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, et tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991

DÉCIDE :

Article 1er : La requête n° 23LY00939 de M. B... est rejetée.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 23LY00940 de M. B... tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n° 2301145 du 20 février 2023 du tribunal administratif de Lyon.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête n° 23LY00940 de M. B... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Loire.

Délibéré après l'audience du 8 juin 2023 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

Mme Djebiri, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023.

La rapporteure,

C. DjebiriLe président,

V.-M. Picard

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N°s 23LY00939, 23LY00940

lc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY00939
Date de la décision : 22/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: Mme Christine DJEBIRI
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : VRAY

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-06-22;23ly00939 ?
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