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22/06/2023 | FRANCE | N°23LY00886

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 22 juin 2023, 23LY00886


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 18 août 2022 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination

Par un jugement n° 2206172 du 3 février 2023, le tribunal a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour.

Procédure devant la cour

Par une requête e

nregistrée le 10 mars 2023, le préfet de l'Isère demande à la cour d'annuler ce jugement.

Il soutient ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 18 août 2022 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination

Par un jugement n° 2206172 du 3 février 2023, le tribunal a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 10 mars 2023, le préfet de l'Isère demande à la cour d'annuler ce jugement.

Il soutient que c'est à tort que le tribunal a annulé pour méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales l'arrêté du 18 août 2022.

Par un mémoire enregistré le 31 mai 2023, M. A..., représenté par Me Adja Oke, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de l'État une somme de 1 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Djebiri, première conseillère ;

- et les observations de Me Adja Oke pour M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Le préfet de l'Isère relève appel du jugement du 3 février 2023 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 18 août 2022 rejetant la demande de titre de séjour présentée par M. A..., ressortissant sénégalais, et l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Sur le motif d'annulation retenu par les premiers juges :

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui est entré en France en 2017, se prévaut de sa relation avec une compatriote titulaire d'une carte pluriannuelle valable jusqu'au 27 décembre 2023, de leur situation professionnelle, de leur mariage en date du 6 février 2021 et de la naissance de leur enfant en France le 5 juillet 2021. Il apparaît toutefois que ce mariage et cette naissance étaient très récents à la date de l'arrêté contesté, l'intéressé s'étant par ailleurs maintenu en France de manière irrégulière malgré la fin de validité de son visa, et sans chercher à régulariser sa situation avant février 2022. Par suite, et alors que M. A... a passé la majeure partie de son existence au Sénégal, c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges se sont fondés sur le motif tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention pour annuler l'arrêté litigieux.

4. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A....

Sur les autres moyens :

5. L'arrête contesté a été signé par Mme B... C..., attachée, cheffe du bureau du droit au séjour, qui a reçu délégation à cet effet par arrêté du préfet de l'Isère du 26 juillet 2022, publié au recueil des actes administratifs du même jour. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte doit être écarté.

6. Le préfet de l'Isère, qui a notamment rappelé la situation familiale de M. A... ses démarches auprès d'une agence privée d'emploi française et qui n'était pas tenu de reprendre précisément l'ensemble des pièces produites à l'appui de la demande, a énoncé les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de sa décision. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté en litige ne serait pas suffisamment motivé.

7. Il ressort de l'arrêté litigieux, ainsi motivé, que le préfet de l'Isère a, contrairement à ce que prétend M. A... préalablement procédé à un examen de sa situation particulière, tant professionnelle que familiale.

8. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., en sa qualité de conjoint d'une ressortissante sénégalaise titulaire d'une carte pluriannuelle, entre dans les catégories qui ouvrent droit au regroupement familial alors même qu'il s'est marié après son entrée sur le territoire français. Il ne peut donc utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

9. M. A... n'établit pas que le préfet aurait commis une erreur de fait en retenant qu'il n'a pas réalisé d'effort pour s'insérer alors qu'il a produit trente-quatre bulletins de salaires, ou que cette erreur aurait été déterminante sur le sens de la décision.

10. En l'absence d'autres éléments que ceux qui ont été exposés au point 3 du présent arrêt, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Isère aurait méconnu les stipulations rappelées plus haut de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ni que, faute d'exercice par le préfet de son pouvoir de régularisation, et alors même qu'il n'aurait pas contrefait un titre, le refus de séjour serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

11. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale de New York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A..., qui ne pouvait ignorer la fragilité de sa situation en France, ne pourrait s'installer au Sénégal pays dont tous les membres de la famille ont la nationalité ou, au moins, retourner dans son pays d'origine le temps que soit instruite une éventuelle demande de regroupement familial, rien ne permettant de dire qu'il n'y serait pas éligible. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant doit être écarté.

12. M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français devrait être annulée par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour, ni que la décision octroyant un délai de départ volontaire et celle fixant le pays de destination devraient être annulées par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre et de l'obligation de quitter le territoire français.

13. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de l'Isère est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a annulé son arrêté du 18 août 2022. Les conclusions à fin d'injonction, d'astreinte et celles présentées en première instance sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble n° 2206172 du 3 février 2023 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Grenoble est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. E... A....

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 8 juin 2023 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

Mme Djebiri, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023.

La rapporteure,

C. DjebiriLe président,

V.-M. Picard

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

.

N° 23LY00886 2

lc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY00886
Date de la décision : 22/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: Mme Christine DJEBIRI
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : ADJA OKE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-06-22;23ly00886 ?
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