Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... B..., sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'ordonner à la chambre de commerce et d'industrie de Région (CCIR) Auvergne Rhône-Alpes, en exécution du jugement rendu le 27 juillet 2017 n° 1502152, de prendre, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, différentes mesures sous astreinte de 100 euros par jour de retard.
Après l'ouverture d'une procédure juridictionnelle ordonnée le 5 septembre 2018 par son président en application de l'article R. 921-6 du code de justice administrative, le tribunal, par un jugement n° 1805695 du 4 mai 2021, a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'exécution du jugement du 27 juillet 2017 et rejeté le surplus de la demande de M. B....
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire enregistrés les 6 juillet 2021 et 19 janvier 2022, M. B..., représenté par la SCP Janot et Associés, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant que le tribunal a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur ses conclusions à fin d'exécution et rejeté le surplus de sa demande ;
2°) d'ordonner l'exécution du jugement du 27 juillet 2017 en enjoignant à la CCIR Auvergne Rhône-Alpes de procéder à la reconstitution intégrale de sa carrière et de l'ensemble de ses droits sociaux, sous astreinte de 100 euros par jour de retard en cas d'inexécution dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt ;
3°) de mettre à la charge de la CCIR Auvergne Rhône-Alpes une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier, n'ayant pas examiné le moyen tiré de ce que la CCIR Auvergne Rhône-Alpes n'avait pas reconstitué sa carrière au titre de ses droits sociaux pour la période en cause ;
- il appartenait à la CCIR Auvergne Rhône-Alpes en exécution du jugement du 27 juillet 2017 de procéder à sa réintégration juridique et à la reconstitution complète de sa carrière au titre de ses droits sociaux pour la période du 16 mai 2015, date de son éviction illégale, au 12 avril 2018, date à laquelle il a de nouveau été licencié, en prenant en compte l'indice d'expérience ;
- la CCIR Auvergne Rhône-Alpes n'a pas entièrement reconstitué ses droits au titre de la retraite complémentaire pour la période des mois de janvier à avril 2018, aucune cotisation n'ayant été versée auprès des organismes concernés ;
- elle n'a pas reconstitué sa carrière au titre de l'indice d'expérience à hauteur de quinze points, correspondant aux mois de janvier 2016, 2017 et 2018 ;
- elle n'a pas reconstitué entièrement ses droits, notamment au titre de son solde de tout compte, en l'absence d'indemnisation de ses congés payés alors qu'elle lui avait imposé de prendre ces congés dans le cadre de son préavis, de détermination de ses droits à congés, avant son premier licenciement et pendant la période devant être reconstituée, de fixation correcte de son préavis, du point de vue de son calcul et de ses effets, de calcul exact de son salaire journalier de référence, et de prise en compte de son ancienneté ; elle doit justifier de démarches auprès de Pôle emploi s'agissant de ce salaire de référence suite à l'exécution en litige.
Par un mémoire enregistré le 20 décembre 2022, la chambre de commerce et d'industrie de Région Auvergne Rhône-Alpes, représentée par Me Bousquet, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le moyen tiré de ce qu'elle n'a pas reconstitué la carrière de l'intéressé au titre de l'indice d'expérience à hauteur de quinze points, correspondant aux mois de janvier 2016, 2017 et 2018, est nouveau en appel, et donc irrecevable ;
- les autres moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 10 décembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er février 2022.
Un mémoire présenté pour M. B... a été enregistré le 21 avril 2022, après l'intervention de la clôture d'instruction.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- l'arrêté du 25 juillet 1997 relatif au statut du personnel de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie, des chambres de commerce et d'industrie et des groupements consulaires ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Chassagne, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ;
- et les observations de Me Bousquet, pour la CCIR Auvergne Rhône-Alpes ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., recruté initialement le 24 avril 1989 par la chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Grenoble en qualité d'assistant conseil aux entreprises, occupait en dernier lieu, comme agent statutaire, un poste de responsable de développement économique du pôle études et aménagement du territoire. Par une délibération du 23 octobre 2014, l'assemblée générale de la CCI a décidé la suppression de quarante-huit postes, dont celui occupé par M. B..., qui a été licencié pour suppression de poste par décision du 16 janvier 2015. Par un jugement, définitif, du 27 juillet 2017 le tribunal administratif de Grenoble a annulé cette décision de licenciement en précisant que la chambre de commerce et d'industrie de Région (CCIR) Auvergne Rhône-Alpes devait reconstituer la carrière et les droits sociaux de M. B.... Par une décision du 8 décembre 2017, la CCIR Auvergne Rhône-Alpes a prononcé une nouvelle fois le licenciement pour suppression de poste de M. B.... Ce dernier a alors demandé au tribunal administratif de Grenoble, sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, d'ordonner à la CCIR Auvergne Rhône-Alpes, en exécution du jugement rendu le 27 juillet 2017, de prendre différentes mesures. Il relève appel du jugement du 4 mai 2021 par lequel le tribunal, après l'ouverture d'une procédure juridictionnelle, a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'exécution du jugement du 27 juillet 2017 et rejeté leur surplus.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux points 5, 8 et 9 du jugement attaqué, les premiers juges ont vérifié si la CCIR Auvergne Rhône-Alpes justifiait, au titre de ses droits à la retraite de base et complémentaire, avoir reconstitué les droits sociaux de M. B... pour la période du 16 mai 2015 au 12 avril 2018, qui comprenaient, au regard des documents produits, les points d'indice d'expérience, s'étant prononcés sur la prise en compte de ces points par son employeur, qu'il contestait. Par suite, et à la supposer soulevée, aucune irrégularité, faute pour le tribunal d'avoir examiné cette contestation, ne saurait ici être retenue.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable : " En cas d'inexécution d'un jugement (...), la partie intéressée peut demander au tribunal administratif (...) qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. / (...) / Si le jugement (...) dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte. / (...). " Il résulte de ces dispositions qu'en l'absence de définition, par le jugement dont l'exécution lui est demandée, des mesures qu'implique nécessairement cette décision, il appartient au juge saisi sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative d'y procéder lui-même en tenant compte des situations de droit et de fait existant à la date de sa décision. Il lui appartient également d'apprécier l'opportunité de compléter les mesures déjà prescrites ou qu'il prescrit lui-même par la fixation d'un délai d'exécution et le prononcé d'une astreinte suivi, le cas échéant, de la liquidation de celle-ci, en tenant compte tant des circonstances de droit et de fait existant à la date de sa décision que des diligences déjà accomplies par les parties tenues de procéder à l'exécution de la chose jugée ainsi que de celles qui sont encore susceptibles de l'être.
4. L'annulation d'une décision licenciant illégalement un agent public implique nécessairement, au titre de la reconstitution de sa carrière, la reconstitution des droits sociaux, et notamment des droits à pension de retraite, qu'il aurait acquis en l'absence de l'éviction illégale et, par suite, le versement par l'administration des cotisations nécessaires à cette reconstitution. Ainsi, sauf à ce que l'agent ait bénéficié d'une indemnité destinée à réparer le préjudice matériel subi incluant les sommes correspondantes, il incombe à l'administration de prendre à sa charge le versement de la part salariale de ces cotisations, au même titre que de la part patronale.
5. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la CCIR Auvergne Rhône-Alpes a adressé le 18 juin 2018 auprès du GIE Humanis, alors gestionnaire des régimes de retraite complémentaire de ses agents, un virement bancaire d'un montant de 146 136,87 euros afin de régulariser la situation de neuf agents, ce montant comprenant, selon des tableaux produits par cet établissement, les sommes de 13 755,11 et 17 271,03 euros de cotisations dues pour la période du 16 mai 2015 au 12 avril 2018 au titre de la reconstitution des droits de retraite complémentaire de M. B.... Ce dernier soutient que, faute de versement de cotisations auprès des organismes concernés, la CCIR Auvergne Rhône-Alpes n'aurait pas entièrement reconstitué ses droits au titre de la retraite complémentaire pour les mois de janvier à avril de l'année 2018, se prévalant notamment de relevés de carrière établis, pour l'un, le 16 mars 2021 par " AG2R - La Mondiale ", désormais gestionnaire du régime de retraite complémentaire dite " Agirc - Arrco ", pour l'autre le 8 janvier 2022 par " Info Retraite ", qui ne mentionnent pas, au titre de la période concernée, de versement par son employeur, et de ce que " AG2R - La Mondiale " lui a demandé le 7 avril 2022 ses bulletins de salaire pour régulariser sa situation. Toutefois, compte tenu des éléments apportés par la CCIR Auvergne Rhône-Alpes, et notamment des sommes évoquées ci-dessus, dont le montant n'est pas sérieusement contesté, rien dans ce que soutient l'intéressé ne permet de vraiment douter de ce que ses droits au titre de la retraite complémentaire pour les mois de janvier à avril 2018 n'auraient pas été intégralement reconstitués et de ce que le jugement du 27 juillet 2017 serait sur ce point resté inexécuté.
6. En deuxième lieu, la CCIR Auvergne Rhône-Alpes a réglé pour les mêmes agents le 12 décembre 2018 une somme de 150 616 euros au titre des cotisations pour la retraite de base auprès de l'Urssaf. Il ressort de la comparaison de tableaux produits par la CCIR Auvergne Rhône-Alpes, qui détaillent pour chacun de ces agents les sommes correspondant aux cotisations de retraite de sécurité sociale et de retraite complémentaire dite " Agirc - Arrco " et les calculs opérés pour reconstituer les droits de M. B..., que les sommes qu'elle a versées pour régulariser la situation de ce dernier prennent en compte, pour la période en litige un indice d'expérience augmentant de cinq points supplémentaires au 1er janvier de chacune des années entre 2015 et 2018, soit de quatre-vingt-cinq à cent. Contrairement à ce que soutient M. B..., et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de ce moyen, la reconstitution de ses droits sociaux a ainsi pris en compte cet indice.
7. En dernier lieu, M. B... se plaint de ce que la CCIR Auvergne Rhône-Alpes, ne l'a pas indemnisé de ses congés payés, alors qu'elle lui avait imposé de les prendre dans le cadre de son préavis, n'a pas déterminé ses droits à congés avant son premier licenciement et pendant la période devant être reconstituée, n'a pas fixé correctement son préavis, du point de vue de son calcul et de ses effets, n'a pas calculé exactement son salaire journalier de référence et n'a pas pris en compte son ancienneté, ne justifiant pas de démarches auprès de Pôle emploi pour ce salaire de référence. Toutefois, ces éléments, eu égard à leur nature et à la manière dont ils doivent être appréciés, ne mettent pas directement en cause l'exécution même du jugement du 27 juillet 2017, mais ses effets sur la détermination des droits de M. B... à la suite du second licenciement dont il a ultérieurement fait l'objet. En toutes ses branches, ce moyen, qui soulève un litige distinct de celui de l'exécution du jugement du 27 juillet 2017, ne peut qu'être écarté.
8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur ses conclusions à fin d'exécution et rejeté le surplus de sa demande. Sa requête doit donc, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée.
9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de M. B... une somme de 500 euros au titre des frais exposés par la CCIR Auvergne Rhône-Alpes pour les besoins du litige et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : M. B... versera à la CCIR Auvergne Rhône-Alpes une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la chambre de commerce et d'industrie de Région Auvergne Rhône-Alpes.
Délibéré après l'audience du 8 juin 2023 à laquelle siégeaient :
M. Picard, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
M. Chassagne, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023.
Le rapporteur,
J. Chassagne
Le président,
V.-M. Picard La greffière,
A. Le Colleter
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 21LY02335
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