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15/06/2023 | FRANCE | N°22LY03440

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 15 juin 2023, 22LY03440


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 4 mai 2022 par lesquelles le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.

Par un jugement n° 2203749 du 17 août 2022, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 2

3 novembre 2022, M. B..., représenté par Me Fréry, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 4 mai 2022 par lesquelles le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.

Par un jugement n° 2203749 du 17 août 2022, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 23 novembre 2022, M. B..., représenté par Me Fréry, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 17 août 2022 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler les décisions susmentionnées du 4 mai 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou à défaut, de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, au profit de son conseil, une somme de 1 500 euros, en application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à charge pour ce conseil, de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- en prenant sa décision antérieurement au dépôt du dossier de première demande de titre de séjour, alors même qu'il avait connaissance de la date du rendez-vous dans ses services, le préfet a méconnu son droit d'être entendu ;

- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sur le fondement desquelles il avait demandé sa régularisation ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le délai de départ volontaire est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- eu égard aux risques encourus au Nigéria, la décision fixant le pays de renvoi qui est insuffisamment motivée, méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par décision du 26 octobre 2022, le bureau d'aide juridictionnelle a rejeté la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. B....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure,

- les observations de Me Tronquet, représentant M. B... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., né le 23 février 1991, de nationalité nigériane, est entré en France, le 12 mai 2019, selon ses déclarations. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 5 mars 2021. Ce refus a été confirmé par la Cour nationale du droit d'asile, le 28 septembre 2021. Par décision du 4 mai 2022, le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office. M. B... relève appel du jugement du 17 août 2022 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions du 4 mai 2022.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. (...) ".

3. L'obligation de quitter le territoire en litige, qui fait état de la situation familiale et administrative de M. B... et vise, notamment, le 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur lequel le préfet du Rhône s'est fondé pour prononcer à son encontre une mesure d'éloignement, comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté.

4. En deuxième lieu, si le requérant fait valoir que, suite à la demande de rendez-vous qu'il avait déposée, il a été convoqué en préfecture, le 9 mai 2022, date à laquelle la décision en litige lui a été notifiée, il ressort toutefois des termes mêmes de cette décision, que le préfet a pris en compte les éléments communiqués par le conseil de l'intéressé, le 10 mars 2022, concernant son handicap ainsi que son parcours et ses productions artistiques. Dès lors, M. B..., qui a ainsi pu présenter des observations concernant sa situation administrative et familiale, n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français est intervenue en méconnaissance du principe général du droit de l'Union européenne d'être entendu.

5. En dernier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an (...) / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " et aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".

6. D'autre part, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an "

7. Lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure d'éloignement.

8. En l'espèce, si M. B... produit des attestations concernant la réalisation de productions artistiques en France lui permettant de participer à son intégration en France, il ressort des pièces du dossier qu'il est entré en France en mai 2019, soit trois ans avant l'édiction de la décision en litige et qu'il est célibataire et sans charge de famille. Ainsi, eu égard au caractère récent de son séjour en France et alors qu'il ne peut utilement se prévaloir des risques encourus dans son pays d'origine à l'encontre de la décision en litige qui ne fixe pas le pays de renvoi, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français prise à son encontre aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Si le requérant se prévaut également de son état de santé, les documents qu'il produit ne permettent pas d'établir qu'il ne pourrait effectivement bénéficier d'un traitement adapté à ses pathologies au Nigéria. Par suite, et eu égard au caractère récent de son séjour, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations et dispositions citées au point précédent, ainsi que celui tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision en litige sur la situation personnelle de l'intéressé doivent être écartés.

Sur la légalité de la décision fixant le délai de départ volontaire :

9. Il résulte de l'examen de la légalité de l'obligation de quitter le territoire français, que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le délai de départ volontaire.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

10. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision par laquelle le préfet du Rhône a obligé M. B... à quitter le territoire français n'est pas illégale. Par suite, ce dernier n'est pas fondé à exciper de son illégalité à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi.

11. En deuxième lieu, la décision fixant le pays de renvoi vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment son article 3, et les articles L. 721-3 et L.721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle mentionne la nationalité nigériane de l'intéressé et porte l'appréciation selon laquelle celui-ci n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. La décision en litige comporte dès lors les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté.

12. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

13. M. B... n'apporte à la cour aucun élément nouveau sur les risques actuels encourus en cas de retour au Nigéria, liés notamment à son homosexualité, alors au demeurant qu'ainsi qu'il a été indiqué, sa demande d'asile a été rejetée par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit précédemment, le requérant n'établit pas qu'il ne pourrait effectivement bénéficier au Nigéria d'un traitement adapté à son état de santé. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

14. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Le requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie du présent arrêt en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 25 mai 2023 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 juin 2023.

La rapporteure,

P. DècheLe président,

F. Bourrachot

La greffière,

A-C. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY03440

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY03440
Date de la décision : 15/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: Mme LE FRAPPER
Avocat(s) : FRERY

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-06-15;22ly03440 ?
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