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31/05/2023 | FRANCE | N°21LY01223

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 31 mai 2023, 21LY01223


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner la Métropole de Lyon à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de l'illégalité de la décision par laquelle le président de cette collectivité a refusé d'aménager ses horaires de travail.

Par un jugement n° 1906615 du 10 février 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, et des mémoires, enregis

trés les 16 avril et 19 mai 2021, et 12 mai 2022, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner la Métropole de Lyon à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de l'illégalité de la décision par laquelle le président de cette collectivité a refusé d'aménager ses horaires de travail.

Par un jugement n° 1906615 du 10 février 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, et des mémoires, enregistrés les 16 avril et 19 mai 2021, et 12 mai 2022, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, M. B..., représenté par le cabinet d'avocats DBKM Avocats, agissant par Me Moutoussamy, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 10 février 2021 ;

2°) d'annuler la décision de la Métropole de Lyon du 18 juin 2019 rejetant sa demande d'indemnisation ;

3°) de condamner la Métropole de Lyon à lui verser une indemnité de 50 000 euros ;

4°) de mettre une somme de 1 500 euros à la charge de la Métropole de Lyon au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal, a entaché son jugement d'irrégularité en ne faisant pas usage de ses pouvoirs d'instruction ;

- c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande, alors qu'il s'est trouvé contraint de poser des congés afin de satisfaire ses soins les après-midis ;

- il est fondé à réclamer, outre un préjudice moral de 10 000 euros, une indemnité d'un même montant à titre de compensation financière des congés annuels non pris et 30 000 euros au titre du préjudice constitué par le frein dans le recouvrement de ses capacités physique du fait de l'altération de la phase de récupération.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 février 2022, la Métropole de Lyon, représentée par la Selarl Carnot Avocats, agissant par Me Prouvez, conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- la mise en œuvre des mesures d'instruction relève du pouvoir d'appréciation du Tribunal et n'a pas vocation à pallier les insuffisances probatoires du requérant ;

- la réalité du préjudice n'est pas établie.

Par ordonnance du 5 avril 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 16 mai 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 82-453 du 28 mai 1982 modifié ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère,

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me Prouvez pour la Métropole de Lyon ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., adjoint technique principal exerçant les fonctions d'enquêteur à la direction de la Propreté de la Métropole du Grand Lyon, a présenté au mois d'octobre 2015 une demande d'aménagement de ses horaires de travail pour poursuivre les soins kinésithérapeutiques rendus nécessaires par son état de santé. Par un jugement n° 1600509 du 13 juin 2018, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du président de la Métropole du Grand Lyon rejetant implicitement cette demande et a enjoint au président de la Métropole du Grand Lyon de fixer les horaires de travail de M. B... lui permettant de quitter le service deux fois par semaine en début d'après-midi. Après rejet de sa demande indemnitaire préalable, M. B... a demandé au tribunal administratif de Lyon la condamnation de cette collectivité à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de l'illégalité de cette décision. Il relève appel du jugement n° 1906615 du 10 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Sur les conclusions indemnitaires :

2. Aux termes de l'article 6 sexies de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : " Afin de garantir le respect du principe d'égalité de traitement à l'égard des travailleurs handicapés, les employeurs visés à l'article 2 prennent, en fonction des besoins dans une situation concrète, les mesures appropriées pour permettre aux travailleurs mentionnés aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l'article L. 5212-13 du code du travail d'accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de l'exercer et d'y progresser ou pour qu'une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée, sous réserve que les charges consécutives à la mise en oeuvre de ces mesures ne soient pas disproportionnées, notamment compte tenu des aides qui peuvent compenser en tout ou partie les dépenses supportées à ce titre par l'employeur. (...) ". Aux termes de l'article 40 ter de la loi du 11 janvier 1984 susvisée : " Des aménagements d'horaires propres à faciliter son exercice professionnel ou son maintien dans l'emploi sont accordés à sa demande au fonctionnaire handicapé relevant de l'une des catégories mentionnées aux 1°, 2°, 3°, 4°, 9°, 10° et 11° de l'article L. 5212-13 du code du travail, dans toute la mesure compatible avec les nécessités du fonctionnement du service. (...) ". Aux termes de l'article 26 du décret du 28 mai 1982 susvisé : " lorsque les propositions du médecin du travail ne sont pas agréées par l'administration, celle-ci doit motiver son refus et le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail doit en être tenu informé. ".

3. Il résulte de ces dispositions que l'aménagement du poste de travail constitue un droit destiné à faciliter le maintien en activité des personnels confrontés à l'altération de leur état de santé. A cet égard, des aménagements d'horaires peuvent être proposés, sous réserve qu'ils soient compatibles avec les nécessités de fonctionnement du service.

4. Il résulte de l'instruction qu'en raison des séquelles consécutives à une poliomyélite, M. B... a été reconnu travailleur handicapé par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées. Il doit se rendre deux fois par semaine chez le kinésithérapeute, avec, consécutivement à ces soins, un temps de récupération tout au long de l'après-midi. Le médecin de prévention a ainsi préconisé un aménagement de ses horaires, avec une prise de poste avancée le matin afin de le libérer au plus tôt l'après-midi pour permettre la poursuite des soins. Ne connaissant aucune évolution dans ses horaires, le requérant a été contraint de demander lui-même un aménagement d'horaires, par un courrier du 22 octobre 2015, reçu le 23 octobre suivant par la métropole de Lyon. La décision du président de la Métropole du Grand Lyon rejetant implicitement sa demande a été annulée par un jugement définitif du tribunal administratif de Lyon du 13 juin 2018.

5. Si M. B... critique les modalités de l'aménagement de ses horaires qui lui a été ultérieurement accordé, notamment par une décision du 12 février 2016, il ne se prévaut pas de l'illégalité de cette décision et invoque comme seul fait générateur de responsabilité l'illégalité de la décision implicite mentionnée au point précédent, de sorte qu'il ne saurait réclamer une indemnisation au-delà du 12 février 2016.

6. M. B... soutient qu'un créneau horaire à 14 h 00 le mercredi et le vendredi lui permettait de poursuivre des soins avec des résultats encourageants en termes de mobilité, avec des améliorations progressives au niveau des lombalgies et des crampes. Il indique que ces rendez-vous médicaux ont exigé la prise de demi-journées de congés rémunérés ou de RTT. Il invoque dans ses écritures la prise pour soins de treize demi-journées de congés ou RTT, les 13 octobre 2015, 4 novembre 2015, 6 novembre 2015, 18 novembre 2015, 20 novembre 2015, 25 novembre 2015, 27 novembre 2015, 2 décembre 2015, 4 décembre 2015, 9 décembre 2015, 11 décembre 2015, 16 décembre 2015 et 18 décembre 2015. Il produit à hauteur d'appel les justificatifs de ses demandes de congés ou RTT. Il sera fait une juste appréciation du préjudice subi à ce titre par M. B... en lui allouant une indemnité compensatrice de 1 000 euros.

7. En revanche, M. B..., qui a ainsi pu bénéficier des soins justifiés par son état de santé, n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait subi, en lien avec la faute commise, une altération de la phase de récupération et par suite, un frein dans le recouvrement de ses capacités physiques et à réclamer une indemnisation à ce titre. S'il fait valoir qu'il a ensuite été contraint d'arrêter les soins, compte tenu de l'épuisement de ses congés de 2015, un tel chef de préjudice ne se rattache pas à la période d'indemnisation en litige

8. Enfin, la nécessité pour le requérant de gérer concomitamment l'éducation de ses enfants, ses soins, sa récupération et ses impératifs professionnels ne permet pas d'établir la réalité d'un préjudice moral en lien avec l'illégalité fautive dont il est demandé la réparation.

9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'en examiner la régularité, que M. B... est fondé à demander l'annulation du jugement du 10 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Métropole de Lyon le versement d'une somme de 2 000 euros à M. B..., en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 10 février 2021 est annulé.

Article 2 : La Métropole de Lyon versera une somme de 1 000 euros à M. B....

Article 3 : La Métropole de Lyon versera une somme de 2 000 euros à M. B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la Métropole de Lyon.

Délibéré après l'audience du 16 mai 2023 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2023.

La rapporteure,

Bénédicte LordonnéLe président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Sandra Bertrand

La République mande et ordonne à la préfète du Rhône en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY01223


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY01223
Date de la décision : 31/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. - Contentieux de la fonction publique. - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Bénédicte LORDONNE
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : CARNOT AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-05-31;21ly01223 ?
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