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31/05/2023 | FRANCE | N°20LY03300

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 31 mai 2023, 20LY03300


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B..., a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) de condamner les Hospices civils de Lyon à lui verser, dans un délai de deux mois et sous astreinte de 50 euros par jour de retard, la somme de 58 836,33 euros au titre de la rémunération qui lui est due par les Hospices civils de Lyon depuis le 1er janvier 2014, assortie des intérêts au taux légal capitalisés ;

2°) de mettre à la charge des Hospices civils de Lyon une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du cod

e de justice administrative, ainsi que les dépens.

Par un jugement n° 1902189 du 16 s...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B..., a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) de condamner les Hospices civils de Lyon à lui verser, dans un délai de deux mois et sous astreinte de 50 euros par jour de retard, la somme de 58 836,33 euros au titre de la rémunération qui lui est due par les Hospices civils de Lyon depuis le 1er janvier 2014, assortie des intérêts au taux légal capitalisés ;

2°) de mettre à la charge des Hospices civils de Lyon une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens.

Par un jugement n° 1902189 du 16 septembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a d'une part, renvoyé l'agent devant les Hospices civils de Lyon pour qu'il soit procédé, dans les conditions précisées aux points 3 et 4 de son jugement, à la liquidation de la somme correspondant à la différence entre la rémunération que M. B... aurait dû percevoir au titre des gardes effectuées du mois de janvier 2014 au mois de mai 2019 et la rémunération qu'il a effectivement perçue au titre de cette période, d'autre part, a décidé que cette somme sera assortie des intérêts au taux légal dans les conditions précisées au point 5 du jugement.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 16 novembre 2020, les Hospices civils de Lyon, représentés par la Selarl Jean-Pierre et Walgenwitz Avocats associés, agissant par Me Walgenwitz, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 16 septembre 2020 ;

2°) de rejeter la demande de M. B... présentée devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de ce dernier une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- M. B..., qui n'exerçait pas ses fonctions à temps plein, ne démontre pas que les gardes effectuées du 1er janvier 2014 au 1er janvier 2018 au centre antipoison, ont été réalisées au titre de son temps de travail additionnel ;

- M. B... ne réalisait pas la totalité de ses obligations de service au sein des deux établissements où il avait été affecté ;

- l'indemnisation des gardes réalisées au centre antipoison, au titre de la permanence des soins pour les nuits, les samedis après-midi, les dimanches et les jours fériés, était régulière pour la période du 1er janvier 2014 au 1er janvier 2018.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er février 2021, M. B... représenté par Me Debiesse :

1°) conclut au rejet de la requête ;

2°) demande qu'une somme de 3 500 euros soit mise à la charge des Hospices civils de Lyon sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens présentés par les Hospices civils de Lyon ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 17 mai 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 21 juin 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

- le code de la santé publique ;

- l'arrêté du 30 avril 2003 relatif à l'organisation et à l'indemnisation de la continuité des soins et de la permanence pharmaceutique dans les établissements publics de santé et dans les établissements publics d'hébergement pour personnes âgées dépendantes ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Fédi, président-assesseur,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me Walgenwitz, représentant les Hospices civils de Lyon, et celles de Me Debiesse, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Praticien hospitalier employé successivement par le centre hospitalier de Bourgoin-Jallieu, du 1er novembre 2008 au 31 décembre 2016, puis par l'hôpital intercommunal de Neuville-Fontaines depuis le 1er janvier 2017, M. B... a, en complément de son service pour ces deux établissements, effectué des gardes au centre antipoison des Hospices civils de Lyon (HCL). Par un courrier du 27 novembre 2018, M. B... a demandé au directeur général des HCL de réexaminer le fondement et le montant de sa rémunération pour l'ensemble des gardes effectuées à compter du 1er janvier 2014 et de lui verser la différence entre le montant auquel il estimait avoir droit et celui qui lui avait été versé. Par un courrier du 22 janvier 2019, les HCL ont rejeté cette demande. M. B... a demandé la condamnation des HCL à lui verser, à hauteur de 58 836,33 euros, la rémunération différentielle qu'il estimait lui être due. Les Hospices civils de Lyon font appel du jugement du 16 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a, d'une part, renvoyé l'intéressé devant les Hospices civils de Lyon pour qu'il soit procédé à la liquidation de la somme correspondant à la différence entre la rémunération que M. B... aurait dû percevoir au titre des gardes effectuées du mois de janvier 2014 au mois de mai 2019 et la rémunération qu'il a effectivement perçue au titre de cette période, d'autre part, décidé que cette somme sera assortie des intérêts au taux légal.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Contrairement à ce que soutiennent les Hospices civils de Lyon, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments invoqués devant eux, ont motivé avec une précision suffisante leur réponse au moyen tiré de ce que M. B... devait être rémunéré au taux en vigueur pour les heures de temps de travail additionnel. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article R. 6152-23 du code de la santé publique : " Les praticiens perçoivent, après service fait, attesté par le tableau mensuel de service réalisé, validé par le chef de pôle... (...) : / 1° Des émoluments mensuels variant selon l'échelon des intéressés (...) ; / 2° Des indemnités et allocations dont la liste est fixée par décret ". Aux termes de l'article R. 6152-27 du même code : " Le service hebdomadaire est fixé à dix demi-journées, sans que la durée de travail puisse excéder quarante-huit heures par semaine, cette durée étant calculée en moyenne sur une période de quatre mois. Lorsqu'il est effectué la nuit, celle-ci est comptée pour deux demi-journées...Le praticien peut accomplir, sur la base du volontariat au-delà de ses obligations de service hebdomadaires, un temps de travail additionnel donnant lieu soit à récupération, soit au versement d'indemnités de participation à la continuité des soins et, le cas échéant, d'indemnités de temps de travail additionnel (...). ". L'article R. 6152-28 du même code précise : " Les médecins...ont la responsabilité médicale de la continuité des soins, conjointement avec les autres membres du corps médical de l'établissement. (...) /A ce titre, ils doivent en particulier : (...) 2° (...) assurer le travail quotidien du matin et de l'après-midi ; en outre, ils participent à la continuité des soins (...) organisée soit sur place, soit en astreinte à domicile. ". Aux termes de l'article D. 6152-23-1 dudit code: " Les indemnités et allocations mentionnées au 2° de l'article R. 6152-23 sont : / 1° Des indemnités de participation à la permanence des soins ou de réalisation de périodes de travail au-delà des obligations de service hebdomadaires : a) Des indemnités de sujétion correspondant au temps de travail effectué, dans le cadre des obligations de service hebdomadaires, la nuit, le samedi après-midi, le dimanche et les jours fériés ; b) Des indemnités forfaitaires pour tout temps de travail additionnel accompli, sur la base du volontariat, au-delà des obligations de service hebdomadaires (...). Aux termes de l'article 1 de l'arrêté du 30 avril 2003 visé ci-dessus, dans sa version alors en vigueur : " ...L'organisation des activités médicales... comprend un service quotidien de jour et un service relatif à la permanence des soins, pour la nuit, le samedi après-midi, le dimanche et les jours fériés, sous forme de permanence sur place ou par astreinte à domicile. ". Aux termes de l'article 4 du même arrêté : " Les praticiens hospitaliers (...) peuvent, sur la base du volontariat (...) réaliser des périodes de temps de travail additionnel au-delà de leurs obligations de service dans les conditions fixées par leurs statuts respectifs (...). Ce temps de travail additionnel doit s'effectuer prioritairement dans la structure d'affectation du praticien. Il peut être effectué dans une autre structure, sur la base du volontariat, sous réserve de l'accord du responsable de la structure d'affectation ". Selon l'article 9 de cet arrêté : " La participation des praticiens à la permanence des soins : A. - Dans le cadre d'un service quotidien de jour suivi d'une permanence sur place, la participation des praticiens se fait de la manière suivante : ... Les périodes de travail accomplies au titre des obligations de service la nuit, le samedi après-midi, le dimanche ou jour férié donnent lieu au versement d'une indemnité ou d'une demi-indemnité de sujétion. Un praticien doit justifier, en moyenne sur quatre mois, d'avoir accompli l'ensemble de ses obligations de service, de jour et de nuit. Le cas échéant, sur la base du volontariat, ces personnels peuvent effectuer des périodes de temps de travail additionnel, le jour ou la nuit, en sus de leurs obligations de service hebdomadaires. Ces périodes donnent lieu au versement d'une indemnité forfaitaire lorsqu'elles ne font pas l'objet d'une récupération ou d'un versement au compte épargne-temps. ". Il résulte de ces dispositions que le praticien hospitalier qui a accompli, au-delà de ses obligations de service hebdomadaires, un temps de travail additionnel a droit à en être indemnisé.

4. Le directeur d'un établissement hospitalier tient, de ses pouvoirs généraux d'organisation du service, compétence pour organiser la permanence des soins et déterminer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, les formes selon lesquelles le service fait sera constaté, sans préjudice de la faculté pour les intéressés d'établir, par tout moyen de preuve approprié, qu'ils ont effectivement accompli les services ouvrant droit à rémunération.

5. Il est constant que les gardes que M. B... a effectuées pour le compte des HCL, du 1er janvier 2014 au mois de mai 2019, au centre antipoison, ont été rémunérées sur la base du barème défini pour les indemnités de sujétion prévues au a) de l'article D. 6152-23-1 cité ci-dessus. Si les HCL contestent le fait que ces gardes ont été réalisées au titre de son temps de travail additionnel, toutefois il résulte de l'instruction, notamment des certificats administratifs des directeurs du centre hospitalier de Bourgoin-Jallieu et de l'hôpital intercommunal de Neuville-Fontaines, lesquels attestent que M. B... exerçait à temps plein, des tableaux de service de ces deux établissements et de l'intégralité des bulletins de salaire couvrant la période en cause, que l'agent a effectué les gardes en litige en dehors des établissements hospitaliers où il effectuait un service à temps plein, avec l'accord de ceux-ci et, par suite, au-delà de ses obligations de service. En se bornant à soutenir, d'une part, qu'aucune disposition législative ni réglementaire ne précise que l'exercice à temps plein d'un praticien hospitalier impose que ses obligations, au titre de la permanence des soins, soient exécutées au sein du même établissement, d'autre part, que les gardes effectuées au centre antipoison l'étaient exclusivement les nuits, samedis après-midi, dimanches et jours fériées, les HCL, à qui il appartenait de s'assurer que l'agent exerçait ou non la totalité de son service dans son établissement d'affectation, ne démontrent pas, d'une part, que l'intéressé n'aurait pas exercé ses fonctions à temps plein dans les deux établissements, d'autre part, qu'il ne réalisait pas la totalité de ses obligations de service au sein des deux établissements. Par ailleurs, la convention de participation à l'activité de garde aux HCL conclue le 13 février 2018, mentionne expressément que l'agent réalisera " l'intégralité de ses obligations de service auprès de l'hôpital intercommunal Neuville Fontaines. Sa participation à l'activité de garde aux HCL s'exercera au-delà de ses obligations de service. ". En outre, les HCL ne peuvent utilement se prévaloir, dans le cadre du présent litige, de la convention du 7 décembre 2011 qu'ils ont passée avec le centre hospitalier de Bourgoin-Jallieu du 7 décembre 2011, auquel M. B... n'est pas partie prenante. Par ailleurs, la circonstance que l'article 3 du contrat conclu le 19 octobre 2017, à effet au 22 octobre 2017, entre les HCL et l'agent, qui ne concerne que deux mois de la période de quatre années en litige, stipule que : " M. A... B... perçoit après service fait les indemnités de sujétion, de garde et d'astreinte liées à sa participation à la permanence des soins (...) ", ne permet pas d'établir que les gardes réalisées par M. B... au centre antipoison devaient être réalisées au titre de la permanence des soins pour la totalité de la période du 1er janvier 2014 au 1er janvier 2018. De même, la seule absence de contrat entre le praticien et l'établissement hospitalier, durant la période en cause, ne permet pas de justifier que les heures en litige ne relèveraient pas du temps de travail additionnel de l'agent. Dans ces conditions, les HCL ne sont pas fondés à soutenir que M. B... n'a pas droit au versement de la différence entre les sommes qu'il aurait dû percevoir, au titre de son complément de service, réalisé sur son temps de travail additionnel et celles qui lui ont été versées.

6. Il résulte de tout ce qui précède que les Hospices civils de Lyon ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a, d'une part, renvoyé l'agent devant l'administration pour qu'il soit procédé à la liquidation de la somme correspondant à la différence entre la rémunération que M. B... aurait dû percevoir au titre des gardes effectuées du mois de janvier 2014 au mois de mai 2019 et la rémunération qu'il a effectivement perçue au titre de cette période, d'autre part, décidé que cette somme sera assortie des intérêts au taux légal.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par les Hospices civils de Lyon. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des Hospices civils de Lyon une somme de 2 000 euros à verser à M. B..., au titre de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête des Hospices civils de Lyon est rejetée.

Article 2 : Les Hospices civils de Lyon verseront à M. B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et aux Hospices civils de Lyon.

Délibéré après l'audience du 16 mai 2023, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2023.

Le rapporteur,

Gilles FédiLe président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Sandra Bertrand

La République mande et ordonne à la préfète du Rhône en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 20LY03300


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY03300
Date de la décision : 31/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. - Rémunération. - Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Gilles FEDI
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : DEBIESSE

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-05-31;20ly03300 ?
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