La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/05/2023 | FRANCE | N°22LY02279

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 25 mai 2023, 22LY02279


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme E... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 17 septembre 2021 par lequel le préfet de la Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, et d'enjoindre à cette autorité, sous astreinte et dans certains délais, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler puis un titre de séjour temporaire portant la mention

" vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer sa situation.

Par un j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme E... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 17 septembre 2021 par lequel le préfet de la Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, et d'enjoindre à cette autorité, sous astreinte et dans certains délais, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler puis un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 2200202 du 12 mai 2022, le tribunal a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 21 juillet 2022 et 5 mai 2023, Mme A... C..., représentée par Me Vray, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Savoie, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans le délai de huit jours à compter de la date de notification de l'arrêt et, dans un délai d'un mois à compter de cette date, de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer sa situation ;

3°) de mettre à la charge de l'État, à son profit, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ou, au profit de son conseil, au titre de cet article et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une contradiction de motifs, en ayant estimé que le préfet rapportait la preuve d'une fraude, alors qu'il appartenait seulement aux premiers juges de vérifier si le père de son enfant contribuait effectivement à son entretien et son éducation, ce qu'elle démontrait ;

- le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions des articles L. 423-7 et L. 423-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet ne démontrant pas l'existence d'une reconnaissance de paternité frauduleuse ; il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle méconnait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision fixant le pays de destination méconnait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire enregistré le 2 mai 2023, le préfet de la Savoie conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens présentés par Mme A... C... ne sont pas fondés.

Le bénéfice de l'aide juridictionnelle a été refusé à Mme A... C... par une décision du 21 septembre 2022, confirmée sur recours par une décision n° 22LY02878 du 11 avril 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Chassagne, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... C..., ressortissante de l'Union des Comores, née le 21 avril 1989 à Djoumoicongo, est entrée irrégulièrement sur le territoire métropolitain en 2013. Elle a donné naissance à une enfant, le 23 avril 2020, reconnue le 9 mars 2020 par un ressortissant français. La demande de l'intéressée, qui résidait alors à Chambéry, tendant à la délivrance d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français sur le fondement de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile s'est heurtée à un arrêté du préfet de Savoie du 17 septembre 2021 lui opposant un refus, avec obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de destination. Elle relève appel du jugement du tribunal administratif de Lyon qui a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. " Aux termes de l'article L. 423-8 de ce code : " Pour la délivrance de la carte de séjour prévue à l'article L. 423-7, lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, doit justifier que celui-ci contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du code civil, ou produire une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. / Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant. "

3. Ces dispositions sont interprétées, en vertu d'une jurisprudence constante, en ce sens que si la reconnaissance d'un enfant est opposable aux tiers, en tant qu'elle établit un lien de filiation et, le cas échéant, en tant qu'elle permet l'acquisition par l'enfant de la nationalité française, dès lors que cette reconnaissance a été effectuée conformément aux conditions prévues par le code civil, et s'impose donc en principe à l'administration tant qu'une action en contestation de filiation n'a pas abouti, il appartient néanmoins au préfet, s'il est établi, lors de l'examen d'une demande de titre de séjour présentée sur le fondement de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que la reconnaissance de paternité a été souscrite dans le but de faciliter l'obtention de la nationalité française ou d'un titre de séjour, de faire échec à cette fraude et de refuser, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, tant que la prescription prévue par les articles 321 et 335 du code civil n'est pas acquise, la délivrance de la carte de séjour temporaire sollicitée par la personne se présentant comme père ou mère d'un enfant français.

4. D'abord, en estimant que le préfet avait retenu à bon droit que la reconnaissance de paternité à laquelle il s'était livré présentait un caractère frauduleux et en jugeant que rien ne permettait de justifier de la contribution du père déclarant, de nationalité française, à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, et en concluant, en conséquence, à l'absence de violation des articles L 423-7 et L. 423-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les premiers juges n'ont pas entaché leur jugement d'une contradiction de motifs.

5. Ensuite, par les mêmes motifs que ceux retenus par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter, le moyen tiré de ce que le refus de séjour en litige, en l'absence de fraude, a été opposé en méconnaissance des dispositions ci-dessus, doit, faute d'éléments nouveaux, hormis des pièces établies postérieurement à la décision contestée, et de critique pertinente en appel, être écarté.

6. En deuxième lieu, il n'apparait pas que Mme A... C..., qui a vécu sur le territoire français métropolitain depuis 2013 en situation irrégulière, justifierait d'attaches familiales intenses sur ce territoire en dehors de sa fille mineure, se bornant à alléguer la présence d'une sœur et d'une cousine sans justifier entretenir avec ces dernières des relations suivies, alors qu'elle ne démontre au demeurant pas de manière circonstanciée la réalité de tel liens familiaux. Mme A... C... n'allègue pas qu'elle serait dépourvue de toutes attaches privées ou familiales dans son pays d'origine, où elle a vécu l'essentiel de son existence et peut reconstituer la cellule familiale qu'elle forme avec sa fille mineure, en l'absence d'obstacle à ce que cette dernière l'accompagne, le ressortissant français ayant reconnu cet enfant ne pouvant être considéré, en toute hypothèse, au regard des pièces du dossier, comme participant effectivement et sérieusement depuis sa naissance à l'entretien et à l'éducation de cette dernière et ayant noué avec celle-ci un lien avéré. Par adoption, pour le surplus, des motifs retenus par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter, les moyens, déjà soulevés en première instance, tirés de ce que le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français méconnaîtraient les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doivent donc être écartés.

7. En dernier lieu, les moyens, déjà soulevés en première instance, tirés de ce que le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français ainsi que la décision fixant le pays de destination méconnaîtraient les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, doivent, en l'absence d'éléments nouveaux et de critique pertinente en appel, être écartés par les motifs retenus par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme A... C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Sa requête doit donc, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Savoie.

Délibéré après l'audience du 11 mai 2023 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

M. Seillet, président-assesseur ;

M. Chassagne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 mai 2023.

Le rapporteur,

J. Chassagne

Le président,

V.-M. Picard La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY02279

al


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY02279
Date de la décision : 25/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: M. Julien CHASSAGNE
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : VRAY

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-05-25;22ly02279 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award