Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 29 juillet 2021 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de douze mois.
Par un jugement n° 2107228 du 24 novembre 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 17 décembre 2021, M. A..., représenté par Me Legrand-Castellon, avocate, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 24 novembre 2021 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler les décisions du préfet du Rhône du 29 juillet 2021 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour ou, subsidiairement, de procéder à un nouvel examen de sa situation.
Il soutient que :
- le refus de titre de séjour litigieux méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au vu de l'évolution de son état de santé et de son traitement depuis l'avis rendu par le collège des médecins de l'OFII ;
- l'interdiction de retour sur le territoire français prononcée à son encontre est disproportionnée.
Par une décision du 29 juin 2022, la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. A... a été considérée comme caduque.
Par une ordonnance du 20 septembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 octobre 2022.
Par courrier du 6 avril 2023, les parties ont été informées en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour est susceptible de soulever d'office l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère,
- et les observations de Me Legrand-Castellon, avocate, pour M. A... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A... relève appel du jugement du 24 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône du 29 juillet 2021 rejetant sa demande de titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de douze mois.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants tunisiens en vertu de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien, dispose par ailleurs, dans sa rédaction alors applicable, que : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. (...) La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, (...) ".
3. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte-tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
4. Pour rejeter la demande dont il était saisi, le préfet du Rhône s'est approprié le sens de l'avis médical du collège de médecins de l'Office français de l'intégration et de l'immigration du 11 septembre 2018, selon lequel si l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, au vu de l'offre de soins et des caractéristiques du système de santé tunisien. S'il ressort des pièces du dossier, en particulier du certificat médical établi le 28 février 2022 par un psychiatre du centre hospitalier du Vinatier, que M. A... souffre de troubles psychotiques et schizophréniques sévères, ayant conduit à des gestes suicidaires et ayant nécessité plusieurs hospitalisations, parfois forcées, en service de psychiatrie, en revanche, il ne ressort pas des pièces du dossier que la Tunisie ne serait pas dotée des structures médicales, spécialisées en psychiatrie, nécessaires à sa prise en charge, nonobstant la spécificité et le caractère évolutif de celle-ci, ni que le traitement médicamenteux qui lui est prescrit n'y serait pas commercialisé. En particulier, la seule déclaration sur l'honneur d'un médecin tunisien dont M. A... se prévaut, qui, au demeurant, atteste de la commercialisation en Tunisie de l'olanzapine sous des posologies compatibles avec les dosages qui lui sont prescrits, ne saurait suffire à établir l'indisponibilité du Loxapac ou du principe actif qu'il comporte. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet du Rhône a méconnu les dispositions précitées.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". L'article L. 612-10 du même code précise que : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 (...) ".
6. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a déjà fait l'objet de précédentes mesures d'éloignement, à tout le moins le 29 octobre 2015, qu'il n'a pas exécutées. Par ailleurs, à l'exception de deux frères, il ne peut se prévaloir de réelles attaches en France, son épouse, également de nationalité tunisienne, y résidant en situation irrégulière. Dans ces circonstances, nonobstant l'importante durée de son séjour en France et l'absence de menace alléguée pour l'ordre public constituée par sa présence, le préfet du Rhône n'a pas méconnu les dispositions précitées en assortissant le refus de titre de séjour opposé d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée limitée à un an.
7. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
8. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.
Délibéré après l'audience du 2 mai 2023, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,
Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère,
Mme Sophie Corvellec, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 mai 2023.
La rapporteure,
Sophie CorvellecLe président,
Jean-Yves Tallec
La greffière,
Sandra Bertrand
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 21LY04158