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17/05/2023 | FRANCE | N°21LY00535

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 17 mai 2023, 21LY00535


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'association Bressolles bien vivre, l'association L214, M. et Mme M..., M. et Mme U..., M. et Mme G..., A... N..., M. et Mme O..., M. et Mme X..., M. B..., M. C... et Mme L... ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté d'enregistrement n° 3052/2017 du 19 décembre 2017 par lequel le préfet de l'Allier a fixé des prescriptions complémentaires à l'exploitation d'un élevage de volailles à chair à Bressolles.

Par un jugement n° 1800658 du 15 dé

cembre 2020, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, après avoir admis les i...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'association Bressolles bien vivre, l'association L214, M. et Mme M..., M. et Mme U..., M. et Mme G..., A... N..., M. et Mme O..., M. et Mme X..., M. B..., M. C... et Mme L... ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté d'enregistrement n° 3052/2017 du 19 décembre 2017 par lequel le préfet de l'Allier a fixé des prescriptions complémentaires à l'exploitation d'un élevage de volailles à chair à Bressolles.

Par un jugement n° 1800658 du 15 décembre 2020, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, après avoir admis les interventions de l'association Fédération Allier nature et de la chambre départementale d'agriculture de l'Allier, a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 18 février et 26 novembre 2021, M. C... J..., représenté par la Selarl DMMJB Avocats, agissant par Me Martins da Silva, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 15 décembre 2020 ;

2°) de mettre une somme de 2 000 euros à la charge des demandeurs au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les associations demanderesses n'ont pas d'intérêt pour agir ; il en est de même pour les autres demandeurs, qui ne produisent aucun titre de propriété ;

- l'irrecevabilité de demande principale emporte l'irrecevabilité de l'intervention de France Nature Environnement ;

- c'est à tort que les premiers juges ont retenu l'insuffisance de ses capacités techniques et financières ;

- c'est à tort que les premiers juges ont retenu le moyen tiré de l'insuffisance de la notice comportant l'évaluation des incidences " Natura 2000 " ; elle précise la situation des parcelles ; s'agissant de la parcelle située dans la zone " Natura 2000 ", classée au titre de la directive " habitats " (site AL07), elle est en cultures depuis de nombreuses années donc recevant déjà divers apports en particulier chimiques, et d'une topographie plane, permettant de limiter les écoulements ; s'agissant des parcelles classées au titre de la directive " oiseaux ", les épandages de fumier remplaceront les apports d'engrais et il n'y aura donc pas d'incidence sur la population d'oiseaux ; remplacer les apports d'engrais chimiques par des fumiers aura un effet positif sur le milieu ;

- les autres moyens soulevés sont infondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 6 juillet 2021, 5 mai 2022 et 9 juin 2022, ces deux derniers mémoires n'ayant pas été communiqués, l'association Bressolles bien vivre, l'association L214, M. et Mme M..., M. et Mme U..., M. et Mme G..., A... N..., M. et Mme O..., M. et Mme X..., M. C... et Mme L..., représentés par Me Menard, concluent au rejet de la requête et demandent que soit mise à la charge de M. J... le versement d'une somme de 2 000 euros à l'association Bressolles bien vivre, d'une somme 2 000 euros à l'association L214, et d'une somme de 500 euros à chacun des autres intimées.

Ils soutiennent que :

- ils justifient de leur intérêt pour agir ;

- les moyens d'annulation retenus par le tribunal doivent être confirmés ;

- le dossier d'enregistrement est insuffisant quant aux risques du projet en matière de pollution aux nitrates, d'émissions dans l'air d'odeurs, de gaz et de poussières, et de nuisances sonores ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l'article L. 512-7-2 du code de l'environnement, dès lors que le préfet aurait dû traiter la demande de M. J... sous le régime de l'autorisation et non de l'enregistrement ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l'article 3 de l'arrêté du 28 juin 2010, dès lors que la densité d'élevage maximale dans l'exploitation de M. J... dépassera 33 kg de volaille au m² ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l'article 2 de l'arrêté du 25 octobre 1982, dès lors que les conditions d'exploitation de l'élevage de M. J... entraîneront des souffrances pour les animaux ainsi que des effets néfastes sur leur santé ;

- le projet est incompatible avec les documents d'urbanisme, dès lors que l'élevage de M. J... ne sera ni rattaché ni nécessaire à aucune exploitation agricole.

Par un mémoire, enregistré le 6 juillet 2021, l'association France Nature Environnement Allier, représentée par Me Menard, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. J... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir les mêmes moyens que l'association Bressolles bien vivre et autres.

Le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires n'a pas présenté d'écritures.

Par ordonnance du 22 mars 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 5 mai 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère ;

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;

- et les observations Me Lambert pour M. J... ainsi que celles de Me Menard pour l'association Bressolles bien vivre et autres et l'association France nature environnement Allier.

Et après avoir pris connaissance de la note en délibéré, enregistrée le 2 mai 2023, présentée pour l'association Bressolles bien vivre et autres.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... J... a déposé le 5 juillet 2017 une demande d'enregistrement au titre de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement d'un élevage de 39 900 volailles de chair sur le territoire de la commune de Bressolles au lieudit " Chante Alouette ", comprenant la construction d'un poulailler et un plan d'épandage. Par un arrêté d'enregistrement n° 3052/2017 du 19 décembre 2017, le préfet de l'Allier a fixé des prescriptions complémentaires à l'exploitation. M. J... relève appel du jugement n° 1800658 du 15 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, a, sur demande de l'association Bressolles bien vivre et autres, annulé cet arrêté.

2. Il appartient au juge du plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement d'apprécier le respect des règles relatives à la forme et la procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et celui des règles de fond régissant le projet en cause au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce, sous réserve du respect des règles d'urbanisme qui s'apprécie au regard des circonstances de fait et de droit applicables à la date de l'autorisation.

Sur le bien-fondé des moyens retenus par les premiers juges :

En ce qui concerne la composition du dossier de demande d'enregistrement :

3. Aux termes de l'article L. 512-7-3 du code de l'environnement dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : " En vue d'assurer la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et, le cas échéant, à l'article L. 211-1, le Préfet peut assortir l'enregistrement de prescriptions particulières complétant ou renforçant les prescriptions générales applicables à l'installation. Dans les limites permises par la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1, ces prescriptions particulières peuvent aussi inclure des aménagements aux prescriptions générales justifiés par les circonstances locales. Dans ces deux cas, le Préfet en informe l'exploitant préalablement à la clôture de l'instruction de la demande et consulte la commission départementale consultative compétente. / Le préfet ne peut prendre l'arrêté d'enregistrement que si le demandeur a justifié que les conditions de l'exploitation projetée garantiraient le respect de l'ensemble des prescriptions générales, et éventuellement particulières, applicables. Il prend en compte les capacités techniques et financières que le pétitionnaire entend mettre en œuvre, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et, le cas échéant, à l'article L. 211-1, et d'être en mesure de satisfaire aux obligations de l'article L. 512-7-6 lors de la cessation d'activité. ". Aux termes de l'article R. 512-46-4 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable : " A chaque exemplaire de la demande d'enregistrement doivent être jointes les pièces suivantes : (...) / 6° Le cas échéant, l'évaluation des incidences Natura 2000 dans les cas et conditions prévus par les dispositions réglementaires de la sous-section 5 de la section 1 du chapitre IV du titre Ier du livre IV ; / 7° Les capacités techniques et financières de l'exploitant (...) ".

4. Le dossier de demande d'enregistrement de M. J... comporte une notice d'incidence " Natura 2000 ", rappelant que la commune de Bressolles compte trois zones classées " Natura 2000 ". Les installations d'élevage ne se trouvent pas dans une telle zone. En revanche, une des parcelles d'épandage se situe dans une zone " Natura 2000 ", classée au titre de la directive " habitats " (site AL07), et plusieurs parcelles dans une zone classée au titre de la directive " oiseaux " (FPS 46/A AE01). Le dossier précise que la parcelle concernée par le site AL07 est cultivée depuis plusieurs années, en maïs depuis 2017, dépourvue de végétation naturelle et disposant d'une topographie plane, empêchant les apports de fumier d'atteindre la rivière ou sa ripisylve ainsi que les forêts de la zone " Natura 2000 ". Elle précise que la flore ne sera pas perturbée par l'apport de fumier, lequel au contraire, permettra de diminuer les apports d'engrais minéraux sur cette parcelle. S'agissant des parcelles qui se trouvent dans la zone " Natura 2000 " ZPS46/AE01 classée au titre de la directive " oiseaux ", la notice précise que les îlots concernés sont cultivés et qu'il n'y aura pas de création d'obstacles à la migration des oiseaux ou à leur nidification. S'agissant d'un dossier d'enregistrement, pour lequel aucune étude d'impact n'est en principe exigée, il ne peut être reproché au dossier de ne pas comporter une analyse de l'impact de l'épandage des effluents d'élevage sur les nappes phréatiques. Le préfet a précisé dans ses écritures de première instance en quoi les modalités d'épandage, constituées de fumiers de volailles et non de lisiers, étaient propres à prévenir les incidences de l'exploitation de M. J... sur les zones " Natura 2000 ", en évitant le risque de lessivage dans les sols. Il a pu procéder à la vérification du respect par le projet des prescriptions s'imposant en la matière, y compris celles applicables aux zones vulnérables au sens de la directive 91/676/CEE concernant la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir des sources agricoles.

5. M. J... précise dans son dossier de demande d'enregistrement que le coût total du projet est évalué à 488 000 euros d'investissement global, et de 367 000 euros après subventions, et qu'il doit être financé par des emprunts bancaires. Il est en outre précisé que l'étude prévisionnelle réalisée par CerFrance Terre d'Allier, transmise sous pli confidentiel à l'inspecteur des installations classées pour la protection de l'environnement, estime le chiffre d'affaires à 87 000 euros en année de routine. Quand bien même cette étude n'a pas été produite devant le tribunal, le dossier de demande comportait les indications suffisantes sur le montant des investissements nécessaires à la mise en service de l'exploitation et sur les modalités de financement de ces investissements, de sorte que le pétitionnaire a suffisamment précisé les capacités financières qu'il entendait mettre en œuvre pour la réalisation de son projet.

6. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a retenu comme fondés les moyens tirés des insuffisances entachant les garanties financières présentées par M. J... ainsi que la notice d'incidence " Natura 2000 " du dossier de demande d'enregistrement.

7. Il résulte de l'article L. 512-7-3 du code de l'environnement issu de l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale que l'arrêté d'enregistrement d'une installation classée ne peut légalement être délivré, sous le contrôle du juge du plein contentieux des installations classées, si le pétitionnaire ne justifie pas des capacités techniques et financières qu'il entend mettre en œuvre. Il appartient au juge, si la méconnaissance de ces règles de fond est soulevée, de vérifier la pertinence des modalités selon lesquelles le pétitionnaire prévoit de disposer de capacités financières et techniques suffisantes pour assumer l'ensemble des exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site, au regard des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, ainsi que les garanties de toute nature qu'il peut être appelé à constituer à cette fin en application des article L. 516-1 et L. 516-2 du même code.

8. Il ressort des mentions figurant au dossier de demande d'enregistrement que M. J... est titulaire d'un baccalauréat professionnel " conduite et gestion de l'exploitation agricole " " option productions animales " et d'un certificat d'aptitude professionnelle " conducteur routier ". Quand bien même son expérience se limite à cinq stages en exploitations agricoles de différentes productions animales et végétales effectués sur une période de deux ans, il ne résulte pas de l'instruction qu'il ne disposerait pas des compétences techniques pour assumer l'ensemble des obligations susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site au regard des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement. C'est donc à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a également retenu, au fond, le moyen tiré du défaut de capacités techniques de M. J....

9. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par l'association Bressolles bien vivre et autres.

Sur les autres moyens soulevés par les intimés :

En ce qui concerne le moyen tiré de l'incompétence du signataire :

10. Par un arrêté du 2 mai 2017, le préfet de l'Allier a donné délégation à M. Schuffenecker, secrétaire général de la préfecture, aux fins de signer toutes décisions relevant des compétences du préfet dans le département. L'arrêté litigieux ayant été signé par M. W..., le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté en litige doit être écarté.

En ce qui concerne la procédure suivie :

11. Aux termes de l'article L. 512-7-2 du code de l'environnement dans sa rédaction alors applicable : " Le préfet peut décider que la demande d'enregistrement sera instruite selon les règles de procédure prévues par le chapitre unique du titre VIII du livre Ier pour les autorisations environnementales : / 1° Si, au regard de la localisation du projet, en prenant en compte les critères mentionnés au point 2 de l'annexe III de la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, la sensibilité environnementale du milieu le justifie ; / 2° Ou si le cumul des incidences du projet avec celles d'autres projets d'installations, ouvrages ou travaux situés dans cette zone le justifie ; / 3° Ou si l'aménagement des prescriptions générales applicables à l'installation, sollicité par l'exploitant, le justifie ; / Dans les cas mentionnés au 1° et au 2°, le projet est soumis à évaluation environnementale. Dans les cas mentionnés au 3° et ne relevant pas du 1° ou du 2°, le projet n'est pas soumis à évaluation environnementale. (...). ".

12. Si les installations soumises à enregistrement sont, en principe, dispensées d'une évaluation environnementale préalable à leur enregistrement, le préfet, saisi d'une demande d'enregistrement d'une installation, doit, en application de l'article L. 512-7-2 du code de l'environnement, se livrer à un examen particulier du dossier afin d'apprécier si une évaluation environnementale donnant lieu, en particulier, à une étude d'impact, est nécessaire, notamment au regard de la localisation du projet et de la sensibilité environnementale de la zone d'implantation.

13. Il résulte de l'instruction que l'élevage sera exploité conformément aux prescriptions de l'arrêté du 27 décembre 2013 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations relevant du régime de l'enregistrement au titre des rubriques nos 2101, 2102 et 2111 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement. Au vu de son implantation et de ses caractéristiques techniques, des équipements prévus et en particulier des ventilateurs, le projet d'installation, tant en ce qui concerne le risque de pollution, les émissions d'ammoniac et les nuisances sonores, ne sera pas susceptible d'avoir d'incidences notables sur l'environnement, y compris sur les zones " Natura 2000 " dans l'emprise desquelles le projet n'est pas directement situé. Les effluents seront stockés dans le poulailler, puis directement transportés sur les parcelles du plan d'épandage situées sur le territoire de la commune de Chemilly. Si cette commune, comme celle de Bressolles se situe dans une zone vulnérable aux nitrates, au sens de la directive 91/676/CEE, les fumiers seront stockés au champ conformément à la règlementation applicable en zone vulnérable. Par suite, l'association Bressolles bien vivre et autres ne sont pas fondés à soutenir que le préfet aurait dû mettre en œuvre les dispositions de l'article L. 512-7-2 du code de l'environnement.

En ce qui concerne la nécessité de prescriptions complémentaires :

14. Comme il a été dit au point précédent, dès lors que l'élevage sera exploité conformément aux prescriptions de l'arrêté du 27 décembre 2013, en particulier de la règle de distance de 100 mètres minimum des habitations des tiers qu'elles édictent, et qu'il ne résulte pas de l'instruction que les modalités d'épandages seraient susceptibles d'avoir une incidence sur les zones " Natura 2000 ", le moyen selon lequel le préfet aurait dû assortir l'enregistrement d'autres prescriptions particulières en application des dispositions de l'article L. 512-7-3 du code de l'environnement citées au point 3, tendant à l'instauration d'une distance minimale d'au moins 1000 mètres entre l'élevage de M. J... et toutes habitations avoisinantes, ainsi que l'exclusion du plan d'épandage de toute parcelle située en zone " Natura 2000 ", doit être écarté.

En ce qui concerne la compatibilité avec le plan local d'urbanisme :

15. Il résulte du deuxième alinéa du I de l'article L. 514-6 et du 4° de l'article R. 512-46-4 du code de l'environnement que le juge des installations classées contrôle la compatibilité des décisions prises par les autorités compétentes avec l'affectation des sols prévue pour les secteurs délimités par le plan local d'urbanisme.

16. Il résulte de l'instruction que les parcelles d'implantation du projet sont classées en zone agricole (A) du plan local d'urbanisme de la commune de Bressolles, où sont autorisés les " bâtiments agricoles, leurs extensions et les travaux, ouvrages, aménagements et installations liés, classés ou non pour la protection de l'environnement, nécessaires aux exploitations agricoles professionnelles ". Le bâtiment d'élevage de M. J... étant nécessaire à son exploitation, ce moyen ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la méconnaissance des autres législations et règlementations :

17. L'arrêté en litige est pris sur le fondement des dispositions du code de l'environnement destinées à assurer le respect, par l'exploitant d'une installation classée pour la protection de l'environnement, de certaines des prescriptions qui s'imposent à son activité pour la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 de ce même code. En vertu de l'indépendance des législations, les intimés ne peuvent utilement se prévaloir des dispositions de l'arrêté du 28 juin 2010 établissant les normes minimales relatives à la protection des poulets destinés à la production de viande ni de celles de l'arrêté du 25 octobre 1982 relatif à l'élevage, à la garde et à la détention des animaux.

18. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées à la demande de première instance, que M. J... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé l'arrêté d'enregistrement n° 3052/2017 du 19 décembre 2017.

Sur les frais liés au litige :

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées à ce titre par l'association France Nature Environnement Allier, qui n'a pas la qualité de partie. Ces dispositions font également obstacle à ce que la somme que les intimés demandent au titre des frais non compris dans les dépens qu'ils ont exposés soit mise à la charge de M. J..., qui n'est pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association Bressolles bien vivre et autres le versement d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. J....

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 15 décembre 2020 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par l'association Bressolles bien vivre et autres devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de l'association Bressolles bien vivre et autres et de l'association France Nature Environnement Allier présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : L'association Bressolles bien vivre et autres verseront à M. J... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... J..., au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, à l'association Bressolles bien vivre, à l'association L214, à M. et Mme F... et I... M..., à M. et Mme K... et Q... U..., à M. et Mme D... et H... G..., à Mme Y... N..., à M. et Mme P... et E... O..., à M. et Mme R... et V... X..., à M. T... C..., à Mme S... L... et à l'association France nature environnement Allier.

Délibéré après l'audience du 2 mai 2023 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 mai 2023.

La rapporteure,

Bénédicte LordonnéLe président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Sandra Bertrand

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY00535


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00535
Date de la décision : 17/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

44-02 Nature et environnement. - Installations classées pour la protection de l'environnement.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Bénédicte LORDONNE
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : DMMJB AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-05-17;21ly00535 ?
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