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11/05/2023 | FRANCE | N°23LY00354

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 11 mai 2023, 23LY00354


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2022 par lequel le préfet du Rhône a décidé la remise aux autorités italiennes en vue de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 2208925 du 13 décembre 2022, le magistrat désigné par la présidente du tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 27 janvier 2023, présentée pour M. A..., il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce

jugement n° 2208925 du 13 décembre 2022 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;
...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2022 par lequel le préfet du Rhône a décidé la remise aux autorités italiennes en vue de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 2208925 du 13 décembre 2022, le magistrat désigné par la présidente du tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 27 janvier 2023, présentée pour M. A..., il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 2208925 du 13 décembre 2022 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de l'admettre au séjour au titre de l'asile et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de quinze jours ;

4°) de mettre à la charge de l'État le paiement d'une somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que la décision méconnaît l'article 17 du règlement du 26 juin 2013, l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, eu égard à son état de santé et alors il n'existe aucune garantie que les autorités italiennes, qui avaient pris à son encontre une mesure d'éloignement, soient en mesure de prendre en compte cet état de santé, et qu'elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 janvier 2023 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Lyon (section administrative d'appel).

Par un mémoire enregistré le 8 mars 2023, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 modifié par le règlement (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Seillet, président assesseur, ayant été entendu au cours de l'audience publique :

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., de nationalité afghane, né le 24 mai 1998 à Parwan (Afghanistan), entré en France le 25 juillet 2022, selon ses déclarations, a déposé une demande d'asile enregistrée à la préfecture de police de Paris le 8 août 2022. Une consultation du fichier Eurodac a révélé qu'il avait été identifié en Italie, le 9 juin 2022, suite à un franchissement irrégulier de la frontière et en Allemagne, le 13 juin 2022, où il avait déposé une demande d'asile. Les autorités italiennes, saisies le 30 août 2022 d'une demande de prise en charge de M. A... pour l'examen de sa demande d'asile, ont donné leur accord par une décision implicite du 31 octobre 2022. Par un arrêté du 23 novembre 2022, le préfet du Rhône a ordonnéson transfert aux autorités italiennes, responsables de sa demande d'asile. M. A... relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 : " 1. Par dérogation (...), chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers (...), même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) ". La faculté qu'ont les autorités françaises d'examiner une demande d'asile présentée par un ressortissant d'un État tiers, alors même que cet examen ne leur incombe pas, relève de l'entier pouvoir discrétionnaire du préfet, et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile. Ces dispositions doivent être appliquées dans le respect des droits garantis par la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

3. Par ailleurs, eu égard au niveau de protection des libertés et des droits fondamentaux dans les États membres de l'Union européenne, lorsque la demande de protection internationale a été introduite dans un État autre que la France, que cet État a accepté de prendre ou de reprendre en charge le demandeur et en l'absence de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, les craintes dont le demandeur fait état quant au défaut de protection dans cet État membre doivent en principe être présumées non fondées, sauf à ce que l'intéressé apporte, par tout moyen, la preuve contraire. La seule circonstance qu'à la suite du rejet de sa demande de protection par cet État membre l'intéressé serait susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement ne saurait caractériser la méconnaissance par cet État de ses obligations.

4. D'une part, si M. A... fait valoir qu'il a fait l'objet d'une mesure d'éloignement prise le 22 juillet 2022 par les autorités italiennes et qu'en cas de transfert vers l'Italie, il risque d'être reconduit en Afghanistan où il encourt des risques pour sa vie compte tenu de sa collaboration avec les autorités américaines au sein de l'armée afghane, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier, en l'absence de sérieuses raisons de croire qu'il existe en Italie des défaillances systémiques dans le traitement des demandeurs d'asile, qu'il ne serait pas en mesure de faire valoir, le cas échéant, devant les autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile et qui ont accepté sa prise en charge, tout élément relatif à sa situation personnelle et à la situation qui prévaut en Afghanistan ni que ces mêmes autorités, en conséquence de leur acceptation de la prise en charge de M. A..., n'évalueront pas, avant de procéder à un éventuel éloignement de l'intéressé vers son pays d'origine, les risques auxquels il y serait exposé en cas de retour. D'autre part, s'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté portant transfert aux autorités italiennes de M. A..., il souffrait d'une pathologie pulmonaire nécessitant un suivi médical et biologique ainsi qu'un traitement médicamenteux, ainsi qu'en attestent des ordonnances et certificats établis par l'hôpital de la Croix-Rousse les19 octobre, 30 novembre et 21 décembre 2022 mentionnant les conséquences d'une absence de traitement ou de suivi, ces documents ne comportent toutefois, pas davantage que les autres pièces produites par le requérant, un élément médical faisant état d'une impossibilité d'accès aux soins nécessités par son état en Italie. Il résulte de ce qui précède que le préfet du Rhône n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en ne faisant pas usage de la clause discrétionnaire prévue au 1 de l'article 17 précité du règlement (UE) n° 604/2013. Il n'a pas davantage entaché la décision en litige d'une violation des stipulations de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ni de celles de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation. Par ailleurs, la seule circonstance qu'à la suite de l'examen de sa demande de protection, M. A... serait susceptible d'être éloigné à destination de l'Afghanistan ne peut caractériser la méconnaissance par l'Italie de ses obligations, ni la méconnaissance par la France des obligations résultant des articles 3 de la convention européenne des droits de l'homme et 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

5. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et tendant à la mise à la charge de l'État au profit de son conseil des frais exposés à l'occasion de la présente instance dans les conditions prévues par les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.

Délibéré après l'audience du 27 avril 2023 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

M. Chassagne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 mai 2023.

Le rapporteur,

Ph. SeilletLe président,

V.-M. PicardLe président,

V.-M. Picard

La greffière,

A. Le Colleter

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

1

N° 23LY00354 2

al


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY00354
Date de la décision : 11/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : MUSCILLO

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-05-11;23ly00354 ?
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