La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/04/2023 | FRANCE | N°22LY01604

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 27 avril 2023, 22LY01604


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon, d'une part d'annuler la décision du 22 mars 2021 par laquelle le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud-Est a refusé de lui délivrer un agrément pour l'exercice des fonctions d'adjoint de sécurité de la police nationale, d'autre part, d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer cet agrément.

Par un jugement n° 2103396 du 23 mars 2022, le tribunal a fait droit à la demande d'annulation, a enjoint au préfet de la zone de défen

se et de sécurité sud-est de prendre une nouvelle décision sur la situation de M. B...,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon, d'une part d'annuler la décision du 22 mars 2021 par laquelle le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud-Est a refusé de lui délivrer un agrément pour l'exercice des fonctions d'adjoint de sécurité de la police nationale, d'autre part, d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer cet agrément.

Par un jugement n° 2103396 du 23 mars 2022, le tribunal a fait droit à la demande d'annulation, a enjoint au préfet de la zone de défense et de sécurité sud-est de prendre une nouvelle décision sur la situation de M. B..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, et a mis à la charge de l'État une somme de 1 400 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 20 mai 2022 et un mémoire enregistré le 6 mars 2023, le ministre de l'intérieur demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de première instance de M. B....

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a opposé l'absence de motivation de la décision litigieuse qui ne relève d'aucune catégorie de décisions soumises à une telle obligation ;

- les autres moyens soulevés en première instance doivent être écartés par voie d'effet dévolutif.

Par un mémoire enregistré le 18 septembre 2022, présenté pour M. B..., il conclut au rejet de la requête et réitère ses conclusions à fin d'injonction, et demande de mettre à la charge à la charge de l'État le paiement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la sécurité intérieure ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le décret n° 95-1197 du 6 novembre 1995 ;

- le décret n° 2002-812 du 3 mai 2002 ;

- l'arrêté du 24 août 2000 fixant les modalités de recrutement et de formation des adjoints de sécurité recrutés au titre du développement d'activités pour l'emploi des jeunes ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Seillet, président assesseur ;

- les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ;

- et les observations de Me Ricci, pour M. B..., ainsi que celles de M. B... ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 7 avril 2023, présentée pour M. B... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a été informé, par une lettre du 25 février 2020, de la décision du jury de la session 2020/2021 de le retenir, sous réserve de l'avis médical et des résultats d'une enquête administrative, au concours d'adjoint de sécurité de la police nationale organisé au titre de l'année 2020. Par décision du 22 mars 2021, le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud-Est a néanmoins refusé de lui délivrer l'agrément permettant d'exercer ces fonctions. Le ministre de l'intérieur relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé cette décision alors que M. B... maintient ses conclusions de première instance aux fins d'injonction.

2. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques (...) ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; (...) 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; 7° Refusent une autorisation (...) " ; tandis qu'aux termes aux termes l'article 5 de l'arrêté du 24 août 2000 susvisé : " Les candidatures proposées par la commission de sélection et dont le dossier aura été jugé recevable au vu d'une enquête administrative sont agréées par l'autorité compétente en application de l'article R. 411-9 du code de la sécurité intérieure. Cet agrément est valable deux ans. Une prolongation d'un an peut être accordée par l'administration. (...) ".

3. Il résulte des dispositions précitées que l'agrément préalable à la nomination dans un emploi d'adjoint de sécurité de la police nationale est instruit d'office et ne résulte pas d'une demande des personnels recrutés. La décision refusant cet agrément ne présente donc pas le caractère d'un refus d'autorisation au sens du 7° de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, et elle ne constitue pas plus le refus d'un avantage dont l'attribution constitue un droit au sens du 6° du même article, dès lors que la réussite à un concours, si elle donne vocation à occuper un emploi, n'ouvre pas par elle-même un droit au recrutement, ni le retrait d'une décision créatrice de droit, au sens des dispositions du 4° de cet article mentionnées par la circulaire NOR/INT/C/93/2600/C du 2 janvier 2020 relative aux adjoints de sécurité de la police nationale dont se prévaut M. B... dès lors qu'un refus d'agrément ne remet pas en cause la réussite au concours mais seulement le droit au recrutement, lui-même soumis, outre à la réussite au concours, à l'obtention de cet agrément. Par suite, le refus d'agrément litigieux n'avait pas à être motivé et c'est, dès lors, à tort que le tribunal en a prononcé l'annulation, motif pris de son absence de motivation.

4. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... tant devant le tribunal administratif de Lyon qu'en appel.

5. Il résulte des dispositions précitées de l'article 5 de l'arrêté du 24 août 2000 que l'agrément qu'elles prévoient a pour objet de vérifier que les candidats à un emploi d'adjoint de sécurité de la police nationale présentent les garanties requises pour l'exercice des fonctions auxquelles ils postulent.

6. En premier lieu, à supposer même établie la circonstance que M. B... n'aurait pas cessé d'exercer une activité commerciale à la date de la décision en litige, il se trouvait, à cette date, dans l'attente d'un agrément nécessaire à son recrutement et n'était dès lors pas encore soumis aux obligations propres aux fonctionnaires définies par la loi du 13 juillet 1983. Dès lors, l'administration n'a pu, pour refuser de délivrer l'agrément prévu par ces dispositions, se fonder sur le motif tiré de ce que l'intéressé ne justifiait pas avoir cessé définitivement toute activité au sein d'un commerce, en méconnaissance des dispositions de l'article 25 septies de la loi du 13 juillet 1983 susvisée portant droits et obligations des fonctionnaires, alors en vigueur, en vertu desquelles tout fonctionnaire consacre l'intégralité de son activité professionnelle aux tâches qui lui sont confiées et ne peut exercer à titre professionnel une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit.

7. Toutefois, en deuxième lieu, il ressort également des pièces du dossier et, en particulier, d'une note de synthèse de l'enquête administrative effectuée en vue de l'agrément de M. B..., et produite pour la première fois en appel, que, selon des renseignements recueillis par le service du renseignement territorial au cours de l'enquête de personnalité et administrative, le père de M. B..., qui gérait de fait un établissement de nuit dont le candidat était propriétaire, et un tiers auquel ce dernier envisageait de céder ses parts dans la société exploitant cet établissement, alors même qu'il ne disposait pas des agréments nécessaires, étaient défavorablement connus des services de police pour des faits de violence, de recel et de travail dissimulé. Dans ces conditions, le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud-Est a pu légalement refuser de délivrer à M. B... un agrément pour l'exercice des fonctions d'adjoint de sécurité de la police nationale, compte tenu d'un entourage proche ayant eu un comportement de nature à faire obstacle à l'exercice par M. B... des fonctions auxquelles il avait postulé. Par suite, en estimant, pour refuser l'agrément prévu par les dispositions de l'article 5 de l'arrêté du 24 août 2000, que M. B... ne remplissait pas les conditions pour occuper un emploi d'adjoint de sécurité de la police nationale, le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud-Est n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées de cet article ni entaché sa décision d'une erreur d'appréciation. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision en litige serait entachée d'un détournement de pouvoir ni qu'elle constituerait une discrimination. Il résulte de l'instruction que ledit préfet aurait pris la même décision s'il s'était fondé sur ce seul motif pour refuser de délivrer l'agrément en cause, alors même que, si le ministre se prévaut dans ses écritures d'un manquement de M. B... à son devoir de loyauté envers la police nationale résultant de l'enregistrement par ce dernier d'une conversation téléphonique avec un fonctionnaire de police en charge de l'enquête de personnalité sans son consentement, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un tel élément, nécessairement postérieur à la date de cette enquête, aurait été pris en compte dans la décision en litige, qui repose sur les résultats de ladite enquête.

8. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 22 mars 2021 par laquelle le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud-Est a refusé de délivrer à M. B... un agrément pour l'exercice des fonctions d'adjoint de sécurité de la police nationale. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions de M. B... aux fins d'injonction et tendant à la mise à la charge de l'État d'une somme au titre des frais exposés à l'occasion de la présente instance.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2103396 du 23 mars 2022 du tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : Les conclusions de M. B... sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. A... B....

Délibéré après l'audience du 6 avril 2023 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

M. Chassagne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 avril 2023.

Le rapporteur,

Ph. SeilletLe président,

V.-M. Picard

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 22LY01604 2

ar


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY01604
Date de la décision : 27/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-03-03-007 Fonctionnaires et agents publics. - Entrée en service. - Nominations. - Conditions de nomination.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : RICCI

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-04-27;22ly01604 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award