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20/04/2023 | FRANCE | N°21LY03004

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 20 avril 2023, 21LY03004


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Pharmacie de Champvert a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre de l'exercice clos le 30 novembre 2016.

Par un jugement n° 1908834 du 8 juillet 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 8 septembre 2021, la société Pharmacie de Champvert, représentée par Me Mandon, avocat, demande

à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 8 juillet 2021 ;

2°)...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Pharmacie de Champvert a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre de l'exercice clos le 30 novembre 2016.

Par un jugement n° 1908834 du 8 juillet 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 8 septembre 2021, la société Pharmacie de Champvert, représentée par Me Mandon, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 8 juillet 2021 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions susmentionnées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice.

Elle soutient que la valeur probable de réalisation de son fonds de commerce est devenue inférieure à sa valeur d'inscription en comptabilité ainsi que le prouvent une étude sectorielle intitulée " Prix et valeur des pharmacies " mettant en lumière une tendance à la baisse du prix de vente des officines au niveau national et régional, une sélection de comparables au niveau local ainsi que des éléments comptables et financiers constatés au niveau de l'entreprise révélant une baisse continue et régulière du chiffre d'affaires et du résultat fiscal. Cette dévalorisation justifie la constitution de la provision en litige.

Par un mémoire enregistré le 20 mai 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que c'est à juste titre que la déduction de la provision pour dépréciation du fonds de commerce a été rejetée.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure ;

- et les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. La société Pharmacie de Champvert a fait l'objet d'un examen de comptabilité en matière d'impôt sur les sociétés portant sur la période du 1er décembre 2013 au 30 novembre 2016, à l'issue duquel par une proposition de rectification du 11 décembre 2017, l'administration lui a notifié une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos le 30 novembre 2016. Elle relève appel du jugement du 8 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette imposition et des pénalités dont elle a été assortie.

2. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice. (...) ". Aux termes de l'article 38 quater de l'annexe III à ce code : " Les entreprises doivent respecter les définitions édictées par le plan comptable général, sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l'assiette de l'impôt ". Aux termes de l'article 38 sexies de l'annexe III à ce code : " La dépréciation des immobilisations qui ne se déprécient pas de manière irréversible, notamment les terrains, les fonds de commerce, les titres de participation, donne lieu à la constitution de provisions dans les conditions prévues au 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 123-14 du code de commerce : " Les comptes annuels doivent être réguliers, sincères et donner une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l'entreprise. / Lorsque l'application d'une prescription comptable ne suffit pas pour donner l'image fidèle mentionnée au présent article, des informations complémentaires doivent être fournies dans l'annexe. / Si, dans un cas exceptionnel, l'application d'une prescription comptable se révèle impropre à donner une image fidèle du patrimoine, de la situation financière ou du résultat, il doit y être dérogé. Cette dérogation est mentionnée à l'annexe et dûment motivée, avec l'indication de son influence sur le patrimoine, la situation financière et le résultat de l'entreprise ". Aux termes de l'article 322-1 du plan comptable général, dont les dispositions ont été reprises pour les exercices ouverts après le 1er janvier 2014 à l'article 214-6 : " (...) 4 - La dépréciation d'un actif est la constatation que sa valeur actuelle est devenue inférieure à sa valeur nette comptable. / 5 - La valeur brute d'un actif est sa valeur d'entrée dans le patrimoine (...). / 7 - La valeur nette comptable d'un actif correspond à sa valeur brute diminuée des amortissements cumulés et des dépréciations. / 8 - La valeur actuelle est la valeur la plus élevée de la valeur vénale ou de la valeur d'usage (...). / 10 - La valeur vénale est le montant qui pourrait être obtenu, à la date de clôture, de la vente d'un actif lors d'une transaction conclue à des conditions normales de marché, net des coûts de sortie. (...) / 11 - La valeur d'usage d'un actif est la valeur des avantages économiques futurs attendus de son utilisation et de sa sortie. Elle est calculée à partir des estimations des avantages économiques futurs attendus. Dans la généralité des cas, elle est déterminée en fonction des flux nets de trésorerie attendus. (...). "

4. La déductibilité fiscale d'une provision est subordonnée, en application des dispositions du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts et de l'article 38 quater de l'annexe II à ce code, outre aux conditions relatives à la dépréciation elle-même, à ce que la provision en cause ait été constatée dans les écritures de l'exercice conformément, en principe, aux prescriptions comptables. S'agissant de la dépréciation d'un élément d'actif, il résulte des dispositions du plan comptable général citées au point 3 que la passation de l'écriture comptable correspondante est subordonnée au constat selon lequel la valeur actuelle de cet élément d'actif, valeur la plus élevée de la valeur vénale ou de la valeur d'usage, est devenue notablement inférieure à sa valeur nette comptable. Par suite, la seule circonstance que la valeur vénale d'un élément d'actif soit devenue inférieure à sa valeur nette comptable ne saurait, en principe, justifier la déductibilité fiscale d'une provision s'il apparaît que la valeur d'usage reste supérieure à cette valeur nette comptable, faisant ainsi obstacle à la comptabilisation d'une dépréciation.

5. En juin 2010, la société Pharmacie de Champvert a acquis un fonds de commerce de pharmacie pour une valeur de 2 077 820 euros. Ce fonds de commerce a été porté à l'actif de la société pour une valeur d'apport de 2 077 820 euros. Au titre de l'exercice clos le 30 novembre 2016, elle a constitué une provision pour dépréciation de son fonds de commerce pour un montant de 297 820 euros que l'administration a réintégré à son résultat imposable.

6. La requérante, à laquelle il appartient d'établir le bien-fondé de la dotation aux provisions en litige, fait valoir d'une part qu'en 2015 et 2016, selon des études établies par l'organisme Interfimo le prix moyen des pharmacies se négocie autour de 82 % de leur chiffre d'affaires annuel, d'autre part, que les montants de quatre cessions d'officine comparables à la sienne s'échelonnent entre 65 % et 89 % du chiffre d'affaires annuel, et enfin, que son chiffre d'affaires et son résultat fiscal ont baissé respectivement de 9,30 % et de 17,30 % entre 2013 et 2016, en dépit des travaux d'agencement de sa surface menés en 2016. Toutefois la baisse du chiffre d'affaires et du résultat fiscal ainsi présentée par la requérante qui s'abstient de comparer la valeur de son fonds de commerce à la clôture de l'exercice 2016 avec la valeur d'apport déterminée en juin 2010, compte tenu du chiffre d'affaires et du résultat d'exploitation résultant de l'exploitation de ce fonds et constatés à la clôture de l'exercice 2010 ne saurait être regardée comme significative. En outre, la société requérante ne fait état d'aucune autre donnée propre à son entreprise, ni d'aucun élément circonstancié lié aux conditions d'exploitation de la pharmacie. Elle ne détermine pas plus de valeur d'usage de son bien. Par ailleurs, si les études établies par l'organisme Interfimo, dont la requérante fait état relèvent une diminution globale du prix de cession des officines de pharmacie sur la France ainsi que sur la région Rhône-Alpes et si les données qu'elle produit relatives à la cession d'autres officines qu'elle considère comme comparables à la sienne peuvent servir d'indices en vue de la valorisation de son bien, ces éléments ne suffisent pas établir que le fonds de commerce concerné a subi une réelle dépréciation sur la période litigieuse. Alors que la société requérante n'invoque par ailleurs aucun engagement de cession de son fonds de commerce, elle n'apporte aucun élément permettant d'établir la valeur d'usage de son fonds de commerce, les éléments invoqués en défense étant à cet égard de nature à remettre en cause une diminution de la valeur d'usage de l'actif ou de sa valeur vénale.

7. Dans ces conditions, la société Pharmacie de Champvert, qui n'établit pas que la valeur actuelle de son fonds de commerce serait inférieure à la valeur nette comptable, ne justifie pas du bien-fondé de la provision constituée au titre de la dépréciation de son fonds de commerce. Par ailleurs, la requérante ne se prévaut d'aucune circonstance exceptionnelle justifiant, en application des dispositions de l'article L. 123-14 du code de commerce, de déroger à ces prescriptions. Par suite, l'administration était bien fondée à remettre en cause la déduction de la provision en litige.

8. Il résulte de ce qui précède que la société Pharmacie de Champvert n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions tendant à ce qu'il soit mis à la charge de l'État le versement de la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Pharmacie de Champvert est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Pharmacie de Champvert et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 23 mars 2023 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 avril 2023.

La rapporteure,

P. DècheLe président,

F. Bourrachot

La greffière,

A.-C. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY03004

ap


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY03004
Date de la décision : 20/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

19-04 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: Mme LE FRAPPER
Avocat(s) : SELARL SMA FISCAL

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-04-20;21ly03004 ?
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