Vu les procédures suivantes :
Procédures contentieuses antérieures
I°) M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les décisions du 30 septembre 2021 par lesquelles le préfet du Puy-de-Dôme lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et l'a assigné à résidence.
II°) Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les décisions du 30 septembre 2021 par lesquelles le préfet du Puy-de-Dôme lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et l'a assignée à résidence.
Par un jugement nos 2102078, 21LY2081 du 7 octobre 2021, le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a joint et rejeté ces demandes.
Procédures devant la cour
I°) Par une requête enregistrée le 5 novembre 2021, M. C..., représenté par Me Khanifar, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 7 octobre 2021 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;
2°) d'annuler les décisions du préfet du Puy-de-Dôme du 30 septembre 2021.
Il soutient que :
- le premier juge n'a pas répondu au moyen tiré du défaut de traduction des décisions litigieuses ;
- les décisions litigieuses sont illégales à défaut d'avoir été traduites dans une langue qu'il comprend ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale, à défaut d'avoir été précédée d'un examen de sa demande de titre de séjour ;
- le refus de lui accorder un délai de départ volontaire méconnaît l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en l'absence de risque qu'il se soustraie à la mesure d'éloignement dont il fait l'objet ;
- l'interdiction de retour sur le territoire français n'est pas motivée quant au défaut de circonstances humanitaires ;
- l'assignation à résidence est insuffisamment motivée et méconnaît l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à défaut de preuve de l'impossibilité de procéder à son éloignement.
Par un mémoire en défense enregistré le 8 août 2022, le préfet du Puy-de-Dôme conclut au rejet de la requête.
Il expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 11 octobre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 27 octobre 2022.
II°) Par une requête enregistrée le 5 novembre 2021, Mme C..., représentée par Me Khanifar, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 7 octobre 2021 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;
2°) d'annuler les décisions du préfet du Puy-de-Dôme du 30 septembre 2021.
Elle soutient que :
- le premier juge n'a pas répondu au moyen tiré du défaut de traduction des décisions litigieuses ;
- les décisions litigieuses sont illégales à défaut d'avoir été traduites dans une langue qu'elle comprend ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale, à défaut d'avoir été précédée d'un examen de sa demande de titre de séjour ;
- le refus de lui accorder un délai de départ volontaire méconnaît l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en l'absence de risque qu'elle se soustraie à la mesure d'éloignement dont elle fait l'objet ;
- l'interdiction de retour sur le territoire français n'est pas motivée quant au défaut de circonstances humanitaires ;
- l'assignation à résidence est insuffisamment motivée et méconnaît l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à défaut de preuve de l'impossibilité de procéder à son éloignement.
Par un mémoire en défense enregistré le 8 août 2022, le préfet du Puy-de-Dôme conclut au rejet de la requête.
Il expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 11 octobre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 27 octobre 2022.
La demande d'aide juridictionnelle présentée par M. et Mme C... a été rejetée par une décision du 5 janvier 2022.
Par courrier du 7 mars 2023, les parties ont été informées en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour est susceptible de soulever d'office l'illégalité des décisions faisant interdiction de retour sur le territoire français à M. et Mme C... et les assignant à résidence, par voie de conséquence de l'illégalité du refus de leur accorder un délai de départ volontaire.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère ;
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 7 octobre 2021, le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a joint et rejeté les demandes de M. et Mme C... tendant à l'annulation des décisions du préfet du Puy-de-Dôme du 30 septembre 2021 leur faisant obligation de quitter le territoire français sans délai et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et les assignant à résidence. M. et Mme C... relèvent appel de ce jugement par deux requêtes distinctes.
2. Leurs requêtes étant dirigées contre le même jugement, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Il ressort des pièces du dossier que M. et Mme C... ont tous deux soulevé en première instance un moyen tiré de l'illégalité des décisions litigieuses à défaut d'avoir été traduites dans une langue qu'ils maîtrisent. Le premier juge, qui n'a pas visé les moyens ainsi présentés, n'y a pas répondu. Le jugement attaqué a ainsi été rendu dans des conditions irrégulières et doit, par suite, être annulé.
4. Il y a lieu pour la cour de statuer, par la voie de l'évocation, sur les conclusions de M. et Mme C... dirigées contre les décisions du préfet du Puy-de-Dôme du 30 septembre 2021.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
5. En premier lieu, aucun principe général du droit ni aucune disposition applicable n'exige qu'une décision administrative soit traduite dans une langue autre que le français. Par suite, le moyen tiré du défaut de traduction des décisions contestées est inopérant et ne peut qu'être écarté.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) 2° L'étranger, entré sur le territoire français sous couvert d'un visa désormais expiré (...), s'est maintenu sur le territoire français sans être titulaire d'un titre de séjour (...) ".
7. Si M. et Mme C... ont déposé, le 31 octobre 2019, des demandes de titre de séjour, celles-ci ont, d'après le préfet du Puy-de-Dôme, été " clôturées " à défaut de présentation des intéressés à l'entretien fixé le 20 août 2020 en vue de procéder à leur instruction. Le préfet du Puy-de-Dôme établit, par les attestations de domicile et les accusés de réception portant la mention " destinataire inconnu à l'adresse " produits, les avoir régulièrement convoqués à cet entretien, ceux-ci ne prétendant pas lui avoir communiqué une autre adresse. Leurs demandes de titre de séjour devant ainsi être regardées comme ayant été rejetées, le préfet du Puy-de-Dôme n'a pas méconnu les dispositions précitées en leur faisant obligation de quitter le territoire français.
8. En troisième lieu, la seule circonstance que M. et Mme C... sont les parents d'un enfant né en France, quelques mois avant les décisions attaquées, ne saurait suffire à établir qu'en les obligeant à quitter le territoire français, le préfet du Puy-de-Dôme aurait porté une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale. Ce moyen doit par suite être écarté.
9. En revanche, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". L'article L. 612-3 du même code précise que : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) 2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour (...) ".
10. Contrairement à ce que prétend le préfet du Puy-de-Dôme, la seule circonstance que M. et Mme C... ne se soient pas présentés aux services de la préfecture en vue de l'instruction de leurs demandes de titre de séjour ne remet pas en cause l'existence de ces demandes, régulièrement déposées le 31 octobre 2019, d'après les formulaires versés au dossier. Par suite, M. et Mme C... sont fondés à soutenir qu'ayant déposé des demandes de titre de séjour, ils ne relevaient pas du 2° de l'article L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, en l'absence de tout autre motif susceptible de les justifier invoqué en défense, que les décisions refusant de leur accorder un délai de départ volontaire sont entachées d'illégalité.
11. L'illégalité de ces décisions entraîne par voie de conséquence l'illégalité des décisions faisant interdiction de retour sur le territoire français à M. et Mme C... en application de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les assignant à résidence.
12. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés, que M. et Mme C... sont uniquement fondés à demander l'annulation des décisions du préfet du Puy-de-Dôme du 30 septembre 2021 refusant de leur accorder un délai de départ volontaire, leur faisant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et les assignant à résidence.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 7 octobre 2021 est annulé.
Article 2 : Les décisions du préfet du Puy-de-Dôme du 30 septembre 2021 refusant d'accorder un délai de départ volontaire à M. et Mme C..., leur faisant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et les assignant à résidence sont annulées.
Article 3 : Le surplus des demandes présentées par M. et Mme C... devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à Mme B... D... épouse C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme.
Délibéré après l'audience du 28 mars 2023, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,
M. Gilles Fédi, président-assesseur,
Mme Sophie Corvellec, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 avril 2023.
La rapporteure,
Sophie CorvellecLe président,
Jean-Yves Tallec
La greffière,
Sandra Bertrand
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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Nos 21LY03589-21LY03591