Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme A... E... B..., épouse C..., a demandé au tribunal administratif de Lyon : 1°) d'annuler la décision du 10 janvier 2019 par laquelle le maire de Châtillon-sur-Chalaronne l'a exclue de ses fonctions pour une durée de dix jours ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Châtillon-sur-Chalaronne une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1901782 du 8 juin 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 10 août 2020 et le 9 février 2022, Mme C..., représentée par la SELARL Grimaldi Molina et associés, agissant par Me Grimaldi, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 8 juin 2020 et l'arrêté du 10 janvier 2019 par laquelle le maire de Châtillon-sur-Chalaronne l'a exclue de ses fonctions pour une durée de dix jours ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Châtillon-sur-Chalaronne une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme C... soutient que :
- l'avis du conseil de discipline est insuffisamment motivé ;
- la sanction qui lui a été infligée est insuffisamment motivée ;
- la décision est fondée sur des faits qui ne sont pas établis et présente un caractère disproportionné au regard des griefs retenus et de sa manière de servir.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 novembre 2020, la commune de Châtillon-sur-Chalaronne, représentée par Me Mariller :
1°) conclut au rejet de la requête ;
2°) demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme C... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La commune de Châtillon-sur-Chalaronne fait valoir que les moyens présentés par la requérante ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 10 février 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 11 mars 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Fédi, président-assesseur,
- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de Me Piquet, représentant Mme C..., et celles de Me Tardieu, représentant la commune de Châtillon-sur-Chalaronne
Considérant ce qui suit :
1. Assistante d'enseignement artistique principale exerçant les fonctions d'intervenante musicale en milieu scolaire au sein de la commune de Châtillon-sur-Chalaronne, Mme C... a contesté la décision du 10 janvier 2019 par laquelle le maire de cette commune lui a infligé une sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de dix jours. Le tribunal administratif de Lyon, par un jugement du 8 juin 2020 dont elle relève appel, a rejeté la demande de Mme C....
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. L'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires dispose : " (...) Aucune sanction disciplinaire autre que celles classées dans le premier groupe par les dispositions statutaires relatives aux fonctions publiques de l'Etat, territoriale et hospitalière ne peut être prononcée sans consultation préalable d'un organisme siégeant en conseil de discipline dans lequel le personnel est représenté. L'avis de cet organisme de même que la décision prononçant une sanction disciplinaire doivent être motivés. ".
3. Aux termes des dispositions de l'article 12 du décret du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux : " Le conseil de discipline délibère sur les suites qui lui paraissent devoir être réservées à la procédure disciplinaire engagée (...). / La proposition ayant recueilli l'accord de la majorité des membres présents doit être motivée (...) ". L'exigence de motivation, prévue par l'article 19 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, de l'avis de la commission administrative paritaire compétente siégeant en conseil de discipline constitue une garantie. Cette motivation peut être attestée par la production, sinon de l'avis motivé lui-même, du moins du procès-verbal de la réunion de la commission comportant des mentions suffisantes.
4. Il résulte de l'examen du procès-verbal de la réunion de la commission administrative paritaire de la commune de Châtillon-sur-Chalaronne, siégeant en conseil de discipline le 5 décembre 2018, qui a été consacrée à l'examen du cas de Mme C... et qui a émis un avis favorable à la sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de dix jours, qu'il est suffisamment motivé au regard des faits reprochés et de leur qualification juridique. Ainsi, l'avis donné par le conseil de discipline qui, en fonction des faits ainsi relatés par le procès-verbal, a indiqué la sanction qui lui paraissait la plus appropriée, compte tenu des faits reprochés, est suffisamment motivé au regard des dispositions du décret du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux.
5. Aux termes du 2° de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 2° Infligent une sanction ; (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Il résulte de ces dispositions que le législateur a entendu imposer à l'autorité qui prononce une sanction l'obligation de préciser elle-même dans sa décision les griefs qu'elle entend retenir à l'encontre de la personne intéressée, de sorte que cette dernière puisse à la seule lecture de la décision qui lui est notifiée connaître les motifs de la sanction qui la frappe.
6. Il ressort des termes mêmes de la sanction du 10 janvier 2019 en litige qu'après avoir visé les textes applicables, la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et le décret du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux, elle mentionne les griefs reprochés à Mme C.... La décision en litige expose ainsi les griefs retenus à l'encontre de l'intéressée de manière suffisamment circonstanciée pour la mettre à même de déterminer les faits que l'autorité disciplinaire entend lui reprocher et lui permettre d'en comprendre les motifs à sa seule lecture. Dans ces conditions, alors même que cette décision ne précise pas les dates exactes des manquements ou quelle obligation professionnelle spécifique aurait été méconnue, l'arrêté en litige est suffisamment motivé en droit et en fait. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation, qui manque en fait, doit être écarté.
7. Aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 dans sa rédaction alors en vigueur : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / Premier groupe : l'avertissement ; le blâme ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours ; / Deuxième groupe : l'abaissement d'échelon ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quatre à quinze jours ; (...) ". Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
8. Pour prononcer la sanction d'exclusion temporaire de fonctions de Mme C... pour une durée de dix jours, le maire de la commune de Châtillon-sur-Chalaronne s'est fondé sur l'attitude de l'intéressée dans ses relations avec les élèves, tenant en des paroles, tons et gestes à la limite du respect de l'enfant, sur sa difficulté à créer, prévoir et organiser un projet pédagogique et à le mener à bien, générant des cours bruyants, improvisés et non structurés et enfin sur sa difficulté à travailler en équipe, en raison notamment d'absences à des réunions ou de retards à des auditions, générant une désorganisation globale du fonctionnement des services.
9. S'agissant des relations entretenues par l'agent avec les élèves, si Mme C... conteste le comportement inapproprié qui lui est reproché, il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport du directeur de l'école Saint Charles du 10 septembre 2018 et des courriers concordants de parents d'élèves, que l'intéressée a adressé des insultes et des propos vexatoires à plusieurs enfants. Ensuite, Mme C... ne peut utilement soutenir d'une part, que certains faits, remontant à juillet 2014 et à juin 2015, qui lui sont reprochés sont désormais prescrits, dès lors qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que l'administration aurait eu une connaissance effective de ces faits trois ans avant l'engagement de la procédure disciplinaire, d'autre part, qu'elle a suivi le protocole mis en place pour le déroulement de ses cours. De même, l'intéressée ne peut utilement se prévaloir d'une part, de ce qu'elle souffrirait d'un " véritable isolement, suite à un spectacle en juin 2014, auquel elle est arrivée avec quelques minutes de retard " d'autre part, de ce qu'elle " est également soutien de famille auprès de sa mère malade ". En ce qui concerne le deuxième reproche, tiré des difficultés à créer, prévoir et organiser un projet pédagogique et à le mener à bien, si Mme C... soutient qu'elle a toujours entretenu des relations cordiales avec le directeur de l'école et que les problèmes sont circonscrits à deux classes, toutefois ces reproches sont établis par les pièces du dossier, notamment par un courrier du directeur de l'école Saint-Charles du 2 juillet 2018 et un rapport du directeur de l'école municipale de musique du 20 juillet 2018. Enfin, s'agissant des difficultés rencontrées par l'intéressée dans le travail en équipe, le rapport du directeur de l'école de musique du 20 juillet 2018 fait mention d'absences à des réunions en dépit de convocations écrites et de retards aux auditions sans préparation, sans que, là encore, l'agent ne puisse utilement se prévaloir de bonnes appréciations depuis 2008 ou de soutiens de parents d'élèves. Dans ces conditions, ces faits, dont l'exactitude matérielle est établie, sont constitutifs de fautes de nature à justifier légalement le prononcé d'une sanction disciplinaire. Eu égard à leur gravité, l'autorité disciplinaire, qui a suivi l'avis du conseil de discipline, n'a pas pris, en l'espèce, une sanction disproportionnée et n'a ainsi pas commis d'erreur d'appréciation.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
11. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par les parties sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Châtillon-sur-Chalaronne présentées au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... E... B..., épouse C..., et à la commune de Châtillon-sur-Chalaronne.
Délibéré après l'audience du 28 mars 2023, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,
M. Gilles Fédi, président-assesseur,
Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 avril 2023.
Le rapporteur,
Gilles FédiLe président,
Jean-Yves Tallec
La greffière,
Sandra Bertrand
La République mande et ordonne à la préfète de l'Ain en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 20LY02254