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06/04/2023 | FRANCE | N°21LY02329

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 06 avril 2023, 21LY02329


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société anonyme (SA) Enedis a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les titres exécutoires émis à son encontre, les 14 novembre 2017 et 19 octobre 2018, par le président de Clermont Auvergne Métropole en recouvrement de la redevance de l'occupation de son domaine public, respectivement pour les années 2017 et 2018.

Par jugement nos 1800599, 1802554 du 12 mai 2021, le tribunal a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistré

e le 12 juillet 2021, la métropole Clermont Auvergne Métropole, représentée par la SELARL DMM...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société anonyme (SA) Enedis a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les titres exécutoires émis à son encontre, les 14 novembre 2017 et 19 octobre 2018, par le président de Clermont Auvergne Métropole en recouvrement de la redevance de l'occupation de son domaine public, respectivement pour les années 2017 et 2018.

Par jugement nos 1800599, 1802554 du 12 mai 2021, le tribunal a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 12 juillet 2021, la métropole Clermont Auvergne Métropole, représentée par la SELARL DMMJB avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de la société Enedis ;

3°) de mettre à la charge de la société Enedis la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a jugé qu'elle ne pouvait fixer elle-même le montant de la redevance en raison de l'occupation de son domaine public ;

- les articles L. 2125-1 et L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques doivent être substitués aux articles R. 2333-105 à R. 2333-111 du code général des collectivités territoriales comme base légale des délibérations ;

- la redevance due pour l'occupation ou l'utilisation du domaine public tient compte des avantages de toute nature procurés au titulaire de l'autorisation en appliquant la formule de calcul de la redevance due pour l'utilisation du domaine public communal telle qu'encadrée par les dispositions de l'article R. 2333-105 du code général des collectivités territoriales qui tient compte du nombre d'habitants ;

- pour le surplus elle s'en rapporte à ses écritures de première instance.

Par mémoire enregistré le 21 décembre 2022, la société Enedis, représentée par la SELARL Carbonnier Mamaze Rasle et Associés, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de Clermont Auvergne Métropole la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- quand bien même Clermont Auvergne Métropole était, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, compétente pour fixer le montant des redevances en se fondant sur l'article R. 2333-106 du code général des collectivités territoriales ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat par la décision n° 445108 du 10 décembre 2021, les délibérations du 29 septembre 2017 et du 5 octobre 2018 fixant le montant de la redevance en retenant la population de l'ensemble de l'EPCI pour le calcul du plafond de la redevance, au lieu de procéder à ce calcul pour chacune des communes membres et en tenant compte de la proportion de réseaux implantés sur le domaine public métropolitain, sont illégales ;

- la demande de substitution de base légale n'est pas fondée.

En application des articles R. 611-11-1, R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative l'instruction a été close le 27 janvier 2023.

Un mémoire produit pour Clermont Auvergne Métropole a été enregistré le 10 mars 2023, postérieurement à la clôture d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de l'énergie ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, première conseillère,

- les conclusions de M. Savouré, rapporteur public,

- et les observations de Me Bonicel pour Clermont Auvergne Métropole, et celles de Me Durrleman pour la société Enedis ;

Considérant ce qui suit :

1. Le conseil communautaire de la communauté urbaine Clermont Auvergne Métropole, puis le conseil de la métropole, après transformation au 1er janvier 2018 de l'établissement en métropole sous la même dénomination, ont institué, par délibérations des 29 septembre 2017 et 5 octobre 2018, en application des dispositions de l'article L. 2333-84 du code général des collectivités territoriales, des redevances à la charge des opérateurs de transport et de distribution d'électricité en contrepartie de l'occupation du domaine public routier par leurs ouvrages au titre respectivement des années 2017 et 2018 et en ont fixé le montant. Sur le fondement de ces délibérations, le président de Clermont Auvergne Métropole a émis, les 14 novembre 2017 et 19 octobre 2018, deux titres exécutoires constituant la société Enedis débitrice des sommes de 236 247 euros et 240 656 euros. La société Enedis a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler ces titres exécutoires. Par un jugement du 12 mai 2021 dont Clermont Auvergne Métropole relève appel, le tribunal a fait droit à sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 5215-20 du code général des collectivités territoriales : " I. - La communauté urbaine exerce de plein droit, au lieu et place des communes membres, les compétences suivantes : (...) b) (...) création, aménagement et entretien de voirie (...) ". En vertu de l'article L. 5215-28 de ce code, les immeubles faisant partie du domaine public des communes qui se trouvent dans le périmètre de compétence de la communauté urbaine sont transférés en pleine propriété à la communauté urbaine, de même que les droits et obligations qui y sont attachés, au plus tard un an après les transferts de compétences.

3. Aux termes de l'article L. 5217-2 du même code : " I. - La métropole exerce de plein droit, en lieu et place des communes membres, les compétences suivantes : (...) b) (...) création, aménagement et entretien de voirie (...) c) Création, aménagement et entretien des espaces publics dédiés à tout mode de déplacement urbain ainsi qu'à leurs ouvrages accessoires (...) ". Aux termes de l'article L. 5217-5 de ce code : " Les biens et droits appartenant au patrimoine de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre transformé en application de l'article L. 5217-4 sont transférés à la métropole en pleine propriété. ".

4. D'autre part, sous réserve des dispositions qui leur sont propres, les dispositions du livre III de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales sont applicables aux communautés urbaines conformément à l'article L. 5211-36 de ce code et aux métropoles conformément à l'article L. 5217-10 de ce code.

5. Aux termes de l'article L. 2333-84 dudit code : " Le régime des redevances dues aux communes en raison de l'occupation de leur domaine public par les ouvrages de transport et de distribution d'électricité et de gaz et par les lignes ou canalisations particulières d'énergie électrique et de gaz, ainsi que pour les occupations provisoires de leur domaine public par les chantiers de travaux, est fixé par décret en Conseil d'Etat (...) ". Si ces dispositions se réfèrent seulement au domaine public communal, elles sont applicables, en vertu des articles L. 5211-36 et L. 5217-10 de ce code, aux communautés urbaines ainsi qu'aux métropoles, auxquelles a été transférée la voirie ainsi que les droits et obligations qui y sont attachés, afin qu'elles fixent les tarifs des redevances d'occupation dues par les opérateurs de transport et de distribution d'électricité et de gaz.

6. En vertu de l'article R. 2333-105 du code général des collectivités territoriales, pris pour l'application de son article L. 2333-84, la redevance due à la commune pour l'occupation de son domaine public par les ouvrages des réseaux publics de transport et de distribution d'énergie électrique est fixée par le conseil municipal dans la limite de plafonds fixés par cet article selon un barème progressif en fonction de la population de la commune.

7. L'article R. 2333-106 du même code, également pris pour l'application de l'article L. 2333-84, dispose que : " Lorsqu'une partie du domaine public communal est mise à la disposition d'un établissement public de coopération intercommunale (...), dans les conditions fixées à l'article L. 1321-2 du présent code, la commune, l'établissement public de coopération intercommunale (...) fixent, chacun en ce qui le concerne, le montant des redevances dues pour l'occupation du domaine public qu'ils gèrent par les ouvrages des réseaux publics de transport et de distribution d'énergie (...) / Le montant de la redevance mentionnée à l'article R. 2333-105 fixé par chacun des gestionnaires mentionnés à l'alinéa précédent est alors limité à un montant égal au plafond calculé dans les conditions fixées par l'article R. 2333-105 du présent code et multiplié par un coefficient égal au rapport entre la longueur des réseaux publics de transport et de distribution d'électricité installés sur leurs domaines respectifs et la longueur totale de ces réseaux installés sur le territoire de la commune. Le montant de la redevance mentionnée à l'article R. 2333-105-2 fixé par chacun des gestionnaires concernés est limité à un dixième de la redevance due à chacun d'eux au titre de l'occupation permanente de leurs domaines respectifs par les ouvrages des réseaux publics de distribution d'électricité ".

8. Il résulte des dispositions précitées de l'article R. 2333-106 du code général des collectivités territoriales que lorsqu'une partie du domaine public d'une commune est mis à la disposition d'un établissement public de coopération intercommunale, l'un comme l'autre fixent le montant des redevances dues à raison de l'occupation, par les ouvrages des réseaux publics de transport et de distribution d'énergie électrique, des dépendances domaniales dont ils sont gestionnaires, dans les limites du plafond communal global prévu par l'article R. 2333-105 du même code, réparti au prorata de l'occupation par ces réseaux de leur domaine public respectif. Ces dispositions s'appliquent également lorsqu'un établissement public de coopération intercommunale, tel que Clermont Auvergne Métropole, est devenu propriétaire de dépendances du domaine public par l'effet d'un transfert de compétences. Ainsi, lorsque des ouvrages des réseaux publics de transport et de distribution d'énergie électrique occupent à la fois le domaine public d'une communauté urbaine ou d'une métropole et celui de ses communes membres, les tarifs de la redevance instituée par la communauté urbaine ou la métropole à raison de l'occupation permanente de son propre domaine public par ces ouvrages doivent être fixés dans la limite, pour chacune des communes, d'une fraction du plafond communal global, calculée au prorata de la longueur des réseaux installés sur ce domaine public par rapport à la longueur totale des réseaux installés sur le territoire de la commune concernée.

9. Le 29 septembre 2017, lorsque le conseil communautaire de Clermont Auvergne Métropole a adopté la délibération fixant le tarif des redevances à la charge des opérateurs de transport et de distribution d'électricité en contrepartie de l'occupation du domaine public routier par leurs ouvrages au titre de l'année 2017, la communauté urbaine exerçait, sur le territoire de ses communes membres, la compétence relative à la voirie. Cette délibération étant intervenue moins d'un an après la création de la communauté urbaine, soit la voirie était mise à sa disposition par les communes membres, soit elle lui avait déjà été transférée en pleine propriété conformément aux dispositions rappelées au point 2. Lorsque le 19 octobre 2018, le conseil de la métropole a adopté la délibération ayant le même objet pour l'année 2018, la métropole urbaine exerçait, sur le territoire de ses communes membres, la compétence relative à la voirie et celle-ci lui avait été transférée en pleine propriété conformément aux dispositions citées au point 3. Dans ces conditions, et compte tenu de ce qui a été indiqué aux points 4 à 8, c'est à tort que pour annuler les titres exécutoires procédant de ces délibérations le tribunal s'est fondé sur le moyen tiré de ce que Clermont Auvergne Métropole ne pouvait, par elle-même, sur le fondement du régime prévu à l'article L. 2333-84 du code général des collectivités territoriales, fixer le montant de la redevance d'occupation du domaine public.

10. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Enedis devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand et devant la cour.

11. Les titres exécutoires ont été signés par Mme B... A..., directrice des finances. Si une délégation de signature lui a été accordée par le président de Clermont Auvergne Métropole pour signer électroniquement les bordereaux de dépenses et de recettes, il n'est justifié ni de son affichage, ni de sa publication. Dès lors, la société Enedis est fondée à soutenir, en l'état de l'instruction, que la signataire des titres exécutoires n'était pas titulaire d'une délégation exécutoire et qu'elle était donc incompétente.

12. Il résulte de ce qui précède que Clermont Auvergne Métropole n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé les titres exécutoires émis les 14 novembre 2017 et 19 octobre 2018 à l'encontre de la société Enedis d'un montant respectif de 236 247 euros et 240 656 euros. Sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions. Il y a lieu en revanche, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à sa charge la somme de 2 000 euros à verser à la société Enedis.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Clermont Auvergne Métropole est rejetée.

Article 2 : Clermont Auvergne Méropole versera à la société Enedis une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Clermont Auvergne Métropole et à la société Enedis.

Délibéré après l'audience du 16 mars 2023, à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président,

Mme Evrard, présidente assesseure,

Mme Duguit-Larcher, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 avril 2023.

La rapporteure,

A. Duguit-LarcherLe président,

Ph. Arbarétaz

Le greffier,

J. Billot

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

Le greffier,

2

N° 21LY02329


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY02329
Date de la décision : 06/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

135-05-01-01 Collectivités territoriales. - Coopération. - Établissements publics de coopération intercommunale - Questions générales. - Dispositions générales et questions communes.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : CARBONNIER LAMAZE RASLE ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-04-06;21ly02329 ?
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