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30/03/2023 | FRANCE | N°22LY02837

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 30 mars 2023, 22LY02837


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... B... épouse A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 29 juillet 2021 par lequel la préfète de la Loire a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office.

Par jugement n° 2108407 du 28 janvier 2022, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enre

gistrée le 23 septembre 2022, Mme A..., représentée par Me Messaoud, demande à la cour :

1°) d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... B... épouse A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 29 juillet 2021 par lequel la préfète de la Loire a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office.

Par jugement n° 2108407 du 28 janvier 2022, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 23 septembre 2022, Mme A..., représentée par Me Messaoud, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 janvier 2022 ainsi que l'arrêté susvisés ;

2°) d'enjoindre à la préfète de la Loire :

- à titre principal, en cas d'annulation de la décision portant refus de titre de séjour, de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir ou de réexaminer sa demande et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;

- à titre subsidiaire, en cas d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation à ce titre ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée à la préfète de la Loire qui n'a pas produit d'observations.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 31 août 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., née le 28 novembre 1958, de nationalité ivoirienne, est entrée en France le 24 octobre 2015, munie d'un visa de court séjour. Elle a été autorisée à prolonger temporairement son séjour sur le territoire national en raison de son état de santé. Le 9 mars 2021, l'intéressée a sollicité le renouvellement de son titre de séjour. Par un arrêté du 29 juillet 2021, la préfète de la Loire a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office. Mme A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité du refus de séjour :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. (...) ".

3. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

4. Il ressort des pièces du dossier que, par son avis du 21 juin 2021, le collège de médecins de l'OFII a indiqué que si l'état de santé de Mme A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé en Côte d'Ivoire, elle pourra y bénéficier d'un traitement approprié et voyager sans risque vers son pays d'origine. Pour contester cet avis dont la préfète de la Loire s'est appropriée le contenu, Mme A... soutient qu'elle a subi un cancer du sein droit en 2015 qui a nécessité un traitement par mastectomie et qui justifie aujourd'hui un traitement au long cours sur une période de cinq ans. A ce titre, elle fait valoir que le traitement médicamenteux qui lui est prescrit n'est pas disponible dans son pays d'origine dès lors que ni le Tamoxifene ni le Novadex, qui sont les seuls médicaments à contenir la molécule dont elle a besoin, ne sont commercialisés en Côte d'Ivoire. Toutefois, il ressort des termes du seul certificat médical qu'elle produit daté du 18 octobre 2021 que le traitement par hormonothérapie qui lui est prescrit est l'Anastrozole (générique de l'Arimidex). Il ressort de l'index pharmaceutique de la " nouvelle PSP-CI " (pharmacie de la santé publique de Côte d'Ivoire) auquel renvoie Mme A... dans ses écritures que ce produit figure sur la liste des produits disponibles en Côte d'Ivoire. S'agissant des deux autres médicaments évoqués par Mme A..., dont elle ne démontre pas qu'ils lui seraient prescrits, elle n'apporte aucun autre élément de nature à démontrer que des traitements ou molécules équivalentes ne seraient pas disponibles en Côte d'Ivoire au moyen le cas échéant d'un rééquilibrage. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir qu'en refusant le titre de séjour sollicité, la préfète de la Loire aurait méconnu les dispositions précitées ou entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.

5. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que si Mme A... réside en France depuis 2015 où vit son fils âgé de 27 ans à la date de la décision en litige, elle conserve nécessairement dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 57 ans des attaches privées et familiales, lesquelles ne saurait se limiter à son époux dont elle est séparée depuis 2007. Afin de justifier d'une intégration dans la société française, elle se borne à produire quelques attestations de connaissances et se prévaloir de son engagement associatif ce qui est insuffisant pour justifier de liens stables, intenses et anciens construits sur le territoire français. Compte tenu de ces éléments, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision en litige aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés. Il en est de même, et pour les mêmes motifs, du moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. Les moyens dirigés contre la décision portant refus de séjour ayant été écartés, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français qui lui a été opposée serait illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour.

7. Le moyen tiré de la méconnaissance par la mesure d'éloignement des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 4.

8. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dirigé contre la mesure d'éloignement doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

9. La décision portant obligation de quitter le territoire français étant légale, la décision fixant le pays de destination n'est pas dépourvue de base légale. Par suite, le moyen tiré de ce que cette décision serait illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

10. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. "

11. Il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, que Mme A... ne pourrait effectivement accéder à un traitement approprié à son état de santé en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.

12. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Les conclusions qu'elle présente aux mêmes fins en appel doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... épouse A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de la Loire.

Délibéré après l'audience du 9 mars 2023, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 mars 2023.

La rapporteure,

V. Rémy-NérisLe président,

F. Bourrachot

La greffière,

A-C. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY02837

ap


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY02837
Date de la décision : 30/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: Mme LE FRAPPER
Avocat(s) : MESSAOUD

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-03-30;22ly02837 ?
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