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28/03/2023 | FRANCE | N°22LY01051

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 28 mars 2023, 22LY01051


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 14 février 2022 par lesquelles la préfète de l'Ain l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination, et lui a interdit le retour pour une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2201485 du 2 mars 2022 le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requêt

e et un mémoire enregistrés les 17 mars 2022 et 12 décembre 2022, M. A... C... B..., représenté par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 14 février 2022 par lesquelles la préfète de l'Ain l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination, et lui a interdit le retour pour une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2201485 du 2 mars 2022 le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 17 mars 2022 et 12 décembre 2022, M. A... C... B..., représenté par Me Lussiana, demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du 2 mars 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 14 février 2022 par lequel la préfète de l'Ain l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination, et lui a interdit le retour pour une durée de trois ans ;

3°) d'annuler le refus implicite qui a été opposé, par le préfet du Gard, à sa demande de titre de séjour effectuée le 21 septembre 2021 ;

4°) d'enjoindre au préfet du Gard de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 200 euros sur le fondement, à titre principal, de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à titre subsidiaire, de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité en ce qu'une décision implicite de refus de séjour est née à compter du 22 janvier 2022 et qu'il bénéficiait jusqu'à cette date des dispositions de l'article L. 431-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile lui permettant de résider régulièrement sur le territoire français et le préfet de l'Ain ne pouvait pas prononcer une obligation de quitter le territoire français sur le fondement du 5° de l'article L. 611-1 du code précité ;

- l'obligation de quitter le territoire français ne pouvait pas davantage être fondée sur le 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le rejet implicite de sa demande de titre de séjour était illégal ;

- le rejet implicite de sa demande de titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'obligation de quitter le territoire français sera annulée par voie de conséquence de l'illégalité du refus de séjour ;

- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par mémoire enregistré le 10 janvier 2023, la préfète de l'Ain conclut au rejet de la requête en soutenant que le moyen tiré de l'illégalité du refus implicite de titre de séjour est irrecevable car nouveau en appel et que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par lettre du 14 février 2023, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de l'irrecevabilité des conclusions présentées par M. B... et tendant à l'annulation du refus implicite de délivrance de titre de séjour du préfet du Gard, de telles conclusions étant nouvelles en appel et par suite, irrecevables.

Par un mémoire enregistré le 16 février 2023, M. B..., représenté par Me Lussiana, maintient ses conclusions en soutenant que le jugement attaqué a relevé qu'il a effectué une demande de titre de séjour auprès de la préfecture du Gard et qu'ainsi sa demande de titre de séjour faisait partie des documents transmis au tribunal qui a été conduit à statuer sur sa légalité.

M. A... C... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 9 novembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Burnichon, première conseillère.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... C... B..., ressortissant russe né le 25 juillet 1976 à Sovkhove, est entré pour la dernière fois sur le territoire français en 2016, suite à une première mesure d'éloignement, sous couvert de son passeport russe sans disposer des documents mentionnés à l'article L. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable. Par arrêté du 14 février 2022, la préfète de l'Ain a prononcé à son encontre une obligation de quitter le territoire français sans délai, avec fixation du pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans. Par un autre arrêté du 25 février 2022, il a fait l'objet d'un placement en centre de rétention administrative. Il relève appel du jugement n° 2201485 du 2 mars 2022 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 février 2022.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. M. B..., en soutenant que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité en ce qu'une décision implicite de refus de séjour est née à compter du 22 janvier 2022 et qu'il bénéficiait jusqu'à cette date des dispositions de l'article L. 431-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile lui permettant de résider régulièrement sur le territoire français et qu'ainsi, la préfète de l'Ain ne pouvait pas prononcer une obligation de quitter le territoire français, évoque une question relevant du bien-fondé de la décision en litige et non de la régularité du jugement attaqué.

Sur les conclusions tendant à l'annulation du refus implicite de délivrance de titre de séjour du préfet du Gard :

3. Si M. B... demande l'annulation de la décision implicite de rejet de sa demande de titre de séjour présentée auprès du préfet du Gard par lettre recommandée du 21 septembre 2021, de telles conclusions, présentées pour la première fois en appel sont irrecevables et doivent être rejetées à ce titre.

Sur la légalité de l'arrêté du 14 février 2022 :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants :/1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; /(...)/5° Le comportement de l'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois constitue une menace pour l'ordre public ; /(...) ".

5. Il ressort des pièces du dossier que la dernière entrée sur le territoire français de M. B... date de l'année 2016, après avoir été éloigné une première fois en 2015. L'intéressé s'est vu opposer, suite au jugement du tribunal judiciaire de Nîmes du 20 octobre 2020 le condamnant à une peine de deux ans d'emprisonnement délictuel pour des faits de menaces de mort, de violences conjugales en état d'ivresse et de conduite d'un véhicule sans permis, une première mesure d'éloignement par le préfet du Gard le 19 septembre 2020, non exécutée, avant d'être écroué à la maison d'arrêt de Nîmes le 22 septembre 2020, puis d'être transféré au centre pénitentiaire de Bourg-en-Bresse le 25 janvier 2021. Contrairement à ce que M. B... soutient, s'il a déposé une nouvelle demande de titre de séjour auprès du préfet du Gard en septembre 2021, il n'était pas en séjour régulier sur le territoire français, faute d'avoir bénéficié d'un récépissé l'autorisant à y séjourner, et pouvait dès lors faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement du 1° de l'article L. 611-1 précité. Par ailleurs, compte tenu du comportement de l'intéressé, défavorablement connu des services de police pour usage de produits de stupéfiants, recel, délits routiers et port d'armes, et de sa condamnation précitée, la préfète de l'Ain pouvait également l'obliger à quitter le territoire français en se fondant sur le 5° de l'article L. 611-1 précité. Il suit de là que M. B... n'est pas fondé à invoquer la méconnaissance, par la mesure d'éloignement en litige, des dispositions précitées.

6. En deuxième lieu, l'obligation de quitter le territoire français en litige n'ayant pas été prise sur le fondement et en application du refus implicite de titre de séjour qui lui aurait été opposé suite à sa demande présentée en septembre 2021 auprès du préfet du Gard, M. B... ne peut utilement exciper de l'illégalité de ce refus implicite de titre de séjour à l'encontre de la mesure d'éloignement en litige.

7. En troisième lieu, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit en l'absence d'éléments nouveaux en appel, être écarté par les motifs retenus par le premier juge et qu'il y a lieu pour la cour d'adopter.

8. En dernier lieu, en se bornant à évoquer la mobilisation des citoyens réservistes pour le front ukrainien par décision du président russe du 21 septembre 2022, M. B... ne démontre pas la réalité et l'actualité des risques allégués en cas de retour dans son pays d'origine. Il n'est dès lors pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi méconnaît les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Les conclusions aux fins d'injonction doivent également et par voie de conséquence, être rejetéee ainsi que ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'Etat n'étant pas partie perdante.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie sera adressée à la préfète de l'Ain.

Délibéré après l'audience du 7 mars 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Camille Vinet, présidente de la formation de jugement,

M. François Bodin-Hullin, premier conseiller,

Mme Claire Burnichon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023.

La rapporteure,

C. BurnichonLa présidente,

C. Vinet

La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 22LY01051 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22LY01051
Date de la décision : 28/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme VINET
Rapporteur ?: Mme Claire BURNICHON
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : LUSSIANA

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-03-28;22ly01051 ?
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