Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 3 janvier 2022 par lequel la préfète de la Loire lui a refusé un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, et a fixé la destination d'éloignement en cas de non-respect de ce délai de départ volontaire.
Par un jugement n° 2201040 du 30 mai 2022, le tribunal a rejeté sa requête.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 25 octobre 2022, M. B..., représenté par Me Lawson-Body, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et l'arrêté contesté ;
2°) d'enjoindre au préfet de la Loire de lui délivrer une carte de séjour, subsidiairement, de réexaminer sa situation après lui avoir remis une autorisation provisoire de séjour, le tout dans le délai de quinze jours à compter de l'arrêt et sous astreinte de cent cinquante euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier en raison de son insuffisance de motivation ;
- l'arrêté est entaché d'incompétence de l'auteur de l'acte et est insuffisamment motivé ;
- le refus de séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, les articles L. 423-3 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- l'obligation de quitter le territoire français doit être annulée en raison de l'illégalité du refus de séjour, elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la fixation du pays de destination doit être annulée en raison de l'illégalité du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.
En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative l'affaire a été dispensée d'instruction.
M. B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 septembre 2022.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
M. B... ayant été régulièrement averti du jour de l'audience ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Djebiri, première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant comorien né en 1970 entré sur le territoire français le 20 décembre 2010, relève appel du jugement du 30 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 3 janvier 2022 de la préfète de la Loire lui refusant un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant la destination d'éloignement.
Sur la régularité du jugement :
2. Le tribunal administratif de Lyon a, aux points 5 et 7 de sa décision, expressément et suffisamment répondu aux moyens soulevés par M. B... dans sa requête, tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En outre, si M. B... conteste l'appréciation portée par les premiers juges sur le bien-fondé de ces moyens, cette critique ne relève pas de la régularité du jugement. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité.
Sur le fond du litige :
En ce qui concerne l'arrêté :
3. Il y a lieu d'écarter par adoption des motifs de première instance les moyens tirés de l'incompétence du signataire de l'acte et de l'insuffisance de motivation.
En ce qui concerne le refus de séjour :
4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. "
5. Si M. B... est présent en France depuis près de onze ans, qu'il y réside avec sa compagne, et qu'y vivent sa fille et son petit-fils, il ressort des pièces du dossier qu'il s'y est irrégulièrement maintenu, en dépit des décisions de refus de titre de séjour et d'obligation de quitter le territoire français dont il a fait l'objet. Il n'apporte aucun autre élément de nature à établir son insertion dans la société française, ni ses moyens d'existence, alors qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine et qu'il n'est pas établi que la cellule familiale ne pourrait se reconstituer hors de France, et notamment aux Comores, pays dont sa compagne et lui ont la nationalité. Dans ses conditions, et en dépit de l'avis favorable de la commission du titre de séjour, la décision en litige n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts en vue desquels elle a été prise, et n'a, par suite, méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions l'article L. 423-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. / Les modalités d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'État. "
7. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que la présence en France de sa compagne, de sa fille majeure et de son petit-fils ainsi que sa durée de présence en France, ne sauraient en aucun cas constituer des motifs exceptionnels, ni relever de considérations humanitaires de nature à établir qu'en refusant son admission exceptionnelle au séjour, l'autorité préfectorale aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit, par suite, être écarté.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
8. Les conclusions à fin d'annulation la décision de refus de titre de séjour étant rejetées, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence.
9. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés précédemment. Pour les mêmes motifs, la décision en litige n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
10. Aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " Il résulte de ces stipulations que l'autorité administrative doit, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, accorder une attention particulière à l'intérêt supérieur de l'enfant dans toutes les décisions le concernant.
11. M. B... soutient qu'il entretient des relations privilégiées avec son petit-fils. Toutefois, cette seule circonstance ne suffit pas à démontrer que le préfet aurait méconnu l'intérêt supérieur du petit-fils du requérant, qui vit en France avec sa mère française, ni, par suite, les stipulations du paragraphe 1) de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Sur la fixation du pays de destination :
12. M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité des décisions refusant de lui délivrer une carte de séjour temporaire et l'obligeant à quitter le territoire français.
13. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, sa requête doit être rejetée dans toutes ses conclusions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Loire.
Délibéré après l'audience du 23 février 2023 à laquelle siégeaient :
M. Picard, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme Djebiri, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 mars 2023.
La rapporteure,
C. DjebiriLe président,
V.-M. Picard
La greffière,
A. Le Colleter
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
N° 22LY03165
lc