Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B..., a demandé au tribunal administratif de Lyon :
1°) d'annuler la décision implicite par laquelle la directrice générale des Hospices civils de Lyon a rejeté sa demande d'indemnisation, et de condamner les Hospices civils de Lyon à lui verser la somme de 1 500 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis ;
2°) d'enjoindre à la directrice générale des Hospices civils de Lyon de statuer à nouveau sur sa situation en vue de le titulariser sur un poste hospitalo-universitaire correspondant à ses diplômes et à son expérience, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge des Hospices civils de Lyon la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1802066 du 15 juin 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 30 juillet 2020, 28 décembre 2021 et le 12 janvier 2022, M. B... représenté par Me Drai-Attal, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 15 juin 2020 ;
2°) d'annuler la décision implicite par laquelle la directrice générale des Hospices civils de Lyon a rejeté sa demande d'indemnisation du 27 novembre 2017 et de condamner les Hospices civils de Lyon à lui verser la somme de 1 500 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis, avec intérêts et capitalisation des intérêts ;
3°) de mettre à la charge des Hospices civils de Lyon une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. B... soutient que :
- le tribunal administratif de Lyon a commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant qu'il ne faisait pas l'objet d'une situation de discrimination ;
- les HCL ont refusé de lui attribuer des vacations disponibles ;
- les HCL ont eu recours abusivement à des contrats à durée déterminée ;
- le traitement administratif de sa carrière est empreint de discrimination ;
- les HCL ont bloqué ses candidatures extérieures ;
- les HCL ont fait le choix délibéré de ne pas le recruter comme praticien hospitalier.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 3 décembre 2021 et le 4 janvier 2022, les Hospices civils de Lyon, représentés par la Selarl Jean-Pierre et Walgenwitz Avocats Associés, agissant par Me Jean-Pierre, concluent au rejet de la requête et demandent que soit mise à la charge de M. B... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Les Hospices civils de Lyon exposent que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 17 mai 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 20 juin 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Fédi, président-assesseur,
- et les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., praticien attaché exerçant ses fonctions de neurochirurgien au sein des Hospices civils de Lyon (HCL), a demandé la condamnation de cet établissement à l'indemniser des préjudices résultant des agissements constitutifs de discrimination, en raison de son origine, dont il estime avoir été victime dans l'exercice de ses fonctions à compter de l'année 2006. Par un jugement du 15 juin 2020 dont il relève appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M. B....
Sur les conclusions à fin d'indemnisation :
2. Aux termes de l'article 6 de la loi du 13 juillet 1983, applicable aux agents non titulaires en vertu de l'article 32 de cette loi : " Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions politiques, syndicales, philosophiques ou religieuses, de leur origine, de leur orientation sexuelle ou identité de genre, de leur âge, de leur patronyme, de leur situation de famille, de leur état de santé, de leur apparence physique, de leur handicap ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la rémunération, la formation, l'évaluation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : 1° Le fait qu'il a subi ou refusé de subir des agissements contraires aux principes énoncés au deuxième alinéa du présent article ; (...) ".
3. Il appartient au juge administratif, dans la conduite de la procédure inquisitoire, de demander aux parties de lui fournir tous les éléments d'appréciation de nature à établir sa conviction. Cette responsabilité doit, dès lors qu'il est soutenu qu'une mesure ou une pratique a pu être empreinte de discrimination, s'exercer en tenant compte des difficultés propres à l'administration de la preuve en ce domaine et des exigences qui s'attachent aux principes à valeur constitutionnelle des droits de la défense et de l'égalité de traitement des personnes. S'il appartient au requérant qui s'estime lésé par une telle mesure de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer une atteinte à ce dernier principe, il incombe au défendeur de produire tous ceux permettant d'établir que la décision attaquée repose sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. La conviction du juge se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
4. En premier lieu, si M. B... soutient les HCL auraient refusé de lui attribuer des vacations disponibles, toutefois ces derniers ont indiqué à l'intéressé, par un courriel du 29 avril 2015, que la situation budgétaire de l'établissement ne permettait pas de compenser tous les postes de " faisant fonction d'interne " non pourvus. En outre, il n'est pas sérieusement contesté, d'une part, que les vacations en cause, attribuées de 2014 à 2018, n'ont pas été confiées à un autre neurochirurgien, alors au demeurant que M. B... ne peut se prévaloir d'un droit à voir sa quotité de travail augmentée, d'autre part, que les praticiens attachés des différents services de neurologie aux HCL n'effectuent pas plus de vacations que M. B.... Enfin, il est constant que l'intéressé a pu effectuer, pendant les années 2014 à 2018, un nombre de gardes plus important que les autres praticiens des différents services de neurologie, notamment en 2016 et 2017, période durant laquelle il est le praticien qui a assuré le plus de gardes au sein du service. Dans ces conditions, il n'est pas établi que M. B... aurait fait l'objet d'un traitement discriminatoire dans la répartition des vacations ou des gardes au sein des Hospices civils de Lyon.
5. En deuxième lieu, si M. B... soutient que les HCL auraient recouru de manière abusive et injustifiée à des contrats à durée déterminée, alors qu'en 2018, il justifiait de dix-huit années d'activités médicales en milieu hospitalier, il résulte de l'instruction qu'il n'a été inscrit au tableau du conseil départemental de l'ordre des médecins du Rhône qu'à compter du 1er juillet 2014 et qu'il n'a pas réussi le concours de praticien hospitalier.
6. En troisième lieu, si M. B... soutient qu'un incident de paiement est intervenu au cours des mois de juillet et août 2013 et qu'il a dû insister à plusieurs reprises pour obtenir le règlement de son traitement, qu'un contrat à durée déterminée ne lui a été remis qu'en septembre 2016 pour la période du 1er juillet 2014 au 30 juin 2017 et que les HCL ont fait preuve de " mutisme " suite à la dénonciation de la situation de discrimination qu'il estime avoir subie, ces circonstances ne révèlent toutefois aucune discrimination à son encontre. De même, s'il se plaint d'avoir sollicité en vain un entretien avec la direction en juillet 2014, il résulte de l'instruction qu'il a été reçu à plusieurs reprises par l'administration et que les nombreuses demandes afférentes à sa situation ont fait l'objet, au cours de la période en cause, de réponses de la part du service, qui lui a en particulier adressé un courrier très détaillé le 28 août 2017.
7. En quatrième lieu, si M. B... soutient que le rejet de ses candidatures dans d'autres établissements serait imputable aux Hospices civils de Lyon, qui auraient communiqué des informations défavorables le concernant, aucun des éléments qu'il produit ne permet de l'établir. En particulier, il résulte de l'instruction que si sa candidature en qualité de praticien attaché contractuel à temps plein au centre hospitalier de Besançon à compter du 2 avril 2018, a été retenue, l'appelant a finalement renoncé à ce poste.
8. En cinquième et dernier lieu, M. B... soutient également que les Hospices civils de Lyon ont fait le choix délibéré de ne pas le recruter comme praticien hospitalier, alors que depuis 2013, quatre postes de neurochirurgien ont été ouverts et que sa candidature n'a pas été retenue. S'agissant du poste de chef de service de neuropsychiatrie pédiatrique ouvert en 2014, les HCL font valoir, sans être sérieusement contredits, que M. B... n'a présenté sa candidature que le 25 novembre 2014, soit le jour même où se déroulait la commission d'audition, alors que l'appel à candidatures précisait que les candidats devaient adresser un dossier à la direction des affaires médicales avant le 30 septembre 2014 et alors que le poste a été attribué à M. D... qui dispose, à l'inverse de M. B..., de compétences en pédiatrie. De même, s'il est soutenu que le poste de praticien hospitalier dans le service du docteur A...... serait resté vacant plus d'un an, avec comme seule candidature celle de M. B... et que le poste a finalement été pourvu par mutation du docteur A......, il résulte de l'instruction que ce dernier a effectué 967 interventions chirurgicales du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2018, contre seulement 128 pour M. B.... En outre, la circonstance, à la supposer établie, qu'après le départ du docteur A..., qui occupait un poste en neurochirurgie fonctionnelle, chirurgie de l'épilepsie, créé au début de l'année 2018, le poste serait resté vacant quelques semaines puis aurait été supprimé, n'est pas suffisante pour faire présumer que la mesure présenterait un caractère discriminatoire. Par suite, alors qu'il est constant que M. B... ne s'est pas présenté au concours de praticien hospitalier et que les neurochirurgiens qui ont été recrutés sur les postes de praticien hospitalier à compter de 2014 disposaient de la spécialisation requise, les arguments avancés par l'appelant ne permettent pas de considérer que son absence de recrutement, comme praticien hospitalier, reposerait sur des motifs entachés de discrimination.
9. Il résulte de tout ce qui précède que les éléments de fait dont se prévaut M. B... ne sont pas susceptibles de faire présumer l'existence d'une situation de discrimination directe ou indirecte. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge des Hospices civils de Lyon, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. B.... Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce dernier une somme de 1 000 euros à verser aux Hospices civils de Lyon au titre de ces mêmes dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : M. B... versera aux Hospices civils de Lyon une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... B... et aux Hospices civils de Lyon.
Délibéré après l'audience du 14 février 2023, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,
M. Gilles Fédi, président-assesseur,
Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er mars 2023.
Le rapporteur,
Gilles FédiLe président,
Jean-Yves TallecLa greffière,
Sandra Bertrand
La République mande et ordonne à la préfète du Rhône ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
2
N° 20LY02112