Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme A... B..., agissant par l'intermédiaire de sa tutrice, Mme D... C..., a demandé au tribunal administratif de Lyon, le cas échéant après avoir ordonné une expertise, d'une part, de condamner la commune de Groslée-Saint-Benoît à lui verser la somme de 373 000 euros en réparation des préjudices subis du fait de la carence du maire de la commune à user de ses pouvoirs de police pour maintenir une desserte de son fonds et, d'autre part, d'enjoindre au maire de prendre les mesures de police propres à rétablir l'accès à sa propriété.
Par jugement n° 1909202 du 6 avril 2021, le tribunal a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par requête enregistrée le 7 juin 2021, Mme B..., représentée par Me Tardieu, demande à la cour, le cas échéant après avoir ordonné une expertise :
1°) d'annuler ce jugement du 6 avril 2021 ;
2°) de condamner la commune de Groslée-Saint-Benoît à lui verser la somme de 397 000 euros ;
3°) d'enjoindre au maire de Groslée-Saint-Benoît de faire usage de ses pouvoirs de police afin de rétablir l'accès à sa propriété ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Groslée-Saint-Benoît une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a estimé que ses parcelles ne bénéficiaient pas d'un accès direct sur la voie publique, alors qu'elles sont desservies par la rue des Cours qui est une voie communale, bouchée au niveau de la rue Neuve et au niveau de sa propriété puis au niveau de la route de la Sauge par l'édification de murs de clôture ou de portails ;
- la circonstance que le maire ne se soit pas opposé ou ait autorisé de telles constructions sur la rue des Cours, laquelle relève du domaine public, constitue une faute dans l'exercice de ses pouvoirs de police générale qu'il tient du 1° de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, ou de ses pouvoirs de police en matière d'urbanisme ;
- le lien de causalité entre les carences du maire dans l'exercice de ses pouvoirs de police et l'enclavement de ses propriétés est établi ;
- en conséquence de l'impossibilité d'accéder à sa propriété depuis 13 ans, son préjudice se chiffre à un montant global de 397 000 euros, dont 2 000 euros de frais d'avocats, 10 000 euros au titre de son préjudice moral, 229 000 euros à parfaire de perte de valeur vénale et 156 000 euros au titre de trouble de jouissance.
Par mémoires enregistrés les 7 septembre et 22 novembre 2021, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la commune de Groslée-Saint-Benoît, représentée par Me Rossi, conclut au rejet de la requête et à ce que Mme B... lui verse une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- les propriétés en cause ne disposent d'aucun accès sur la voie publique, de telle sorte que le maire n'est pas habilité à user de ses pouvoirs de police pour rétablir un accès au bénéfice de la parcelle de la requérante ;
- les conclusions indemnitaires doivent être rejetées, la responsabilité de la commune ne pouvant être engagée.
Par ordonnance du 24 octobre 2022, prise en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, la clôture d'instruction a été fixée au 9 novembre suivant.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de la voirie routière ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Christine Psilakis, première conseillère,
- les conclusions de M. Bertrand Savouré, rapporteur public,
- et les observations de Me Tardieu pour Mme B... et celles de Me Gras pour la commune de Groslée-Saint-Benoît ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... a constaté, après une absence prolongée, que ses parcelles cadastrées section G n° 104 et n° 105 au lieu-dit la Sauge Ouest sur le territoire de la commune de Groslée-Saint-Benoît avaient été enclavées après que les propriétaires privés riverains eurent posé des barrières ou construit des murs sur les emprises qui lui servaient d'accès. Elle a demandé au maire de rétablir un cheminement jusqu'à sa propriété, notamment par la rue des Cours. Après refus de celui-ci, elle a demandé à la commune, par courrier notifié le 27 juillet 2019, à être indemnisée de préjudices nés de la carence du maire dans l'exercice de ses pouvoirs de police. Elle relève appel du jugement du jugement du 6 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes de condamnation de la commune de Groslée-Saint-Benoît et d'injonction en rétablissement de l'accès à sa propriété.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 111-1 du code de la voirie routière : " Le domaine public routier comprend l'ensemble des biens du domaine public (...) des communes, affectés aux besoins de la circulation terrestre (...) ". Au terme de l'article L. 141-3 du même code : " Le classement et le déclassement des voies communales sont prononcés par le conseil municipal. Ce dernier est également compétent pour (...) l'ouverture, le redressement et l'élargissement des voies ".
3. Il résulte des pièces versées au dossier que sont identifiées comme voies communales, au sens des dispositions précitées, la rue Neuve, la rue de la Sauge ainsi que la section de la rue des Cours comprise entre, d'une part, l'intersection de la route de la Sauge et de la rue de Cafetière et, d'autre part, la limite de la parcelle cadastrée section ..., appartenant à un tiers. Les deux parcelles de Mme B..., bordées par des propriétés privées, ne sont desservies par aucune voie domaniale ou ouverte à la circulation publique. Ne saurait avoir ce statut l'emprise que Mme B... empruntait, à titre individuel, pour accéder à son fonds sur les parcelles ... ou ..., et l'implantation sur l'une des parcelles riveraines d'un éclairage de type mobilier urbain dont rien ne confirme qu'elle serait propriété publique, ne révèle pas l'existence du prolongement d'une voie publique jusqu'à la propriété de la requérante. Dans ces conditions, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que l'enclavement de ses parcelles résulterait d'autorisations d'urbanisme délivrées illégalement sur les emprises du domaine public routier communal.
4. En second lieu, Mme B... réitère en appel sans y ajouter de nouveaux développements son moyen tiré des carences du maire de Groslée-Saint-Benoît dans l'exercice des pouvoirs de police qu'il tient de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales. Il convient d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal, au point 5 du jugement.
5. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande indemnitaire et, par voie de conséquence, sa demande d'injonction. Sans qu'il soit besoin d'ordonner d'expertise, les conclusions de la requête tendant aux mêmes fins doivent être rejetées.
6. Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par Mme B..., partie perdante, doivent être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées aux mêmes fins par la commune de Groslée-Saint-Benoît.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Groslée-Saint-Benoît au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C..., tutrice de Mme A... B..., et à la commune de Groslée-Saint-Benoît.
Délibéré après l'audience du 26 janvier 2023 à laquelle siégeaient :
M. Philippe Arbaretaz, président
Mme Aline Evrard, présidente-assesseure,
Mme Christine Psilakis, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 février 2023.
La rapporteure,
Christine Psilakis
Le président,
Philippe Arbarétaz
Le greffier,
Julien Billot
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
Le greffier,
2
N° 21LY01819