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23/02/2023 | FRANCE | N°21LY01774

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 23 février 2023, 21LY01774


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision du 30 juillet 2018 par laquelle le maire de la commune d'Aulnat a refusé de le réintégrer dans son ancien poste de responsable de la restauration, d'enjoindre sous astreinte au maire de le réintégrer dans un délai de huit jours, et de mettre à la charge de la commune d'Aulnat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1801633 du 8 avril 2021, l

e tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses demandes.

Procédure...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision du 30 juillet 2018 par laquelle le maire de la commune d'Aulnat a refusé de le réintégrer dans son ancien poste de responsable de la restauration, d'enjoindre sous astreinte au maire de le réintégrer dans un délai de huit jours, et de mettre à la charge de la commune d'Aulnat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1801633 du 8 avril 2021, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 juin 2021 et le 25 janvier 2022, M. A..., représenté par la SCP Canis et Associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et la décision du 30 juillet 2018 ;

2°) d'enjoindre au maire de la commune d'Aulnat de le réintégrer dans ses fonctions antérieures, dans un délai de huit jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Aulnat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa demande de première instance est recevable ;

- il n'a pas eu de comportement de nature à justifier un déplacement de son poste initial vers les services techniques et ce changement d'affectation n'est dès lors pas justifié ;

- s'il s'agit d'une sanction, elle est disproportionnée et injustifiée, au vu notamment de l'avis du conseil de discipline, dès lors qu'il a seulement dénoncé le harcèlement sexuel auquel se livrait le second de cuisine ;

- s'il s'agit d'une mesure d'ordre intérieur prise dans l'intérêt du service, elle procède d'une erreur manifeste d'appréciation, seul le comportement de son second de cuisine étant de nature à justifier un changement d'affectation.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 26 juillet 2021 et le 7 mars 2022, la commune d'Aulnat, représentée par la Selarl DMMJB Avocats, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de M. A... une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la contestation du refus de réintégration au sein du service antérieur est dirigée contre une mesure d'ordre intérieur insusceptible de recours et, par suite, irrecevable ; elle tend par ailleurs à contourner la tardiveté d'une demande dirigée contre la mesure initiale ;

- les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 23 septembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 11 octobre 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bourrachot, président,

- les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique,

- et les observations de Me Martins Silva, représentant la commune d'Aulnat ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., titulaire du grade d'adjoint technique et affecté depuis le 1er mars 2010 au restaurant municipal de la commune d'Aulnat, en qualité de responsable, a été suspendu de ses fonctions à compter du 22 janvier 2018, à la suite d'une altercation verbale avec son second de cuisine survenue le 8 janvier 2018, puis réaffecté aux services techniques à compter du 26 février 2018, ce dont il a été informé par courrier du 23 février 2018. M. A... a formé le 5 mars 2018 un recours gracieux par lequel il demandait à reprendre ses fonctions antérieures, demande réitérée par un courrier de mise en demeure du 12 juin 2018. Par courrier du 30 juillet 2018, le maire d'Aulnat a rejeté la demande de réintégration de M. A... dans le service de restauration. M. A... relève appel du jugement du 8 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 30 juillet 2018.

2. Aux termes de l'article 52 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " L'autorité territoriale procède aux mouvements des fonctionnaires au sein de la collectivité ou de l'établissement ".

3. Un changement d'affectation dans l'intérêt du service décidé par l'autorité territoriale, alors même que, compte tenu de ses effets, il ne pourrait être qualifié de simple mesure d'ordre intérieur, ne constitue pas en principe une sanction ayant le caractère d'une punition, sauf s'il est établi que l'auteur de l'acte a eu l'intention de sanctionner l'agent et que la décision a porté atteinte à la situation professionnelle de ce dernier.

4. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la mutation dans l'intérêt du service de M. A... aux services techniques à compter du 26 février 2018, qui a donné lieu le 27 avril 2018 à un avis favorable de la commission administrative paritaire, emporte pour lui une perte de responsabilités ainsi qu'une perte de rémunération dont la commune, si elle en discute l'ampleur, au demeurant sans assortir ses allégations de la moindre précision, ne conteste pas la réalité. Cette mesure, dont les effets excluent ainsi au demeurant la qualification de mesure d'ordre intérieur, a dès lors porté atteinte à la situation professionnelle de M. A....

5. Toutefois, il ressort également des pièces du dossier que M. A..., alors responsable du restaurant municipal, a eu, le 8 janvier 2018, une altercation verbale avec son second de cuisine, en présence d'employées du service, ayant pour origine une allusion maladroitement faite par le requérant au contenu d'échanges à caractère confidentiel qui s'étaient tenus auparavant lors de l'entretien professionnel de l'une des employées présente, et relatifs aux gestes particulièrement déplacés de son second de cuisine envers le personnel féminin du restaurant municipal, dont M. A... estimait qu'ils étaient susceptibles de recevoir la qualification de harcèlement sexuel ou d'agression sexuelle. Il n'est pas contesté que, dans ces conditions, l'intérêt du service exigeait de séparer durablement M. A... et son second de cuisine. M. A... ne conteste par ailleurs utilement ni que son grade permettait sa réaffectation au sein des services techniques, dont les missions concourent par ailleurs, comme celle du restaurant municipal, à l'intérêt général, ni que cette affectation permettait notamment d'améliorer la réactivité des services techniques et répondait ainsi à un besoin réel. Contrairement à ce que soutient M. A..., il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le maire de la commune d'Aulnat, lequel a certes engagé à l'encontre du requérant une procédure disciplinaire concomitamment à sa mutation, aurait, à quelque moment que ce soit, eu l'intention de le sanctionner pour avoir dénoncé le comportement inapproprié de son second de cuisine. Il ressort en particulier suffisamment de l'avis émis par le conseil de discipline que le maire, qui a finalement renoncé à prononcer la sanction de blâme proposée par le conseil, faisait uniquement grief à M. A... de ne pas avoir respecté la confidentialité des échanges tenus lors d'un entretien professionnel et d'avoir directement pris à partie son collaborateur. L'intention du maire de sanctionner M. A... en prononçant son changement d'affectation ou en refusant sa réaffectation n'étant pas établie, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée, prise dans l'intérêt du service, serait constitutive d'une sanction disciplinaire déguisée. Compte tenu des progrès déjà demandés antérieurement à M. A..., lors de ses entretiens professionnels, en matière de gestion du personnel, son changement d'affectation dans l'intérêt du service n'apparaît pas davantage entaché d'erreur manifeste d'appréciation, malgré les qualités qui lui étaient par ailleurs reconnues dans d'autres domaines. La circonstance, pour regrettable qu'elle soit, que la commune n'aurait pas pris de mesure appropriée à l'encontre du second de cuisine ne peut enfin que demeurer sans influence sur la légalité des mesures prises à l'égard de M. A....

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la demande de première instance, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses demandes. Les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées pour M. A... doivent être rejetées par voie de conséquence.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune d'Aulnat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. A... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux demandes présentées au même titre par la commune d'Aulnat.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune d'Aulnat tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune d'Aulnat.

Délibéré après l'audience du 2 février 2023, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 février 2023.

Le président-rapporteur,

F. BourrachotLa présidente assesseure,

P. Dèche

La greffière,

A-C. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY01774

lc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY01774
Date de la décision : 23/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-01-02 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Affectation et mutation. - Mutation.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. François BOURRACHOT
Rapporteur public ?: Mme LE FRAPPER
Avocat(s) : DMMJB AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-02-23;21ly01774 ?
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