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15/02/2023 | FRANCE | N°22LY02010

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 15 février 2023, 22LY02010


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 23 mai 2022 par lesquelles le préfet de la Côte-d'Or lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement et l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 2201374 du 2 juin 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Dijon a, après avoir admis M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, rejet

é cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 1er juillet ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 23 mai 2022 par lesquelles le préfet de la Côte-d'Or lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement et l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 2201374 du 2 juin 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Dijon a, après avoir admis M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 1er juillet 2022, M. B..., représenté par Me Lukec, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 2 juin 2022 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Dijon ;

2°) d'annuler les décisions du préfet de la Côte-d'Or du 23 mai 2022 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son avocate de la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé, en ce qu'il écarte le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- cette décision méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et procède d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le préfet n'a pas préalablement examiné la possibilité de déroger à la réglementation ;

En ce qui concerne l'assignation à résidence :

- elle n'est pas justifiée et est disproportionnée, eu égard notamment à ses garanties de représentation et à la contrainte résultant de l'obligation de se présenter quotidiennement aux services de police.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 novembre 2022, le préfet de la Côte-d'Or, représenté par Me Cano (SELARL Centaure avocats), avocat, conclut au rejet de la requête.

Il expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 octobre 2022.

Par une ordonnance du 28 novembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 décembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B... relève appel du jugement du 2 juin 2022 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Côte-d'Or du 23 mai 2022 lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai et l'assignant à résidence.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Contrairement à ce que prétend M. B..., la première juge a, au point 10 de son jugement, répondu avec précision au moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le jugement attaqué est, par suite, suffisamment motivé.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français sans délai :

3. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) ".

4. M. B..., ressortissant marocain né le 3 décembre 1984, a été autorisé à séjourner ponctuellement en France, à compter du 7 août 2014 en qualité de travailleur saisonnier. S'il s'y est établi durablement, en méconnaissance des restrictions inhérentes au titre de séjour dont il bénéficiait alors, à compter de 2018, il n'y résidait habituellement que depuis quatre ans à la date de la décision litigieuse. S'il est marié, depuis le 26 janvier 2019, avec une compatriote, titulaire en France d'une carte de résident, avec laquelle il a eu deux enfants nés le 13 juillet 2019 et le 5 février 2022, il n'établit nullement, eu égard notamment au bas âge de leurs enfants, l'existence d'un obstacle à ce que leur cellule familiale se reconstitue dans leur pays d'origine. Si certains membres de sa fratrie résident également en France, M. B... ne conteste pas ne pas être dépourvu d'attaches privées et familiales dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-trois ans et où demeurent, à tout le moins, deux de ses frères, d'après ses déclarations. Enfin, à défaut de tout certificat médical en ce sens, il ne démontre ni la nécessité qu'il reçoive un traitement médical, ni l'indisponibilité d'un tel traitement dans son pays d'origine. Dans ces circonstances, M. B..., qui ne peut se prévaloir d'une réelle intégration par sa seule activité bénévole succincte, n'est pas fondé à soutenir qu'en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet de la Côte-d'Or a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnu les stipulations précitées.

5. En deuxième lieu, pour ces mêmes motifs, le préfet de la Côte-d'Or, qui n'était pas tenu d'indiquer, dans la décision litigieuse, les motifs pour lesquels il n'a pas entendu faire usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation et dont il n'est pas établi qu'il n'aurait pas examiné cette éventualité, n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. B....

6. En troisième lieu, si, lorsque la loi prescrit l'attribution de plein droit d'un titre de séjour à un étranger, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français, M. B... ne peut, pour les motifs indiqués au point 4, prétendre à la délivrance de plein droit d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, depuis repris à l'article L. 423-23 du même code. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit donc être écarté.

Sur la légalité de l'assignation à résidence :

7. Aux termes de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants : 1° L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins d'un an auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé (...) ". L'article L. 733-1 de ce code précise que : " L'étranger assigné à résidence en application du présent titre se présente périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie ". Enfin, selon l'article L. 731-2 du même code : " L'étranger assigné à résidence en application de l'article L. 731-1 peut être placé en rétention en application de l'article L. 741-1, lorsqu'il ne présente plus de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement (...) ".

8. En premier lieu, il résulte de la combinaison de ces dispositions que la justification de garanties de représentation constitue une condition préalable à l'adoption d'une mesure d'assignation à résidence et ne saurait, dès lors, faire obstacle à ce qu'une telle mesure soit prononcée à l'encontre de l'intéressé. Par suite, M. B..., qui a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français moins d'un an auparavant, ne peut utilement se prévaloir de ses garanties de représentation, et notamment de son domicile, pour contester la décision litigieuse.

9. En second lieu, l'exigence que l'intéressé se présente régulièrement aux services de police ou de gendarmerie est applicable à toute assignation à résidence prise en application du titre III du livre VII du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en vertu de l'article L. 733-1 de ce code. En l'absence de preuve de la reprise d'une activité professionnelle par son épouse et du caractère excessif de la distance à parcourir, M. B... ne démontre pas le caractère disproportionné de l'obligation de présentation ainsi prescrite. A le supposer soulevé, le moyen tiré du caractère disproportionné de cette obligation ne peut dès lors qu'être écarté.

10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

11. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions présentées en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.

Délibéré après l'audience du 24 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2023.

La rapporteure,

Sophie CorvellecLe président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Sandra Bertrand

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

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N°22LY02010


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY02010
Date de la décision : 15/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : LUKEC

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-02-15;22ly02010 ?
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