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15/02/2023 | FRANCE | N°21LY01513

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 15 février 2023, 21LY01513


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

I. Par une requête n° 2001710, Mme B... C..., veuve A... D..., a demandé au tribunal administratif de Dijon :

1°) d'annuler la décision implicite de refus opposée par le préfet de la Côte-d'Or à sa demande de titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir ou, à dé

faut, de réexaminer sa situation, dans le même délai.

II. Par une requête n° 2002686, Mme B... ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

I. Par une requête n° 2001710, Mme B... C..., veuve A... D..., a demandé au tribunal administratif de Dijon :

1°) d'annuler la décision implicite de refus opposée par le préfet de la Côte-d'Or à sa demande de titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation, dans le même délai.

II. Par une requête n° 2002686, Mme B... C..., veuve A... D..., a demandé au tribunal administratif de Dijon :

1°) d'annuler l'arrêté du 10 septembre 2020 par lequel le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel elle pourra être renvoyée d'office ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation, dans le même délai et sous la même astreinte.

Par un jugement n° 2001710-2002686 du 8 avril 2021, le tribunal administratif de Dijon a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 10 mai 2021, Mme A... D..., représentée par Me Grenier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 8 avril 2021 du tribunal administratif de Dijon ;

2°) d'annuler l'arrêté du 10 septembre 2020 par lequel le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel elle pourra être renvoyée d'office ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation, dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 2 000 euros, à verser à son conseil sur le fondement de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; cette décision est entachée d'un vice de procédure en ce que le préfet n'a pas saisi la commission du titre de séjour en violation de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 décembre 2021, le préfet de la Côte-d'Or, représenté par Me Cano, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de Mme A... D... la somme de 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens présentés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Fédi, président-assesseur,

- et les observations de Me Augoyard, représentant le préfet de la Côte-d'Or.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... D..., née C..., ressortissante marocaine née le 1er janvier 1943, est entrée en France le 3 janvier 2019, sous couvert d'un visa de court séjour à entrées multiples. Elle a sollicité le 15 septembre 2019 un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Par des courriers datés du 7 janvier et du 20 février 2020, Mme A... D... a réitéré sa demande de titre de séjour. Le silence du préfet de la Côte-d'Or a fait naître une décision implicite de refus. Puis par un arrêté du 10 septembre 2020, le préfet de la Côte-d'Or a explicitement refusé la délivrance du titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel l'intéressée pourra être renvoyée d'office. Mme A... D... fait appel du jugement du tribunal administratif de Dijon du 8 avril 2021 qui a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces décisions préfectorales.

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour en France des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : [...] 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

3. Mme A... D..., âgée de soixante-dix-sept ans à la date de la décision attaquée, est hébergée depuis 2019 par l'un de ses fils et l'épouse de celui-ci, ressortissants français, après des séjours réguliers entre 2016 et 2018. Elle fait valoir, comme elle l'a fait d'ailleurs devant les premiers juges, qu'elle est isolée dans son pays d'origine, où résident trois de ses enfants avec lesquels elle indique ne pas avoir de contact, qu'elle souffre de multiples pathologies qui nécessitent un accompagnement quotidien et qu'elle est totalement prise en charge par son fils M. F... A... D..., qui dispose, avec son épouse d'un revenu mensuel moyen de plus de 2 500 euros, depuis son entrée en France et même avant, alors qu'elle résidait au Maroc et plus particulièrement depuis le décès de son conjoint en 2015. Toutefois, si un certificat médical d'un médecin généraliste évoque sa perte d'autonomie et son besoin d'être assistée en permanence, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'appelante souffre de problèmes de santé nécessitant sa présence en France. La perte de tout contact avec ses trois enfants résidant au Maroc n'est pas davantage établie et il en va de même de l'allégation selon laquelle elle aurait été totalement prise en charge par son fils depuis plusieurs années. Ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision de refus de séjour en litige n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Elle n'a ainsi méconnu ni les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet de la Côte-d'Or n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

4. Puisqu'il n'est pas établi que Mme A... D... remplirait les conditions de délivrance de plein droit du titre de séjour régi par l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de la Côte-d'Or a donc pu, sans méconnaître les dispositions des articles L. 312-2 et R. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, s'abstenir de saisir la commission du titre de séjour.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

5. Il résulte de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé, que Mme A... D... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français.

6. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points précédents, la décision obligeant Mme A... D... à quitter le territoire français n'a pas été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme A... D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté ses demandes.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par Mme A... D.... Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière le paiement des frais exposés par l'Etat au titre de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... D... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du préfet de la Côte-d'Or présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... veuve A... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.

Délibéré après l'audience du 24 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2023.

Le rapporteur,

Gilles Fédi

Le président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Sandra Bertrand

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY01513


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY01513
Date de la décision : 15/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Gilles FEDI
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : GRENIER

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-02-15;21ly01513 ?
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