Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris, qui a transmis sa demande au tribunal administratif de Lyon en application de l'article R. 351-3 du code de justice administrative, d'annuler l'arrêté du 30 janvier 2019 par lequel la directrice générale du Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière (CNG) a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident survenu le 9 février 2018, d'enjoindre à la directrice générale du CNG de reconnaître l'imputabilité au service de son accident et de mettre à la charge du CNG la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1902639 du 16 septembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 22 novembre 2020 et un mémoire en réplique, enregistré le 28 avril 2022, qui n'a pas été communiqué, M. A..., représenté par Me Debrenne, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 16 septembre 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 30 janvier 2019 ;
3°) de mettre une somme de 3 000 euros à la charge des défendeurs au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, la décision attaquée est entachée d'un défaut de motivation ; l'avis de la commission de réforme hospitalière du Rhône souffre du même vice ;
- l'avis de la commission de réforme hospitalière du Rhône a été rendu au terme d'une procédure irrégulière, en l'absence d'expertise médicale, alors que le médecin du travail a rendu son rapport sans l'avoir rencontré ; il ne s'est pas volontairement soustrait à cette commission mais n'était simplement pas en capacité de s'y présenter ; la commission de réforme départementale ne comportait pas de psychiatre ;
- l'imputabilité est présumée en vertu de l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; le CNG ne démontre ni faute, ni autre circonstance particulière détachant l'accident du service, " l'état préexistant " n'étant d'ailleurs pas défini ; la CNG ne pouvait pas avoir connaissance de son état anxio-dépressif au moment de sa décision ; son hospitalisation est bien consécutive à l'accident de service et non à son " état antérieur " ;
- c'est à tort que les premiers juges ont retenu que les conditions de sa mutation ne seraient pas à l'origine de la " pathologie " dont il souffre ; au demeurant, le litige concerne l'imputabilité au service de l'accident survenu le 9 février 2018 ;
- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que les faits en cause n'étaient pas constitutifs de harcèlement moral.
Par un mémoire en observations, enregistré le 6 juillet 2021, les Hospices civils de Lyon, représentés par la SELARL Jean-Pierre et Walgenwitz avocats associés, agissant par Me Walgenwitz, concluent au rejet de la requête.
Ils soutiennent que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 mars 2022, le Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 29 mars 2022, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 2 mai 2022.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
- l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 ;
- le décret n° 2020-566 du 13 mai 2020 ;
- l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère,
- et les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A... a été nommé et titularisé dans le corps des directeurs d'hôpital à compter du 1er avril 2000. Par un arrêté de la directrice générale du centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière (CNG) du 23 décembre 2016, il a été mis fin à la disponibilité pour convenance personnelle de M. A..., qui a été réintégré, à compter de la même date, à l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris et affecté au centre hospitalier des Escartons de Briançon (CHEB) en qualité de directeur adjoint chargé des affaires financières et des ressources matérielles. Par une décision du 26 septembre 2017, la directrice générale du CNG a prononcé la suspension des fonctions de l'intéressé à titre conservatoire. Après avis de la CAP nationale compétente à l'égard du corps de directeur d'hôpital, par deux arrêtés du 31 janvier 2018, la directrice générale du CNG lui a infligé un blâme et a prononcé sa mutation dans l'intérêt du service, à compter du 9 février 2018, sur un poste de directeur adjoint aux Hospices civils de Lyon (HCL). Le jour de son installation aux HCL, M. A... a fait deux malaises et sera, consécutivement, hospitalisé en clinique spécialisée. Par une déclaration d'accident du 20 février 2018, le requérant a demandé que ses malaises soient considérés comme imputables au service. Après avis défavorable de la commission de réforme lors de sa séance du 14 juin 2018, la directrice générale du CNG, par un arrêté du 23 août 2018, puis un arrêté modificatif du 30 janvier 2019, a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident survenu le 9 février 2018. M. A... relève appel du jugement du 16 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 janvier 2019.
Sur la légalité de l'arrêté du 30 janvier 2019 :
2. En premier lieu, M. A... réitère en appel, sans l'assortir d'éléments nouveaux, son moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté en litige. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
3. En deuxième lieu, M. A... soutient que l'avis émis le 14 juin 2018 par la commission de réforme comporte plusieurs irrégularités de nature à entacher la légalité de la décision en litige.
4. D'une part, aux termes de l'article 17 de l'arrêté susvisé du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " Les avis sont émis à la majorité des membres présents. Ils doivent être motivés, dans le respect du secret médical ". Si M. A... soutient que la commission n'aurait pas suffisamment précisé les éléments retenus pour fonder ses conclusions, l'avis en litige est suffisamment motivé par les mentions que " il existe un état antérieur et les médecins de la commission estiment que les critères d'imputabilité d'un AS ne sont pas réunis (absence de fait générateur avéré) ".
5. D'autre part, aux termes de l'article 16 du même arrêté du 4 août 2004 : " La commission de réforme doit être saisie de tous témoignages, rapports et constatations propres à éclairer son avis. Elle peut faire procéder à toutes mesures d'instructions, enquêtes et expertises qu'elle estime nécessaires (...) ".
6. Si M. A... n'a pas été en capacité de se déplacer pour se rendre aux rendez-vous proposés par le service de médecine statutaire, le médecin agréé a rendu son rapport du 14 mars 2018 sur la base d'un dossier complet, comprenant notamment la fiche d'observation du centre hospitalier Saint Joseph Saint Luc ainsi que le certificat médical récapitulatif du médecin traitant du requérant. Elle n'était pas tenue d'ordonner une expertise en vertu des dispositions citées au point précédent.
7. Enfin, aux termes de l'article 3 du même arrêté du 4 août 2004, la commission de réforme comprend : " 1. Deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, s'il y a lieu, pour l'examen des cas relevant de sa compétence, un médecin spécialiste qui participe aux débats mais ne prend pas part aux votes (...) ". Il résulte de ces dispositions que, dans le cas où il est manifeste, eu égard aux éléments dont dispose la commission de réforme, que la présence d'un médecin spécialiste de la pathologie invoquée est nécessaire pour éclairer l'examen du cas du fonctionnaire, l'absence d'un tel spécialiste est susceptible de priver l'intéressé d'une garantie et d'entacher ainsi la procédure devant la commission d'une irrégularité justifiant l'annulation de la décision contestée.
8. Il ressort des pièces du dossier que la commission de réforme a rendu son avis sur la base d'un dossier comprenant la déclaration d'accident de service du requérant, le témoignage de son mari, le rapport administratif d'imputabilité au service signé par le directeur du personnel et des affaires sociales des HCL ainsi que le rapport chronologique sur la prise de fonction de M. A... aux HCL le 9 février 2018, signé par le directeur adjoint et le secrétaire général, ainsi que les conclusions du médecin agréé. Compte tenu de ce qui a été dit au point 6, eu égard aux différents éléments d'information dont disposait la commission de réforme, il ne ressort pas manifestement des éléments du dossier que la présence d'un médecin psychiatre était nécessaire lors du passage de M. A... devant la commission de réforme.
9. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure suivie devant la commission de réforme doit être écarté.
10. En troisième lieu, l'application des dispositions de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique est manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant, notamment, les conditions de procédure applicables à l'octroi du nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. L'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 n'est donc entré en vigueur, en tant qu'il s'applique à la fonction publique hospitalière, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 16 mai 2020, du décret n° 2020-566 du 13 mai 2020 par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique. Il en résulte que, compte tenu de la date à laquelle M. A... a déposé sa déclaration d'accident, avant l'entrée en vigueur de ce décret, les dispositions de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 sont seules applicables.
11. Constitue un accident de service un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. Sauf à ce qu'il soit établi qu'il aurait donné lieu à un comportement ou à des propos excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique, lequel peut conduire le supérieur hiérarchique à adresser aux agents des recommandations, remarques, reproches ou à prendre à leur encontre des mesures disciplinaires, un entretien, notamment d'évaluation, entre un agent et son supérieur hiérarchique, ne saurait être regardé comme un événement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service, quels que soient les effets qu'il a pu produire sur l'agent.
12. Il ressort de la déclaration d'accident du 20 février 2018 que M. A... a déclaré avoir été victime d'un accident de service le 9 février 2018 à 12 h 25 minutes. Cette déclaration fait état d'un malaise et d'un état anxio-dépressif sévère. M. A... expose qu'au cours de cet entretien, ses interlocuteurs ont fait preuve de froideur à son égard et auraient tenu des propos provocateurs et intimidants. Toutefois, il n'est pas établi qu'au cours de l'entretien d'accueil qui a eu lieu, le 9 février 2018, et à l'occasion duquel lui ont été remis divers documents, en particulier son profil de poste, le secrétaire général des HCL ou le directeur adjoint chargé du pôle efficience et performance de cet établissement, auraient tenu des propos ou adopté un comportement qui auraient excédé l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. Le rapport chronologique sur la prise de fonction de M. A... aux HCL le 9 février 2018, signé par le directeur adjoint et le secrétaire général, fait quant à lui état de la nervosité et de l'agressivité de M. A..., qui a d'ailleurs fait un premier malaise dès son arrivée dans les locaux des HCL, avant même le début de l'entretien au cours duquel un second malaise est intervenu.
13. M. A... soutient que l'accident serait la conséquence directe de la mutation d'office, qu'il n'a pas contestée au contentieux, et des conditions dans lesquelles elle s'est déroulée. Toutefois, l'imputabilité de l'état anxio-dépressif de l'intéressé consécutivement à cette mutation, dont la demande devrait être présentée auprès de son ancienne administration, et releverait de l'examen d'une autre commission de réforme territorialement compétente, est étrangère à l'objet du litige, portant seulement sur la déclaration d'accident de service de l'intéressé en lien avec l'entretien d'accueil du 9 février 2018. M. A... souffrait d'un état anxio dépressif avant sa prise de fonctions aux HCL, ce qu'il admet en faisant inutilement valoir que la commission n'avait pas connaissance du certificat médical récapitulatif de son médecin traitant le mentionnant. La circonstance que M. A... a dû être hospitalisé en urgence en clinique spécialisée après l'entretien du 9 février 2018, n'est pas, par elle-même, de nature à établir qu'il aurait été victime d'un accident de service.
14. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Sa requête doit, dès lors, être rejetée ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au centre de gestion des praticiens hospitaliers et de personnels de direction de la fonction publique hospitalière.
Copie en sera adressée aux Hospices civils de Lyon.
Délibéré après l'audience du 10 janvier 2023 à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président,
M. Gilles Fédi, président-assesseur,
Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 janvier 2023.
La rapporteure,
Bénédicte LordonnéLe président,
Jean-Yves Tallec
La greffière,
Sandra Bertrand
La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 20LY03394