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22/12/2022 | FRANCE | N°21LY00384

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 22 décembre 2022, 21LY00384


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Axo, devenue la société Girod Médias, a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 25 juillet 2017 par laquelle le président de Thonon Agglomération a refusé d'abroger le règlement local de publicité de la commune de Thonon-les-Bains et d'annuler, en ce qui concerne les zones de publicité restreinte (Z.P.R.) 1 et 2, les articles 1 à 3 et, en ce qui concerne la Z.P.R.3, les articles 1 et 3 du règlement local de publicité approuvé le 14 décembre 2016 par délib

ration du conseil municipal de Thonon-les-Bains.

Par un jugement n° 1705491 du 8...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Axo, devenue la société Girod Médias, a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 25 juillet 2017 par laquelle le président de Thonon Agglomération a refusé d'abroger le règlement local de publicité de la commune de Thonon-les-Bains et d'annuler, en ce qui concerne les zones de publicité restreinte (Z.P.R.) 1 et 2, les articles 1 à 3 et, en ce qui concerne la Z.P.R.3, les articles 1 et 3 du règlement local de publicité approuvé le 14 décembre 2016 par délibération du conseil municipal de Thonon-les-Bains.

Par un jugement n° 1705491 du 8 décembre 2020, le tribunal a annulé le règlement local de publicité approuvé le 14 décembre 2016 en tant qu'il instaure une règle de densité publicitaire discriminante entre les dispositifs situés sur le domaine public et ceux implantés sur les propriétés privées dans les zones de publicité restreintes n° 2 et n° 3 et la décision du 25 juillet 2017 du président de Thonon Agglomération en tant qu'elle refuse de mettre à l'ordre du jour du conseil communautaire l'abrogation de ces mesures.

Procédure devant la cour

Par une requête et des mémoires enregistrés le 8 février 2021, le 21 novembre 2022 et le 24 novembre 2022, non communiqué, la communauté d'agglomération Thonon Agglomération, représentée par la SELAS Olszak et Levy, demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 2 et 3 du jugement ;

2°) de rejeter la demande de la société Girod Médias portant sur les articles 1ers des règlements des Z.P.R.2 et Z.P.R.3 et sur le refus du président du conseil communautaire de Thonon Agglomération de mettre à l'ordre du jour du conseil communautaire l'abrogation de ces articles ;

3°) de mettre à la charge de la société Girod Médias la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- seules les conclusions présentées par les parties intervenantes tendant à la confirmation de l'annulation des articles 1ers des règlements des ZPR2 et ZPR3 et de la décision du 25 juillet 2017 en tant qu'elle refusait de mettre à l'ordre du jour du conseil communautaire l'abrogation de ces mesures sont recevables ;

- le tribunal a procédé à une interprétation erronée de l'article R. 581-25 du code de l'environnement qui prévoit des règles différentes d'implantation de dispositifs de publicité foncière sur les unités foncières et sur le domaine public, de sorte que le règlement local d'urbanisme pouvait conformément à l'article L. 581-14 du code de l'environnement procéder à cette distinction ;

- le président de Thonon Agglomération pouvait en conséquence refuser d'inscrire à l'ordre du jour du conseil communautaire l'abrogation de ces dispositions ;

- les moyens tirés de l'illégalité externe de la délibération du 25 septembre 2013 prescrivant l'élaboration du règlement local de publicité sont irrecevables, inopérants et infondés ;

- les autres moyens soulevés par la société Girod Médias à l'encontre des articles 1ers des règlements des Z.P.R.2 et Z.P.R.3 ne sont pas fondés ;

- la demande tendant à l'abrogation du règlement local de publicité ne contestant pas la légalité de l'article 1.1 du règlement de la Z.P.R.2, les conclusions tendant à l'annulation de ces dispositions sont tardives, et par suite irrecevables ;

- les moyens soulevés contre ces dispositions ne sont pas fondés.

Par mémoires enregistrés les 4 août 2021, le 29 mai 2022, le 21 novembre 2022, non communiqué, le 24 novembre 2022, non communiqué, et le 25 novembre 2022, non communiqué, la société Gest'Espaces et M. B... et Mme C... E..., représentés par Me Bonfils, demandent à la cour ;

1°) en intervention au soutien du défendeur, de rejeter la requête de la communauté d'agglomération Thonon Agglomération ;

2°) par la voie de l'appel incident d'annuler entièrement, en ce qui concerne les Z.P.R.1 et Z.P.R.2, les articles 1 à 3 et, en ce qui concerne la Z.P.R.3, les articles 1 et 3 du règlement local de publicité approuvé le 14 décembre 2016 par délibération du conseil municipal de Thonon-les-Bains et le refus du président de Thonon Agglomération de soumettre au conseil communautaire la décision d'abroger le règlement local de publicité de Thonon-les-Bains.

Ils font valoir que :

- ils sont parfaitement recevables à présenter des conclusions en intervention ;

- les conclusions présentées devant le tribunal dirigées contre la délibération approuvant le règlement local de publicité ne sont pas tardives ;

- la procédure d'adoption du règlement local de publicité est irrégulière dans la mesure où la délibération du 25 septembre 2013 n'a pas fait l'objet d'une publication conforme aux dispositions des articles R. 123-24 et R. 123-25 du code de l'urbanisme ;

- le dossier d'élaboration du règlement local de publicité n'a pas été mis à la disposition du public dès le début de la procédure et aucune information n'a été donnée sur le lieu où il pouvait être consulté ;

- les moyens soulevés par Thonon Agglomération pour contester le jugement ne sont pas fondés ;

- les articles 1ers du règlement des Z.P.R.2 et Z.P.R.3 instituent une discrimination illégale entre les propriétés privées et le gestionnaire du domaine public dans la mesure où aucune règle de densité n'est prévue sur le domaine public ;

- en adoptant ces articles, la commune n'a pas suffisamment pris en compte la liberté du commerce et de l'industrie et les règles de concurrence ;

- il n'est pas justifié de la mise en ligne du règlement local de publicité sur le site internet de la commune, conformément à l'article R. 581-79 du code de l'environnement, de sorte que la contestation de l'article 1.1 du règlement de la Z.P.R.2 n'est pas tardive ;

- depuis le 13 juillet 2010, les règlements locaux de publicité doivent être plus restrictifs que les prescriptions du règlement national ;

- l'interdiction dans la Z.P.R.1 de publicité murale et scellée au sol méconnaît la liberté du commerce et de l'industrie et les règles de concurrence ;

- elle crée une discrimination illégale en l'absence de règles de densité applicables à la publicité sur le mobilier urbain ;

- elle institue une interdiction absolue sur près de 90 à 95 % du territoire communal ce qui est illégal ;

- l'article 3 de la Z.P.R.3, qui interdit les bâches publicitaires et autorise les bâches de chantier alors que ces bâches doivent en principe faire l'objet non d'une réglementation, mais d'une demande d'autorisation, est illégal ;

- il en va de même de l'interdiction de la publicité lumineuse et/ou numérique ;

- en Z.P.R.1, seul le prestataire de mobilier urbain peut proposer des espaces publicitaires ;

- les articles 3 des Z.P.R.2 et Z.P.R.3, qui autorisent les bâches de chantier alors que ces bâches doivent en principe faire l'objet non d'une réglementation, mais d'une demande d'autorisation, sont illégaux ; alors que l'avis de cette commission n'est requis que pour les dispositifs publicitaires de dimension exceptionnelle liés aux manifestations sportives, le règlement prévoit illégalement que les demandes d'autorisation pour les bâches publicitaires ne pourront être accordées qu'après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites ;

- en ayant totalement interdit les bâches publicitaires, sur les Z.P.R.1, Z.P.R.2 et Z.P.R.3, le maire a méconnu le principe de la liberté publicitaire prévu à l'article L. 581-1 du code de l'environnement ;

- en l'absence de monuments historiques dans les Z.P.R.2 et Z.P.R.3, les fortes restrictions imposées dans ces zones ne sont pas justifiées.

Par mémoire enregistré le 11 octobre 2022, la société Girod Médias, représentée par Me Grozdoff, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Thonon Agglomération une somme de 3 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la procédure d'adoption du règlement local de publicité est irrégulière dans la mesure où la délibération du 25 septembre 2013 n'a pas fait l'objet d'une publication conforme aux dispositions des articles R. 123-24 et R. 123-25 du code de l'urbanisme ;

- le dossier d'élaboration du règlement local de publicité n'a pas été mis à la disposition du public dès le début de la procédure et aucune information n'a été donnée sur le lieu où il pouvait être consulté ;

- c'est à juste titre que le tribunal a annulé le règlement et le refus du président au motif que le règlement instituait une différence de traitement non justifiée entre le domaine public et les propriétés privées ;

- elle s'en remet pour le surplus à ses précédentes écritures.

Par courrier du 18 novembre 2022, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé, d'une part, sur l'irrecevabilité pour tardiveté des conclusions présentées devant le tribunal dirigées contre la délibération approuvant le règlement local de publicité et, d'autre part, sur l'irrecevabilité des conclusions d'appel présentées dans le " mémoire en intervention " de la société Gest'espaces, M. Baronne et Mme C....

La communauté d'agglomération Thonon Agglomération, la société Girod Médias et la société Gest'espaces, M. Baronne et Mme C... ont présenté des observations sur ce courrier respectivement les 21, 22 et 24 novembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de M. Savouré, rapporteur public,

- les observations de Me Vallejo pour la communauté d'agglomération Thonon Agglomération et celles de Me Grozdoff pour la société Girod médias ;

Vu les notes en délibéré, présentées pour la société Gest'espaces, M. Baronne et Mme C..., d'une part, et la société Girod Médias, d'autre part, enregistrées le 2 décembre 2022 ;

Considérant ce qui suit :

1. Par délibération du 14 décembre 2016, la commune de Thonon-les-Bains a approuvé le règlement local de publicité. Par courrier du 31 mai 2017, reçu le 2 juin 2017, la société Axo a demandé à la commune d'abroger ce règlement. Cette demande a été transmise à la communauté d'agglomération Thonon Agglomération, compétente depuis le 1er janvier 2017 en matière de plan local d'urbanisme. Par décision du 25 juillet 2017, le président de Thonon Agglomération a refusé d'inscrire à l'ordre du jour d'un prochain conseil communautaire l'abrogation de ce règlement au motif qu'il n'était pas illégal. La société Axo a alors saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une demande d'annulation de la décision du 25 juillet 2017 du président de Thonon Agglomération ainsi que, en ce qui concerne les zones de publicité restreinte (Z.P.R.) 1 et 2, les articles 1 à 3 et, en ce qui concerne la Z.P.R.3, les articles 1 et 3 du règlement local de publicité approuvé le 14 décembre 2016 par délibération du conseil municipal de Thonon-les-Bains. Par jugement du 8 décembre 2020, le tribunal a annulé le règlement local de publicité approuvé le 14 décembre 2016 en tant qu'il instaure une règle de densité publicitaire discriminante entre les dispositifs situés sur le domaine public et ceux implantés sur les propriétés privées dans les Z.P.R.2 et 3 et la décision du 25 juillet 2017 du président de Thonon Agglomération en tant qu'elle refuse de mettre à l'ordre du jour du conseil communautaire l'abrogation de ces mesures. La communauté d'agglomération Thonon Agglomération relève appel de ce jugement en tant qu'il a partiellement fait droit à la demande de la société Axo, aux droits de laquelle est venue la société Girod Médias. La société Gest'Espaces, M. Baronne et Mme C... E..., intervenants au soutien de la demande devant le tribunal, interviennent en défense et demandent en outre à la cour de faire entièrement droit à la demande de première instance.

Sur l'intervention de la société Gest'Espaces, de M. B... et de Mme C... E... :

2. La société Gest'Espaces, M. B... et Mme C... E... ont intérêt au maintien des articles 2 et 3 du jugement attaqué. Ainsi leur intervention au soutien de la société Girod Médias, intimée, est recevable.

Sur la recevabilité du surplus des conclusions de la société Gest'Espaces, de M. B... et de Mme C... E... :

3. La personne qui, devant le tribunal administratif, est régulièrement intervenue à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir n'est recevable à relever appel du jugement rendu sur ce recours contrairement aux conclusions de son intervention, que lorsqu'à défaut d'intervention de sa part, elle aurait eu qualité pour introduire elle-même ce recours.

4. La société Gest'Espaces, M. B... et Mme C... E... sont intervenus devant le tribunal administratif à l'appui du recours pour excès de pouvoir présenté par la société Girod Médias, venue aux droits de la société Axo, contre le refus du président de la communauté de communes Thonon Agglomération d'abroger le règlement de publicité local de la commune de Thonon-les-Bains et contre la délibération du 14 décembre 2016 du conseil municipal de Thonon-les-Bains approuvant le règlement local de publicité. Devant la cour, outre leur intervention au soutien de l'intimée, la société Girod Médias qui s'est bornée à conclure au rejet de la requête, ils présentent des conclusions propres tendant à ce qu'il soit fait entièrement droit à la demande de première instance. A l'appui de leurs écritures, ils se prévalent de leur qualité d'anciens actionnaires de la société Axo, cédée par acte du 27 mars 2018 à la société Girod Médias, et de leur intérêt à percevoir la somme de 500 000 euros prélevée sur le prix de vente au titre de la garantie d'actif et de passif. L'intérêt dont ils se prévalent, qui s'est au demeurant formé en cours d'instance devant le tribunal, ne leur aurait pas donné qualité pour introduire eux-mêmes le recours pour excès de pouvoir formé par la société Axo devenue la société Girod Médias dès lors que le règlement local de publicité ne lèse pas leurs droits d'actionnaires et n'affecte directement que l'activité de la société exploitant les panneaux de publicité elle-même. Ils ne sont dès lors pas recevables à demander d'annuler entièrement, en ce qui concerne les Z.P.R.1 et Z.P.R.2, les articles 1 à 3 et, en ce qui concerne la Z.P.R.3, les articles 1 et 3 du règlement local de publicité approuvé le 14 décembre 2016 par délibération du conseil municipal de Thonon-les-Bains et le refus du président de Thonon Agglomération de soumettre au conseil communautaire la décision d'abroger le règlement local de publicité de Thonon-les-Bains.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne l'annulation partielle du règlement local de publicité approuvé le 14 décembre 2016 :

5. La communauté d'agglomération Thonon Agglomération relève appel du jugement du tribunal en tant que, en son article 2, il a annulé le règlement local de publicité approuvé le 14 décembre 2016 en tant qu'il instaure une règle de densité publicitaire différenciée entre les dispositifs situés sur le domaine public et ceux implantés sur les propriétés privées dans les Z.P.R.2 et 3.

6. Aux termes de l'article L. 581-14-1 du code de l'environnement : " Le règlement local de publicité est élaboré, révisé ou modifié conformément aux procédures d'élaboration, de révision ou de modification des plans locaux d'urbanisme définies au titre V du livre Ier du code de l'urbanisme (...) ". Aux termes de l'article R. 153-21 du code de l'urbanisme : " Tout acte mentionné à l'article R. 153-20 est affiché pendant un mois (...) en mairie. Mention de cet affichage est insérée en caractères apparents dans un journal diffusé dans le département. / Il est en outre publié : 1° Au Recueil des actes administratifs mentionné à l'article R. 2121-10 du code général des collectivités territoriales, lorsqu'il s'agit d'une délibération du conseil municipal d'une commune de 3 500 habitants et plus (...) Chacune de ces formalités de publicité mentionne le ou les lieux où le dossier peut être consulté. L'arrêté ou la délibération produit ses effets juridiques dès l'exécution de l'ensemble des formalités prévues au premier alinéa, la date à prendre en compte pour l'affichage étant celle du premier jour où il est effectué ".

7. Il résulte de ces dispositions que le délai de recours contentieux à l'encontre de la délibération qu'elles visent court, quelle que soit la date à laquelle le plan local d'urbanisme ou le règlement local de publicité devient exécutoire, à compter de la plus tardive des deux dates correspondant, l'une au premier jour d'une période d'affichage en mairie d'une durée d'un mois, l'autre à la mention de cet affichage dans un journal diffusé dans le département.

8. La délibération approuvant le règlement local de publicité de Thonon-les-Bains a été affichée en mairie du 23 décembre 2016 au 1er février 2017, a été transmise en préfecture le 29 décembre 2016 et a été mentionnée dans l'édition du 26 décembre 2016 du journal " Le Messager ", diffusé dans le département de la Haute-Savoie. En outre, cette délibération a été publiée au recueil des actes administratifs de la commune du 14 décembre 2016.

9. Ainsi, le délai de recours contentieux dirigé contre la délibération du 14 décembre 2016 approuvant le règlement local de publicité était expiré à la date de l'introduction de la demande de la société Axo devant le tribunal administratif, de sorte que leur demande d'annulation ne pouvait qu'être rejetée. Par suite c'est à tort que le tribunal a annulé partiellement cette délibération. La demande d'annulation présentée par la société Axo contre les dispositions du règlement local de publicité approuvé le 14 décembre 2016 en tant qu'il instaure une règle de densité publicitaire différenciée entre les dispositifs situés sur le domaine public et ceux implantés sur les propriétés privées dans les Z.P.R.2 et 3 doit être rejetée.

En ce qui concerne l'annulation partielle du refus d'abroger certaines dispositions du règlement local de publicité :

10. La communauté d'agglomération Thonon Agglomération relève appel du jugement du tribunal en tant que, en son article 3, il a annulé la décision du 25 juillet 2017 du président de Thonon Agglomération en tant qu'il refuse de mettre à l'ordre du jour du conseil communautaire l'abrogation du règlement local de publicité approuvé le 14 décembre 2016 en tant qu'il instaure une règle de densité publicitaire différenciée entre les dispositifs situés sur le domaine public et ceux implantés sur les propriétés privées dans les Z.P.R.2 et 3.

11. Aux termes de l'article L. 243-2 du code des relations entre le public et l'administration : " L'administration est tenue d'abroger expressément un acte réglementaire illégal, que cette situation existe depuis son édiction ou qu'elle résulte de circonstances de droit ou de fait postérieures (...) ".

12. Aux termes de l'article L. 581-1 du code de l'environnement : " Chacun a le droit d'exprimer et de diffuser informations et idées, quelle qu'en soit la nature, par le moyen de la publicité, d'enseignes et de pré-enseignes, conformément aux lois en vigueur et sous réserve des dispositions du présent chapitre ". Aux termes de l'article L. 581-9 du code de l'environnement : " Dans les agglomérations, et sous réserve des dispositions des articles L. 581-4 et L. 581-8, la publicité est admise. Elle doit toutefois satisfaire, notamment en matière d'emplacements, de densité, de surface, de hauteur, d'entretien et, pour la publicité lumineuse, d'économies d'énergie et de prévention des nuisances lumineuses au sens du chapitre III du présent titre, à des prescriptions fixées par décret en Conseil d'Etat en fonction des procédés, des dispositifs utilisés, des caractéristiques des supports et de l'importance des agglomérations concernées (...) ". L'article L. 581-14 du même code dispose que : " L'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme (...) peut élaborer sur l'ensemble du territoire de l'établissement public (...) un règlement local de publicité qui adapte les dispositions prévues aux articles L. 581-9 et L. 581-10. Sous réserve des dispositions des articles L. 581-4, L. 581-8 et L. 581-13, le règlement local de publicité définit une ou plusieurs zones où s'applique une réglementation plus restrictive que les prescriptions du règlement national (...). ". Ces dispositions permettent au règlement local de publicité de définir une ou plusieurs zones où s'applique une réglementation plus restrictive que les prescriptions du règlement national. Elles confèrent aux autorités locales, en vue de la protection du cadre de vie et sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, un large pouvoir de réglementation de l'affichage, qui leur permet notamment d'interdire dans ces zones toute publicité ou certaines catégories de publicité en fonction des procédés ou des dispositifs utilisés. Il leur appartient cependant d'exercer ce pouvoir de police dans le respect du principe d'égalité et sans porter une atteinte excessive à la liberté du commerce et de l'industrie et à la concurrence, ainsi qu'à la liberté de l'affichage et de la publicité.

13. L'article R. 581-25 du code de l'environnement, qui s'applique à tous les dispositifs publicitaires, a limité, en principe et sous réserve des exceptions qu'il prévoit, l'installation de dispositifs publicitaires à un seul dispositif sur les unités foncières dont le côté sur la voie publique a une longueur inférieure à 80 mètres et à un dispositif par tranche de 80 mètres pour les unités foncières dont la longueur est supérieure à 80 mètres. Il a retenu des règles d'implantation similaires sur le domaine public au droit des unités foncières, selon la longueur du côté de ces unités foncières sur la voie publique. Le règlement local de publicité de la commune de Thonon-les-Bains a prévu des règles de densité plus restrictives que celles prévues dans le code de l'environnement, en précisant que ces règles ne s'appliqueraient que " sur le domaine privé ", c'est-à-dire sur les unités foncières. Les règles d'implantation sur le domaine public au droit des unités foncières restent celles, moins restrictives, prévues par le code de l'environnement.

14. Au regard de l'objectif poursuivi par le règlement local de publicité de limiter la publicité sur le territoire communal, cette différence de traitement, qui ne repose sur aucun des objectifs assignés par les articles L. 581-9 et L. 581-14 précité du code de l'environnement et a été prise sans considération notamment des procédés, des dispositifs utilisés ou des caractéristiques des supports, n'est pas justifiée. En instituant une telle différence de traitement entre le domaine public et les unités foncières, la commune de Thonon-les-Bains a ainsi méconnu ces dispositions. Saisie d'une demande d'abrogation de ces dispositions illégales du règlement local de publicité, le président de la communauté d'agglomération Thonon Agglomération était tenu, en application de l'article L. 243-2 du code des relations entre le public et l'administration précité, de proposer leur abrogation à l'assemblée délibérante. Par suite, la communauté d'agglomération Thonon Agglomération n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 25 juillet 2017 de son président en tant qu'elle refuse de mettre à l'ordre du jour du conseil communautaire l'abrogation du règlement local de publicité approuvé le 14 décembre 2016 en tant qu'il instaure une règle de densité publicitaire différenciée entre les dispositifs situés sur le domaine public et ceux implantés sur les propriétés privées dans les Z.P.R.2 et 3.

15. Il résulte de ce qui précède que la communauté d'agglomération Thonon Agglomération est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a, en son article 2, annulé le règlement local de publicité approuvé le 14 décembre 2016 en tant qu'il instaure une règle de densité publicitaire différenciée entre les dispositifs situés sur le domaine public et ceux implantés sur les propriétés privées dans les Z.P.R.2 et 3 et qu'elle n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal a annulé la décision du 25 juillet 2017 du président de Thonon Agglomération en tant qu'elle refuse de mettre à l'ordre du jour du conseil communautaire l'abrogation de ces mesures.

Sur les frais liés au litige :

16. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Girod Médias une somme au titre des frais exposés par la communauté d'agglomération Thonon Agglomération et non compris dans les dépens. Ces dispositions font obstacle à ce que la communauté d'agglomération Thonon Agglomération qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la société Girod Médias la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention de la société Gest'Espaces, M. B... et Mme C... E... est admise.

Article 2 : L'article 2 du jugement du tribunal administratif de Grenoble en date du 8 décembre 2020 est annulé.

Article 3 : La demande de la société Girod Médias tendant à l'annulation du règlement local de publicité approuvé le 14 décembre 2016 en tant qu'il instaure une règle de densité publicitaire discriminante entre les dispositifs situés sur le domaine public et ceux implantés sur les propriétés privées dans les Z.P.R.2 et 3 est rejetée.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties et de la société Gest'Espaces, M. B... et Mme C... E... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté d'agglomération Thonon Agglomération, à la société Girod Médias et à M. A... B..., désigné représentant unique en application de l'article R. 751-3 du code de justice administrative.

Délibéré après l'audience du 1er décembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président,

Mme Evrard, présidente assesseure,

Mme Duguit-Larcher, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 décembre 2022.

La rapporteure,

A. D...Le président,

Ph. Arbarétaz

Le greffier,

J. Billot

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

Le greffier,

2

N° 21LY00384


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00384
Date de la décision : 22/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

02-01-04-02-04 Affichage et publicité. - Affichage. - Régime de la loi du 29 décembre 1979. - Dispositions applicables à la publicité. - Institution des ones de publicité autorisée, de publicité restreinte ou de publicité élargie.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : SELAS OLSZAK et LEVY

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-12-22;21ly00384 ?
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