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08/12/2022 | FRANCE | N°22LY00836

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 08 décembre 2022, 22LY00836


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 18 août 2020 par lesquelles le préfet du Rhône lui a refusé un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé.

Par jugement n° 2008049 du 22 février 2022, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 21

mars et 4 mai 2022, M. B..., représenté par Me Paquet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 18 août 2020 par lesquelles le préfet du Rhône lui a refusé un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé.

Par jugement n° 2008049 du 22 février 2022, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 21 mars et 4 mai 2022, M. B..., représenté par Me Paquet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 22 février 2022, ainsi que les décisions du 18 août 2020 du préfet du Rhône le concernant ;

2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une carte de séjour dans le délai de quinze jours ou à défaut de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois et après remise sous huitaine d'une autorisation provisoire de séjour et de travail, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le refus de titre de séjour est entaché d'un vice de procédure ; l'avis du collège de médecins de l'OFII n'a pas fait l'objet d'une délibération collective en méconnaissance de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 ;

- le refus de titre de séjour méconnaît l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le refus de titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.

Le préfet du Rhône n'a pas produit de mémoire en défense.

Par décision du bureau d'aide juridictionnelle près de tribunal judiciaire de Lyon du 1er juin 2022, la demande d'aide juridictionnelle de M. B... a été rejetée.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Christine Psilakis, rapporteure ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant nigérian, né le 3 mars 1982, est entré en France en décembre 2014 et s'y est maintenu depuis. Sa demande d'asile a été rejetée par décision du 31 décembre 2015 par l'office de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) puis par la cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 15 décembre 2016, puis sa demande de réexamen, le 27 mars 2017 par l'OFPRA puis le 5 juillet 2017 par la CNDA. M. B... a demandé le 16 octobre 2018 un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur. Par décisions du 18 août 2020, le préfet du Rhône lui a refusé un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé. M. B... relève appel du jugement du 22 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions précitées.

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". Aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 susvisé pris pour l'application de l'article R. 313-22 : " Au vu du rapport médical (...), un collège de médecins désigné pour chaque dossier (...) émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

3. En premier lieu, il ressort des mentions figurant sur l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ayant examiné la situation de M. B..., que cet avis, signé par les trois médecins qui composent ce collège, indique expressément qu'il a été émis le 13 mars 2019 " après en avoir délibéré ". S'il ressort des deux copies de l'avis émis le 13 mars 2019 versées aux débats que quelques mentions différent, telles que l'absence de la nationalité de l'intéressé ou la date précise de l'arrêté du 27 décembre 2016 dans les visas dans l'une des copies, de même que l'aspect de la version dématérialisée des signatures de ces médecins, ces détails liés à la génération d'une copie de l'avis, ne traduisent pas, en eux-mêmes un défaut de collégialité, ni n'ont été susceptibles d'exercer une influence sur le sens de la décision et ne sont, par suite, pas de nature à avoir entaché le refus de titre de séjour litigieux d'un vice de procédure tiré de l'absence de collégialité.

4. En deuxième lieu, par l'avis précité, le collège des médecins de l'OFII a estimé que l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité. Pour contester le refus de titre de séjour opposé par le préfet du Rhône au vu de cet avis, M. B... se prévaut des certificats médicaux et d'ordonnances déjà versés en première instance, relatifs au traitement de son syndrome anxio-dépressif et verse nouvellement en appel deux certificats des 17 et 31 mars 2022, établis par son psychiatre et son médecin traitant et faisant état d'une possibilité de risque vital en cas de rupture du lien avec les personnes qui l'entourent et avec les soignants ou d'un passage à l'acte auto-agressif lié à la perspective d'un retour au pays. Cependant ces certificats, établis postérieurement à la date de l'arrêté contesté, ne suffisent pas à remettre en cause l'appréciation portée par le préfet du Rhône, au vu de l'avis émis par le collège de médecins de l'OFII, ni à établir le caractère obsolète de cet avis, quant à l'état de santé de l'intéressé à la date de l'arrêté en litige.

5. En troisième lieu, M. B... se prévaut de l'ancrage de sa vie privée et familiale en France où est présente sa conjointe et leurs trois enfants, ainsi que de la scolarisation de ses deux aînés, dont l'un bénéficie d'un accompagnement spécifique dans sa scolarité du fait de problèmes psychomoteurs et de compréhension. Toutefois, ainsi qu'il a été dit précédemment, l'état de santé de M. B... ne justifie pas la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade, dès lors qu'un éventuel défaut de soins n'est pas de nature à entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Sa conjointe est de même nationalité et fait l'objet d'un refus de titre de séjour et d'une mesure d'éloignement et leurs enfants mineurs, scolarisés en maternelle et primaire, ont vocation à suivre leurs parents au Nigéria. Dans ces conditions, compte tenu du caractère récent du séjour en France de l'intéressé et de ce qu'il n'y justifie d'aucune insertion particulière, et alors qu'il n'établit pas être exposé à des menaces faisant obstacle à ce qu'il poursuive sa vie familiale au Nigéria, la décision portant refus de titre de séjour n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. B... une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Le préfet n'a ainsi pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que cette décision procède d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.

6. En quatrième lieu, dès lors que la décision refusant un titre de séjour à M. B... n'a ni pour objet ni pour effet de le séparer de ses trois enfants mineurs, ces derniers ayant vocation à le suivre, de même que leur mère, au Nigéria, le préfet du Rhône n'a pas porté atteinte à l'intérêt supérieur des trois enfants de M. B... en refusant de l'admettre au séjour. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

7. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 22 février 2022, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction doivent être, par voie de conséquence, rejetées, de même que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 17 novembre 2022 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Arbarétaz, président de chambre,

Mme Aline Evrard, présidente-assesseure,

Mme Christine Psilakis, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 décembre 2022.

La rapporteure,

Christine Psilakis

Le président,

Philippe Arbarétaz

Le greffier,

Julien Billot

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

Le greffier,

2

N° 22LY00836


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY00836
Date de la décision : 08/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Christine PSILAKIS
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : PAQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-12-08;22ly00836 ?
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