Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du préfet du Rhône du 14 août 2019 prorogeant les effets de l'arrêté préfectoral portant déclaration d'utilité publique du 26 septembre 2014, ainsi que la décision du 3 décembre 2019 rejetant leur recours gracieux contre cet arrêté.
Par jugement n° 2001065 du 18 mars 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire (non communiqué) enregistrés le 19 mai 2021 et le 12 octobre 2022, M. et Mme A... B..., représentés par la Sarl Alternatives Avocats, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 18 mars 2021 ;
2°) d'annuler cet arrêté du 14 août 2019 ainsi que le rejet de leur recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge du préfet du Rhône une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que la prorogation des effets de la déclaration d'utilité publique est illégale, faute d'avoir été précédée d'une nouvelle enquête publique ; l'économie générale du projet a été bouleversée par les modifications substantielles du bien immobilier du fait des travaux engagés par les copropriétaires pour réhabiliter sa structure ; l'utilité publique du projet n'est pas démontrée.
Par mémoire enregistré le 4 août 2021, le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par mémoire enregistré le 15 novembre 2021, la métropole de Lyon, représentée par la Selas Cabinet Legas-Cité, conclut au rejet de la requête et à ce que les requérants lui versent la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 27 septembre 2022, prise en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 octobre suivant.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Christine Psilakis, rapporteure,
- les conclusions de M. Bertrand Savouré, rapporteur public,
- et les observations de Me Alberto pour M. et Mme A... B..., et celles de Me Perrier pour la métropole de Lyon ;
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme A... B... sont copropriétaires de plusieurs lots au sein d'un bâtiment implanté sur la parcelle cadastrée section AO n° 165 dans le 3ème arrondissement de Lyon. Cet immeuble a fait l'objet d'un projet de démolition-reconstruction déclaré d'utilité publique par arrêté du préfet du Rhône du 26 septembre 2014. Au motif que l'ensemble des emprises foncières nécessaires à la réalisation du projet n'avait pu être acquis durant le délai de validité initial de la déclaration d'utilité publique et que le projet n'avait pas fait l'objet de modifications substantielles, le préfet a prorogé pour une durée de cinq ans, à compter du 30 septembre 2019, les effets de cette déclaration d'utilité publique, par arrêté du 14 août 2019 dont les époux A... B... ont demandé l'annulation au tribunal administratif de Lyon. Ils relèvent appel du jugement par lequel le tribunal a rejeté leur demande.
2. Aux termes de l'article L. 1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " L'expropriation, en tout ou partie, d'immeubles (...) ne peut être prononcée qu'à la condition qu'elle réponde à une utilité publique préalablement et formellement constatée à la suite d'une enquête (...) ". Aux termes de l'article L. 121-2 du même code : " L'acte déclarant l'utilité publique (...) intervient au plus tard un an après la clôture de l'enquête préalable (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 121-4 du même code : " L'acte déclarant l'utilité publique précise le délai accordé pour réaliser l'expropriation. Il ne peut excéder cinq ans (...) " Enfin, aux termes de l'article L. 121-5 de ce code : " Un acte pris dans la même forme peut proroger une fois les effets de la déclaration d'utilité publique pour une durée au plus égale à la durée initialement fixée, lorsque celle-ci n'est pas supérieure à cinq ans. Cette prorogation peut être accordée sans nouvelle enquête préalable, en l'absence de circonstances nouvelles (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'autorité compétente peut proroger les effets d'un acte déclaratif d'utilité publique, sauf si l'opération n'est plus susceptible d'être légalement réalisée en raison de l'évolution du droit applicable ou s'il apparaît que le projet a perdu son caractère d'utilité publique par suite d'un changement des circonstances de fait. Cette prorogation peut être décidée sans nouvelle enquête publique, alors même que le contexte dans lequel s'inscrit l'opération aurait connu des évolutions significatives, sauf si les caractéristiques du projet sont substantiellement modifiées. A cet égard, une augmentation de son coût dans des proportions de nature à en affecter l'économie générale doit être regardée comme une modification substantielle.
3. Il ressort des pièces du dossier que le projet déclaré d'utilité publique par arrêté du 26 septembre 2014 consiste en la démolition de l'immeuble existant pour construire, en lieu et place, un immeuble d'habitation dédié à un programme de logements sociaux et très sociaux, le règlement du PLU-H approuvé par délibération métropolitaine du 13 mai 2019, renouvelant le classement de cet ensemble immobilier en emplacement réservé institué sur le fondement du 4° de l'article L. 151-41 du code de l'urbanisme en vue d'y réaliser, dans le respect des objectifs de mixité sociale, des programmes de logements qu'il définit. Les requérants n'établissent pas que, du seul fait des travaux de consolidation de sa structure, réalisés au cours de l'année 2019 et permettant la conservation de l'immeuble, l'utilité publique du projet n'était plus établie. Par ailleurs, s'ils soutiennent que ces travaux, qui ont permis de préserver l'immeuble menacé de péril, surenchérissent sa valeur vénale et affectent nécessairement l'économie générale du projet, il ressort des pièces du dossier que l'immeuble n'est toujours pas habitable et demeure désaffecté du fait de sa vétusté. Dans ces conditions, les requérants, qui n'établissent pas une augmentation ou un changement substantiels du coût et des caractéristiques du projet, ne sont ainsi pas fondés à soutenir que l'arrêté en litige serait illégal faute d'avoir été précédé d'une nouvelle enquête publique.
4. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les époux A... B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande.
Sur les frais d'instance :
5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du préfet du Rhône, qui n'est pas partie à l'instance, la somme demandée par les époux A... B... au titre des frais qu'ils ont exposés et non compris dans les dépens. Il y a en revanche lieu de faire application de ces mêmes dispositions à l'encontre des époux A... B... et de mettre à leur charge la somme de 2 000 euros à verser à la Métropole de Lyon.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête des époux A... B... est rejetée.
Article 2 : Les époux A... B... verseront à la Métropole de Lyon la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et Mme D... A... B..., au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la métropole de Lyon.
Délibéré après l'audience du 3 novembre 2022 à laquelle siégeaient :
M. Philippe Arbarétaz, président de chambre,
Mme Aline Evrard, présidente-assesseure,
Mme Christine Psilakis, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 novembre 2022.
La rapporteure,
Christine Psilakis
Le président,
Philippe Arbarétaz
Le greffier,
Julien Billot
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
Le greffier,
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N° 21LY01564