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27/10/2022 | FRANCE | N°21LY01044

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 27 octobre 2022, 21LY01044


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon l'annulation de l'arrêté du 16 juillet 2020 par lequel le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, a assorti ce refus de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi.

Par jugement n° 2006229 du 31 décembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 5 avril 2021, M. A..., r

eprésenté par Me Rodrigues, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 31 décembre 2020 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon l'annulation de l'arrêté du 16 juillet 2020 par lequel le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, a assorti ce refus de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi.

Par jugement n° 2006229 du 31 décembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 5 avril 2021, M. A..., représenté par Me Rodrigues, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 31 décembre 2020 ainsi que l'arrêté du 16 juillet 2020 pris à son encontre ;

2°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet du Rhône de lui délivrer, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ou un titre de séjour " salarié " en lui délivrant dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 30 euros par jour de retard ;

3°) d'enjoindre, à titre subsidiaire, au préfet du Rhône de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt en lui délivrant dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 30 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision portant refus de séjour est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation individuelle ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences sur sa vie personnelle ;

- elle est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions du 2° bis de l'article L. 313-11 du code précité ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du même code ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observations.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 3 mars 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant guinéen né le 21 novembre 2000, déclare être entré en France en février 2016 alors qu'il était encore mineur et a été pris en charge par l'aide sociale à l'enfance de l'Isère avant l'âge de 16 ans. L'intéressé a sollicité, le 1er février 2019, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 16 juillet 2020, le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, a assorti ce refus de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :

2. En premier lieu, la décision contestée portant refus de séjour comporte les motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement en visant notamment le 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les raisons justifiant le rejet de la demande de titre de séjour présentée par M. A.... Si l'intéressé conteste le bien-fondé de ces motifs, cette circonstance est par elle-même sans incidence sur le caractère suffisant de la motivation. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision contestée doit être écarté.

3. En deuxième lieu, il ressort des mentions de cette décision que le préfet du Rhône a pris en considération la situation personnelle de M. A.... Si le requérant soutient qu'il n'a pas pu poursuivre de formation durant les années scolaires 2019-2020 et 2020-2021 en raison de l'illégalité du récépissé qui lui avait été délivré ne l'autorisant pas à travailler et soutient qu'il est isolé dans son pays d'origine, ces éléments ne sauraient caractériser de la part du préfet du Rhône un défaut d'examen mais relèvent de l'appréciation du bien-fondé de la demande. Dès lors, le moyen tiré du défaut d'examen de la situation personnelle de l'intéressé doit être écarté.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 2° bis A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3, qui a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance et sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigée (...) ".

5. Lorsqu'il examine une demande de titre de séjour de plein droit portant la mention " vie privée et familiale ", présentée sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entre dans les prévisions de l'article L. 311-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'il a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance. Si ces conditions sont remplies, il ne peut alors refuser la délivrance du titre qu'en raison de la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le juge de l'excès de pouvoir exerce sur cette appréciation un entier contrôle.

6. Il est constant que M. A... a présenté sa demande de titre de séjour dans l'année qui a suivi son dix-huitième anniversaire, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'il a été confié avant ses seize ans aux services de l'aide sociale à l'enfance. Toutefois, à la date de sa demande de titre de séjour, soit le 1er février 2019, il ne poursuivait aucune formation, ainsi que l'a relevé le préfet du Rhône dans sa décision, dès lors qu'il avait abandonné son cursus de CAP Cuisine au lycée professionnel des métiers René Cassin à Rive-de-Gier en deuxième année au cours de l'année scolaire 2018-2019 le 8 janvier 2019. Il ne justifiait pas davantage du suivi d'une formation à la date de la décision en litige. L'interruption de la formation engagée témoigne de l'absence de caractère réel et sérieux du suivi de la formation sans que M. A... ne puisse à ce titre se prévaloir de l'illégalité du récépissé de demande de titre de séjour qui lui a été accordé et qui est postérieur à cette interruption. En outre, s'agissant de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine, si l'intéressé conteste être en contact avec sa famille restée en Guinée, il n'établit par aucune pièce la réalité du décès de ses parents et a lui-même indiqué dans sa demande de titre de séjour conserver en Guinée sept demi-frères et sœurs avec qui il lui appartient de renouer dès lors qu'aucune contrainte extérieure à sa volonté n'y fait obstacle. Enfin, contrairement à ce qu'il soutient, il ne ressort pas de la décision contestée que le préfet du Rhône aurait fait de l'absence d'isolement dans le pays d'origine un critère prépondérant alors qu'il a porté une appréciation globale sur l'ensemble des critères visés au 2° bis de l'article L. 313-11 du code précité. Par suite, nonobstant l'avis favorable de la structure d'accueil, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet aurait commis une erreur de droit ou méconnu les dispositions précitées du 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ".

8. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est présent en France depuis plus de quatre ans à la date de la décision attaquée. Ainsi qu'il a été rappelé, l'intéressé conserve dans son pays d'origine des attaches familiales qu'il n'a pas en France ainsi que nécessairement des attaches privées. Il ne justifie d'aucune intégration particulière au sein de la société française alors qu'il n'a pas terminé le cursus de CAP Cuisine entamé en 2017 et ne justifie d'aucun diplôme ou suivi de formation. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet du Rhône a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnu les stipulations et dispositions précitées. Pour les mêmes motifs, il n'a pas davantage entaché cette décision d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de celle-ci sur la situation personnelle de M. A....

9. En dernier lieu, M. A... réitère en appel le moyen tiré de ce que le préfet du Rhône a entaché cette décision d'une erreur manifeste d'appréciation en s'abstenant de faire usage de son pouvoir de régularisation exceptionnelle au vu de sa situation en vertu des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il y a lieu pour la cour d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal. Au demeurant, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... aurait présenté une demande de titre de séjour sur le fondement de ces dispositions, quand bien même le préfet a examiné ce fondement.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. Compte tenu de la légalité de la décision portant refus de séjour opposée à M. A..., celui-ci n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'encontre de celle portant obligation de quitter le territoire français.

11. Pour les mêmes motifs que ceux visés au point 8, le moyen tiré de la méconnaissance par la mesure d'éloignement édictée des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

12. En raison de l'absence d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, le moyen tiré de ce que la fixation du pays de destination est dépourvue de base légale doit être écarté.

13. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Les conclusions qu'il présente aux mêmes fins en appel doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées à fin d'injonction et d'astreinte et celle présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 6 octobre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 octobre 2022.

La rapporteure,

V. Rémy-NérisLe président,

F. Bourrachot

La greffière,

A-C. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY01044

lc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY01044
Date de la décision : 27/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : RODRIGUES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-10-27;21ly01044 ?
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