Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 10 septembre 2020 par lesquelles le préfet de Saône-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé à l'expiration de ce délai.
Par un jugement n° 2002826 du 2 avril 2021, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 5 juillet 2021, M. A... B..., représenté par Me Grenier, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 2 avril 2021 ;
2°) d'annuler les décisions du préfet de Saône-et-Loire du 10 septembre 2020 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- il justifie d'une progression et de sérieux dans le suivi de ses études, de même que de ressources suffisantes au sens des dispositions des articles L 313-7 et R. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur de droit faute de prise en compte de son activité professionnelle et accessoire ; le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- le refus de titre de séjour méconnaît les articles L. 313-11 7°, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'intérêt supérieur de son neveu ; il méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, compte tenu de ses attaches familiales en France, des conditions et de l'ancienneté de son séjour en France ;
- l'obligation de quitter le territoire français est privée de base légale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
- elle a été prise en méconnaissance du droit d'être entendu ;
- les décisions fixant le délai de départ volontaire et le pays de destination subséquentes aux précédentes décisions, doivent être annulées.
La requête a été communiquée au préfet de Saône-et-Loire, qui n'a pas produit de mémoire.
Par une décision du 2 juin 2021, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé l'aide juridictionnelle partielle (25%) à M. A... B....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'arrêté du 31 décembre 2002 modifiant et complétant l'arrêté du 27 décembre 1983 fixant le régime des bourses accordées aux étrangers boursiers du gouvernement français ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 2011 pris pour son application ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant tunisien né le 8 janvier 2000, relève appel du jugement du 2 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 10 septembre 2020 par lesquelles le préfet de Saône-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé à l'expiration de ce délai.
Sur la légalité des décisions du 10 septembre 2020 :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant " (...) ". Aux termes de l'article R. 313-7 du même code, alors en vigueur : " I.- Pour l'application du I de l'article L. 313-7, l'étranger qui demande la carte de séjour portant la mention " étudiant " ou " étudiant-programme de mobilité " doit présenter, outre les pièces mentionnées aux articles R. 311-2-2 et R. 313-1, les pièces suivantes : / 1° La justification qu'il dispose de moyens d'existence, correspondant au moins au montant de l'allocation d'entretien mensuelle de base versée, au titre de l'année universitaire écoulée, aux boursiers du Gouvernement français (...) " .
3. Il résulte des dispositions de l'article R. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 1er de l'arrêté du 31 décembre 2002 modifiant et complétant l'arrêté du 27 décembre 1983 fixant le régime des bourses accordées aux étrangers boursiers du Gouvernement français, que pour justifier de la possession de moyens d'existence suffisants, l'étudiant doit disposer de ressources équivalentes à 615 euros par mois.
4. Pour refuser à M. A... B... la délivrance d'une carte de séjour en qualité d'étudiant, le préfet de Saône-et-Loire a relevé que l'intéressé ne dispose pas de moyens d'existence suffisants au vu des ressources de sa sœur majeure, qui déclare le prendre financièrement en charge, et au vu de ses ressources propres. D'une part, il en résulte que, contrairement à ce que soutient le requérant, le préfet n'a pas commis d'erreur de droit en refusant la prise en compte des ressources issues de son activité professionnelle et accessoire. D'autre part, les premiers juges ont relevé qu'alors même que l'intéressé perçoit un revenu de 300 euros mensuels pour l'emploi à temps partiel qu'il occupe dans un restaurant de Chalon-sur-Saône, il ne démontre pas disposer de moyens d'existence suffisants eu égard au reste à vivre de sa sœur de 989 euros, insuffisant pour subvenir à ses besoins, à ceux de son fils handicapé né en 2012 et à ceux de M. A... B.... En bornant à soutenir que les ressources de sa sœur s'élèvent à près de 1 300 euros par mois, le requérant ne critique pas utilement le jugement attaqué. Le requérant est d'ailleurs entré irrégulièrement en France après qu'un refus de visa lui a été refusé pour moyens d'existence insuffisants.
5. Aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit (...) à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. M. A... B... est entré irrégulièrement en France le 7 novembre 2015, alors qu'il était encore mineur. S'il indique qu'il a vécu et grandi sur le sol français depuis l'âge de quinze ans aux côtés de sa sœur, dont il est particulièrement proche puisque celle-ci s'est vu confier sa responsabilité, il dispose de fortes attaches dans son pays d'origine, où réside notamment sa mère. La seule promesse de contrat d'apprentissage, produite par l'intéressé, ne peut constituer, compte tenu de l'absence d'insertion professionnelle stable et ancienne sur le territoire, un motif d'admission exceptionnelle au séjour. En l'absence d'obstacle avéré à la poursuite de sa vie privée et familiale dans son pays d'origine, le requérant, célibataire, n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de titre de séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise, en méconnaissance des dispositions et stipulations citées au point 5. Elle n'apparaît pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ni ne peut être regardée comme contraire à l'intérêt supérieur du neveu du requérant.
7. Si M. A... B... a fait preuve de sérieux dans son parcours scolaire et obtenu un CAP de serrurier en juin 2019 et un CAP d'agent de sécurité en juin 2020, la seule promesse de contrat d'apprentissage produite par l'intéressé ne peut constituer, compte tenu de l'absence d'insertion professionnelle stable et ancienne sur le territoire, un motif d'admission exceptionnelle au séjour, comme l'ont retenu les premiers juges. Compte tenu de ce qui a été indiqué au point 6, le préfet de Saône-et-Loire n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en s'abstenant de faire usage de son pouvoir de régularisation exceptionnelle au vu de sa situation.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français et à soutenir, en l'absence de circonstance particulière faisant obstacle à son éloignement du territoire français, que l'obligation de quitter le territoire français violerait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
9. En second lieu, M. A... B..., qui a sollicité la délivrance d'un titre de séjour, a ainsi été conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demandait que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartenait, lors du dépôt de sa demande, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il jugeait utiles. Le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que l'administration statue sur sa demande, n'imposait pas à l'autorité administrative de mettre M. A... B... à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu doit être écarté.
En ce qui concerne les décisions fixant le délai de départ volontaire et le pays de destination :
10. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que les décisions fixant le délai de départ volontaire et le pays de destination devraient être annulée en conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
12. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de Saône-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 11 octobre 2022 à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président,
M. Gilles Fédi, président-assesseur,
Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 octobre 2022.
La rapporteure,
Bénédicte LordonnéLe président,
Jean-Yves Tallec
La greffière,
Sandra Bertrand
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 21LY02259