Vu la procédure suivante :
Procédures contentieuses antérieures
M. B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Dijon de condamner l'Etat à lui verser une provision d'un montant global de 142 892,30 euros, augmentée des intérêts moratoires à compter de la réception de sa demande préalable du 3 octobre 2012.
Par une ordonnance n° 1603579 du 18 avril 2017, le juge des référés a condamné l'Etat à verser à M. A... une provision d'un montant de 142 892,30 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la réception de la demande préalable du 3 octobre 2012.
Par un arrêt n° 17LY01767 du 11 avril 2019, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé cette ordonnance et condamné l'Etat à verser à M. A... une provision d'un montant de 97 119,33 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 8 août 2012.
Le ministre de l'agriculture et de l'alimentation a demandé au tribunal administratif de Dijon, sur le fondement de l'article R. 541-4 du code de justice administrative, de fixer définitivement sa dette à l'égard de M. A... à la somme de 56 053,99 euros.
M. A... a, par la voie de conclusions incidentes, en outre demandé au tribunal de fixer le montant de la dette de l'État à la somme de 142 892,30 euros, sauf à parfaire, au regard notamment d'une éventuelle modification à intervenir du taux de rachat des cotisations sociales, assortie de l'intérêt au taux légal à compter du 4 octobre 2012, de condamner l'Etat à lui verser cette somme de 142 892,30 euros et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1901690 du 8 octobre 2020, le tribunal administratif de Dijon a :
1°) renvoyé M. A... devant le ministre de l'agriculture et de l'alimentation afin qu'il soit procédé à la liquidation et au versement de l'indemnité à laquelle il a droit ;
2°) fixé définitivement la somme due par l'Etat à M. A... au montant de 59 659,82 euros et au montant calculé au titre de l'article 1er de ce jugement, sous déduction des sommes déjà versées dans le cadre de la procédure de référé-provision, et dans la limite de la somme de 142 892,30 euros ;
3°) jugé que la part de cette somme correspondant aux arriérés de cotisations portera intérêts au taux légal à compter du 4 octobre 2012, que la part de cette somme correspondant aux arrérages dus pour la période allant de la date de mise à la retraite de M. A... jusqu'au 4 octobre 2012 portera intérêts au taux légal à compter de cette date et que le surplus de cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la date d'échéance de chacun des arrérages correspondants ;
4°) rejeté le surplus des demandes des parties.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 8 décembre 2020, M. A..., représenté par la SCP Yves Richard, avocat au Conseil d'Etat, demande à la cour :
1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 8 octobre 2020, en condamnant l'Etat à lui verser la somme de 142 892,30 euros, à parfaire au regard notamment d'une éventuelle modification à intervenir du taux de rachat des cotisations sociales, assortie des intérêts au taux légal à compter du 4 octobre 2012 ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 142 892,30 euros, à parfaire au regard notamment d'une éventuelle modification à intervenir du taux de rachat des cotisations sociales, assortie des intérêts au taux légal à compter du 4 octobre 2012 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué ne répond pas au moyen tiré de ce que la charge de la preuve incombant à l'administration, l'assiette forfaitaire devait, à défaut, être appliquée ;
- les premiers juges se sont mépris sur la charge de la preuve et ont entaché leur jugement d'une erreur de droit ;
- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, des principes s'inspirant de l'assiette forfaitaire prévue par l'article R. 351-11 du code de la sécurité sociale doivent être appliqués pour déterminer les salaires qu'il a perçus au titre de son mandat ;
- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, les salaires perçus au titre de l'exercice du mandat sanitaire pour une période antérieure à 1990 doivent être intégrés dans l'assiette de calcul de son indemnité, alors même qu'ils auraient été versés postérieurement au 31 janvier 1989.
Par un mémoire en défense enregistré le 30 mars 2022, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut au rejet de la requête.
Il expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 7 avril 2022, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 6 mai 2022.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la sécurité sociale ;
- le code rural ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- la loi n° 89-412 du 22 juin 1989 ;
- l'ordonnance n° 2011-863 du 22 juillet 2011 ;
- le décret n° 70-1277 du 23 décembre 1970 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère ;
- et les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., qui a exercé la profession de vétérinaire jusqu'à son admission à la retraite le 1er janvier 2011, a été, entre 1972 et 1989, investi d'un mandat sanitaire dans le cadre duquel il a accompli des actes de police sanitaire et de prophylaxie collective des maladies des animaux. Par réclamation du 3 octobre 2012, il a demandé à être indemnisé du préjudice résultant du défaut de versement par l'Etat des cotisations dues par l'employeur au régime général d'assurance vieillesse et au régime de retraite complémentaire auxquels il devait être affilié en raison de cette activité. Le juge des référés du tribunal administratif de Dijon a condamné l'Etat à lui verser une provision d'un montant de 142 892,30 euros, laquelle a été ramenée en appel à 97 119,33 euros par un arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 11 avril 2019. Le même tribunal, saisi par le ministre en charge de l'agriculture sur le fondement de l'article R. 541-4 du code de justice administrative, a fixé définitivement la dette de l'Etat à l'égard de M. A... sur la base des rémunérations établies par l'administration, la provision obtenue en référé devant en être déduite. M. A... doit être regardé comme relevant appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit, en totalité, à ses conclusions indemnitaires incidentes.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
3. Il ressort des termes mêmes du jugement attaqué qu'en ses paragraphes 8 et 9, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à chacun des arguments soulevés, ont écarté l'application de l'assiette forfaitaire prévue par l'article R. 351-11 du code de la sécurité sociale dont M. A... se prévalait, en relevant notamment qu'il ne produisait aucune pièce relative aux rémunérations perçues dans l'exercice de son mandat sanitaire. Par suite, ce jugement ne souffre d'aucune omission à statuer.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. En vertu des dispositions de l'article 215-8 du code rural issues de l'article 10 de la loi du 22 juin 1989 modifiant et complétant certaines dispositions du livre deuxième du code rural ainsi que certains articles du code de la santé publique, reprises jusqu'à l'ordonnance n° 2011-863 du 22 juillet 2011 relative à la modernisation des missions des vétérinaires titulaires d'un mandat sanitaire à l'article L. 221-11 du code rural et de la pêche maritime, puis, en substance, à l'article L. 203-11 de ce code : " [Les rémunérations perçues au titre de l'exercice du mandat sanitaire] sont assimilées, pour l'application du code général des impôts et du code de la sécurité sociale, à des revenus tirés de l'exercice d'une activité libérale. Ces dispositions sont applicables à compter du 1er janvier 1990 ". Jusqu'à cette date, les vétérinaires titulaires d'un mandat sanitaire devaient être regardés comme des agents non titulaires de l'Etat relevant du régime général de la sécurité sociale en application de l'article L. 311-2 du code de la sécurité sociale ainsi que du régime de retraite complémentaire des agents publics non titulaires de l'Etat. A ce titre, l'Etat avait l'obligation, dès la date de prise de fonction, d'assurer leur immatriculation à la caisse primaire de sécurité sociale ainsi qu'à l'institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques (IRCANTEC) en application des dispositions, d'une part, de l'article R. 312-4 du code de la sécurité sociale et, d'autre part, des articles 3 et 7 du décret du 23 décembre 1970 portant création d'un régime de retraite complémentaire des assurances sociales en faveur des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques, et de verser les cotisations correspondant aux rémunérations perçues en vertu des actes de prophylaxie.
5. En premier lieu, le montant des rémunérations perçues par les vétérinaires libéraux au titre du mandat sanitaire ne saurait se déduire de la seule existence de ce mandat, détenu, par un grand nombre des vétérinaires, à raison d'une activité qui ne revêtait au demeurant qu'un caractère accessoire et complémentaire, en sus de leur activité libérale.
6. Si M. A... conteste l'absence de toute indemnisation accordée au titre des années 1972 à 1979, il n'apporte pas davantage en appel qu'en première instance d'éléments de nature à justifier les opérations effectuées au titre de son mandat au cours de ces années et les revenus qu'il en aurait tirés. Il ne saurait en conséquence réclamer pour ces années le bénéfice d'une indemnisation au titre de l'assiette forfaitaire prévue par le code de la sécurité sociale, laquelle suppose une durée minimale d'activité et, au demeurant, n'a pas été retenue par la circulaire du 24 avril 2012 organisant la procédure amiable de traitement des demandes d'indemnisation des vétérinaires sanitaires. Il ne peut davantage se prévaloir utilement de l'instruction ministérielle du 9 avril 2013, qui renvoie à une circulaire CNAV du 29 octobre 2009, ni de la circulaire ministérielle du 6 mars 2013, faisant référence au mécanisme de l'évaluation forfaitaire. M. A... ne peut, dès lors, prétendre à aucune indemnité supplémentaire de ce chef.
7. En second lieu, il résulte des dispositions issues de l'article 10 de la loi du 22 juin 1989 que l'ensemble des rémunérations perçues à compter du 1er janvier 1990 par les vétérinaires à raison d'un mandat sanitaire doivent être assimilées à des revenus tirés de l'exercice d'une profession libérale, quelle que soit la date de réalisation des prestations auxquelles elles se rapportent. Par suite, et contrairement à ce que prétend M. A..., il n'y a pas lieu d'intégrer à l'assiette de calcul des indemnités les rémunérations qui lui ont été versées au cours de l'année 1990 alors même qu'elles auraient été perçues à raison d'activités réalisées dans le cadre du mandat sanitaire antérieurement au 1er janvier 1990.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon n'a pas fait droit, en totalité, à ses conclusions indemnitaires incidentes.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. A....
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.
Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,
M. Gilles Fédi, président-assesseur,
Mme Sophie Corvellec, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 octobre 2022.
La rapporteure,
Sophie CorvellecLe président,
Jean-Yves Tallec
La greffière,
Sandra BertrandLa République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 20LY03598