Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon :
1°) d'annuler la décision en date du 12 avril 2019 par laquelle le président du conseil régional d'... l'a admis à la retraite pour invalidité à compter du 1er mai 2019 ;
2°) de mettre à la charge de la région ... la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1905807 du 30 septembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du président du conseil régional ... du 12 avril 2019 admettant M. A... à la retraite pour invalidité et a mis à la charge de la région ... la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 24 novembre 2020 et un mémoire enregistré le 27 janvier 2022, la région ..., représentée par Me Lonqueue (SCP Lonqueue-Sagalovitsch-Eglie-Richters et associés), avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 30 septembre 2020 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Lyon ;
3°) de mettre à la charge de M. A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle a qualité pour interjeter appel ;
- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, les pièces médicales dont se prévaut l'intéressé, postérieures à la décision en litige, ne sauraient remettre en cause son inaptitude totale et définitive, à la date de cette décision ;
- les moyens soulevés en première instance ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 2 septembre 2021, M. A..., représenté par Me Pinet (SELARLU Pinet avocats), avocate, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de la région ... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 28 janvier 2022, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 21 février 2022.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;
- le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère ;
- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;
- les observations de Me Kukuryka, avocat, représentant la région ... ;
Considérant ce qui suit :
1. La région ... relève appel du jugement du 30 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du président de son conseil régional du 12 avril 2019 admettant M. A..., adjoint technique territorial des établissements d'enseignement, à la retraite pour invalidité à compter du 1er mai 2019.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article 30 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales : " Le fonctionnaire qui se trouve dans l'impossibilité définitive et absolue de continuer ses fonctions par suite de maladie, blessure ou infirmité grave dûment établie peut être admis à la retraite soit d'office, soit sur demande. / (...) / La mise en retraite d'office pour inaptitude définitive à l'exercice de l'emploi ne peut être prononcée qu'à l'expiration des congés de maladie, des congés de longue maladie et des congés de longue durée dont le fonctionnaire bénéficie en vertu des dispositions statutaires qui lui sont applicables, sauf dans les cas prévus à l'article 39 si l'inaptitude résulte d'une maladie ou d'une infirmité que son caractère définitif et stabilisé ne rend pas susceptible de traitement. (...) ". Selon l'article 31 de ce décret, dans sa rédaction alors applicable : " Une commission de réforme est constituée dans chaque département pour apprécier la réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, les conséquences et le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions. (...) / Le pouvoir de décision appartient dans tous les cas à l'autorité qui a qualité pour procéder à la nomination, sous réserve de l'avis conforme de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales. / (...) / La Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales peut, à tout moment, obtenir la communication du dossier complet de l'intéressé, y compris les pièces médicales. Tous renseignements médicaux ou pièces médicales dont la production est indispensable pour l'examen des droits définis au présent titre pourront être communiqués, sur leur demande, aux services administratifs dépendant de l'autorité à laquelle appartient le pouvoir de décision ainsi qu'à ceux de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales. / (...) ". L'article 39 de ce décret dispose que : " Le fonctionnaire qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'une invalidité ne résultant pas du service peut être mis à la retraite par anticipation soit sur demande, soit d'office dans les délais prévus au troisième alinéa de l'article 30 (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions que lorsqu'un fonctionnaire territorial, ayant épuisé ses droits aux congés de maladie, de longue maladie et de longue durée, se trouve définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, il est admis à la retraite, soit d'office, soit à sa demande, après avis de la commission de réforme et que l'autorité territoriale doit, préalablement à la mise à la retraite, obtenir un avis conforme de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales. La légalité de la décision qu'il appartient à l'autorité territoriale de prendre en vue du placement d'office d'un fonctionnaire à la retraite par anticipation, pour les motifs et, lorsqu'elles sont réunies, dans les conditions déterminées par ces dispositions, s'apprécie au regard de l'ensemble des pièces et renseignements propres à établir la réalité de la situation effective de santé de ce fonctionnaire au jour de cette décision, y compris au regard de ceux de ces renseignements ou pièces qui n'auraient pas été communiqués à l'autorité territoriale préalablement à sa décision ou qui auraient été établis ou analysés postérieurement à celle-ci, dès lors qu'ils éclairent cette situation. Le juge administratif exerce un contrôle normal sur l'appréciation portée par l'autorité territoriale sur l'inaptitude définitive d'un fonctionnaire.
4. Il ressort des pièces du dossier que, lors de sa séance du 27 novembre 2018, la commission de réforme des fonctionnaires des collectivités locales a estimé que M. A... était dans l'incapacité absolue et définitive de continuer ses fonctions, rejoignant ainsi l'avis du comité médical départemental du 4 octobre 2018 défavorable à la réintégration de l'intéressé à l'issue de son congé de longue maladie le 30 décembre 2018. Par ailleurs, la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales s'est prononcée en faveur du placement d'office de ce fonctionnaire à la retraite pour invalidité, par un avis du 8 avril 2019 qui a été suivi par l'arrêté contesté du 12 avril 2019.
5. Toutefois, il ressort du certificat médical établi le 22 mai 2019 par le Dr. D., chirurgien, que M. A... a subi une arthrodèse cervicale au mois de décembre 2018, lui permettant, d'après ce médecin, de reprendre ses activités physiques et professionnelles, sous réserve de certaines restrictions médicales, telles que l'absence de port de charges lourdes, de certaines positions prolongées ou de certains gestes répétitifs. Ce certificat, établi un mois seulement après la décision litigieuse et qui fait état d'une opération qui lui est antérieure, est de nature à éclairer la situation médicale qui était celle de M. A... à la date de cette décision et peut, dès lors, être utilement invoqué par l'intéressé, contrairement à ce que prétend la région .... Ce certificat ne saurait, en outre, être remis en cause par les avis précédemment évoqués du comité médical départemental et de la commission de réforme des fonctionnaires des collectivités locales, rendus avant l'intervention chirurgicale pratiquée sur M. A.... Par suite, il résulte de ce certificat, établi par un médecin spécialisé, que, contrairement à ce qu'a estimé le président du conseil régional, M. A... n'était pas définitivement inapte à l'exercice de toute fonction à la date à laquelle la décision en litige a été adoptée, ainsi que l'a d'ailleurs ultérieurement confirmé le médecin de prévention en émettant, le 9 décembre 2020, un avis favorable à sa reprise sur un poste de cuisinier. Par suite, et ainsi que l'ont retenu les premiers juges, l'autorité administrative a, à tort, considéré M. A... comme définitivement inapte à l'exercice de toute fonction.
6. Il résulte de tout ce qui précède que la région ... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du président de son conseil régional du 12 avril 2019 admettant M. A... à la retraite pour invalidité.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la région .... Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière le versement d'une somme de 1 500 euros à M. A..., en application de ces mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la région ... est rejetée.
Article 2 : La région ... versera à M. A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la région ... et à M. B... A....
Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,
M. Gilles Fédi, président-assesseur,
Mme Sophie Corvellec, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 octobre 2022.
La rapporteure,
Sophie CorvellecLe président,
Jean-Yves Tallec
La greffière,
Sandra BertrandLe président,
J. -Y. Tallec
La République mande et ordonne au préfet de la région ... en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 20LY03415