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12/10/2022 | FRANCE | N°20LY00136

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 12 octobre 2022, 20LY00136


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry (ACENAS) a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler l'arrêté du 31 août 2018 par lequel le maire de Colombier-Saugnieu (69124) a délivré à la société Goodman France un permis de construire valant permis de démolir en vue de la construction d'une plateforme logistique sur un terrain situé rue de Hongrie ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Colombier-Saugnieu la somme de 2 000 eu

ros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry (ACENAS) a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler l'arrêté du 31 août 2018 par lequel le maire de Colombier-Saugnieu (69124) a délivré à la société Goodman France un permis de construire valant permis de démolir en vue de la construction d'une plateforme logistique sur un terrain situé rue de Hongrie ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Colombier-Saugnieu la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1808051 du 14 novembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, deux mémoires et deux mémoires récapitulatifs, produits après l'invitation prévue à l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, enregistrés le 14 janvier 2020, le 15 mars 2021, le 1er avril 2021, le 23 mai 2021 et le 10 juin 2021, l'association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry (ACENAS), représentée par Me Tête, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 14 novembre 2019 et l'arrêté du 31 août 2018 par lequel le maire de Colombier-Saugnieu (69124) a délivré à la société Goodman France un permis de construire valant permis de démolir en vue de la construction d'une plateforme logistique sur un terrain situé rue de Hongrie ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Colombier-Saugnieu ou de la société Goodman France une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'association soutient que :

- le jugement est irrégulier, dès lors que l'un des magistrats de la formation de jugement a également statué en qualité de juge des référés sur la demande de suspension du permis de construire délivré à la société Goodman ;

- l'arrêté méconnaît l'article 6 de la directive n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement ;

- l'étude d'impact jointe à l'enquête publique est insuffisante au regard de l'article 3 de la directive n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011, dès lors que l'étude de danger ne précise pas les conséquences d'une chute d'avion sur les constructions projetées au regard des produits stockés, alors que les données communiquées par l'autorité de sûreté nucléaire ne sont pas pertinentes s'agissant d'un aéroport ; elle ne prévoit pas les incidences du projet en terme de climat ; l'étude de trafic est incomplète, en particulier quant à la circulation aérienne, au trafic routier et à la production de gaz à effet de serre ; elle contient des informations erronées et n'est pas pertinente à défaut de connaître l'utilisateur de la plateforme logistique ; aucune mesure compensatoire liée au trafic routier et au climat n'est prévue ;

- la rédaction de l'autorisation de construire méconnaît l'article 8 bis de la directive et l'article L. 122-1-1 du code de l'environnement, en l'absence de mesures de compensation environnementale ou de suivi de l'environnement, et à défaut de mentionner les conclusions motivées de la commission d'enquête ;

- la décision contestée méconnaît la directive territoriale d'aménagement de l'aire métropolitaine lyonnaise, le schéma de cohérence territoriale et le plan local d'urbanisme de la commune de Colombier-Saugnieu, le projet de plateforme logistique étant uniquement voué à l'activité de transports poids lourds, sans lien avec les activités spécifiques dépendant de la présence d'un aéroport ou conditionnant son développement ;

- la décision est illégale, par exception d'illégalité du plan local d'urbanisme au regard de la directive territoriale d'aménagement de l'aire métropolitaine lyonnaise et du schéma de cohérence territoriale, quant à la compatibilité des occupations ou utilisations des sols avec le fonctionnement de l'aéroport ;

- elle contrevient à la déclaration d'utilité publique de la liaison ferroviaire Lyon-Turin, compte tenu de son périmètre et alors que les tracés de détails ne sont pas définitifs ;

- le projet est incompatible avec les engagements internationaux de la France pour lutter contre le changement climatique, notamment en réduisant les gaz à effet de serre ;

- le permis de construire a été probablement obtenu par fraude ;

- le maire de la commune aurait dû refuser le permis pour des motifs de sécurité tenant notamment à l'insuffisance des voiries en périphérie du projet ;

- l'arrêté contrevient à la convention de délégation de service public en autorisant une construction durable sur un terrain, au-delà du délai de la convention.

Par une intervention, enregistrée le 7 décembre 2020 présentée à l'appui de la requête, complétée par deux mémoires enregistrés les 5 mars et 8 mai 2021, la confédération des commerçants de France, représentée par Me Doueb, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 14 novembre 2019 et l'arrêté du 31 août 2018 par lequel le maire de Colombier-Saugnieu a délivré à la société Goodman France un permis de construire valant permis de démolir en vue de la construction d'une plateforme logistique sur un terrain situé rue de Hongrie ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Colombier-Saugnieu une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La confédération des commerçants de France soutient que :

- sur un emploi créé dans le commerce électronique, quatre emplois et demi sont perdus dans le commerce de détail traditionnel ;

- l'ancien secrétaire d'Etat chargé du numérique en 2019 avait constaté qu'Amazon avait détruit 20 200 emplois dans le secteur du commerce de détails ;

- pour le commerce non-alimentaire, si l'on établit le solde des créations/destructions pour les commerces de détail et de gros, la France et l'Allemagne ont, tous deux, perdu plus de 80 000 emplois entre 2009 et 2018 ;

- le projet, qui annonce la création de 1 000 emplois, engendrera la fermeture de très nombreux commerces de proximité, avec une perte d'emplois estimée au total de 4 500, si bien qu'il en résulte un solde négatif de 3 500 emplois directs.

Par une intervention présentée à l'appui de la requête, enregistrée le 14 mars 2021, complétée par des mémoires enregistrés le 2 avril 2021 et le 10 juin 2021, l'association " les Amis de la Terre France ", la ville de Lyon, Mme E... C..., M. D... F..., et Mme B... A... de Brosses, représentés par Me Cofflard demandent à la cour :

1°) d'admettre leur intervention volontaire ;

2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 14 novembre 2019 et l'arrêté du 31 août 2018 par lequel le maire de Colombier-Saugnieu (69124) a délivré à la société Goodman France un permis de construire valant permis de démolir en vue de la construction d'une plateforme logistique sur un terrain situé rue de Hongrie.

Ils soutiennent :

- le jugement attaqué est irrégulier au motif que les premiers juges n'ont pas suffisamment motivé leur décision ;

- les premiers juges ont commis une erreur de droit ou une erreur d'appréciation en rejetant le moyen soulevé en première instance, tiré des insuffisances de l'étude d'impact du projet d'entrepôt litigieux sur le climat et la qualité de l'air ;

- le dossier d'enquête publique se révèle entaché d'insuffisances substantielles, dès lors qu'il ne contient ni le dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale, ni l'avis de la CDAC, ce qui emporte des conséquences très concrètes sur l'information du public ;

- le projet litigieux relève de la destination " commerces et activités de service ", interdite par les dispositions des articles UZ1 et UZ2 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- le permis de construire ne comporte pas les mesures et prescriptions permettant de prévenir les risques d'impacts négatifs directs et indirects sur l'environnement et le climat induits par l'activité spécifique du futur locataire de cet entrepôt géant dédié au " e-commerce ".

Par trois mémoires en défense et un mémoire récapitulatif, produit après l'invitation prévue à l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, enregistrés le 27 mars 2020, le 9 février 2021, le 30 mars 2021 et le 10 juin 2021, la société Goodman France, représentée par la SCP Boivin et associés :

1°) conclut au rejet de la requête ;

2°) demande à la cour de déclarer irrecevable et de rejeter l'intervention de la Confédération des commerçants de France, de l'association " les Amis de la Terre France ", de la ville de Lyon, de Mme E... C..., de M. D... F..., et de Mme B... A... de Brosses ;

3°) demande qu'une somme de 8 000 euros soit mise à la charge de l'association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon Saint- Exupéry sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Goodman France fait valoir que les moyens présentés par la requérante et les intervenants ne sont pas fondés.

Par deux mémoires en défense et un mémoire récapitulatif, produit après l'invitation prévue à l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative, enregistrés le 31 mars 2020, le 8 janvier 2021 et le 25 mai 2021, la commune de Colombier-Saugnieu, représentée par Me Sestier et par Me Lamouille, demande à la cour :

1°) titre principal, de dire et juger d'une part, que le recours de l'association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry contre le permis de construire n° PC 69 299 18 00012 du 31 août 2018 est irrecevable, d'autre part, que l'intervention de la confédération des commerçants de France, de l'association " les Amis de la Terre France ", de la ville de Lyon, de Mme E... C..., de M. D... F..., et de Mme B... A... de Brosses est irrecevable ;

2°) à titre subsidiaire, de dire et juger que l'arrêté de permis de construire du 31 août 2018 est régulier et en conséquence, rejeter l'ensemble des demandes présentées par l'association ACENAS et les intervenants volontaires ;

3°) qu'une somme de 8 000 euros soit mise à la charge de l'association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry, de la confédération des commerçants de France, de l'association " les Amis de la Terre France ", de la ville de Lyon, de Mme E... C..., de M. D... F..., et de Mme B... A... de Brosses sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune de Colombier-Saugnieu fait valoir que les moyens présentés par la requérante et les intervenants ne sont pas fondés.

Par un mémoire distinct enregistré le 14 mars 2021 l'association " les Amis de la Terre France ", la ville de Lyon, Mme E... C..., M. D... F..., Mme B... A... de Brosses représentés par Me Cofflard demandent à la cour de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité portant sur la contrariété à la Constitution du 3ème alinéa de l'article 3 de la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés en tant qu'il n'inclut pas dans la définition de l'assiette de la taxe sur les surfaces commerciales, les surfaces dédiées au commerce en ligne et qu'il opère une rupture d'égalité devant la loi et les charges publiques.

Par un mémoire enregistré le 18 mars 2021, la commune de Colombier-Saugnieu, représentée par Me Lamouille demande à la cour :

- de déclarer irrecevable l'intervention de l'association " les Amis de la Terre France ", la ville de Lyon, Mme E... C..., M. D... F..., et Mme B... A... de Brosses ;

- de dire qu'il n'y a pas lieu de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité.

Par un mémoire enregistré le 25 mars 2021, la société Goodman France demande à la cour :

- de déclarer irrecevable l'intervention de l'association " les Amis de la Terre France ", la ville de Lyon, Mme E... C..., M. D... F..., et Mme B... A... de Brosses ;

- de dire qu'il n'y a pas lieu de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité.

Par deux mémoires distincts enregistrés le 29 mars 2021 et le 6 mai 2021, l'association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry demande à la cour la transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur la contrariété à la Constitution du 3ème alinéa de l'article 3 de la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés en tant qu'il n'inclut pas dans la définition de l'assiette de la taxe sur les surfaces commerciales, les surfaces dédiées au commerce en ligne et qu'il opère une rupture d'égalité devant la loi et les charges publiques.

Par ordonnance du 15 février 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 15 mars 2021.

Par ordonnance du 7 mai 2021 l'instruction a été rouverte et la clôture a été reportée au 11 juin 2021 à 16 heures 30.

Par une lettre du 7 mai 2021, la Cour, en application de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative a invité les parties et les intervenants à produire un mémoire récapitulatif.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution du 4 octobre 1958, notamment son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

- la directive n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011 relative à l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement ;

- le code de commerce ;

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- la loi de programme du 13 juillet 2005 fixant les orientations de la politique énergétique ;

- la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte ;

- l'arrêté du 10 novembre 2016 définissant les destinations et sous-destinations de constructions pouvant être réglementées par le règlement national d'urbanisme et les règlements des plans locaux d'urbanisme ou les documents en tenant lieu ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Fédi, président-assesseur,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me Tête, représentant l'association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry, celles de Me Cofflard, représentant l'association " les Amis de la Terre France ", la ville de Lyon, Mme E... C..., M. D... F..., Mme B... A... de Brosses, celles de Me Hercé, représentant la société Goodman France, et celles de Me Lamouille, représentant la commune de Colombier-Saugnieu ;

Considérant ce qui suit :

1. Dans le cadre de son projet de construction d'une plateforme logistique, pour les acteurs du commerce électronique, sur les parcelles cadastrées E 964 et E 975, situées rue de Hongrie à Colombier-Saugnieu, sur le domaine aéroportuaire de Lyon Saint-Exupéry, comprenant un bâtiment principal de trois niveaux, d'une surface de plancher de 160 934 m² et six bâtiments annexes, eu égard à la nature et au volume des activités projetées, la société Goodman France a déposé le 1er mars 2018 une demande de permis de construire et de démolir en vue de la construction de cette plateforme logistique. Par arrêté du 31 août 2018, le maire de Colombier-Saugnieu a délivré à la société Goodman France un permis de construire valant permis de démolir en vue de la construction d'une plateforme logistique. Par jugement n° 1808051 du 14 novembre 2019, le tribunal administratif de Lyon, a rejeté la demande d'annulation de ce permis présentée par l'association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry. L'association relève appel de ce jugement.

Sur la recevabilité des interventions :

2. Aux termes de l'article R. 632-1 du code de justice administrative : " L'intervention est formée par mémoire distinct. / (...) / Le président de la formation de jugement ou le président de la chambre chargée de l'instruction ordonne, s'il y a lieu, que ce mémoire en intervention soit communiqué aux parties et fixe le délai imparti à celles-ci pour y répondre. / Néanmoins, le jugement de l'affaire principale qui est instruite ne peut être retardé par une intervention ". Est recevable à former une intervention, y compris pour la première fois en appel, toute personne qui justifie d'un intérêt suffisant eu égard à la nature et à l'objet du litige et qui n'a pas qualité de partie à l'instance.

3. Eu égard à son objet, l'association " les Amis de la Terre France ", qui bénéfice en outre d'un agrément pour la protection de l'environnement conformément aux dispositions des articles L. 141-1 et R. 141-1 à R. 141-20 du code de l'environnement, justifie d'un intérêt suffisant pour intervenir au soutien d'une requête dirigée contre l'autorisation délivrée par le maire de Colombier-Saugnieu à la société Goodman France en vue de la construction d'une plateforme logistique. Ainsi, son intervention, qui tend aux mêmes fins que les conclusions présentées par l'association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry, est recevable et doit être admise. Par suite, l'intervention collective, qui comprend celle de la ville de Lyon, de Mme E... C..., de M. D... F... et de Mme B... A... de Brosses, est recevable. En revanche, la confédération des commerçants de France, dont l'objet est de défendre l'intérêt professionnel des commerçants sur un plan national, ne justifie pas d'un intérêt suffisant pour contester le permis de construire litigieux. Son intervention ne peut, dès lors, être admise.

Sur la régularité du jugement :

4. Eu égard à la nature de l'office ainsi attribué au juge des référés saisi sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, et sous réserve du cas où il apparaîtrait, compte tenu notamment des termes mêmes de l'ordonnance, qu'allant au-delà de ce qu'implique nécessairement cet office, il aurait préjugé l'issue du litige, la seule circonstance qu'un magistrat a statué sur une demande tendant à la suspension de l'exécution d'une décision administrative n'est pas, par elle-même, de nature à faire obstacle à ce qu'il se prononce ultérieurement sur la requête en qualité de juge du principal.

5. Il ressort des termes de l'ordonnance n° 1903523 en date du 31 mai 2019 rejetant la demande de suspension de l'exécution de l'arrêté du 31 août 2018 par lequel le maire de Colombier-Saugnieu a accordé une autorisation de construire valant permis de démolir à la société Goodman France pour la réalisation d'une plateforme logistique, que le juge des référés du tribunal administratif de Lyon s'est borné à constater qu'" aucun des moyens invoqués par l'ACENAS, tels qu'ils sont énoncés plus haut, n'est, en l'état de l'instruction, de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de l'acte contesté ; ". En jugeant ainsi et contrairement à ce qui est soutenu, le juge des référés n'a pas préjugé de l'issue du litige et n'est donc pas allé au-delà de ce qu'implique nécessairement son office. Il résulte de ce qui précède que la circonstance que ce dernier ait siégé à l'occasion du jugement attaqué n'est pas, par elle-même, de nature à entacher ce dernier d'irrégularité. Dans ces conditions, la participation de ce magistrat au jugement au fond de l'affaire ne peut être regardée comme de nature à faire douter de l'impartialité de la formation de jugement. Dès lors, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué n'aurait pas été rendu par une formation impartiale ne peut qu'être écarté.

6. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Contrairement à ce qui est soutenu, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments invoqués devant eux, ont motivé avec une précision suffisante leur réponse aux moyens tirés de l'insuffisance de l'étude d'impact du projet. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué doit être écarté. De même si les premiers juges n'ont pas répondu à certains éléments de faits du dossier tenant à la question du climat, ces éléments doivent être regardés comme des circonstances de faits, sur lesquelles le juge n'avait pas l'obligation de statuer. Le jugement attaqué n'est donc pas entaché d'omission à statuer sur ce point.

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

7. Il résulte des dispositions combinées des premiers alinéas des articles 23-1 et 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, que la juridiction saisie d'un moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution présenté dans un écrit distinct et motivé, statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat et procède à cette transmission si est remplie la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question ne soit pas dépourvue de caractère sérieux.

8. Aux termes du troisième alinéa de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés : " La surface de vente des magasins de commerce de détail, prise en compte pour le calcul de la taxe, et celle visée à l'article L. 720-5 du code de commerce, s'entendent des espaces affectés à la circulation de la clientèle pour effectuer ses achats, de ceux affectés à l'exposition des marchandises proposées à la vente, à leur paiement, et de ceux affectés à la circulation du personnel pour présenter les marchandises à la vente. ". Aux termes de l'article L. 720-5 du code de commerce, devenu l'article L. 752-1 du même code conformément aux dispositions de l'ordonnance du 8 juin 2006 portant refonte du code de l'organisation judiciaire et modifiant le code de commerce, le code rural et le code de procédure pénale : " Sont soumis à une autorisation d'exploitation commerciale les projets ayant pour objet : / 1° La création d'un magasin de commerce de détail d'une surface de vente supérieure à 1 000 mètres carrés, résultant soit d'une construction nouvelle, soit de la transformation d'un immeuble existant ; / 2° L'extension de la surface de vente d'un magasin de commerce de détail ayant déjà atteint le seuil des 1 000 mètres carrés ou devant le dépasser par la réalisation du projet. (...) ; / 3° Tout changement de secteur d'activité d'un commerce d'une surface de vente supérieure à 2 000 mètres carrés. (...) ; / 4° La création d'un ensemble commercial tel que défini à l'article L. 752-3 et dont la surface de vente totale est supérieure à 1 000 mètres carrés ; / 5° L'extension de la surface de vente d'un ensemble commercial ayant déjà atteint le seuil des 1 000 mètres carrés ou devant le dépasser par la réalisation du projet ; / 6° La réouverture au public, sur le même emplacement, d'un magasin de commerce de détail d'une surface de vente supérieure à 2 500 mètres carrés (...) ; / 7° La création ou l'extension d'un point permanent de retrait par la clientèle d'achats au détail commandés par voie télématique, organisé pour l'accès en automobile. (...) ".

9. L'association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry, ainsi que les intervenants, soutiennent que le troisième alinéa de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972, instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés, méconnaît les principes constitutionnels d'égalité devant l'impôt et d'égalité devant les charges publiques, garantis par les articles 6, 13 et 16 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, en ce qu'il n'inclut pas les surfaces dédiées au commerce en ligne, en particulier les entrepôts logistiques, dans la définition des surfaces de vente comprises dans l'assiette de la taxe sur les surfaces commerciales. Il ressort des pièces du dossier que les requérants ont demandé au tribunal administratif de Lyon l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 31 août 2018 par lequel le maire de Colombier-Saugnieu a délivré à la société Goodman France un permis de construire valant permis de démolir en vue de la construction d'une plateforme logistique au motif, notamment que le projet en litige n'échappe pas à l'obligation d'une autorisation d'exploitation commerciale, en application des articles L. 425-4 du code de l'urbanisme et L. 752-1 du code de commerce. Toutefois, les dispositions du troisième alinéa de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972, dont la conformité à la Constitution est contestée, qui se bornent à définir la surface de vente à prendre en compte pour l'application de l'article L. 752-1 du code de commerce, dans le cadre d'un dispositif fiscal, n'ont pour objet ni d'établir, ni de limiter la liste des projets soumis à une autorisation d'exploitation commerciale en application de cet article. En outre, ces dispositions sont sans lien avec la décision d'autorisation de construire en litige, dont il n'est pas contesté qu'elle ne vaut pas autorisation d'exploitation commerciale. Par suite, les dispositions invoquées ne sauraient être regardées comme applicables au litige au sens et pour l'application de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel. Ainsi, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen, tiré de ce que les dispositions du troisième alinéa de la loi du 13 juillet 1972 méconnaissent les principes constitutionnels d'égalité devant l'impôt et d'égalité devant les charges publiques garantis par la constitution, doit être écarté.

Sur la légalité de l'autorisation d'urbanisme litigieuse :

En ce qui concerne la légalité externe de l'arrêté :

10. L'association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry ne peut utilement invoquer la méconnaissance de l'article 6 de la directive n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement. A supposer que l'association ait entendu invoquer la méconnaissance de l'article L. 123-10 du code de l'environnement, qui transpose l'article 6 de ladite directive, en se bornant à soutenir, d'une part, que l'avis d'enquête ne précisait pas qu'un permis de construire pouvait être délivré à l'issue de l'enquête publique et qu'aucune pièce du dossier ne pouvait laisser penser que ledit permis de construire était de la compétence du maire, d'autre part, qu'en indiquant " faussement " que le préfet était compétent, les citoyens ont été trompés, cette dernière ne démontre pas que l'article L. 123-10 du code de l'environnement aurait été inexactement appliqué. En tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que l'avis d'enquête publié par la préfecture du Rhône le 18 mai 2018 indique que l'enquête publique portera " sur la demande d'autorisation environnementale et sur la demande de permis de construire un entrepôt logistique présentées par la société Goodman ". L'intitulé du dossier soumis à enquête publique précise, par ailleurs, que la demande de permis de construire a été présentée par la société Goodman sur la commune de Colombier-Saugnieu. Dans ces conditions, la circonstance que cet avis ne mentionne pas l'autorité compétente pour délivrer ce permis n'a pu, en l'espèce, faire, à elle-seule, obstacle à la bonne information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération ou exercer une influence sur les résultats de l'enquête et par suite, vicier la procédure préalable à l'édiction du permis de construire contesté.

11. L'association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry réitère en appel, sans l'assortir d'éléments nouveaux, son moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact jointe à l'enquête publique au regard de l'article 3 de la directive n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011, d'une part, en tant que l'étude de danger ne précise pas les conséquences d'une chute d'avion sur les constructions projetées au regard des produits stockés, d'autre part, en tant que les effets du projet sur le climat et la qualité de l'air n'ont pas été suffisamment analysés dans l'étude d'impact, enfin, en tant que l'étude de trafic est incomplète, en particulier quant à la circulation aérienne, au trafic routier et à la production de gaz à effet de serre, alors qu'aucune mesure compensatoire liée au trafic routier et au climat n'est prévue. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges. En outre, les parties intervenantes ne peuvent utilement soutenir d'une part, que l'étude d'impact aurait omis de prendre en compte les émissions de gaz à effet de serre liées à la fabrication et au transport jusqu'en France des produits stockés et qu'elle serait insuffisante compte tenu de l'absence de mention du futur locataire de l'entrepôt, d'autre part, que le dossier d'enquête publique serait insuffisant en tant qu'il ne contient ni le dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale, ni l'avis de la CDAC.

12. Aux termes de l'article L. 424-4 du code de l'urbanisme : " Lorsque la décision autorise un projet soumis à étude d'impact, elle comprend en annexe un document comportant les éléments mentionnés au I de l'article L. 122-1-1 du code de l'environnement. ". Ces dernières dispositions prévoient que : " I.- L'autorité compétente pour autoriser un projet soumis à évaluation environnementale prend en considération l'étude d'impact, l'avis des autorités mentionnées au V de l'article L. 122-1 ainsi que le résultat de la consultation du public et, le cas échéant, des consultations transfrontières. La décision de l'autorité compétente est motivée au regard des incidences notables du projet sur l'environnement. Elle précise les prescriptions que devra respecter le maître d'ouvrage ainsi que les mesures et caractéristiques du projet destinées à éviter les incidences négatives notables, réduire celles qui ne peuvent être évitées et compenser celles qui ne peuvent être évitées ni réduites. Elle précise également les modalités du suivi des incidences du projet sur l'environnement ou la santé humaine. ". Ces dispositions, qui exigent que l'auteur de la décision, une fois cette dernière prise, porte à la connaissance du public une information supplémentaire explicitant les motifs et les considérations qui l'ont fondée, ne sauraient être interprétées comme imposant une motivation en la forme de la décision qui serait une condition de sa légalité. La circonstance que les informations prévues à ces articles n'ont pas été jointes au permis de construire litigieux, est sans incidence sur sa légalité. Par suite, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la rédaction de l'autorisation de construire méconnaîtrait l'article 8 bis de la directive n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011 et l'article L. 122-1-1 du code de l'environnement, en l'absence de mesures de compensation environnementale ou de suivi de l'environnement, et à défaut de mentionner l'intégralité des conclusions motivées de la commission d'enquête.

En ce qui concerne la légalité interne de l'arrêté :

13. L'article Uz 1 du règlement du plan local d'urbanisme de Colombier-Saugnieu, dans sa rédaction issue de la révision du 28 juin 2017 applicable en l'espèce, interdit " toutes constructions, installations, occupations et utilisations du sol qui ne soient pas directement liées et compatibles avec le fonctionnement de l'aéroport et des activités ferroviaires attenantes, ou nécessaires, aux services publics ou d'intérêt collectif, sauf celles énumérées à l'article Uz 2. Sont visés notamment : (...) / 8. Les constructions et installations à destination de commerce et activités de service, sauf sous-destinations listées à l'article Uz 2 ". Ce dernier article autorise les constructions hébergeant des activités du secteur tertiaire, " compatibles avec leur environnement proche, mais aussi compatibles et liés à l'exercice de l'activité aéroportuaire, y compris aux activités ferroviaires attenantes, sous réserve que les aménagements et constructions soient compatibles avec les principes inscrits dans l'" Orientation d'aménagement et de programmation liée au projet de développement de l'aéroport Lyon - Saint-Exupéry ", dernier chapitre des OAP du PLU ".

14. Le schéma de cohérence territoriale de l'agglomération lyonnaise, qualifie la zone aéroportuaire de Lyon Saint-Exupéry de " polarité économique de rayonnement métropolitain à conforter ". La directive territoriale d'aménagement de l'aire métropolitaine lyonnaise, modifiée en mars 2015, sur l'espace interdépartemental Saint-Exupéry, classe la zone en litige en " site économique d'envergure métropolitaine ". L'un des axes majeurs de la directive est notamment de structurer le développement sur le site de l'aéroport Lyon Saint-Exupéry de fonctions logistiques nouvelles autour des infrastructures présentes sur la plateforme aéroportuaire, dans un contexte d'offres déficitaires et inadaptées aux besoins de niveau métropolitain et de vocation multimodale de la zone. En outre, les orientations fixées par ces deux documents tendent à l'accueil, sur le site de la plateforme aéroportuaire, et sous réserve de maîtrise du foncier par la puissance publique, d'activités économiques et d'équipements spécifiques, soit directement liés à la présence de l'aéroport parce qu'ils conditionnent son développement ou qu'ils en dépendent, soit porteurs d'image et contribuant au rayonnement international de l'aire métropolitaine, ainsi que d'autres activités pour des projets économiques d'envergure exigeant de grands tènements, notamment sur la partie sud de la plateforme existante. Par ailleurs, le dernier chapitre des orientations d'aménagement et de programmation liées au projet de développement de l'aéroport Lyon Saint-Exupéry prévoit que si le secteur Cargo, situé au sud Est reste réservé aux fonctions logistiques avec " affinité aéroportuaire ", les secteurs sud et nord constituent des secteurs de développement de l'immobilier de diversification sur la plateforme, dont il n'est pas contesté qu'ils peuvent générer des ressources complémentaires pour l'exploitant de l'activité aéroportuaire. Enfin, le syndicat mixte d'études et de programmation de l'agglomération lyonnaise a émis le 28 mars 2018 un avis favorable au projet. Dans ces conditions, la plateforme logistique, laquelle est implantée sur un tènement foncier de 213 502 m², doit être regardée comme directement liée à l'exercice de l'activité aéroportuaire, et demeure compatible avec le fonctionnement de l'aéroport. Par suite, et contrairement à ce qui est soutenu, le permis délivré ne méconnait pas les dispositions précitées des articles Uz 1 et Uz 2 du règlement du plan local d'urbanisme. Au surplus, l'association appelante ne peut utilement faire valoir que le projet de plateforme logistique contesté méconnaîtrait la directive territoriale d'aménagement de l'aire métropolitaine lyonnaise ainsi que les orientations du schéma de cohérence territoriale, qui ne lui sont pas directement opposables.

15. Aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 10 novembre 2016 définissant les destinations et sous-destinations de constructions pouvant être réglementées par le règlement national d'urbanisme et les règlements des plans locaux d'urbanisme ou les documents en tenant lieu : " La destination de construction " commerce et activité de service " prévue au 3° de l'article R. 151-27 du code de l'urbanisme comprend les six sous-destinations suivantes : artisanat et commerce de détail, restauration, commerce de gros, activités de services où s'effectue l'accueil d'une clientèle, hébergement hôtelier et touristique, cinéma. La sous-destination " artisanat et commerce de détail " recouvre les constructions commerciales destinées à la présentation et vente de bien directe à une clientèle ainsi que les constructions artisanales destinées principalement à la vente de biens ou services. ". Si l'association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry soutient qu'une plate-forme logistique, qui se présente comme le dernier contact avec le client, est un commerce de détail soumis à la réglementation applicable à ce genre d'activité, toutefois ce type de plateforme n'entre dans aucune des catégories fixées à l'article 3 de l'arrêté du 10 novembre 2016. Par suite le moyen tiré de ce que le projet ne serait pas conforme à l'article Uz1 du règlement du PLU qui interdit notamment " les constructions et installations à destination de commerce et activités de service ", doit être écarté.

16. S'il est soutenu, par voie d'exception, au regard de la directive territoriale d'aménagement de l'aire métropolitaine lyonnaise, dont les dispositions invoquées sont devenues caduques et du schéma de cohérence territoriale de l'agglomération lyonnaise, que les dispositions du plan local d'urbanisme seraient illégales au motif notamment que le sens donné au règlement est incompatible avec le SCOT, il résulte de ce qui vient d'être dit au point précédent que les dispositions modifiées du plan local d'urbanisme ne sont pas incompatibles avec lesdits documents et permettent l'implantation d'activités logistiques sur la

plateforme de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry.

17. Comme l'ont jugé à bon droit les premiers juges, le projet en cause n'est pas incompatible avec la déclaration d'utilité publique des travaux nécessaires à la réalisation de la liaison ferroviaire Lyon-Turin, au seul motif qu'il se trouverait à près de 90 % dans le périmètre de cette déclaration d'utilité publique, alors que le projet en litige repose sur une législation indépendante et distincte de celle invoquée par la requérante. Ensuite, il est constant d'une part, que la commune de Colombier-Saugnieu a intégré ce périmètre dans son plan local d'urbanisme sous la forme d'un emplacement réservé, lequel a été pris en compte pour la délimitation du projet, d'autre part, que par courrier du 23 mars 2018, la SNCF réseau, bénéficiaire de cet emplacement réservé, a indiqué que le projet en cause était compatible avec le projet de liaison ferroviaire. Enfin, en confirmant la compatibilité du projet de la société Goodman France avec le projet de liaison ferroviaire Lyon-Turin, SNCF Réseau n'a pas modifié le décret prononçant l'utilité publique du projet Lyon-Turin, ni d'ailleurs le périmètre de cette DUP. Par suite, les moyens, tirés de la méconnaissance du parallélisme des formes et de ce que seul le ministre des transports, pouvait donner son avis sur la compatibilité du projet, sont inopérants.

18. En se bornant à se prévaloir d'une part, du protocole de Kyoto, de la loi de programme du 13 juillet 2005 fixant les orientations de la politique énergétique, du " paquet législatif énergie climat ", du " Grenelle de l'environnement ", sans viser les dispositions précises de ces textes qui auraient, selon elle, été méconnues lors la délivrance de l'autorisation litigieuse, alors que ces dispositions n'ont pas pour objet de faire obstacle, par principe, à tout nouveau projet de construction, d'autre part, de l'article 45 de la loi du 17 août 2015, qui concerne le programme d'action que devaient établir les exploitants d'aérodromes au plus tard le 31 décembre 2016 pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques résultant des activités directes et au sol de la plateforme, l'association appelante n'établit pas que le permis de construire en litige serait incompatible avec les engagements internationaux de la France pour lutter contre le changement climatique, notamment en réduisant les gaz à effet de serre. De même, la requérante ne peut utilement invoquer d'une part, que le transport de marchandises en camion est de nature à générer d'importants rejets de gaz à effet de serre et à contribuer au dérèglement climatique, que le principe même d'expédier, à partir du monde entier, des produits et des biens de consommation qui parviennent directement aux consommateurs, engendre une surconsommation de transport, d'autre part, qu'il serait " de notoriété publique " que l'opérateur de la plateforme serait l'un des plus gros contributeurs de gaz à effet de serre, bien supérieur au commerce de proximité. Enfin les intervenants ne démontrent pas que le permis de construire ne comporterait pas les mesures et prescriptions permettant de prévenir les risques d'impacts négatifs directs et indirects sur l'environnement et le climat induits par l'activité spécifique du futur locataire de l'entrepôt autorisé.

19. L'association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry réitère en appel, sans l'assortir d'éléments nouveaux, son moyen tiré de ce que le permis de construire a été " probablement " obtenu par fraude. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

20. Aux termes de l'article R. 111-1 du code de l'urbanisme " (...) Les dispositions des articles R. 111-3, R. 111-5 à R. 111-19 et R. 111-28 à R. 111-30 ne sont pas applicables dans les territoires dotés d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu. (...)Il résulte de ces dispositions que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme doit être écarté comme étant inopérant, la commune de Colombier-Saugnieu étant couverte par un plan local d'urbanisme.

21. Il ressort des pièces du dossier , d'une part, que l'étude de trafic réalisée par le bureau d'études Egis, précise que l'impact du projet est négligeable sur les conditions de circulation du matin et du soir et que la période de midi est critique pour le seul giratoire C2, d'autre part, que le département du Rhône a donné son accord le 9 mai 2018 pour réaliser des travaux visant à réduire les effets sur les carrefours giratoires existants, notamment concernant la difficulté d'écoulement du trafic au carrefour C2. Il est ainsi prévu de créer une " voie de shunt " entre la rue du Portugal et la D29 et d'élargir la branche d'accès Ouest au giratoire et son passage à deux voies. En se bornant à soutenir que " l'étude de trafic réalisée par le bureau d'études EGIS n'est suffisante dès lors qu'elle émane du pétitionnaire ", sans produire le moindre élément précis sur ce point, et alors même que les conditions de trafic sont sans incidence sur la légalité d'un permis de construire, l'appelante ne justifie pas , d'une part, que l'augmentation du trafic routier liée à l'exploitation du projet serait, à elle-seule, de nature à porter atteinte à la sécurité publique, au sens de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme , d'autre part, que les voiries avoisinantes seraient insuffisantes et entraineraient une augmentation des accidents. Dans ces conditions, c'est sans erreur manifeste d'appréciation que le maire de la commune a pu délivrer le permis de construire.

22. L'association requérante ne peut utilement soutenir que le permis litigieux serait irrégulier au motif que le délégataire de la convention de service public de l'aéroport ne pouvait accorder plus de droit que ne lui confère cette délégation, de sorte qu'aucune construction allant au-delà de la durée de la convention ne pouvait être autorisée sur le terrain d'assiette, alors même qu'était joint au dossier de demande de permis de construire une attestation de maîtrise foncière d'Aéroport de Lyon faisant état de la signature avec le pétitionnaire d'une convention d'occupation temporaire du site, sans d'ailleurs que ne soit exigé l'accord du propriétaire du domaine public. La circonstance que la case du bordereau de dépôt des pièces jointes correspondant à l'accord du gestionnaire du domaine pour engager la procédure d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public ne soit pas cochée est, de même, sans incidence sur la légalité du permis délivré, et alors que cette pièce figurait bien au dossier de permis de construire et que le maire de la commune n'avait pas, au demeurant, à en examiner la validité. Au surplus, en application des dispositions des articles 11 II et 84 du cahier des charges type applicable aux concessions aéroportuaires de l'Etat annexé au décret n° 2007-244 du 23 février 2007 relatif aux aérodromes appartenant à l'Etat et portant approbation du cahier des charges type applicable à la concession de ces aérodromes, le concessionnaire d'un aérodrome peut accorder à un tiers une autorisation d'occupation du domaine public pour une durée dépassant l'échéance de la convention de concession qu'il a conclue avec l'Etat.

23. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées en défense, que l'association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Colombier-Saugnieu et de la société Goodman France, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par l'association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière une somme de 2 000 euros à verser, à la fois, à la société Goodman France et à la commune de Colombier-Saugnieu, au titre de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : L'intervention de la confédération des Commerçants de France n'est pas admise.

Article 2 : L'intervention de l'association les Amis de la Terre France et autres est admise.

Article 3 : La requête de l'association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry est rejetée.

Article 4 : L'association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry versera à la société Goodman France une somme de 2 000 euros et à la commune de Colombier-Saugnieu une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'association contre l'extension et les nuisances de l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry, à la société Goodman France et à la commune de Colombier-Saugnieu.

Copie en sera adressée à la confédération des commerçants de France, à l'association " les Amis de la Terre France ", à la ville de Lyon, à Mme E... C..., à M. D... F... et à Mme B... A... de Brosses.

Délibéré après l'audience du 27 septembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 octobre 2022.

Le rapporteur,

Gilles FédiLe président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Sandra Bertrand

La République mande et ordonne au préfet du Rhône en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 20LY00136


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY00136
Date de la décision : 12/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-02 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire. - Nature de la décision. - Octroi du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Gilles FEDI
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : DROIT PUBLIC CONSULTANTS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-10-12;20ly00136 ?
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