Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon : 1°) d'annuler la décision du 24 septembre 2018 par laquelle le maire de Saint-Etienne a refusé de reconnaître sa maladie imputable au service, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux ; 2°) d'enjoindre au maire de Saint-Etienne de reconnaître sa pathologie imputable au service ou, subsidiairement, de procéder au réexamen de sa demande ; 3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Etienne la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens.
Par un jugement n° 1902414 du 30 juin 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 3 septembre 2020, Mme C..., représentée par Me Bonicatto, demande à la cour de réformer le jugement du tribunal administratif de Lyon du 30 juin 2020 et :
1°) avant-dire droit, d'ordonner une expertise ;
2°) d'annuler la décision du 24 septembre 2018 par laquelle le maire de Saint-Etienne a refusé de reconnaître sa maladie imputable au service, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux ;
3°) d'enjoindre au maire de Saint-Etienne de reconnaître de reconnaître sa pathologie imputable au service ou, subsidiairement, de procéder au réexamen de sa demande ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Etienne la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens.
Elle soutient que :
- elle n'a jamais soutenu que son état anxio-dépressif serait lié à un accident de service survenu le 18 février 2011 ; le jugement est, à cet égard, entaché d'une erreur de fait ;
- le jugement est entaché d'erreur d'appréciation en ce qu'il confirme le refus d'imputabilité au service de sa maladie ; le rapport d'expertise du docteur A... ne comporte aucune précision permettant d'identifier une pathologie indépendante évoluant pour son propre compte, détachable du service ; il existe un lien direct et certain entre sa pathologie et la sanction disciplinaire dont elle a fait l'objet et la procédure contentieuse qu'elle a dû engager pour aboutir à son annulation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 novembre 2020, la commune de Saint-Etienne, représentée par Me Maurice, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 4 500 euros soit mise à la charge de Mme C... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable en ce qu'elle ne comporte l'énoncé d'aucune conclusion visant l'annulation du jugement contesté ;
- les moyens soulevés sont infondés.
Par ordonnance du 17 juin 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 16 septembre 2021.
Mme C... a produit des pièces, enregistrées le 22 février 2022, postérieurement à la clôture de l'instruction.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère ;
- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;
- les observations de Me Bonicatto pour Mme C... ainsi que celles de Me Cadet pour la commune de Saint-Etienne.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... relève appel du jugement du 30 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 24 septembre 2018 par laquelle le maire de Saint-Etienne a refusé de reconnaître sa maladie imputable au service, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, dans sa version applicable en l'espèce : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite (...) ".
3. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.
4. Il ressort des pièces du dossier que Mme C..., assistant socio-éducatif territorial employée par la commune de Saint-Etienne, a été victime, le 18 février 2011, d'une agression verbale d'un usager dans l'exercice de ses fonctions. Elle a présenté, dans les suites de cet accident du travail, dont l'imputabilité au service a été reconnue, un état anxiodépressif post traumatique, justifiant qu'elle soit suivie par le docteur A..., psychiatre entre les mois de février et octobre 2011. Ce médecin a conclu dans un certificat médical final du 19 octobre 2011, à " une guérison apparente avec possibilité de rechute ultérieure ". Comme le soutient la commune de Saint-Etienne, les pièces du dossier n'objectivent aucun lien entre cet accident du travail et les arrêts de travail dont Mme C... a fait l'objet du 11 mars 2017 au 8 mars 2018 en raison d'un état anxiodépressif. En particulier, le certificat médical initial de demande de maladie professionnelle, émanant du docteur D, indique la date du 25 septembre 2013 comme date de la première constatation médicale de la maladie professionnelle, ce que du reste la requérante confirme dans ses écritures. Si le certificat de ce médecin du 29 novembre 2019, précise que " son état de santé est en lien avec l'accident de travail du 18 février 2011, les troubles ayant été réactivés par la situation professionnelle de suspension de fonctions au mois de septembre 2013 ", l'attestation du même docteur A... du 2 septembre 2020 produite au dossier d'appel lève toute ambiguïté et confirme l'absence de lien entre ces pathologies. Dans ces conditions, la pathologie dépressive de la requérante, apparue plus de six ans après l'évènement du 18 février 2011, ne peut être regardée comme secondaire à l'accident de service dont l'imputabilité au service a été reconnue.
5. Mme C... soutient néanmoins que le développement de sa pathologie dépressive est lié à son travail. Elle se prévaut en particulier d'un certificat du 24 avril 2017 émanant d'un psychiatre évoquant un " état d'effondrement majeur avec angoisse au premier plan, tonalité dépressive, trouble du sommeil, douleur diffuse en regard de grosses difficultés professionnelles. Accusée de faute grave (qu'elle ne comprenait pas) avec mise à pied. (...) Cet état a perduré du fait des longues procédures et nécessité un traitement anxiolytique et antidépresseur (...) ". Le certificat d'un autre médecin psychiatre en date du 5 décembre 2019 indique que les pathologies de l'intéressée sont " liées au travail et au contexte professionnel particulier dans lequel Mme C... a été contrainte d'évoluer (mise à pied, absence de soutien de son administration face à ses difficultés professionnelles, multiplication des procédures) ". Il ressort effectivement des pièces du dossier que Mme C... a fait l'objet, au mois de septembre 2013, d'une suspension de fonction à titre conservatoire, suivie d'une sanction d'exclusion de ses fonctions pour une durée de neuf mois avec sursis, prise à compter du 6 février 2014. Cette sanction a été annulée par un jugement, devenu définitif en l'absence d'appel, du tribunal administratif de Lyon du 13 décembre 2016, en l'absence de matérialité de la quasi-totalité des griefs reprochés à l'intéressée et du défaut de proportionnalité de la sanction aux motifs établis. Toutefois, si la requérante se prévaut de la dégradation de son état de santé suite à la sanction qui lui a été infligée, les arrêts de travail en litige couvrent une période postérieure de plusieurs années. Le rapport du Dr A..., médecin agréé, qui a fondé l'avis défavorable de la commission de réforme lors de sa séance du 6 septembre 2018, a d'ailleurs estimé, dans ses conclusions administratives du 12 février 2018, que les arrêts de travail pour maladie du 11 mars au 31 octobre 2017 relèvent de la maladie ordinaire et pas de la maladie professionnelle, en faisant état de l'existence d'une pathologie indépendante évoluant pour son propre compte. Dans ces conditions, il ne peut être regardé comme établi que la pathologie dépressive de Mme C... serait en lien direct avec ses conditions de travail.
6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la commune de Saint-Etienne ni d'ordonner une expertise, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
7. Le présent arrêt qui rejette les conclusions de la demande de Mme C... dirigées contre la décision du 24 septembre 2018, n'appelle aucune mesure d'exécution. Ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent dès lors qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la requérante demande au titre des frais qu'elle a exposés soit mise à la charge de la commune de Saint-Etienne, qui n'est pas partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au même titre par cette commune.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Etienne tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et à la commune de Saint-Etienne.
Copie en sera adressée à la préfète de la Loire.
Délibéré après l'audience du 13 septembre 2022 à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président,
M. Gilles Fédi, président-assesseur,
Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 septembre 2022.
La rapporteure,
Bénédicte LordonnéLe président,
Jean-Yves Tallec
La greffière,
Sandra Bertrand
La République mande et ordonne à la préfète de la Loire en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 20LY02560