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14/09/2022 | FRANCE | N°20LY00410

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 14 septembre 2022, 20LY00410


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler la décision, en date du 7 avril 2017, par laquelle le maire de Lyon a résilié le contrat à durée déterminée dont il bénéficiait ;

2°) d'enjoindre au maire de Lyon de le réintégrer dans ses fonctions ;

3°) de mettre à la charge de la ville de Lyon une somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler la décision, en date du 7 avril 2017, par laquelle le maire de Lyon a résilié le contrat à durée déterminée dont il bénéficiait ;

2°) d'enjoindre au maire de Lyon de le réintégrer dans ses fonctions ;

3°) de mettre à la charge de la ville de Lyon une somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1706324 du 4 juillet 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 28 janvier 2020 et 31 janvier 2020, M. B..., représenté par Me Bapceres, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 4 juillet 2019 et la décision, en date du 7 avril 2017, par laquelle le maire de Lyon a résilié le contrat à durée déterminée dont il bénéficiait ;

2°) d'enjoindre au maire de Lyon de le réintégrer dans ses fonctions ;

3°) de mettre à la charge de la ville Lyon une somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

M. B... soutient que

- le jugement est entaché d'erreur de droit en ce qu'il a jugé que la procédure de licenciement a été respectée, dès lors que les dispositions relatives au préavis n'ont pas été méconnues ;

- le motif de la décision, tiré de ce qu'il aurait dépassé la limite d'âge d'exercice de ses fonctions, fixée selon la commune à 65 ans, est erroné, de sorte que cette décision est dépourvue de base légale ;

- la décision de licenciement doit s'analyser comme l'abrogation irrégulière de la décision d'embauche qui constitue une décision créatrice de droit.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 avril 2020, la commune de Lyon représentée par Me Conti :

1°) conclut au rejet de la requête ;

2°) et demande qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune de Lyon fait valoir que les moyens présentés par le requérant ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 17 juin 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 15 septembre 2021.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 novembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 ;

- la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 2011-2103 du 30 décembre 2011 portant relèvement des bornes d'âge de la retraite des fonctionnaires, des militaires et des ouvriers de l'Etat ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Fédi, président-assesseur,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me Bapceres, représentant M. B..., et celles de Me Magana, représentant la ville de Lyon.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B... a été recruté, à compter du 1er septembre 2016 et jusqu'au 14 juillet 2017, en tant que surveillant des écoles au sein de la police municipale de la ville de Lyon par un contrat à durée déterminée. Par une décision du 7 avril 2017, le maire de Lyon a résilié ce contrat. Le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M. B... par un jugement du 4 juillet 2019 dont il relève appel.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 6-1 de la loi du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public, créé par l'article 115 de la loi du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique : " I. - Sous réserve des exceptions légalement prévues par des dispositions spéciales, la limite d'âge des agents contractuels employés par les administrations de l'Etat, les collectivités territoriales, leurs établissements publics ne présentant pas un caractère industriel et commercial, les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ainsi que par toutes autres personnes morales de droit public recrutant sous un régime de droit public est fixée à soixante-sept ans. II. - La limite d'âge mentionnée au I est, le cas échéant, reculée conformément aux dispositions de l'article 4 de la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté, sans préjudice des règles applicables en matière de recrutement, de renouvellement et de fin de contrat. III - Après application, le cas échéant, du II du présent article, les agents contractuels dont la durée d'assurance tous régimes est inférieure à celle définie à l'article 5 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites peuvent sur leur demande, sous réserve de l'intérêt du service et de leur aptitude physique et sans préjudice des règles applicables en matière de recrutement, de renouvellement et de fin de contrat, être maintenus en activité. Cette prolongation d'activité ne peut avoir pour effet de maintenir l'agent concerné en activité au-delà de la durée d'assurance définie au même article 5, ni au-delà d'une durée de dix trimestres. ". L'article 115 de la loi du 12 mars 2012 dispose que : " La limite d'âge mentionnée au I de l'article 6-1 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public évolue dans les conditions fixées par le décret prévu au II de l'article 28 de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites. ". Selon l'article 28 de la loi du 9 novembre 2010 : " I - Pour les fonctionnaires relevant de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée dont la limite d'âge était de soixante-cinq ans en application des dispositions législatives et réglementaires antérieures à l'entrée en vigueur de la présente loi et nés à compter du 1er janvier 1955, la limite d'âge est fixée à soixante-sept ans. II. ' Cette limite d'âge est fixée par décret dans la limite de l'âge mentionné au I pour les fonctionnaires atteignant avant le 1er janvier 2015 l'âge d'ouverture du droit à une pension de retraite applicable antérieurement à la présente loi et, pour ceux atteignant cet âge entre le 1er juillet 2011 et le 31 décembre 2014, de manière croissante à raison : 1° De quatre mois par génération pour les fonctionnaires atteignant cet âge entre le 1er juillet et le 31 décembre 2011 ; 2° De cinq mois par génération pour les fonctionnaires atteignant cet âge entre le 1er janvier 2012 et le 31 décembre 2014 ". Aux termes de l'article 8 du décret du 30 décembre 2011 portant relèvement des bornes d'âge de la retraite des fonctionnaires, des militaires et des ouvriers de l'Etat, auquel se réfère le II de l'article 28 de la loi du 9 novembre 2010 et abrogeant, pour l'essentiel et notamment son article 5, le précédent décret portant relèvement des bornes d'âge de la retraite des fonctionnaires des militaires et des ouvriers des établissements industriels de l'Etat du 28 juin 2011 : " Comme il est dit aux II des articles 28 et 31 de la loi du 9 novembre 2010 susvisée, les limites d'âge applicables aux agents nés avant les dates mentionnées aux I de ces mêmes articles sont fixées, à titre transitoire, pour ceux atteignant avant le 1er janvier 2015 l'âge d'ouverture du droit à une pension de retraite qui leur était applicable avant l'entrée en vigueur de ladite loi, de manière croissante à raison : 1° De quatre mois par génération pour les fonctionnaires atteignant cet âge entre le 1er juillet et le 31 décembre 2011 ; 2° De cinq mois par génération pour les fonctionnaires atteignant cet âge entre le 1er janvier 2012 et le 31 décembre 2014. ".

3. Si la limite de soixante-sept ans fixée par l'article 6-1 de la loi du 13 septembre 1984 est applicable, ainsi qu'il ressort des travaux parlementaires qui ont précédé l'adoption de cet article, à l'ensemble des agents non-titulaires des employeurs publics qu'il énumère, il résulte du II. de l'article 115 de la loi du 12 mars 2012, combiné aux dispositions de l'article 8 du décret du 30 décembre 2011, que cette limite d'âge n'est pas applicable aux agents nés avant le 1er janvier 1955 et qu'elle demeure fixée à soixante-cinq ans pour ceux nés avant le 1er juillet 1951, ceux-ci ayant atteint l'âge d'ouverture du droit à une pension de retraite qui leur était précédemment applicable avant le 1er juillet 2011.

4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que, pour les agents contractuels de la fonction publique, la limite d'âge applicable est celle de soixante-cinq ans augmentée de quatre ou cinq mois par génération dans la limite de l'âge de soixante-sept ans. Dès lors que M. B..., né le 2 septembre 1948, qui avait atteint l'âge de soixante-huit ans, à la date de signature de son contrat à durée déterminée le 19 septembre 2016, ne justifie pas entrer dans le champ d'application du II de l'article 6-1 de la loi du 13 septembre 1984, il ne peut utilement se prévaloir du bénéfice de ces dispositions. En outre, si l'appelant soutient qu'il a cumulé un total de vingt-et-un trimestres d'assurance, durée très inférieure à la durée d'assurance de cent soixante trimestres prévue par la loi et qu'il était donc en droit d'être maintenu dans ses fonctions, pour une durée totale pouvant aller jusqu'à dix trimestres, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'agent n'a pas présenté, antérieurement à la décision litigieuse, de demande pour être maintenu en activité en application du III de l'article 6-1 de la loi du 13 septembre 1984, alors même que le maintien en activité, qui n'est pas de droit, reste subordonné à l'intérêt du service et aux conditions d'aptitude physique de l'agent.

5. Sauf s'il présente un caractère fictif ou frauduleux, le contrat de recrutement d'un agent contractuel de droit public crée normalement des droits au profit de celui-ci. En revanche, il ne saurait en créer en tant qu'il porterait sur une période postérieure à la limite d'âge, dès lors que la seule survenance de cette limite, définie par voie législative ou réglementaire, entraîne de plein droit la rupture de tout lien entre l'agent concerné et le service. Ainsi, en dehors des hypothèses expressément prévues par les dispositions précitées de l'article 6-1 de la loi du 13 septembre 1984, une collectivité territoriale ne peut procéder au recrutement ou au maintien en fonctions d'un agent contractuel au-delà de la limite d'âge applicable à l'intéressé. Les décisions administratives individuelles prises en méconnaissance de cette règle sont entachées d'un vice qui doit les faire regarder comme nulles et non avenues et ne sauraient, en conséquence, faire naître aucun droit au profit des intéressés. De même, le contrat de recrutement d'un agent ayant atteint la limite d'âge ne peut pas davantage faire naître de droits à son profit et doit être également déclaré nul et non avenu. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée abrogerait illégalement, en méconnaissance de l'article L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration, la décision individuelle créatrice de droits qui a procédé à son recrutement.

6. Le maire de Lyon, qui s'est borné, pour édicter la décision contestée, à constater que M. B... avait atteint la limite d'âge, sans avoir à porter une appréciation sur les faits de l'espèce, était tenu de mettre fin au contrat liant l'agent à la ville. Par suite, les moyens procéduraux tirés de la méconnaissance des articles 40 et 42 du décret du 15 février 1988 doivent être écartés comme inopérants.

7. Il résulte de tout ce qui précède, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions présentées aux fins d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Lyon, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. B.... Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce dernier le paiement des frais exposés par la commune de Lyon au titre de ces mêmes dispositions.

D E C I D E:

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Lyon présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune de Lyon.

Délibéré après l'audience du 30 août 2022, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 septembre 2022.

Le rapporteur,

Gilles FédiLe président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Sandra Bertrand

La République mande et ordonne au préfet du Rhône en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 20LY00410


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY00410
Date de la décision : 14/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-10-06-02 Fonctionnaires et agents publics. - Cessation de fonctions. - Licenciement. - Auxiliaires, agents contractuels et temporaires.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Gilles FEDI
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : DBKM AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-09-14;20ly00410 ?
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