Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La société à responsabilité limitée (SARL) Maison Peguet a demandé au tribunal administratif de Lyon, à titre principal, la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires de cotisation foncière des entreprises mises à sa charge au titre des années 2014 à 2016 et, à titre subsidiaire, d'exclure de la base d'imposition, sur le fondement de l'article 1499 du code général des impôts, des immobilisations correspondant à un montant total de 36 628 euros.
Par un jugement n° 1902265 du 5 octobre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 4 décembre 2020 et 29 juin 2021, la SARL Maison Peguet, représentée par Me Dionisi, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 5 octobre 2020 et lui accorder la décharge ou la réduction sollicitées ;
2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les bâtiments occupés situés ZA Les sapins 69400 Porte des pierres dorées ne peuvent être qualifiés de bâtiments industriels dès lors que l'approche quantitative du critère de la prépondérance des installations techniques, matériels et outillages conduit à exclure cette qualification ; la valeur des constructions est de 1 042 347 euros alors que celle des matériels et outillages ressortant des comptes de classe 2 " matériel et outillage " et " matériel R. Peguet " est de 496 003 euros ;
- à titre subsidiaire, elle soutient que si l'établissement doit être qualifié d'industriel, deux éléments doivent être distraits de la valeur locative à savoir la passerelle d'une valeur d'achat de 12 500 euros dès lors qu'il s'agit d'un bien d'équipement spécialisé entrant dans le champ du 11°) de l'article 1382 du code général des impôts ainsi que des travaux de réparation de la toiture pour un montant de 24 128 euros qui constituent des travaux d'entretien et de réparation.
Par deux mémoires, enregistrés les 10 juin 2021 et 1er juillet 2022 (non communiqué), le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.
Une ordonnance du 8 février 2022 a fixé la clôture de l'instruction au 8 mars 2022.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère ;
- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. A la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration fiscale a mis à la charge de la SARL Maison Peguet, par courrier du 11 juillet 2017, des compléments en matière de cotisation foncière des entreprises au titre des années 2014 à 2016 au motif que les bâtiments occupés situés ZA Les sapins 69400 Porte des pierres dorées étaient des bâtiments industriels. La SARL Maison Peguet relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant, à titre principal, à la décharge des impositions restant en litige, et, à titre subsidiaire, que soient exclues de la base d'imposition des immobilisations correspondant à un montant total de 36 628 euros.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France (...) dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478 (...) ". Aux termes de l'article 1499 du même code : " La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments, revalorisé à l'aide des coefficients (2) qui avaient été prévus pour la révision des bilans, des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d'État (3) (...) ".
3. Revêtent un caractère industriel, au sens de ce dernier article, les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant. Il incombe au juge de l'impôt de rechercher le rôle joué par ces moyens de production dans les opérations pour lesquelles l'immeuble à évaluer était principalement utilisé.
4. La SARL Maison Peguet exerce à titre principal une activité d'embouteillage à façon dans des bâtiments situés ZA Les sapins 69400 Porte des pierres dorées pour laquelle elle dispose d'un bâtiment de production d'une superficie totale de 1 260 m² à usage d'entrepôt et de bureau dont 360 m² à usage d'embouteillage, ainsi que d'un bâtiment d'une superficie de 450 m² à usage de matières sèches. Elle exerce également une activité accessoire de stockage de vins pour ses clients dans une partie de la superficie de ces locaux. Il est constant que la valeur des constructions est de 1 042 347 euros alors que celle des matériels et outillages ressortant des comptes de classe 2 " matériel et outillage " et " matériel R. Peguet " s'élève au titre des exercices clos en 2014, 2015 et 2016 respectivement à 446 864 euros, 496 003 euros et 569 549 euros. Il résulte de l'instruction que l'intégralité du processus d'embouteillage des vins et spiritueux est effectué à l'aide de machines. Le vin est mis en bouteilles, celles-ci étant préalablement nettoyées à l'aide de laveuses et des nettoyeurs haute pression, au moyen de pompes, par un système de circulation automatique grâce à des convoyeurs à bandes motorisées. Les bouteilles sont ensuite encapsulées, serties, étiquetées et conditionnées en cartons ou en cubitainers à l'aide de machines. Ainsi, le rôle prépondérant des matériels utilisés dans le processus d'exploitation confère à l'établissement en litige un caractère industriel au sens de l'article 1499 du code général des impôts, alors même que la superficie des locaux affectée à la chaîne d'embouteillage n'occupe qu'une superficie de 360 m² sur les 1710 m² de l'ensemble immobilier et que la part de l'outillage, en valeur comptable, au sein de l'ensemble des immobilisations, est minoritaire. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a estimé que les immobilisations en litige revêtaient un caractère industriel et a retenu la méthode d'évaluation comptable définie par ces dispositions.
5. En deuxième lieu, pour apprécier, en application de l'article 1495 du code général des impôts et de l'article 324 B de son annexe III, la consistance des propriétés qui entrent, en vertu de ses articles 1380 et 1381, dans le champ de la taxe foncière sur les propriétés bâties, il est tenu compte, non seulement de tous les éléments d'assiette mentionnés par ces deux derniers articles mais également des biens faisant corps avec eux. Sont toutefois exonérés de cette taxe, en application du 11° de l'article 1382 du même code, ceux de ces biens qui font partie des outillages, autres installations et moyens matériels d'exploitation d'un établissement industriel, c'est-à-dire ceux de ces biens qui relèvent d'un établissement qualifié d'industriel au sens de l'article 1499, qui sont spécifiquement adaptés aux activités susceptibles d'être exercées dans un tel établissement et qui ne sont pas au nombre des éléments mentionnés aux 1° et 2° de l'article 1381.
6. Si la société requérante soutient, à titre subsidiaire et dans l'hypothèse où les bâtiments occupés seraient qualifiés d'industriels, que la passerelle qu'elle a comptabilisée dans le compte 215 " matériels et outillages ", d'une valeur de 12 500 euros, est un bien d'équipement mobilier spécialisé exonéré de la taxe foncière sur les propriétés bâties, elle se borne à soutenir que celle-ci a été installée pour des raisons de facilitation des accès et qu'elle pourrait être déposée sans endommager le bâti, sans apporter aucune précision sur le fait que cet équipement puisse être spécifiquement adapté aux activités susceptibles d'être exercées dans l'établissement. Par suite, tel qu'il est présenté, ce moyen ne peut qu'être écarté.
7. En dernier lieu, le prix de revient des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière, évalué selon la méthode comptable, est celui qui est inscrit à l'actif du bilan. L'administration peut se fonder sur les énonciations comptables opposables à la société pour inclure dans la valeur locative des immobilisations le montant des travaux inscrits en tant qu'immobilisations, sauf pour la société à démontrer que ces travaux constitueraient en réalité des charges déductibles ou qu'elle aurait inscrit en tant qu'immobilisations des biens exclus par nature des bases imposables à la taxe foncière pour les propriétés bâties ou exonérés de celles-ci.
8. La société requérante soutient également, à titre subsidiaire et dans l'hypothèse où les bâtiments occupés seraient qualifiés d'industriels, que les travaux de réfection de la toiture d'un montant de 24 128 euros, comptabilisés au compte 2135 " constructions et agencements " constituent des travaux d'entretien et de réparation qui doivent être distraits de la base imposable. Toutefois, la facture du 12 mars 2013 qu'elle produit concernent des travaux de réhabilitation de locaux commerciaux et de stockage portant sur la pose et la réfection de caniveaux et canalisations. Cette facture n'atteste pas de la nature et la consistance de travaux d'entretien. Tel qu'il est présenté, ce moyen ne peut donc qu'être écarté.
9. Il résulte de ce qui précède que la SARL Maison Peguet n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'État qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la SARL Maison Peguet la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Maison Peguet est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Maison Peguet et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 7 juillet 2022 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre ;
Mme Dèche, présidente assesseure ;
Mme Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 août 2022.
La rapporteure,
V. Rémy-Néris
Le président,
F. Bourrachot
La greffière,
S. Lassalle
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 20LY03550
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