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04/08/2022 | FRANCE | N°21LY01778

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 04 août 2022, 21LY01778


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer, en droits et pénalités, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales mises à sa charge au titre des années 2014, 2015 et 2016.

Par un jugement n° 1903164 du 6 avril 2021, le tribunal administratif de Lyon a décidé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions présentées par M. A... tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des

prélèvements sociaux au titre de l'année 2014, à concurrence de la somme de 21 741 eu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer, en droits et pénalités, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales mises à sa charge au titre des années 2014, 2015 et 2016.

Par un jugement n° 1903164 du 6 avril 2021, le tribunal administratif de Lyon a décidé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions présentées par M. A... tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux au titre de l'année 2014, à concurrence de la somme de 21 741 euros (article 1er) et a rejeté le surplus de sa demande (article 2).

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 2 juin 2021, M. A..., représenté par Me Teissier, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 6 avril 2021, en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités susmentionnées restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice.

Il soutient que :

- en procédant à une substitution de motifs qui n'avait pas été demandée par l'administration, et de surcroit sans en informer les parties, le tribunal a entaché sa décision d'irrégularité ;

- la procédure de taxation d'office mise en œuvre au titre des revenus des années 2014 et 2015 est irrégulière dès lors qu'il a répondu, par courriel de son expert-comptable, à la demande de justifications qui lui a été adressée par le service ;

- il a accompli toutes les diligences nécessaires pour que son bien soit reloué dans les meilleurs délais, notamment en accord avec la doctrine BOI-RFPI-SPEC-20-20-20, n° 30.

Par un mémoire enregistré le 27 octobre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le requérant ne rapporte pas la preuve de l'existence d'une réponse à la demande de justifications, et de sa bonne réception dans les délais impartis alors qu'aucune justification d'un mandat donné à l'expert-comptable de M. A... n'a été produite. ;

- le motif tiré de ce que l'intéressé n'a pas justifié de l'accomplissement de de toutes les diligences nécessaires pour que le bien puisse être reloué n'a pas été soulevé d'office par le tribunal ;

- aucun élément justifiant, notamment, de la réalité des démarches invoquées et de la baisse effective des loyers proposés n'a été produit par le requérant.

Par lettre du 19 mai 2022, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la cour était susceptible de soulever d'office le moyen tiré de l'inapplicabilité de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales pour imposer les redressements issus des amortissements pratiqués dans le cadre du dispositif dit " B... recentré " dans la catégorie des revenus fonciers.

Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique a présenté des observations en réponse au moyen relevé d'office le 17 juin 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- les observations de Me de Lagarde, représentant M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A... a acquis, par acte notarié du 27 mai 2008, un bien immobilier en l'état futur d'achèvement, situé 4 rue des Ménestrels à Avignonnet-Lauragais (Haute-Garonne). Il a fait l'objet d'un contrôle sur pièces de ses déclarations de revenus souscrites au titre des années 2014 à 2016, à l'issue duquel, par deux propositions de rectification en date des 14 décembre 2017 et 13 février 2018, l'administration fiscale lui a notifié des rectifications à raison notamment des amortissements pratiqués dans le cadre du dispositif dit " B... recentré " pour ce bien immobilier. Par un jugement du 6 avril 2021, le tribunal administratif de Lyon a décidé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions présentées par M. A... tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux au titre de l'année 2014, à concurrence de la somme de 21 741 euros (article 1er) et a rejeté le surplus de sa demande (article 2). M. A... relève appel de l'article 2 de ce jugement.

2. Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ". Aux termes de l'article R. 194-1 du même livre : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. (...) ".

3. D'une part, les rectifications en matière d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux des années 2014 et 2015 ont été opérées selon la procédure de taxation d'office prévue par les dispositions de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales. D'autre part, les rectifications d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux de l'année 2016 procèdent de rectifications notifiées selon la procédure contradictoire par une proposition de rectification du 13 février 2018 à laquelle le requérant s'est abstenu de répondre. En application des dispositions des articles L. 193 et R. 194-1 du livre des procédures fiscales, il appartient à M. A... de démontrer le caractère exagéré de ces impositions.

4. Aux termes de l'article 31 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : 1° Pour les propriétés urbaines : (...) h) Pour les logements situés en France, acquis neufs ou en l'état futur d'achèvement entre le 3 avril 2003 et le 31 décembre 2009, et à la demande du contribuable, une déduction au titre de l'amortissement égale à 6 % du prix d'acquisition du logement pour les sept premières années et à 4 % de ce prix pour les deux années suivantes. La période d'amortissement a pour point de départ le premier jour du mois de l'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure. La déduction au titre de l'amortissement est applicable, dans les mêmes conditions, aux logements que le contribuable fait construire et qui ont fait l'objet, entre le 3 avril 2003 et le 31 décembre 2009, de la déclaration d'ouverture de chantier prévue à l'article R. 421-40 du code de l'urbanisme. (...) Le bénéfice de la déduction est subordonné à une option qui doit être exercée lors du dépôt de la déclaration des revenus de l'année d'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure. Cette option est irrévocable pour le logement considéré et comporte l'engagement du propriétaire de louer le logement nu pendant au moins neuf ans à usage d'habitation principale à une personne autre qu'un membre de son foyer fiscal. Cette location doit prendre effet dans les douze mois qui suivent la date d'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure. (...) ".

5. La circonstance qu'un logement soit resté vacant pendant une longue période n'est pas, à elle seule, de nature à faire regarder un contribuable comme n'ayant pas respecté l'engagement de location qu'il avait souscrit afin de bénéficier de l'amortissement institué par les dispositions du h du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts, dès lors qu'il établit, par les pièces qu'il produit, avoir accompli les diligences nécessaires pour que son logement soit rapidement reloué après le départ de son locataire.

6. M. A... a acquis le 27 mai 2008, un logement, situé 4 rue des Ménestrels à Avignonnet-Lauragais, qu'il a loué du 1er février 2010 jusqu'au 1er décembre 2012, puis de nouveau à compter du 5 juillet 2014. L'administration a estimé qu'à défaut de location continue, il ne pouvait pas bénéficier du dispositif prévu par le h) précité du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts et a, en conséquence réintégré dans les revenus fonciers des années en litige les amortissements déduits à compter de l'année 2010.

7. Le requérant produit une attestation de la responsable du service location de la société Gedim en charge de la gestion locative de son appartement depuis 2010 qui indique notamment que " dès réception du préavis de départ des locataires sortants, toutes les actions commerciales ont été menées afin de relouer ce bien, notamment, grâce à la communication sur les sites " Se Loger ", " Le Bon Coin ", " Explorimmo ", " La Dépêche ", " Bien Ici ", " A Vendre à louer ", " Annonces Jaunes ", " Fnaim " et notre site " GEDIM " et que " son bien est situé sur une zone non tendue où la demande locative est quasi inexistante ". Ce document atteste également que l'intéressé a réalisé des travaux de peinture afin d'en faciliter la location. Dès lors, dans les circonstances de l'espèce, M. A... établit avoir accompli les diligences nécessaires pour que son bien puisse être reloué après le départ du locataire et, par suite, comme n'ayant pas rompu l'engagement qu'il avait pris conformément aux dispositions précitées du h du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts. Par suite, il est fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration a remis en cause la déduction des amortissements prévue par lesdites dispositions pour la détermination du revenu foncier imposable.

8. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement, ni sur les autres moyens de la requête, M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté le surplus sa demande.

Sur les frais liés au litige :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 2 du jugement n° 1903164 du 6 avril 2021 du tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : M. A... est déchargé, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales restant en litige mises à sa charge au titre des années 2014, 2015 et 2016.

Article 3 : L'Etat versera à M. A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 23 juin 2022 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Le Frapper, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition le 4 août 2022.

La rapporteure,

P. Dèche

Le président,

F. Bourrachot

La greffière,

A-C. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY01778

ap


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY01778
Date de la décision : 04/08/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu - Établissement de l'impôt - Taxation d'office - Pour défaut de réponse à une demande de justifications (art - L - 16 et L - 69 du livre des procédures fiscales).

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus fonciers.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : TEISSIER

Origine de la décision
Date de l'import : 23/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-08-04;21ly01778 ?
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