Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon :
- d'une part, d'annuler l'arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 7 août 2020 qui lui a refusé un titre de séjour et l'a obligé à quitter la France dans le délai de trente jours vers le Mali ;
- d'autre part, d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or de lui délivrer un titre de séjour.
Par jugement n° 2002429 du 27 avril 2021, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par requête, enregistrée le 1er juin 2021, présentée pour M. A..., il est demandé à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 2002429 du tribunal administratif de Dijon du 27 avril 2021 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté susmentionné ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or de lui délivrer une carte de séjour temporaire " salarié ", dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt et sous astreinte de 200 euros par jour de retard, subsidiairement de réexaminer sa situation dans le même délai ;
4°) de mettre à la charge de l'État le paiement d'une somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé ;
- le préfet n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, que les informations sur son état civil figurant dans les documents produits ne correspondent pas à la réalité et il ne pouvait, dès lors, se fonder, pour refuser le titre de séjour sollicité, sur le motif tiré de ce qu'il n'était pas en mesure de justifier de son identité ; le refus de titre méconnaît l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- le refus de lui accorder un délai de départ d'une durée supérieure à trente jours est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par mémoire, enregistré le 2 avril 2022, présenté pour le préfet de la Côte-d'Or, il conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 500 euros soit mise à la charge de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par décision du 7 juillet 2021.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le décret n° 2015-1740 du 24 décembre 2015 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Seillet, président-assesseur ;
- et les observations de Me D'Ovidio, pour le préfet de la Côte-d'Or ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., se présentant comme un ressortissant de nationalité malienne né le 1er juin 2001 à Bamako (Mali), qui déclare être entré en France le 5 novembre 2017 avant d'être pris en charge par le service d'aide sociale à l'enfance du département de la Côte-d'Or, a fait l'objet d'un arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 7 août 2020 refusant de lui délivrer un titre de séjour, portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignation du pays de renvoi. Il relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du refus de séjour en litige, déjà soulevé en première instance, doit être écarté pour les motifs retenus par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter.
3. En deuxième lieu, aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel (...), la carte de séjour temporaire prévue aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française (...) ".
4. Aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil (...) ", lequel dispose que " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". En vertu de l'article 1er du décret du 24 décembre 2015 susvisé relatif aux modalités de vérification d'un acte de l'état-civil étranger : " Lorsque, en cas de doute sur l'authenticité ou l'exactitude d'un acte de l'état civil étranger, l'autorité administrative saisie d'une demande d'établissement ou de délivrance d'un acte ou de titre procède ou fait procéder, en application de l'article 47 du code civil, aux vérifications utiles auprès de l'autorité étrangère compétente, le silence gardé pendant huit mois vaut décision de rejet (...) ".
5. Il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'en cas de doute sur l'authenticité ou l'exactitude d'un acte de l'état civil étranger et pour écarter la présomption d'authenticité dont bénéficie un tel acte, l'autorité administrative procède aux vérifications utiles ou y fait procéder auprès de l'autorité étrangère compétente. L'article 47 du code civil précité pose une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère dans les formes usitées dans ce pays. Il incombe donc à l'administration de renverser cette présomption en apportant la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non conforme à la réalité des actes en question. En revanche, l'administration française n'est pas tenue de solliciter nécessairement et systématiquement les autorités d'un autre État afin d'établir qu'un acte d'état civil présenté comme émanant de cet État est dépourvu d'authenticité, en particulier lorsque l'acte est, compte tenu de sa forme et des informations dont dispose l'administration française sur la forme habituelle du document en question, manifestement falsifié.
6. A l'appui de sa demande de titre de séjour, M. A... a produit, outre un passeport malien, un acte de naissance dressé le 11 octobre 2017 et un jugement supplétif d'acte de naissance du 9 octobre 2017. Toutefois, le préfet de la Côte-d'Or, pour remettre en cause la force probante de ces documents, s'est fondé sur l'expertise de ces documents effectuée, le 9 août 2019, par les services de la fraude documentaire et à l'identité de la direction interdépartementale de la police aux frontières (DIDPAF) de Pontarlier, qui avait alors conclu à la contrefaçon de ces documents. Il ressort, en particulier, d'un rapport rédigé le 11 septembre 2020 par ce service et produit en première instance par le préfet de la Côte-d'Or, que l'acte de naissance comportait des informations erronées, concernant notamment la date du jugement supplétif sur la base duquel cet acte avait été dressé et la mention du déclarant, et que ce jugement supplétif, caractérisé par un formalisme aléatoire, une absence d'alignement des mentions et l'absence de la mention " pour extrait certifié conforme ", présentait également les caractéristiques d'une contrefaçon. Dans ces conditions, nonobstant la production par M. A..., qui ne peut se prévaloir de la force probante d'un passeport et d'une carte consulaire qui ne constituent pas des documents d'état civil pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et de l'article 47 du code civil auquel il renvoie, d'une copie littérale d'acte de naissance qui comporte la même information erronée concernant la date du jugement supplétif, le préfet a pu en déduire que les documents d'état civil produits à l'appui de la demande de titre de séjour étaient entachés de fraude, et ne pouvaient par suite être regardés comme faisant foi. Dès lors, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige par laquelle le préfet de la Côte-d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour méconnaît les dispositions précitées de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. En dernier lieu, M. A..., célibataire et sans charge de famille, a vécu la majeure partie de son existence au Mali où il a conservé des attaches familiales, notamment un frère. Dans ces conditions, en dépit des études qu'il suit et des liens sociaux qu'il a pu nouer en France, il n'est pas fondé à soutenir que le refus de séjour porterait une atteinte excessive à son droit de mener une vie privée et familiale normale protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni qu'il serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de séjour au soutien de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français. Pour les motifs exposés au point 7 les moyens tirés d'une atteinte excessive à son droit de mener une vie privée et familiale normale protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation doivent être écartés.
Sur le refus de lui accorder un délai de départ supérieur à trente jours :
9. Aux termes des dispositions alors codifiées au II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " II. - L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. (...) ". M. A... s'est vu accorder le délai de départ volontaire de droit commun, pour exécuter l'obligation d'éloignement. Sa scolarisation n'est pas de nature à faire regarder un tel délai comme manifestement insuffisant pour mettre à exécution ladite mesure.
Sur la légalité de la fixation du pays de renvoi :
10. Les conclusions de la demande de M. A... dirigées contre la décision fixant le pays de destination ont été rejetées par les premiers juges comme irrecevables, au motif que de telles conclusions n'étaient assorties d'aucun moyen soulevé à leur appui. Dès lors que le requérant ne critique pas le motif d'irrecevabilité que lui a opposé le tribunal et alors qu'il n'appartient pas à la cour de s'interroger d'office sur son bien-fondé, ces conclusions, reprises en appel, doivent être rejetées.
11. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et tendant à la mise à la charge de l'État d'une somme au titre des frais liés au litige.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.
Délibéré après l'audience du 7 juillet 2022 à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme Burnichon, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 août 2022.
Le rapporteur,
Ph. SeilletLe président,
Ph. Arbarétaz
La greffière,
A. Le Colleter
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 21LY01738