Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les arrêtés des 30 avril et 18 septembre 2018 par lesquels le maire de Manigod lui a refusé deux permis de construire un chalet d'habitation individuelle.
Par un jugement n° 1804066, 1807112 du 8 octobre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a, après les avoirs jointes, prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 avril 2018 et rejeté le surplus de la demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 7 décembre 2020 et 28 février 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, M. A..., représenté par la Selarl Gaillard Oster Associés, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 8 octobre 2020 en tant qu'il a rejeté ses conclusions à fin d'annulation dirigées contre l'arrêté du 18 septembre 2018 et d'annuler cet arrêté ;
2°) de mettre une somme de 2 500 euros à la charge de la commune de Manigod au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier ; c'est à tort que le tribunal a estimé que l'ensemble des moyens soulevés contre le refus de permis de construire en litige étaient irrecevables dès lors que le maire de Manigod était tenu de refuser le permis compte tenu de l'avis défavorable au projet du préfet de la Haute-Savoie ;
- l'avis du Préfet de la Haute-Savoie du 28 août 2018 est illégal et entache d'illégalité le refus de permis de construire en litige ;
- le projet ne méconnaît pas l'article L. 122-10 du code de l'urbanisme ; en se bornant à indiquer que la parcelle d'assiette du projet est inscrite au régime parcellaire graphique des exploitations agricoles et exploitée en prairie par un exploitant situé sur la commune, le préfet et la commune ne démontrent pas l'atteinte à la préservation des terres nécessaires à l'activité agricole ;
- le projet ne méconnaît pas l'article L. 122-5 du même code ; il est situé en continuité d'un groupe de huit constructions existantes ;
- le maire ne pouvait sans entacher d'illégalité, opposer la méconnaissance de la loi Montagne pour refuser le permis de construire sollicité, alors que cette demande de permis a été déposée dans le délai de dix-huit mois suite à l'obtention d'un certificat d'urbanisme opérationnel favorable à l'opération.
Par un mémoire enregistré le 26 janvier 2022, la ministre de la transition écologique, conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Par un mémoire enregistré le 9 février 2022, la commune de Manigod, représentée par Me Philippe, conclut au rejet de la requête et à ce que M. A... lui verse la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
La clôture de l'instruction a été fixée au 1er mars 2022 par une ordonnance 14 février précédent prise sur le fondement de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Christine Psilakis, première conseillère,
- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,
- les observations de Me Philippe, représentant la commune de Manigod.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., propriétaire d'un terrain situé au lieu-dit ... sur le territoire de la commune de Manigod, relève appel du jugement du 8 octobre 2020 en tant que le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 18 septembre 2018 par lequel le maire de la commune de Manigod a refusé de lui délivrer un permis de construire un chalet d'habitation individuelle.
Sur la régularité du jugement :
2. M. A... soutient que le jugement attaqué est irrégulier en ce que les premiers juges ont considéré à tort que les moyens soulevés à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté en litige étaient inopérants, le maire de Manigod étant tenu de refuser le permis de construire sollicité au visa de l'avis défavorable au projet rendu par le préfet de la Haute-Savoie en application de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme et en l'absence de plan d'occupation des sols ou de plan local d'urbanisme en vigueur sur le territoire de la commune. Toutefois, ce moyen relatif au bien-fondé du jugement est sans incidence sur sa régularité.
Sur la légalité de l'arrêté du 18 septembre 2018 :
3. Aux termes de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme : " Lorsque le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale est compétent, il recueille l'avis conforme du préfet si le projet est situé : a) Sur une partie du territoire communal non couverte par une carte communale, un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu (...) ". Le plan d'occupation des sols de la commune de Manigod étant devenu caduc le 27 mars 2017, le maire devait solliciter l'avis conforme du préfet en application des dispositions de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme. Le maire, qui était en compétence liée, s'étant fondé sur l'avis défavorable du préfet de la Haute-Savoie, le requérant est recevable à contester la régularité et le bien-fondé de cet avis.
4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 122-10 du code de l'urbanisme : " Les terres nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles, pastorales et forestières, en particulier les terres qui se situent dans les fonds de vallée, sont préservées. La nécessité de préserver ces terres s'apprécie au regard de leur rôle et de leur place dans les systèmes d'exploitation locaux. Sont également pris en compte leur situation par rapport au siège de l'exploitation, leur relief, leur pente et leur exposition. ".
5. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle d'assiette en cause est herbue, bénéficie d'une bonne exposition ainsi que d'une faible pente, est séparée de quelques chalets d'habitation par une voie de desserte, s'implante dans une vaste zone à dominante agricole et est inscrite au registre parcellaire graphique des exploitations agricoles et exploitée par une EARL installée sur la commune. Par suite, et alors que pour contester le motif de refus fondé sur les dispositions précitées au point 4, le requérant se borne à faire valoir que le projet ne porte que sur la construction d'un chalet d'une surface plancher de 139,21 m² et que la surface de la parcelle d'assiette est infime comparée aux surfaces du territoire de la commune dédiées aux activités agricoles identifiées au registre parcellaire graphique, c'est par une exacte application de l'article L. 122-10 du code de l'urbanisme précité que le préfet de la Haute-Savoie a estimé que la parcelle en cause était nécessaire au maintien et au développement des activités agricoles et qu'il a émis, pour ce motif, un avis défavorable à la demande de M. A....
6. Il résulte de l'instruction que le maire de Manigod aurait pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur la nécessité de préserver les parcelles d'assiette du projet de toute urbanisation lesquelles constituent des terres nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles, pastorales et forestières.
7. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Sur les frais d'instance :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que demande M. A... au titre des frais qu'il a exposés soit mise à la charge de la commune de Manigod, qui n'est pas partie perdante. Dans les circonstances de l'espèce, les conclusions présentées par la commune de Manigod sur le même fondement doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Manigod sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à la commune de Manigod et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Copie en sera faite au préfet de la Haute-Savoie.
Délibéré après l'audience du 5 juillet 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Danièle Déal, présidente,
M. Thierry Besse, président-assesseur,
Mme Christine Psilakis, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 juillet 2022.
La rapporteure,
Christine Psilakis La présidente,
Danièle Déal
La greffière,
Fabienne Prouteau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, en ce qui les concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 20LY03579