Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La SARL Arve Lotissements a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de Saint-Clément-sous-Valsonne a refusé d'abroger la délibération du 26 juin 2018 du conseil municipal de la commune approuvant le plan local d'urbanisme.
Par un jugement n° 2001295 du 25 mars 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédures devant la cour
Par une requête, enregistrée le 26 mai 2021, et un mémoire en réplique enregistré le 29 avril 2022, qui n'a pas été communiqué, la SARL Arve Lotissements, représentée par la Selarl Léga-Cité, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 25 mars 2021 ;
2°) d'annuler cette décision implicite du maire de Saint-Clément-sous-Valsonne ;
3°) d'enjoindre au maire de Saint-Clément-sous-Valsonne d'inscrire l'abrogation du plan local d'urbanisme de la commune à l'ordre du jour du prochain conseil municipal ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Clément-sous-Valsonne la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les dispositions de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme faisant obstacle à l'application des dispositions de l'article L. 243-2 du code des relations entre le public et l'administration, c'est à tort que le tribunal a écarté comme inopérants les moyens relatifs à l'insuffisance du rapport de présentation et à l'irrégularité de la procédure d'adoption du plan local d'urbanisme (PLU) ;
- le rapport de présentation ne contient pas les indicateurs nécessaires à l'analyse des résultats de l'application du plan, en méconnaissance de l'article L. 151-4 du code de l'urbanisme ; une telle insuffisance doit être regardée comme équivalent à une absence de rapport ;
- l'enquête publique était irrégulière, en raison de l'absence au dossier d'enquête de la dispense d'évaluation environnementale et de l'absence de mention de cet avis dans l'arrêté d'ouverture de l'enquête publique ;
- les modifications apportées au projet après l'enquête publique ne procèdent pas de cette enquête et ont porté atteinte à l'économie générale du projet ;
- les modalités de la concertation préalable n'ont pas été respectées ;
- le plan local d'urbanisme est incompatible avec le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale du Beaujolais ;
- le classement en zone agricole des parcelles cadastrées E 700 et 702 est incohérent avec le rapport de présentation et le projet d'aménagement et de développement durables ;
- le classement de ces parcelles est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire enregistré le 28 juillet 2021, la commune de Saint-Clément-sous-Valsonne, représentée par la Selas Adaltys affaires publiques, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de la société requérante la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête d'appel n'est fondé.
La clôture d'instruction a été fixée au 29 avril 2022, par une ordonnance en date du 8 avril 2022.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Thierry Besse, président-assesseur,
- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,
- les observations de Me Depenau pour la SARL Arve Lotissements et celles de Me Corbalan pour la commune de Saint-Clément-sous-Valsonne ;
Considérant ce qui suit :
1. Par délibération du 26 juin 2018, le conseil municipal de Saint-Clément-sur-Valsonne a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune. La SARL Arve Lotissements a demandé l'abrogation de ce plan, par un courrier notifié le 25 octobre 2019. Elle relève appel du jugement du 25 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'abrogation de la décision implicite rejetant sa demande d'abrogation.
2. En premier lieu, si, dans le cadre de la contestation d'un acte réglementaire intervenant après l'expiration du délai de recours contentieux contre cet acte, sous la forme d'un recours pour excès de pouvoir contre le refus de l'abroger, la légalité des règles qu'il fixe, la compétence de son auteur et l'existence d'un détournement de pouvoir peuvent être utilement critiquées, il n'en va pas de même des conditions d'édiction de cet acte, les vices de forme et de procédure dont il serait entaché ne pouvant être utilement invoqués que dans le cadre d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre l'acte réglementaire lui-même et introduit avant l'expiration du délai de recours contentieux.
3. Dès lors qu'il résulte de ses termes mêmes que les règles qu'il fixe s'appliquent aux moyens soulevés par voie d'exception, et non pas aux moyens dirigés contre un refus d'abrogation, l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme, qui prévoit que certains vices de procédure peuvent être soulevés contre un plan local d'urbanisme (PLU) sans condition de délai, ne fait pas obstacle à l'application des principes rappelés au point précédent.
4. Par suite, et ainsi que l'ont estimé les premiers juges, la société Arve Lotissements ne peut utilement invoquer, à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir du refus d'abroger la délibération du 26 juin 2018, les moyens tirés de l'insuffisance du rapport de présentation, de l'irrégularité de l'enquête publique, en toutes ses branches, et du non-respect des modalités de la concertation.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 131-4 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme et les documents en tenant lieu ainsi que les cartes communales sont compatibles avec : / 1° Les schémas de cohérence territoriale prévus à l'article L. 141-1 ; (...) ". Aux termes de l'article L. 142-1 du même code : " Sont compatibles avec le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale : / 1° Les plans locaux d'urbanisme prévus au titre V du présent livre ; (...) ".
6. Pour apprécier la compatibilité d'un PLU avec un SCOT, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert en prenant en compte l'ensemble des prescriptions du document supérieur, si le plan ne contrarie pas les objectifs qu'impose le schéma, compte tenu des orientations adoptées et de leur degré de précision, sans rechercher l'adéquation du plan à chaque disposition ou objectif particulier.
7. La société requérante soutient que le document d'orientation et d'objectifs (DOO) du schéma de cohérence territoriale du Beaujolais indique que les communes de la catégorie dont relève Saint-Clément-sous-Valsonne doivent prévoir un rythme de construction de logements légèrement inférieur à celui constaté au cours des dix années précédant l'élaboration du PLU. Alors que la commune ne fait pas partie des pôles principaux d'urbanisation identifiés dans le SCOT, le PLU en litige, qui est fondé sur des perspectives de création de 3 logements par an, alors que ce rythme atteignait 4,8 logements par an sur la période antérieure à la révision, n'apparaît pas comme entrant en contrariété ou comme étant incompatible avec cet objectif. Par ailleurs, les terrains en litige sont situés en bordure d'un lotissement éloigné du centre-bourg et leur classement en zone agricole ne peut être incompatible avec l'orientation selon laquelle le développement urbain doit se faire dans les bourgs ou en extension de ceux-ci, par comblement en priorité des dents creuses. Par suite, et alors que la compatibilité du document d'urbanisme doit s'apprécier à l'échelle du territoire couvert par le plan, le moyen tiré de l'incompatibilité du PLU avec le SCOT du Beaujolais doit être écarté.
8. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 151-4 du code de l'urbanisme : " Le rapport de présentation explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durables, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement. (...) ". Aux termes de l'article L. 151-5 du même code : " Le projet d'aménagement et de développement durables définit : 1° Les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques (...) ". Aux termes de l'article L. 151-8 de ce code : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. "
9. Si le rapport de présentation identifie les parcelles en litige dans les zones de disponibilités foncières dans l'ancien plan d'urbanisme, et à supposer qu'il les englobe dans les secteurs urbanisés de la commune, ce qui ne ressort au demeurant pas de ce document, de telles circonstances ne sauraient à elles seules impliquer leur classement en zone constructible dans le PLUI en litige. En tout état de cause, la société requérante ne saurait invoquer l'incohérence du règlement avec le rapport de présentation, qui est dépourvu de caractère normatif. Par ailleurs, les deux parcelles en litige sont en bordure d'un lotissement éloigné du centre-bourg, identifié par les auteurs du PADD comme un " lotissement dont l'extension devra être stoppée et le développement encadré ". Alors que les auteurs du PADD ont fixé également comme objectif le maintien du caractère rural de la commune et la lutte contre l'étalement urbain, le classement des parcelles en litige n'est pas incohérent avec le PADD.
10. Enfin, aux termes de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. "
11. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir sur le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces points ne peut être censurée par le juge administratif que si elle repose sur des faits matériellement inexacts ou si elle est entachée d'erreur manifeste.
12. Il ressort des pièces du dossier que les deux parcelles en litige, dont le classement en zone agricole est contesté, sont, ainsi que le fait valoir la requérante, les deux derniers terrains non bâtis d'un lotissement d'une vingtaine de constructions. La parcelle cadastrée section E n° 702, herbue et ouvrant à l'ouest sur des prairies n'apparaît pas dépourvue de tout potentiel agronomique, quand bien même elle est en pente et jouxte des terrains bâtis. Par ailleurs, son classement en zone agricole se justifie, ainsi qu'il a été dit précédemment, par la volonté des auteurs du PLU, en compatibilité avec le schéma de cohérence territoriale du Beaujolais, d'arrêter l'urbanisation de ce lotissement pour privilégier une urbanisation plus proche du centre-bourg, dans cette commune présentant majoritairement un caractère rural. Par suite, son classement en zone agricole n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. En revanche, la parcelle section E n° 700, située entre deux terrains supportant des constructions du lotissement, est séparée des terrains exploités au sud par une forte rupture de pente et une haie. Elle apparaît ainsi dépourvue de potentiel agronomique et son classement en zone agricole ne se justifie pas non plus, compte tenu de sa situation, par la nécessité de préserver le potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles de la commune. Par suite, le classement en zone agricole de cette parcelle est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
13. Il résulte de ce qui précède que la SARL Arve Lotissements est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande en ce qu'elle tend à l'annulation de la décision implicite par laquelle le maire de Saint-Clément-sous-Valsonne a refusé d'abroger la délibération du 26 juin 2018 par laquelle le conseil municipal de la commune a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune, en tant qu'il classe la parcelle cadastrée section E n° 700 en zone agricole.
Sur l'injonction :
14. Aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. (...) ". Le premier alinéa de l'article L. 153-7 du code de l'urbanisme dispose que : " En cas d'annulation partielle par voie juridictionnelle d'un plan local d'urbanisme, l'autorité compétente élabore sans délai les nouvelles dispositions du plan applicables à la partie du territoire communal concernée par l'annulation (...) ". Ces dispositions font obligation à l'autorité compétente d'élaborer, dans le respect de l'autorité de la chose jugée par la décision juridictionnelle ayant partiellement annulé un plan local d'urbanisme, de nouvelles dispositions se substituant à celles qui ont été annulées par le juge.
15. L'annulation de la décision implicite par laquelle le maire de Saint-Clément-sous-Valsonne a refusé d'abroger le plan local d'urbanisme de la commune, en tant qu'il classe en zone agricole la parcelle cadastrée section E n° 700, implique nécessairement la modification du classement de cette parcelle. Il y a lieu d'enjoindre au maire de la commune de convoquer le conseil municipal dans un délai de quatre mois afin de prendre une délibération engageant une procédure de modification du plan local d'urbanisme concernant le classement de cette parcelle, afin qu'elle soit classée en une zone autre qu'agricole.
Sur les frais d'instance :
16. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Saint-Clément-sous-Valsonne la somme que demande la SARL Arve Lotissements au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur leur fondement par la commune de Saint-Clément-sous-Valsonne, partie perdante.
DÉCIDE :
Article 1er : La décision implicite du maire de Saint-Clément-sous-Valsonne refusant d'abroger le plan local d'urbanisme de la commune est annulée en tant qu'elle porte sur le classement en zone agricole de la parcelle cadastrée section E n° 700.
Article 2 : Le jugement du 25 mars 2021 du tribunal administratif de Lyon est annulé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er.
Article 3 : Il est imparti au maire de Saint-Clément-sous-Valsonne un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt, afin d'inscrire à l'ordre du jour d'un conseil municipal la délibération décidant l'engagement d'une procédure de modification du plan local d'urbanisme concernant le classement de la parcelle cadastrée section E n° 700.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Arve Lotissements et à la commune de Saint-Clément-sous-Valsonne.
Délibéré après l'audience du 21 juin 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Danièle Déal, présidente de chambre,
M. Thierry Besse, président-assesseur,
M. François Bodin-Hullin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juillet 2022.
Le rapporteur,
Thierry BesseLa présidente,
Danièle Déal
La greffière,
Fabienne Prouteau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, en ce qui les concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 21LY01685