Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SCI Les Ancolies a demandé au tribunal administratif de Dijon de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés, auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2015 et en 2016, et des pénalités correspondantes, pour un montant total de 17 643 euros.
Par un jugement n° 1900644 du 24 juin 2020, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 27 juillet 2020, la SCI Les Ancolies, représentée par Me Moreu, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des majorations correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'activité de location, qui a été exercée, non pas par la SCI Les Ancolies qui, n'ayant pas la disposition des appartements et n'étant pas propriétaire des meubles, ne pouvait consentir de locations meublées, mais, à titre personnel, par M. et Mme B..., revêt un caractère civil de sorte que les revenus locatifs ont à bon droit été déclarés dans la catégorie des revenus fonciers sans qu'y fasse obstacle le fait que les contrats de location sont au nom de la SCI Les Ancolies par la SAS Cimalpes, cette mention résultant d'une erreur matérielle ;
- l'administration ne pouvait retenir que l'appartement de type T5 a été mis à la disposition de M. et Mme B... pour une période de 110 jours au cours des années 2015 et 2016 ;
- l'administration n'apporte aucune justification de la mise à disposition de l'appartement de type T2 à M. et Mme B... à compter du 7 novembre 2015 ;
- la majoration prévue par l'article 1728 du code général des impôts n'est pas encourue dès lors qu'elle est la conséquence de son refus de déposer les déclarations n° 2065 et qu'elle procède d'un détournement de procédure en l'absence de vérification de comptabilité diligentée par l'administration.
Par un mémoire, enregistré le 28 janvier 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de Mme Vinet, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. La SCI Les Ancolies, dont M. et Mme B... détenaient ensemble 80 % des parts, et la SARL Vincent B..., le reste du capital, était propriétaire dans une résidence de la station de Courchevel à Saint-Bon-Tarentaise (Savoie), d'une part, de deux appartements mitoyens de type T2 et T3, acquis respectivement en 2002 et 2014, qu'elle a regroupés en un seul logement après travaux et, d'autre part, d'un studio acquis en 2015. Elle s'est placée sous le régime de l'article 8 du code général des impôts et a déposé, au titre de 2014 et 2015, des déclarations n° 2072 mentionnant des revenus locatifs bruts de, respectivement, 16 194 euros et 15 000 euros et des déficits fonciers de, respectivement, 8 082 euros et 313 426 euros, repris dans les déclarations de revenus de M. et Mme B.... Au titre de l'année 2016, M. et Mme B... ont porté un revenu foncier de 13 000 euros dans leur déclaration d'ensemble. A la suite d'un contrôle sur pièces portant sur les années 2014, 2015 et 2016, l'administration a estimé que la SCI Les Ancolies se livrait à une activité commerciale de location d'appartements meublés de tourisme au sens de l'article 34 du code général des impôts justifiant son assujettissement à l'impôt sur les sociétés. Faute d'avoir souscrit les déclarations de résultats dans le délai imparti par les mises en demeure qui lui ont été adressées, la SCI Les Ancolies a été taxée d'office à l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2015 et 2016 en application de l'article L. 66-2 du livre des procédures fiscales. Elle relève appel du jugement du 24 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande de décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées et des majorations prévues au b. et au a. de l'article 1728 du code général des impôts dont elles ont été assorties.
Sur l'assujettissement de la SCI Les Ancolies à l'impôt sur les sociétés :
2. Aux termes de l'article 8 du code général des impôts : " Sous réserve des dispositions de l'article 6, les associés des sociétés en nom collectif et les commandités des sociétés en commandite simple sont, lorsque ces sociétés n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société. En cas de démembrement de la propriété de tout ou partie des parts sociales, l'usufruitier est soumis à l'impôt sur le revenu pour la quote-part correspondant aux droits dans les bénéfices que lui confère sa qualité d'usufruitier. Le nu-propriétaire n'est pas soumis à l'impôt sur le revenu à raison du résultat imposé au nom de l'usufruitier./Il en est de même, sous les mêmes conditions :/1° Des membres des sociétés civiles qui ne revêtent pas, en droit ou en fait, l'une des formes de sociétés visées au 1 de l'article 206 et qui, sous réserve des exceptions prévues à l'article 239 ter, ne se livrent pas à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 ;(...) ".
3. Aux termes de l'article 206 du code général des impôts : " 1. (...) sont passibles de l'impôt sur les sociétés (...) se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif. (...) / 2. (...) les sociétés civiles sont également passibles dudit impôt (...) si elles se livrent à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 (...) ". Aux termes de l'article 34 du même code : " Sont considérés comme bénéfices industriels et commerciaux (...) les bénéfices (...) provenant de l'exercice d'une profession commerciale (...) ".
4. Il résulte de ces dispositions, alors applicables, qu'une société civile donnant habituellement en location des locaux garnis de meubles doit être regardée comme exerçant une activité commerciale au sens de l'article 34 du code général des impôts et, par suite, est passible de l'impôt sur les sociétés. La durée de la location des locaux est sans incidence sur le caractère habituel et non occasionnel de l'activité de location, lequel résulte de ce que les locaux meublés ont été loués à plusieurs reprises.
5. Il résulte de l'instruction, ainsi qu'il a été dit au point 1 ci-dessus, que la SCI Les Ancolies était propriétaire de trois appartements à Courchevel acquis le 7 mai 2012, le 28 août 2014 et le 27 novembre 2015. Après des travaux de restructuration, la SCI Les Ancolies a réuni les appartements de type T2 et T3 et mis l'appartement de type T5 en location saisonnière dès la fin de l'année 2015. La SCI Les Ancolies a conclu avec la SAS Cimalpes des mandats d'administration de biens en vue de la location meublée et saisonnière de ces appartements. En réponse à un droit de communication exercé par l'administration auprès de la SAS Cimalpes, celle-ci a indiqué avoir encaissé, pour le compte de la SCI Les Ancolies, les sommes de 11 280,14 euros du 18 au 27 décembre 2014 et de 21 570,28 euros du 27 décembre 2014 au 10 janvier 2015 au titre de la location de l'appartement de type T5 et les sommes de 16 790 euros du 1er décembre 2015 au 30 avril 2016 et de 15 240 euros du 1er janvier 2016 au 30 avril 2017 pour la location de l'appartement de type T2. Par ailleurs, la SCI Les Ancolies a déclaré les recettes encaissées résultant de la location des appartements au titre des exercices clos en 2014 et 2015. Il en résulte que c'est par une exacte application des dispositions précitées que l'administration a considéré que la SCI Les Ancolies, en louant habituellement les locaux meublés dont elle était propriétaire, s'est livrée à une exploitation commerciale au sens de l'article 34 du code général des impôts, la rendant passible de l'impôt sur les sociétés en application du 2 de l'article 206 du code général des impôts sans que la société requérante puisse utilement soutenir, en s'appuyant sur les procès-verbaux d'assemblée générale, que ce régime d'application serait inapplicable au motif qu'elle a décidé de mettre gratuitement à la disposition de M. et Mme B... pour une durée indéterminée les appartements, ni que les meubles garnissant les appartements auraient été achetés par ces derniers. Il résulte de ce qui précède que la SCI n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration l'a assujettie à l'impôt sur les sociétés.
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne la charge de la preuve :
6. Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. ". Aux termes de l'article R. 193-1 du même livre : " Dans le cas prévu à l'article L. 193 le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré. ". En application de ces dispositions, la charge de la preuve du caractère exagéré des impositions incombe à la SCI Les Ancolies qui a été imposée d'office.
En ce qui concerne le caractère exagéré de l'imposition :
7. La SCI conteste les modalités de détermination de la période durant laquelle M. et Mme B... ont disposé des biens détenus par la SCI.
8. Selon la proposition de rectification du 3 août 2017, le service, après avoir relevé que M. et Mme B... avaient eu la jouissance des appartements, a déterminé le loyer théorique que l'appartement de type T5 de 145 m2 après travaux aurait rapporté à la SCI si elle l'avait donné en location à un tiers en se fondant sur les informations relatives aux dates de ménage et aux frais d'entretien à la suite des départs des propriétaires, sur le fait que cet appartement n'a pas été loué entre le 10 janvier 2015 et le début de la saison 2016/2017 et sur l'absence de chiffre d'affaires perçus sur cette période. Le service a retenu la période du 10 janvier au 30 avril 2015, fin de la saison des sports d'hiver, soit cent dix jours, comme correspondant à la mise à disposition au profit de M. et Mme B... de l'appartement et a appliqué une décote de 30% pour tenir compte d'une occupation en haute saison hors des périodes de Noël et de Nouvel An. A défaut d'informations sur l'année 2016, le montant du loyer théorique que la SCI Les Ancolies aurait pu percevoir pour la location de l'appartement de type T5 au titre de l'exercice 2016 a été calculé sur la base de celui de l'exercice 2015. Concernant l'appartement de type T2 de 34,90 m2, le service a retenu une période de deux semaines, soit quatorze jours, de mise à disposition au profit de M. et Mme B... au titre de l'exercice 2016.
9. En se bornant à soutenir que M. B... est président d'une importante maison de négoce bourguignonne de plus de 200 salariés, que M. et Mme B... disposent d'une résidence principale en Côte d'Or et d'une maison de vacances dans le sud de la France et que l'administration n'établit pas qu'ils auraient occupé l'appartement de type T2 pendant une période de 14 jours au cours de l'année 2016, la SCI Les Ancolies, qui supporte la charge de la preuve, ne produit aucun élément probant de nature à établir le caractère exagéré des impositions mises à sa charge.
10. La circonstance que M. et Mme B... serait propriétaire des meubles garnissant les appartements n'est pas de nature à justifier l'application d'une décote supplémentaire de 30% appliquée aux montants des loyers théoriques tels que calculés par l'administration.
Sur les pénalités :
11. Aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : (...) b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ".
12. Il est constant que la SCI Les Ancolies n'a pas déclaré ses résultats imposables à l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos 2015 et 2016 dans le délai légal alors qu'elle s'est livrée à une exploitation commerciale au sens de l'article 34 du code général des impôts. Il résulte de l'instruction que des mises en demeure de régulariser sa situation lui ont été adressées le 12 mai 2017 et le 19 mai 2017 et que la société n'a pas déféré, dans le délai de trente jours prévu par les dispositions précitées de l'article L. 68 du livre des procédures fiscales, à ces mises en demeure. C'est dès lors par une exacte application de ces dispositions que les impositions en litige ont été assorties de la pénalité prévue au b. de l'article 1728 du code général des impôts. Dès lors que les pénalités ont été légalement établies, le moyen tiré du détournement de procédure ne peut qu'être écarté.
13. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI Les Ancolies n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Par suite, sa requête d'appel doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SCI Les Ancolies est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Les Ancolies et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 16 juin 2022, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme Evrard, présidente-assesseure,
Mme Caraës, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2022.
La rapporteure,
R. A...
Le président,
D. PruvostLa greffière,
M-Th Pillet
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
2
N° 20LY02024