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30/06/2022 | FRANCE | N°21LY00831

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 30 juin 2022, 21LY00831


Vu la procédure suivante :

I. Par une requête enregistrée le 17 mars 2021, la SCI Chantemerle, représentée par Me Leraisnable, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2021 par lequel le maire de Savigneux a refusé de faire droit à sa demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale en vue de l'extension de la surface de vente d'un hypermarché Super U ;

2°) d'enjoindre à la Commission nationale d'aménagement commercial de prendre un avis favorable dans un délai d'un mois à compter de la notification d

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3°) de ...

Vu la procédure suivante :

I. Par une requête enregistrée le 17 mars 2021, la SCI Chantemerle, représentée par Me Leraisnable, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2021 par lequel le maire de Savigneux a refusé de faire droit à sa demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale en vue de l'extension de la surface de vente d'un hypermarché Super U ;

2°) d'enjoindre à la Commission nationale d'aménagement commercial de prendre un avis favorable dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de la Commission nationale d'aménagement commercial, une somme de 5 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle dispose d'un intérêt à agir et sa requête est recevable ;

- la Commission nationale d'aménagement commercial a méconnu l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour du 18 juin 2020 ;

- son projet ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 752-6 du code de commerce en ce qui concerne l'aménagement du territoire et le développement durable ;

- son projet n'est pas incompatible avec les orientations du schéma de cohérence et d'orientation territoriale Sud Loire.

II. Par une requête et des mémoires enregistrés le 2 juillet 2021, le 11 mars 2022 et le 3 juin 2022, la SAS Rukim, représentée par Me Debaussart, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 3 mai 2021 par lequel le maire de Savigneux a délivré à la SCI Chantemerle, un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale en vue de l'extension de la surface de vente d'un hypermarché Super U ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Savigneux, une somme de 5 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête est recevable ;

- la Commission nationale d'aménagement commercial s'est abstenue irrégulièrement de convoquer les parties à sa séance et elle n'a pu présenter ses arguments concernant le caractère frauduleux de la présentation du dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale ainsi que la méconnaissance des dispositions de l'article L. 752-21 du code de commerce ;

- il appartenait à la SCI Chantemerle de déposer une nouvelle demande de permis de construire, le maire ayant statué définitivement le 18 janvier 2021 ;

- le maire a commis une erreur de droit, dès lors qu'il n'avait aucune obligation de délivrer un permis de construire mais une simple obligation d'instruction de la demande qui a déjà été réalisée et qui a donné lieu à l'arrêté de refus du 18 janvier 2021 ;

- le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale attaqué dans la présente instance sur le fondement d'une injonction irrégulièrement délivrée à la Commission nationale d'aménagement commercial doit nécessairement être annulé.

Par un mémoire enregistré le 6 avril 2022, la SCI Chantemerle, représentée par Me Leraisnable, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la requérante en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'absence de convocation à la séance de la Commission nationale d'aménagement commercial n'a eu aucune influence sur le sens de la décision attaquée, et n'a privé la requérante d'aucune garantie ;

- elle n'était pas contrainte de solliciter une nouvelle demande de permis de construire ;

- le maire était tenu de prendre en compte le nouvel avis favorable de la Commission nationale d'aménagement commercial du 1er avril 2021, retirant le précédent, et de le viser dans son arrêté ; il n'a donc commis aucune erreur ;

- le maire aurait pris la même décision en se fondant sur le nouvel avis de la Commission nationale d'aménagement commercial du 24 mars 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure,

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,

- les observations de Me Leraisnable, représentant la SCI Chantemerle et de Me Debaussart, représentant la SAS Rukim ;

Considérant ce qui suit :

1. La société Savigneux Distribution exploite un hypermarché sous l'enseigne Super U dans la commune de Savigneux, sur une surface de vente de 3 120 m². La société Chantemerle, qui est propriétaire des murs de l'hypermarché Super U, a déposé une demande de permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale afin d'augmenter la surface de vente du Super U de 780 m² et de la porter ainsi à 3 900 m². Plusieurs sociétés exploitant des surfaces commerciales dans la zone de chalandise, dont la société Rukim, ont formé devant la Commission nationale d'aménagement commercial un recours contre l'avis favorable émis le 11 septembre 2018 par la commission départementale d'aménagement commercial de la Loire. Le 10 janvier 2019, la Commission nationale d'aménagement commercial a émis un avis défavorable au projet. Par un arrêté en date du 15 février 2019, le maire de Savigneux a refusé de délivrer à la société Chantemerle le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale qu'elle avait demandé pour son projet d'extension. Par un arrêt du 18 juin 2020, la cour a annulé cet arrêté (article 1er) et enjoint, respectivement, à la Commission nationale d'aménagement commercial de rendre un avis favorable au projet et au maire de statuer à nouveau sur cette demande de permis de construire (article 2). Par un arrêté du 18 janvier 2021, le maire de Savigneux a de nouveau refusé de faire droit à la demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale présentée par la SCI Chantemerle, en vue de l'extension de la surface de vente d'un hypermarché Super U. Par un arrêt du 18 mars 2021, la cour a enjoint à la Commission nationale d'aménagement commercial de rendre un avis favorable au projet présenté par la SCI Chantemerle, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai. Le 1er avril 2021, la Commission nationale d'aménagement commercial a rendu un avis favorable au projet présenté par la SCI Chantemerle. Par un arrêté du 3 mai 2021, le maire de Savigneux a fait droit à la demande de la SCI Chantemerle. Par un arrêt du 22 décembre 2021, le Conseil d'Etat a annulé l'article 2 de l'arrêt de la cour du 18 juin 2020 (article 1er) et a enjoint, d'une part, à la Commission nationale d'aménagement commercial, qui se trouve à nouveau saisie de ce dossier, de rendre un nouvel avis sur le projet de la société Chantemerle dans un délai de trois mois et, d'autre part, au maire de Savigneux de statuer à nouveau sur la demande de permis de construire de la société Chantemerle dans un délai de trois mois suivant le nouvel avis de la Commission nationale d'aménagement commercial (article 2). Sous le n° 21LY00831, la SCI Chantemerle demande à la cour d'annuler l'arrêté du maire de Savigneux du 18 janvier 2021. Sous le n° 21LY02291, la SAS Rukim demande à la cour d'annuler l'arrêté du 3 mai 2021. Les requêtes n° 21LY00831 et 21LY02291 concernent le même projet et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre afin qu'elles fassent l'objet d'un même arrêt.

Sur la requête n° 21LY02291 :

En ce qui concerne la procédure suivie devant la Commission nationale d'aménagement commercial :

2. Aux termes de l'article R. 752-34 du code de commerce, dans sa version applicable au litige : " (...) Quinze jours au moins avant la réunion de la commission nationale, les parties sont convoquées à la réunion et informées que la commission nationale ne tiendra pas compte des pièces qui seraient produites moins de dix jours avant la réunion, à l'exception des pièces émanant des autorités publiques. "

3. La requérante soutient qu'en l'absence de convocation des parties à la séance au cours de laquelle a été rendu l'avis litigieux, elle n'a pu présenter ses arguments concernant le caractère frauduleux de la présentation du dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale ainsi que la méconnaissance des dispositions de l'article L.752-21 du code de commerce. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la requérante a été auditionnée par la Commission nationale, lors de sa séance du 24 mars 2022 à l'issue de laquelle elle a confirmé l'avis favorable rendu le 1er avril 2021, qu'elle a présenté ces mêmes arguments à l'appui de son recours et qu'ils ont pu être examinés au fond par la Commission nationale. Dès lors, le non-respect des dispositions de l'article R. 752-34 du code de commerce n'est pas susceptible d'avoir exercé, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise et n'a, en tout état de cause, pas privé l'intéressée d'une garantie.

En ce qui concerne la nécessité pour le pétitionnaire de présenter une nouvelle demande de permis de construire :

4. Contrairement à ce que soutient la requérante, l'arrêté du 18 janvier 2021 par lequel le maire de Savigneux a refusé de faire droit à la demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale qui fait l'objet du présent recours contentieux, n'a acquis aucun caractère définitif. Par suite, le maire de la commune a pu légalement statuer à nouveau sur la demande de la SCI Chantemerle.

En ce qui concerne l'instruction de la demande de permis par le maire :

5. Si l'arrêté attaqué mentionne une " obligation de délivrer un nouvel arrêté au vu du nouvel avis de la CNAC ", il ne ressort pas des pièces du dossier que le maire se serait estimé tenu de délivrer un permis de construire à la SCI Chantemerle, du seul fait de l'intervention de l'avis favorable de la Commission nationale d'aménagement commercial, et qu'il se serait abstenu de procéder à l'instruction de la demande d'autorisation de construire. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit, en tout état de cause, être écarté.

En ce qui concerne l'annulation de l'article 2 de l'arrêt de la cour du 18 juin 2020 enjoignant à la Commission nationale d'aménagement commercial de rendre un avis favorable au projet :

6. Ainsi qu'il a été rappelé au point 1, par un arrêt du 22 décembre 2021, le Conseil d'Etat a annulé l'article 2 de l'arrêt de la cour du 18 juin 2020, et a enjoint, d'une part, à la Commission nationale d'aménagement commercial, qui se trouve à nouveau saisie de ce dossier, de rendre un nouvel avis sur le projet de la société Chantemerle dans un délai de trois mois et, d'autre part, au maire de Savigneux de statuer à nouveau sur la demande de permis de construire de la société Chantemerle dans un délai de trois mois suivant le nouvel avis de la Commission nationale d'aménagement commercial. Cette situation n'a eu pour conséquence que de permettre à l'autorité compétente de pouvoir retirer l'autorisation litigieuse dans un délai raisonnable qui ne saurait, eu égard à l'objet et aux caractéristiques des autorisations d'urbanisme, excéder trois mois à compter de la notification à l'administration de la décision juridictionnelle.

Sur la requête n° 21LY00831 :

7. Le présent arrêt rejette les conclusions en annulation dirigées contre l'arrêté du 3 mai 2021 du maire de Savigneux, qui s'est substitué à celui du 18 janvier 2021. Par suite, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête tendant à l'annulation de cet arrêté du 18 janvier 2021.

Sur les frais liés à l'instance :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SAS Rukim la somme de 2 000 euros au profit de la SCI Chantemerle au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu également, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au profit de la SCI Chantemerle au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la SAS Rukim tendant à la mise à la charge de la commune de Savigneux d'une somme de 2 500 euros présentées sur le même fondement.

DECIDE :

Article 1er : La requête n° 21LY02291 est rejetée.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 21LY00831.

Article 3 : La SAS Rukim versera à la SCI Chantemerle la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : l'Etat versera à la SCI Chantemerle la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Chantemerle, à la commune de Savigneux, à la société Distribution Casino France, à la société Rukim, à la société BV Montbrison, à la société Le Coffre à Jouets, à la SAS Les Galeries du Forez, à la société Neca Montbrison, à la SAS Frequence, à la présidente de la Commission nationale d'aménagement commercial et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 9 juin 2022 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Le Frapper, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 juin 2022.

La rapporteure,

P. DècheLe président,

F. Bourrachot

La greffière,

A-C. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui les concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY00831-21LY02291

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00831
Date de la décision : 30/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

14-02-01-05 Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique. - Réglementation des activités économiques. - Activités soumises à réglementation. - Aménagement commercial.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : ALEO

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-06-30;21ly00831 ?
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