Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La SAS SLMI a demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2014.
Par un jugement n° 1902784 du 31 mars 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 juillet et 1er décembre 2020, la SAS SLMI, représentée par Me Farhat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 31 mars 2020 et de lui accorder la décharge sollicitée assortie des intérêts moratoires au taux légal ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La SAS SLMI soutient que :
- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors que le service a refusé à tort de prendre en compte ses observations du 14 novembre 2017 qui étaient présentées en son nom propre et non pour le compte de la SCI du Renard, au sein de laquelle elle est associée ;
- le service a considéré à tort que la SCI du Renard avait encaissé définitivement le produit de la facture du 3 novembre 2014 d'un montant de 90 000 euros HT, soit 108 000 euros TTC, émise à destination de la société SLE, son sous-locataire, correspondant à 15 mois de loyers pour la période de janvier 2015 à avril 2016 ; la position de l'administration consistant à considérer que la facture de loyers n'a pas été annulée conduit à une double imposition de ces loyers ;
- la position de l'administration est incohérente dès lors que les redressements correspondants en matière de taxe sur la valeur ajoutée sur les immobilisations et sur les factures de loyers ont fait l'objet, le 23 juillet 2018, d'un dégrèvement total sur la base des mêmes arguments.
Par un mémoire, enregistré le 21 octobre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.
Une ordonnance du 2 décembre 2020 a fixé la clôture de l'instruction au 15 février 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère,
- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,
- et les observations de Me Lichnewsky pour la SAS SLMI.
Considérant ce qui suit :
1. La société civile immobilière (SCI) du Renard était preneuse d'un contrat de crédit-bail pour un immeuble exploité par la société Synergies Logistique Europe (SLE) dans le cadre d'un contrat de sous-location. Cette SCI a pour associés son gérant, M. B... A..., à hauteur de 90 % des parts, et la SAS SLMI, à hauteur de 10 % des parts, société dont le capital est détenu à hauteur de 76,74 % par M. A.... La SCI du Renard a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016 à l'issue de laquelle l'administration fiscale a mis à sa charge un supplément d'impôt sur les sociétés au titre de l'année 2014. La SAS SLMI relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge de ce supplément, en droits et pénalités.
Sur la demande de jonction :
2. Dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, le juge administratif dispose, sans jamais y être tenu, de la faculté de joindre deux ou plusieurs affaires. Toutefois, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de joindre la requête, objet du présent arrêt, avec la requête n°18LY01840 déposée par M. et Mme A....
Sur la régularité de la procédure suivie :
3. Les membres d'une des sociétés de personnes énumérées à l'article 8 du code général des impôts sont personnellement assujettis à l'impôt sur le revenu pour la part des bénéfices sociaux correspondants à leurs droits dans la société. D'après l'article 60 de ce code, les sociétés de l'article 8 sont tenues aux obligations incombant normalement aux exploitants individuels. En vertu de l'article L. 53 du livre des procédures fiscales, la procédure de vérification des déclarations déposées par ces sociétés est suivie avec celles-ci.
4. Il résulte de ces dispositions que c'est avec la société de personnes que l'administration fiscale doit engager la procédure de vérification des résultats sociaux régulièrement déclarés par cette société, au regard de la comptabilité qu'elle doit tenir en vertu de l'article 60 du code général des impôts. L'administration ne peut légalement mettre des suppléments d'imposition à la charge personnelle des associés sans leur avoir notifié, dans les conditions prévues à l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, les corrections apportées aux déclarations qu'ils ont eux-mêmes souscrites, en motivant cette notification au moins par une référence aux rehaussements apportés aux bénéfices sociaux et par l'indication de la quote-part de ces bénéfices à raison de laquelle les intéressés seront imposés.
5. L'administration n'est pas tenue de suivre une procédure contradictoire à l'égard d'un contribuable auquel elle notifie des rehaussements à proportion de ses parts dans les sociétés considérées. Par conséquent, l'administration n'avait pas, en l'espèce, à répondre aux observations présentées par la SAS SLMI le 14 novembre 2017 dès lors que la proposition de rectification qui lui a été adressée le 14 septembre 2017 était suffisamment motivée. Si elle a indiqué dans sa réponse, à tort, que la SAS SLMI présentait des observations au nom de la SCI du Renard alors qu'elle en présentait en son nom propre, cette circonstance n'a pas eu d'incidence sur la régularité de la procédure. Par suite, la SAS SLMI n'est pas fondée à soutenir que la procédure suivie est entachée d'irrégularité.
Sur le bien-fondé des impositions litigieuses :
6. L'administration a constaté lors de la vérification de comptabilité de la SCI du Renard que cette société avait émis une facture de loyers le 3 novembre 2014 pour un montant de 90 000 euros HT, soit 108 000 euros TTC, à destination de la société SLE, correspondant à 15 mois de loyers d'un immeuble situé à Epinay-sous-Sénart. Le produit en cause, non comptabilisé, a été porté au crédit du compte client de la société SLE dans les écritures comptables de la SCI. L'administration a réintégré ce produit, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux de la SCI, ce qui a généré un supplément d'impôt sur les sociétés notifié à la SAS SLMI, en application des articles 8 et 218 bis du code général des impôts, en fonction de sa quote-part de 10%.
7. La SAS SLMI soutient que la facture du 3 novembre 2014, payée par la société SLE par compensation, a été annulée par un avoir du 12 décembre 2014 et que la créance correspondante de la société SLE à l'égard de la SCI du Renard a été cédée à la SAS SLMI par une convention de cession du 31 décembre 2014. Ainsi, aucun produit n'est imposable à ce titre pour l'exercice 2014.
8. En l'espèce, il est constant que la facture en cause a été effectivement réglée par compensation, la SCI du Renard étant débitrice envers la société SLE d'une créance de 344 000 euros HT, soit 412 800 euros TTC en vertu d'une facture du 1er octobre 2014. La compensation entre cette créance et celles détenues par la SCI du Renard sur la société SLE a donné lieu à un virement le 7 novembre 2014 de la SCI du Renard envers la société SLE d'un montant de 260 366 euros. Si la requérante fait valoir que cette facture a été annulée le 12 novembre 2014, rendant la SCI du Renard redevable de la somme de 90 000 euros HT euros envers la société SLE, l'administration a constaté deux écritures comptables passées entre le 4 novembre et le 12 novembre 2014 dans les comptes de la SCI. Le 5 novembre 2014, une écriture comptable " d'opérations diverses " a été enregistrée par laquelle le compte client SLE a été débité à hauteur de la somme de 108 000 euros et le compte courant de l'associé SLMI a été crédité du même montant. Cette créance client SLE a en outre été soldée le 6 novembre 2014 par l'écriture de banque correspondant au paiement de la société SLE par compensation. En appel, la SAS SLMI fait valoir que l'écriture passée le 5 novembre 2014 a eu pour objet de retracer par anticipation la cession de créances constatée par la convention du 31 décembre 2014, cette écriture étant corroborée par le fait qu'au jour de la cession de créance, aucune écriture comptable n'a été enregistrée. Toutefois, à supposer même que l'enregistrement par anticipation de la cession de créances puisse justifier l'écriture passée le 5 novembre 2014, elle ne saurait justifier celle passée le 6 novembre 2014 dès lors qu'à cette date, la créance de loyers cédée par la société SLE à la SAS SLMI, et que la société SLE ne détenait plus, ne pouvait donner lieu à un paiement par compensation de la SCI du Renard envers la société SLE. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a réintégré le produit de 90 000 euros HT dans la catégorie des bénéfices non commerciaux de la SCI du Renard et a imposé en conséquence la SAS SLMI à proportion de ses droits dans la SCI.
9. Si la SAS SLMI fait valoir que les loyers, objet de la facture litigieuse, ont été imposés deux fois, une fois sur l'exercice 2014 du fait de la rectification litigieuse et une fois sur les exercices 2015 et 2016 lors de la déclaration des loyers perçus, aucune double imposition au titre de l'exercice 2014, seul en litige, ne peut être constatée.
10. Enfin, une décision de dégrèvement non motivée ne constitue pas une prise de position formelle de l'administration sur l'appréciation d'une situation de fait au regard du texte fiscal de nature à entraîner, sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, une décharge des impositions en litige. Par suite, la SAS SLMI ne peut se prévaloir de la décision de dégrèvement intervenue le 23 juillet 2018 au bénéfice de la SCI du Renard au titre de rappels de taxe sur la valeur ajoutée sur les immobilisations et les factures de loyers, qui, au demeurant, a été adressée à une société distincte, dès lors que cette décision ne comporte aucune motivation.
11. Il résulte de ce qui précède que la SAS SLMI n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SAS SLMI réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SAS SLMI est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS SLMI et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 9 juin 2022 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Dèche, présidente assesseure,
Mme Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 juin 2022.
La rapporteure,
V. Rémy-Néris
Le président,
F. Bourrachot
La greffière,
A-C. Ponnelle
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 20LY01804
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