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29/06/2022 | FRANCE | N°21LY00318

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 29 juin 2022, 21LY00318


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler l'arrêté n°19-261068 du 3 décembre 2019 du préfet de la Drôme portant refus de titre de séjour, portant obligation de quitter le territoire français avec un délai de départ volontaire de 30 jours et fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Drôme de réexaminer sa demande et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 15 jours à co

mpter du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) d'enjoindre au préfet ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler l'arrêté n°19-261068 du 3 décembre 2019 du préfet de la Drôme portant refus de titre de séjour, portant obligation de quitter le territoire français avec un délai de départ volontaire de 30 jours et fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Drôme de réexaminer sa demande et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 15 jours à compter du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Drôme de délivrer le titre sollicité dans un délai de 15 jours à compter du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 2006002 du 28 décembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 28 janvier 2021, M. C..., représenté par Me Albertin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 décembre 2020 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler l'arrêté du 3 décembre 2019 du préfet de la Drôme portant refus de titre de séjour, portant obligation de quitter le territoire français avec un délai de départ volontaire de trente jours et fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Drôme, si la décision est annulée pour un motif de forme, de réexaminer sa demande et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Drôme, si la décision est annulée pour un motif de fond, de lui délivrer le titre sollicité dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. C... soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'un vice de procédure tiré de l'absence de consultation de la commission du titre de séjour et méconnaît l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour, méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 juillet 2021, le préfet de la Drôme conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens présentés par le requérant ne sont pas fondés.

Par une décision du 31 mars 2021, le bureau d'aide juridictionnelle a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. C....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 en matière de séjour et de travail

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Fédi, président-assesseur.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... C..., ressortissant tunisien, né le 15 mars 1939, a été titulaire de cartes de résident à partir de 1986. Il est retourné en Tunisie le 7 novembre 2015. Il déclare être entré à nouveau en France le 16 décembre 2018, sous couvert d'un visa C délivré par les autorités consulaires françaises en Tunisie, valable du 6 décembre 2018 au 3 juin 2019. Le 14 mai 2019, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11 7° et de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien. M. C... relève appel du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 28 décembre 2020 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 décembre 2019 par lequel le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer le titre demandé et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours.

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour en France des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : [...] 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

3. Aux termes de l'article L. 314-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de résident d'un étranger qui a quitté le territoire français et a résidé à l'étranger pendant une période de plus de trois ans consécutifs est périmée. "

4. Il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a résidé régulièrement en France à compter du 10 septembre 1986, sous couvert de trois cartes de résident successives, jusqu'au 7 novembre 2015, date de son départ du territoire national pour y revenir le 16 décembre 2018, soit une interruption de plus de trois années, durant laquelle il a vécu dans son pays d'origine, ce qui a entrainé, en application des dispositions citées au point précédent, la péremption de la dernière carte de résident dont il était titulaire. Par ailleurs, il n'est pas contesté que le requérant est hébergé chez son fils, A... C..., ressortissant français, depuis son retour sur le territoire français. Si M. C... a perçu en France une retraite d'un montant mensuel de 474,31 euros, ainsi qu'une retraite complémentaire d'un montant mensuel de 202,98 euros, il ne fait état d'aucune insertion particulière dans la société française. En outre, si M. C... se prévaut de la présence régulière sur le territoire français de cinq enfants et de son ex-épouse titulaire d'une carte de résident, il ne démontre pas l'intensité de ses liens avec les membres de sa famille, en dehors de ceux qu'il entretient avec le fils qui l'héberge, alors même qu'il n'établit pas être isolé dans son pays d'origine, où il a résidé très récemment et où vit son épouse actuelle. Ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la circonstance que M. C... est retourné vivre dans son pays d'origine, la décision de refus de séjour en litige n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Elle n'a ainsi pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet de la Drôme n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

5. Aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) ". Aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. ". Il résulte de ces dispositions que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du cas des seuls ressortissants étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les ressortissants étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Ainsi qu'il a été dit aux points précédents, M. C... ne remplissait pas les conditions nécessaires à la délivrance du titre de séjour qu'il sollicitait. Dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet ne pouvait refuser la délivrance du titre de séjour en litige, sans avoir saisi préalablement la commission du titre de séjour, ne peut qu'être écarté.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. Il résulte de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé, que M. C... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français.

7. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points précédents, la décision obligeant M. C... à quitter le territoire français n'a pas été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

8. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 14 juin 2022, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

M. Gilles Fédi, président assesseur,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 juin 2022.

Le rapporteur,

Gilles Fédi

Le président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Sandra Bertrand

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY00318


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00318
Date de la décision : 29/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Gilles FEDI
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : ALBERTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-06-29;21ly00318 ?
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