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15/06/2022 | FRANCE | N°19LY04595

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 15 juin 2022, 19LY04595


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Sodisal a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler les arrêtés du 18 mai 2017 par lesquels le préfet de la Savoie lui a infligé une amende administrative d'un montant de 5 000 euros et a prononcé à son encontre une astreinte administrative d'un montant journalier de 400 euros ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par jugement n° 1706051 du 15 octobre 2019, le tri

bunal administratif à décidé d'une part, d'abroger l'arrêté du 18 mai 2017 infligeant une ame...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Sodisal a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler les arrêtés du 18 mai 2017 par lesquels le préfet de la Savoie lui a infligé une amende administrative d'un montant de 5 000 euros et a prononcé à son encontre une astreinte administrative d'un montant journalier de 400 euros ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par jugement n° 1706051 du 15 octobre 2019, le tribunal administratif à décidé d'une part, d'abroger l'arrêté du 18 mai 2017 infligeant une amende administrative à la société Sodisal, d'autre part, que le montant final des sommes dues par la société Sodisal au titre de l'astreinte était fixé à 51 200 euros et enfin a rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 15 décembre 2019, la société Sodisal, représentée par Me Cochet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 15 octobre 2019, sauf en ce qu'il a jugé recevable la requête en excès de pouvoir ;

2°) d'annuler les arrêtés du 18 mai 2017 ;

3°) à titre subsidiaire, d'annuler l'arrêté préfectoral DDT/SEEF n° 2017-654 du 18 mai 2017 en raison du caractère manifestement disproportionné de la sanction prononcée par rapport aux manquements reprochés ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Sodisal soutient que :

- les arrêtés attaqués méconnaissent les dispositions des articles L. 171-8 et R. 214-33 du code de l'environnement ;

- elle a respecté les obligations mises à sa charge par la mise en demeure du 3 mars 2017 et il existe une erreur manifeste d'appréciation de la prétendue poursuite du chantier après la mise en demeure ;

- l'astreinte est disproportionnée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 octobre 2021, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que

- la requérante se borne essentiellement à reproduire ses écritures de première instance dans sa requête en appel et par conséquent n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause la régularité et le bien-fondé du jugement rendu par le tribunal administratif de Grenoble dans cette affaire ;

- dans ces circonstances, pour l'appréciation du bien-fondé de la requête, elle s'en remet à l'ensemble des écritures produites en première instance devant le tribunal administratif de Grenoble par le préfet de la Savoie ;

- les moyens présentés par la requérante ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 22 octobre 2021, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 19 novembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Fédi, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Par un permis de construire du 7 juin 2016, la société par action simplifiée société de distribution alimentaire (SO.DI.SAL) a été autorisée à agrandir sa surface commerciale " Super U " et les parkings adjacents pour une superficie de 28 147 m², avec indication qu'un dossier au titre de la loi sur l'eau, concernant l'ensemble du bâtiment, était obligatoire préalablement au début de tous travaux. Toutefois, les travaux ont débuté alors que le dépôt de la déclaration demandée n'avait pas été effectué. Par un courrier du 16 décembre 2016 adressé au pétitionnaire, le préfet de la Savoie lui a rappelé ses obligations légales au titre de la loi sur l'eau, mais la société a néanmoins poursuivi ses travaux sans déposer la déclaration demandée. Le 29 janvier 2017, la société Sodisal a déposé un dossier de déclaration au titre de la loi sur l'eau. Toutefois, par courrier du 9 février 2017, le préfet de la Savoie l'a invitée à compléter le dossier déposé sous huit jours, soit avant le 23 février 2017. Faute de réponse, malgré l'octroi de deux délais supplémentaires, le préfet de la Savoie a, par un arrêté du 3 mars 2017, mis en demeure la société d'une part, de régulariser sa situation administrative en déposant, dans un délai de quinze jours, un dossier de déclaration conforme aux dispositions de l'article R. 214-32 du code de l'environnement, d'autre part, de suspendre les travaux en cours jusqu'à l'obtention du récépissé relatif à ces travaux. Après un contrôle effectué le 3 avril 2017, qui a permis de constater que les travaux n'avaient pas été interrompus, par courrier du 19 avril 2017, dans le cadre de la procédure contradictoire, le préfet de la Savoie a adressé à la société une demande d'observations sur les projets d'arrêtés n° 2017-653 et 2017-654 lui infligeant des sanctions administratives. Cette demande est également restée sans réponse. Par deux arrêtés du 18 mai 2017, le préfet de la Savoie a alors infligé à la société Sodisal une amende administrative d'un montant de 5 000 euros et a prononcé à son encontre une astreinte administrative d'un montant journalier de 400 euros jusqu'à satisfaction de la mise en demeure. Par jugement n° 1706051 du 15 octobre 2019, le tribunal administratif a décidé d'une part, d'abroger l'arrêté du 18 mai 2017 infligeant une amende administrative à la société, d'autre part, que le montant final des sommes dues par cette dernière au titre de l'astreinte était fixé à 51 200 euros et enfin a rejeté le surplus des conclusions de la requête. La société Sodisal relève appel de ce jugement en tant qu'il a fixé le montant final des sommes dues au titre de l'astreinte à 51 200 euros.

2. Aux termes de l'article L. 171-8 du code de l'environnement : " I. (...) en cas d'inobservation des prescriptions applicables en vertu du présent code aux installations, ouvrages, travaux, aménagements, opérations, objets, dispositifs et activités, l'autorité administrative compétente met en demeure la personne à laquelle incombe l'obligation d'y satisfaire dans un délai qu'elle détermine. (...) / II. - Si, à l'expiration du délai imparti, il n'a pas été déféré à la mise en demeure, l'autorité administrative compétente peut arrêter une ou plusieurs des sanctions administratives suivantes : (...) 4° Ordonner le paiement d'une amende au plus égale à 15 000 € et une astreinte journalière au plus égale à 1 500 euros applicable à partir de la notification de la décision la fixant et jusqu'à satisfaction de la mise en demeure. (...) / Les amendes et les astreintes sont proportionnées à la gravité des manquements constatés et tiennent compte notamment de l'importance du trouble causé à l'environnement (...) ". Aux termes de l'article R. 214-33 du même code: " Dans les quinze jours suivant la réception d'une déclaration, il est adressé au déclarant :1° Lorsque la déclaration est incomplète, un accusé de réception qui indique les pièces ou informations manquantes et invite le déclarant à fournir ces pièces ou informations dans un délai fixé par le préfet qui ne peut être supérieur à trois mois. Si le déclarant ne produit pas l'ensemble des pièces ou informations indiquées dans le délai qui lui est imparti, l'opération soumise à déclaration fait l'objet d'une opposition tacite à l'expiration dudit délai (...) ". Aux termes de l'article R. 214-35 dudit code : " Le délai accordé au préfet par l'article L. 214-3 pour lui permettre de s'opposer à une opération soumise à déclaration est de deux mois à compter de la réception d'une déclaration complète. Toutefois, si, dans ce délai, il apparaît que le dossier est irrégulier ou qu'il est nécessaire d'imposer des prescriptions particulières à l'opération projetée, le délai dont dispose le préfet pour s'opposer à la déclaration est interrompu par l'invitation faite au déclarant de régulariser son dossier ou de présenter ses observations sur les prescriptions envisagées, dans un délai fixé par le préfet et qui ne peut être supérieur à trois mois. Lorsque le dossier est irrégulier, si le déclarant ne produit pas l'ensemble des pièces requises dans le délai qui lui a été imparti, l'opération soumise à déclaration fait l'objet d'une décision d'opposition tacite à l'expiration dudit délai ; l'invitation faite au requérant de régulariser son dossier mentionne cette conséquence. ".

3. La société Sodisal soutient que la décision du 16 mai 2017, qui lui fait grief et qui s'est substituée à celle du 3 mars 2017, lui a fait bénéficier d'un nouveau délai de mise en conformité du dossier de déclaration, au titre de la loi sur l'eau, jusqu'au 16 juillet 2017 et que par conséquent aucun constat d'irrégularité administrative ne pouvait être établi avant le terme de ce délai et aucune sanction ne pouvait être prise. Toutefois, la circonstance que le préfet ait octroyé à la société Sodisal, par ledit courrier, un délai de trois mois pour compléter un second dossier de déclaration " loi sur l'eau " enregistré le 3 mai 2017, sur le fondement de l'alinéa 3 de l'article R. 214-35 du code de l'environnement, lequel a pour seul objet de faire naître une décision tacite d'opposition à cette déclaration en l'absence de production des pièces requises dans le délai imparti, d'une part, ne pouvait avoir pour effet de faire courir un nouveau délai au bénéfice du pétitionnaire concernant sa première demande, d'autre part, ne faisait pas obstacle à ce que l'administration, en application de l'article L. 171-8 du code de l'environnement, sanctionne la société Sodisal qui n'avait pas régularisé sa situation administrative, dans les quinze jours, suivant la notification, le 7 mars 2017, de l'arrêté de mise en demeure, en déposant un dossier de déclaration conforme aux dispositions de l'article R. 214-32 du code de l'environnement. De la même façon, la société Sodisal ne peut utilement se prévaloir d'une part, des dispositions de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration, en tant qu'elle n'a pu présenter ses observations écrites à la suite de la décision du 16 mai 2017, alors même qu'il est constant qu'elle n'a pas présenté d'observations à la suite du courrier du 19 avril 2017, adressé dans le cadre de la procédure contradictoire relative à la mise en demeure d'autre part, des dispositions de l'article R. 214-35 du code de l'environnement applicable à son dossier enregistré le 3 mai 2017.

4. La société Sodisal réitère en appel, sans l'assortir d'éléments nouveaux, son moyen tiré de ce qu'elle a respecté les obligations mise à sa charge par la mise en demeure du 3 mars 2017 et que l'administration a commis une erreur manifeste d'appréciation de la prétendue poursuite du chantier après la mise en demeure. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

5. Il résulte des dispositions de l'article L. 171-8 du code de l'environnement que la fixation du montant des amendes et astreintes est proportionnée à la gravité des manquements constatés et tient compte notamment de l'importance du trouble causé à l'environnement. En revanche, ces dispositions ne conditionnent pas le prononcé de ces amendes et astreintes à la justification d'un trouble causé à l'environnement. En l'espèce, la société SODISAL a commencé à réaliser des travaux d'agrandissement d'un bâtiment et des parkings adjacents sans les déclarer au préalable au titre de la loi sur l'eau puis s'est maintenue dans une situation irrégulière sans interrompre ces travaux et en tardant à compléter son dossier. Compte tenu de la gravité du manquement ainsi constaté, l'absence de trouble causé à l'environnement, à la supposer établie, ne suffit pas, à elle seule, à caractériser, dans les circonstances de l'espèce, une disproportion du montant retenu de 400 euros, qui représente environ un quart du maximum autorisé par la loi.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la société Sodisal n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation relative au montant final des sommes dues au titre de l'astreinte. Par voie de conséquence, les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Sodisal est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Sodisal et à la ministre de la transition écologique.

Délibéré après l'audience du 31 mai 2022, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 juin 2022.

Le rapporteur,

Gilles FédiLe président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Sandra Bertrand

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 19LY04595


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY04595
Date de la décision : 15/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

44-02 Nature et environnement. - Installations classées pour la protection de l'environnement.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Gilles FEDI
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SCP COCHET AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-06-15;19ly04595 ?
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