Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... A... et Mme B... D... ont demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2014 à 2016 et des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1901143 du 8 décembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a décidé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2014 (article 1er), a déchargé M. A... et Mme D... des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2015 et 2016 et des pénalités correspondantes pour des montants respectifs de 11 805 et 4 591 euros (article 2) et a mis à la charge de l'Etat le versement aux intéressés d'une somme de 1 400 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 3).
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 30 mars 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour :
1°) d'annuler les articles 2 et 3 de ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 8 décembre 2020 ;
2°) de rétablir les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu ainsi que les pénalités correspondantes auxquelles M. A... et Mme D... ont été assujettis au titre des années 2015 et 2016.
Il soutient que la société holding animatrice AO2B qui ne détenait pas exclusivement des participations dans des sociétés opérationnelles éligibles à la réduction d'impôt sur le revenu, prévue à l'article 199 terdecies 0 A du code général des impôts ne pouvait être elle-même éligible à ce dispositif.
Par un mémoire enregistré le 9 septembre 2021, M. C... A... et Mme B... D..., représentés par Me Martin, avocat, concluent au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que la circonstance que la SARL AO2B puisse détenir des parts dans des sociétés civiles immobilières dont la valeur est limitée ne remet pas en cause le caractère prépondérant du rôle animateur de la société ; elle doit par conséquent être regardée comme exerçant une activité d'holding animatrice à titre principal, ouvrant droit à la réduction d'impôt prévue par l'article 199 terdecies 0 A du code général des impôts.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure ;
- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;
- les observations de Me Dossin-Disant, représentant M. A... et Mme D... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. C... A... et Mme B... D... ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces, à l'issue duquel l'administration a remis en cause les réductions d'impôt qu'ils avaient obtenues au titre des années 2014, 2015 et 2016 sur le fondement de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts à raison de la souscription aux augmentations de capital réalisées par la SARL AO2B. Par propositions de rectification des 19 décembre 2017 et 6 mars 2018, l'administration leur a notifié des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2014 à 2016 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement du 8 décembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a décidé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2014 (article 1er), a déchargé M. A... et Mme D... des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2015 et 2016 et des pénalités correspondantes pour des montants respectifs de 11 805 et 4 591 euros (article 2) et a mis à la charge de l'Etat le versement aux intéressés d'une somme de 1 400 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 3). Le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel des articles 2 et 3 de ce jugement.
2. Aux termes du I de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année 2015 : " I. - 1° Les contribuables domiciliés fiscalement en France peuvent bénéficier d'une réduction de leur impôt sur le revenu égale à 18 % des versements effectués au titre de souscriptions en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés. 2° Le bénéfice de l'avantage fiscal prévu au 1° est subordonné au respect, par la société bénéficiaire de la souscription, des conditions suivantes : a) Les titres de la société ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé français ou étranger ; b) La société a son siège social dans un Etat membre de l'Union européenne ou dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales ; c) La société est soumise à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun ou y serait soumise dans les mêmes conditions si l'activité était exercée en France ; c bis) La société compte au moins deux salariés à la clôture de l'exercice qui suit la souscription ayant ouvert droit à la présente réduction ou un salarié si elle est soumise à l'obligation de s'inscrire à la chambre de métiers et de l'artisanat ; d) La société exerce une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, à l'exclusion des activités procurant des revenus garantis en raison de l'existence d'un tarif réglementé de rachat de la production, des activités financières, des activités de gestion de patrimoine mobilier définie à l'article 885 O quater et des activités immobilières. Toutefois, les exclusions relatives à l'exercice d'une activité financière ou immobilière ne sont pas applicables aux entreprises solidaires mentionnées à l'article L. 3332-17-1 du code du travail. (...) 3° L'avantage fiscal prévu au 1° trouve également à s'appliquer lorsque la société bénéficiaire de la souscription remplit les conditions suivantes : a) La société vérifie l'ensemble des conditions prévues au 2°, à l'exception de celles prévues au c bis et d ; b) La société a pour objet social exclusif de détenir des participations dans des sociétés exerçant les activités mentionnées au d du 2° ; (...) VI quater. (...) Les souscriptions réalisées au capital d'une société holding animatrice ouvrent droit à l'avantage fiscal mentionné au I lorsque la société est constituée et contrôle au moins une filiale depuis au moins douze mois. Pour l'application du présent alinéa, une société holding animatrice s'entend d'une société qui, outre la gestion d'un portefeuille de participations, participe activement à la conduite de la politique de leur groupe et au contrôle de leurs filiales et rend le cas échéant et à titre purement interne des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers. "
3. Aux termes du I de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année 2016 : " I. - 1° Les contribuables domiciliés fiscalement en France peuvent bénéficier d'une réduction de leur impôt sur le revenu égale à 18 % des versements effectués au titre de souscriptions en numéraire réalisées dans les mêmes conditions que celles prévues aux 1 et 2 du I de l'article 885-0 V bis. /2° Le bénéfice de l'avantage fiscal prévu au 1° du présent I est subordonné au respect, par la société bénéficiaire de la souscription, des conditions prévues au 1 bis du I de l'article 885-0 V bis. /3° L'avantage fiscal prévu au 1° trouve également à s'appliquer lorsque la société bénéficiaire de la souscription remplit les conditions mentionnées aux a à f du 3 du I de l'article 885-0 V bis. (...) VI quater. (...) Pour le bénéfice de la réduction d'impôt mentionnée au I du présent article, les deuxième et troisième alinéas du V de l'article 885-0 V bis sont applicables. (...) ". Aux termes de l'article 885-0 V bis de ce même code : " 1 bis. La société bénéficiaire des versements mentionnée au 1 doit satisfaire aux conditions suivantes : (...) c) Elle exerce une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, à l'exclusion (...) des activités de construction d'immeubles en vue de leur vente ou de leur location et des activités immobilières (...) 3. L'avantage fiscal prévu au 1 s'applique également aux souscriptions en numéraire au capital d'une société satisfaisant aux conditions suivantes : (...) b) La société a pour objet exclusif de détenir des participations dans des sociétés exerçant une des activités mentionnées au c du 1 bis (...) V. (...) Les souscriptions réalisées au capital d'une société holding animatrice ouvrent droit à l'avantage fiscal mentionné au I lorsque la société est constituée et contrôle au moins une filiale depuis au moins douze mois. Pour l'application du présent alinéa, une société holding animatrice s'entend d'une société qui, outre la gestion d'un portefeuille de participations, participe activement à la conduite de la politique de leur groupe et au contrôle de leurs filiales et rend, le cas échéant et à titre purement interne, des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers. (...) ".
4. La détention de titres dans des sociétés à caractère civil peut être de nature à exclure du bénéfice de la réduction d'impôt prévue par les dispositions précitées, les souscriptions indirectes réalisées par l'intermédiaire de sociétés holding à caractère " passif ", n'ayant d'autre activité que celle de détenir des titres et qui ne justifient pas de la condition mentionnée au b) du 3° du I de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'année 2015 et au b) du 3 de l'article 885-0 V bis de ce même code dans sa rédaction applicable à l'année 2016, d'avoir pour objet social exclusif de détenir des participations dans des sociétés opérationnelles. Toutefois, une telle condition ne concerne pas les souscriptions au capital des sociétés holding animatrices mentionnées au VI quater de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'année 2015 et au V de l'article 885-0 V bis de ce même code dans sa rédaction applicable à l'année 2016, qui peuvent donner droit à l'avantage fiscal concerné sous réserve que ces sociétés aient été constituées et contrôlent au moins une filiale depuis au moins douze mois.
5. En l'espèce, il résulte de l'instruction que la SARL A02B dispose, dans des sociétés à caractère civile des participations, à hauteur de 11 % des parts de la SCI Idris, 10 % des parts de la SCI Neo38, 10 % des parts de la SCI Antineas et 99 % des parts de la SCI 6AD.
6. Le ministre qui ne conteste ni le caractère de holding animatrice de la SARL A02B, ni le fait qu'elle répond aux conditions prévues par les dispositions précitées du VI quater de l'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'année 2015 et au V de l'article 885-0 V bis de ce même code dans sa rédaction applicable à l'année 2016, soutient que les intéressés ne pouvaient prétendre à l'avantage fiscal prévu par ces dispositions, dès lors que la SARL A02B ne détenait pas exclusivement des participations dans des sociétés opérationnelles. Toutefois, il résulte des dispositions précitées, que le ministre ne pouvait légalement refuser, pour ce motif, l'avantage sollicité par les intéressés.
7. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la relance n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a prononcé la décharge des impositions et pénalités restant en litige et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 400 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à M. A... et à Mme D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête du ministre de l'économie, des finances et de la relance est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à M. A... et à Mme D... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., à Mme B... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 12 mai 2022 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Dèche, présidente assesseure,
Mme Le Frapper, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 juin 2022.
La rapporteure,
P. Dèche
Le président,
F. Bourrachot
La greffière,
C. Langlet
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 21LY00982
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