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31/05/2022 | FRANCE | N°21LY03178

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 31 mai 2022, 21LY03178


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 6 avril 2020 par lequel le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 2006097 du 20 mai 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 24 septembre 2021, Mme A... B..., représentée par Me Robin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 20 mai 2021 ;

2°) d'annuler cet arr

té du 6 avril 2020 ;

3°) de faire injonction au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour mention "...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 6 avril 2020 par lequel le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 2006097 du 20 mai 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 24 septembre 2021, Mme A... B..., représentée par Me Robin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 20 mai 2021 ;

2°) d'annuler cet arrêté du 6 avril 2020 ;

3°) de faire injonction au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son conseil au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii) est irrégulier, dès lors qu'il n'est pas justifié qu'il a été rendu collégialement ; les signatures apposées informatiquement ne sont pas horodatées ni ne mentionnent de certificat de sécurité ;

- l'avis du collège des médecins de l'Ofii est antérieur de dix-huit mois à la décision de refus, ce qui entache d'irrégularité la procédure, qui n'a pas permis au préfet de prendre position au regard de son état de santé à la date du refus ;

- le refus de séjour n'est pas fondé sur un examen suffisant de sa situation ;

- le refus de séjour méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le refus de séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet du Rhône, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, par une décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 25 août 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Besse, président-assesseur,

- et les observations de Me Beligon, substituant Me Robin, pour Mme B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante ukrainienne née en 1983, est entrée en France en 2014. Après le rejet de sa demande d'asile, elle a sollicité le 17 janvier 2018 la délivrance d'un titre de séjour au regard de son état de santé. Par une décision du 6 avril 2020, le préfet du Rhône a refusé de faire droit à sa demande. Mme B... relève appel du jugement du 20 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version alors applicable: " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° À l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 de ce code alors en vigueur : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ".

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 212-3 du code des relations entre le public et l'administration : " Les décisions de l'administration peuvent faire l'objet d'une signature électronique. Celle-ci n'est valablement apposée que par l'usage d'un procédé, conforme aux règles du référentiel général de sécurité mentionné au I de l'article 9 de l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives, qui permette l'identification du signataire, garantisse le lien de la signature avec la décision à laquelle elle s'attache et assure l'intégrité de cette décision ".

4. Il ressort des pièces du dossier que l'avis du collège des médecins de l'Ofii porte la mention, qui fait foi jusqu'à preuve du contraire, " Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'Ofii émet l'avis suivant ", et a été signé par les trois médecins composant le collège. Cet avis n'est pas au nombre des actes relevant du champ d'application de l'article L. 212-3 du code des relations entre le public et l'administration, dont le respect ne s'impose qu'aux décisions administratives. En se bornant à soutenir pour le reste que la seule production dudit avis par le préfet du Rhône ne permet pas de s'assurer de l'intégrité du procédé de signature électronique auquel les médecins signataires ont eu recours sans expliquer en quoi ce procédé aurait méconnu les orientations du référentiel général de sécurité instauré par les dispositions de l'ordonnance du 8 décembre 2005 relatives aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives, ainsi que les autres dispositions dont elle se prévaut, la requérante n'apporte pas de précisions suffisantes permettant d'apprécier le bien-fondé du moyen qu'elle soulève et n'établit pas que les médecins composant le collège n'auraient pas régulièrement délibéré sur sa situation médicale. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis du collège des médecins et de la procédure suivie doit être écarté.

5. En deuxième lieu, la requérante fait valoir que la décision de refus de séjour, datée du 6 avril 2020, a été prise près de dix-huit mois après l'avis rendu le 19 octobre 2018 par le collège des médecins de l'Ofii. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de l'intéressée aurait évolué pendant cette période, de sorte que la décision n'a pas été rendu, dans les circonstances de l'espèce, à l'issue d'une procédure irrégulière. De même, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Rhône, qui s'est fondé sur cet avis du collège des médecins et les éléments dont il disposait concernant la situation de la requérante, n'aurait pas procédé à un réel examen de sa situation.

6. En troisième lieu, pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par Mme B..., le préfet du Rhône s'est fondé sur l'avis rendu le 19 octobre 2018 par le collège des médecins de l'Ofii, lequel, s'il a estimé que l'état de santé de l'intéressée nécessitait des soins dont le défaut devrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine, vers lequel elle peut voyager sans risque. Il ressort des pièces du dossier que la requérante, qui était atteinte d'une polypose adénomateuse familiale, a subi une colectomie totale réalisée en 2015. Suite à cette opération, elle doit faire l'objet d'un suivi régulier, tous les six mois environ, avec exérèse éventuelle et destruction des polypes constatés. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que ce suivi et les opérations qu'il implique ne pouvaient être réalisés en Ukraine, à la date du refus en litige, même si la requérante fait état du mauvais état général du système de santé de ce pays. Si elle indique avoir des difficultés financières, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette circonstance ferait obstacle à ce qu'elle puisse effectivement bénéficier du traitement que son état de santé nécessite, alors que, comme elle l'indique, les habitants du pays bénéficient en principe d'une prise en charge de leurs soins. Par suite, en refusant de délivrer le titre de séjour sollicité, le préfet du Rhône n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation dans l'application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. Enfin, la requérante réitère en appel, sans l'assortir d'éléments nouveaux, son moyen selon lequel la décision de refus de séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction doivent être également rejetées.

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de Mme B... dirigées contre l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 10 mai 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Danièle Déal, présidente de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

Mme Christine Psilakis, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2022.

Le rapporteur,

Thierry Besse

La présidente,

Danièle Déal

La greffière,

Fabienne Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY03178


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21LY03178
Date de la décision : 31/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme DEAL
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : SCP ROBIN VERNET

Origine de la décision
Date de l'import : 14/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-05-31;21ly03178 ?
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