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17/05/2022 | FRANCE | N°20LY03099

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 17 mai 2022, 20LY03099


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Le préfet du Gard a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler le permis de construire tacitement délivré à M. A... le 19 décembre 2017 par le maire de Rochefort-du-Gard, l'autorisant à édifier une maison individuelle.

M. A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation de la décision implicite par laquelle le maire de Rochefort-du-Gard a refusé de lui délivrer un certificat de permis tacite.

Par un jugement n°1800620-1803989 en date du 10 juillet 2019, le tribun

al administratif de Nîmes a, d'une part, annulé le permis de construire tacite né le 19 d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Le préfet du Gard a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler le permis de construire tacitement délivré à M. A... le 19 décembre 2017 par le maire de Rochefort-du-Gard, l'autorisant à édifier une maison individuelle.

M. A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation de la décision implicite par laquelle le maire de Rochefort-du-Gard a refusé de lui délivrer un certificat de permis tacite.

Par un jugement n°1800620-1803989 en date du 10 juillet 2019, le tribunal administratif de Nîmes a, d'une part, annulé le permis de construire tacite né le 19 décembre 2017 au profit de M. A... et, d'autre part, rejeté la demande de M. A....

Procédure devant la cour

Par une ordonnance du 9 octobre 2020, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué le jugement de la requête n° 19MA03945 de M. A... à la cour administrative d'appel de Lyon.

Par une requête enregistrée le 19 août 2019 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, et un mémoire en réplique enregistré le 12 février 2021, M. B... A..., représenté par Me Hequet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 10 juillet 2019 ;

2°) de rejeter ce déféré du préfet du Gard ;

3°) d'annuler cette décision implicite du maire de Rochefort-sur-Gard ;

4°) d'enjoindre au maire de Rochefort-sur-Gard de lui délivrer un certificat de permis de construire tacite dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge solidaire de l'Etat et la commune de Rochefort-du-Gard la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le déféré préfectoral était irrecevable car tardif ; le préfet avait eu connaissance du permis tacite au mois d'août 2018, dans le cadre du contentieux contre l'arrêté interruptif de travaux ; la solution retenue par les premiers juges porte atteinte au principe de sécurité juridique ;

- il est bénéficiaire d'une autorisation de défrichement tacitement acquise le 8 octobre 2018 ; cette autorisation a été transmise dans le cadre d'une demande de construire modificatif enregistrée le 14 mai 2019 ; ce vice peut en tout état de cause être régularisé en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ; au demeurant, une telle autorisation n'était pas nécessaire, dès lors que l'opération restait en deçà des seuils définis par l'arrêté du 21 juin 2005 du préfet du Gard ;

- les dispositions du nouveau plan local d'urbanisme ne lui étaient pas opposables, dès lors qu'il bénéficiait de la cristallisation des dispositions du plan d'occupation des sols applicables à la date du dépôt de sa demande de certificat d'urbanisme opérationnel le 22 avril 2013, puis des certificats d'urbanisme suivants ;

- compte tenu de l'illégalité du retrait du permis de construire tacite, la décision refusant de lui délivrer un certificat de permis tacite est entachée d'illégalité.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 juin 2020, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête d'appel n'est fondé.

Par un mémoire en défense enregistré le 21 septembre 2020, la commune de Rochefort-du-Gard, représentée par la SCP Margall d'Albenas, conclut au rejet de la requête.

Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête d'appel n'est fondé.

La clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 19 février 2021, par une ordonnance en date du 11 janvier 2021.

M. A... a présenté un mémoire enregistré le 10 juin 2021, après la clôture de l'instruction.

La commune de Rochefort-du-Gard a présenté un mémoire enregistré le 2 février 2022, après la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code forestier ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Thierry Besse, président-assesseur,

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,

- les observations de Me Hequet pour M. A... et de Me d'Audigier pour la commune de Rochefort-du-Gard ;

Et après avoir pris connaissance de la note en délibéré présentée pour M. A..., enregistrée le 10 mai 2022 ;

Considérant ce qui suit :

1. Le 9 novembre 2015, M. A... a déposé une demande de permis de construire en vue de l'édification d'une maison d'habitation sur la parcelle cadastrée section, sur la commune de Rochefort-du-Gard. Par arrêté du 9 mars 2016 devenu définitif suite au rejet du recours formé par M. A... à son encontre, le maire de la commune a opposé un sursis à statuer pour une durée de deux ans. Par délibération du 23 mars 2017, soit avant l'expiration de ce délai, le plan local d'urbanisme a été approuvé. Le 19 octobre 2017, M. A... s'est rendu en mairie, où il a confirmé sa demande de permis de construire du 9 novembre 2015, ainsi qu'en atteste le document qu'il a produit en cours d'instance. A défaut de réponse du maire, il est ainsi devenu titulaire, le 19 décembre 2017, d'un permis de construire tacite. Par deux courriers successifs respectivement reçus en mairie les 21 et 27 décembre suivants, ce dernier a sollicité du maire la délivrance d'un certificat de permis tacite. La commune a opposé des refus implicites à ses demandes. M. A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation de ces décisions. Par ailleurs, le préfet du Gard a déféré à ce tribunal le permis tacite du 19 décembre 2017. Par jugement du 10 juillet 2019, le tribunal administratif de Nîmes a d'une part, annulé le permis de construire tacite et d'autre part, rejeté la demande de M. A.... M. A... relève appel de ce jugement.

Sur la recevabilité du déféré du préfet du Gard :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales : " Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement. " Selon l'article L. 2131-2 dudit code : " Sont soumis aux dispositions de l'article L. 2131-1 les actes suivants : (...) 6° Le permis de construire (...) ". Aux termes de l'article L. 2131-6 du même code : " Le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission. (...) ". Toutefois, selon l'article L. 424-8 du code de l'urbanisme, le permis tacite est exécutoire à compter de la date à laquelle il est acquis et d'après l'article R. 423-7 de ce code : " Lorsque l'autorité compétente pour délivrer le permis (...) est le maire au nom de la commune, celui-ci transmet un exemplaire de la demande (...) au préfet dans la semaine qui suit le dépôt. (...) ". Enfin, en vertu des dispositions des articles R. 423-23 et R. 424-1 du même code, à défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction de deux mois s'agissant d'une demande de permis de construire portant sur une maison individuelle, le silence gardé par l'autorité compétente vaut permis tacite.

3. D'autre part, aux termes de l'avant dernier alinéa de l'article L. 424-1 de ce code : " (...) A l'expiration du délai de validité du sursis à statuer, une décision doit, sur simple confirmation par l'intéressé de sa demande, être prise par l'autorité compétente chargée de la délivrance de l'autorisation, dans le délai de deux mois suivant cette confirmation. Cette confirmation peut intervenir au plus tard deux mois après l'expiration du délai de validité du sursis à statuer. Une décision définitive doit alors être prise par l'autorité compétente pour la délivrance de l'autorisation, dans un délai de deux mois suivant cette confirmation. A défaut de notification de la décision dans ce dernier délai, l'autorisation est considérée comme accordée dans les termes où elle avait été demandée. ".

4. Une commune doit être réputée avoir satisfait à l'obligation de transmission, dans le cas d'un permis de construire tacite, si elle a transmis au préfet l'entier dossier de demande, en application de l'article R. 423-7 du code de l'urbanisme. Dans l'hypothèse où le pétitionnaire confirme sa demande à l'issue du délai de validité du sursis à statuer, il appartient à la commune d'informer le préfet de la confirmation de sa demande par le pétitionnaire, en lui indiquant sa date de réception. Le délai de deux mois imparti au préfet par les dispositions de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales court alors, sous réserve que le préfet soit en possession de l'entier dossier de demande, à compter de la date du permis tacite si le préfet a eu connaissance de la confirmation de la demande avant la naissance du permis. Dans le cas contraire, sous la même réserve que le préfet soit en possession de l'entier dossier de demande, le délai court à compter de la date à laquelle le préfet est informé par la commune de l'existence du permis tacite, soit par la transmission du certificat délivré le cas échéant par le maire en application de l'article R. 424-13 du code de l'urbanisme, soit par la transmission, postérieurement à la naissance du permis, de la confirmation de sa demande par le pétitionnaire.

5. Il ressort des pièces du dossier qu'à l'occasion de la transmission au préfet de l'arrêté du 9 mars 2016 portant sursis à statuer sur la demande de permis de construire déposée par M. A..., l'entier dossier de permis de construire a été transmis aux services du contrôle de légalité le 11 mars 2016. Par ailleurs, la lettre du 19 octobre 2017 par laquelle ce dernier avait confirmé sa demande de permis de construire n'a été transmise au contrôle de légalité que par un courrier de la commune de Rochefort-du-Gard du 6 décembre 2018, reçu par les services du contrôle de légalité le 14 décembre 2018. Par suite, le délai ouvert au préfet du Gard pour déférer le permis de construire tacite en litige n'a commencé à courir qu'à cette date et n'était donc pas expiré à la date d'enregistrement du déféré devant le tribunal administratif de Nîmes, le 19 décembre 2018. Eu égard aux règles spéciales de transmission au contrôle de légalité des actes des collectivités locales, telles que prévues par les dispositions citées au point 2 du code général des collectivités territoriales, le préfet du Gard ne peut être regardé comme ayant eu connaissance acquise de ce permis tacite en août 2018 à l'occasion de la communication de la demande de M. A... et du courrier de communication de la demande dans le cadre d'une instance contentieuse portant sur un arrêté interruptif de travaux pris le 23 juillet 2018 par le maire de Rochefort-du-Gard au nom de l'Etat, arrêté fondé d'ailleurs sur le fait que le requérant avait entrepris des travaux sans autorisation d'urbanisme, ce que l'intéressé contestait. Dès lors, le courrier du 19 octobre 2017 n'ayant pas été transmis par la commune au préfet du Gard ou aux services de l'Etat placés sous son autorité, dans le cadre du contrôle de légalité, avant le 14 décembre 2018, aucun délai n'a pu courir à l'encontre du préfet antérieurement à cette date. Par suite, et sans qu'il soit porté atteinte au principe de sécurité juridique ou au droit de propriété, tous deux garantis par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors au surplus que M. A... avait eu connaissance, du fait du refus du maire de Rochefort-du-Gard de lui refuser des certificats de permis tacite et de l'arrêté interruptif de travaux, de ce que l'existence de ce permis tacite était contestée, la fin de non-recevoir opposée par M. A... au déféré du préfet du Gard doit être écartée.

Sur la légalité du permis tacite :

6. Pour annuler le permis tacite né le 19 décembre 2017, le tribunal administratif de Nîmes a estimé d'une part que le projet n'était pas réalisable sur un terrain situé en zone N du PLU approuvé le 23 mars 2017, d'autre part que M. A... n'avait pas justifié de l'obtention préalable d'une autorisation de défrichement.

En ce qui concerne la méconnaissance des articles N1 et N2 du règlement du PLU :

7. Selon l'article N1 du règlement du PLU de Rochefort-du-Gard, sont interdites en zone N : " Toutes les constructions et les installations autres que celles soumises à conditions particulières définies à l'article N2, notamment les constructions dédiées à : / - l'habitat sauf les cas visés à l'article N2 (...) ". L'article N2 en cause dispose quant à lui que : " (...) Pour les constructions à usage d'habitation existantes à la date d'approbation du PLU, sont admis : / - l'aménagement dans les volumes existants, / - l'extension limitée ayant une surface de plancher initiale d'au moins 70 m2, / - la création de deux annexes au maximum (garage, abri, cuisine d'été, etc.) accolées ou non à la construction principale, / - la création d'une piscine, / - l'extension limitée des annexes existantes à la date d'approbation du PLU, / sous conditions (...) ". Il résulte de ces dispositions que ne sont pas admises en zone N les constructions nouvelles à usage d'habitation.

8. Aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée :/ a) Indique les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain (...). Lorsqu'une demande d'autorisation ou une déclaration préalable est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d'un certificat d'urbanisme, les dispositions d'urbanisme, le régime des taxes et participations d'urbanisme ainsi que les limitations administratives au droit de propriété tels qu'ils existaient à la date du certificat ne peuvent être remis en cause à l'exception des dispositions qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique. (...) ". Aux termes de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date de la décision de sursis à statuer : " A compter de la publication de la délibération prescrivant l'élaboration d'un plan local d'urbanisme, l'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 424-1, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan. "

9. M. A... soutient que les dispositions du PLU approuvé en 2017 ne lui étaient pas opposables en se prévalant de trois certificats d'urbanisme délivrés les 21 juin 2013, 30 juillet 2015 et 28 novembre 2017, mentionnant tous trois les règles applicables en zone NA du règlement du plan d'occupation des sols antérieur. Ces trois certificats d'urbanisme, qui déclaraient non réalisables l'opération alors projetée par M. A... ont été annulés par trois jugements du tribunal administratif de Nîmes en date des 20 janvier 2015, 19 septembre 2017 et 10 juillet 2019.

10. En premier lieu, si aucune disposition n'exclut la prise en compte d'un certificat d'urbanisme pour l'examen d'une demande d'autorisation ou d'une déclaration préalable déposée antérieurement à la délivrance de ce certificat et n'ayant pas encore donné lieu à décision de l'autorité administrative, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de délivrance du certificat d'urbanisme en date du 29 novembre 2017, le plan local d'urbanisme classant le terrain en litige en zone N était entré en vigueur. L'article L. 600-2 du code de l'urbanisme ne s'appliquant pas aux certificats d'urbanisme, le service instructeur devait examiner la demande de M. A..., suite à l'annulation d'un précédent certificat d'urbanisme, en se fondant sur les dispositions d'urbanisme applicables à la date à laquelle il a pris sa décision, ainsi que l'a d'ailleurs relevé le tribunal administratif de Nîmes pour annuler ce certificat d'urbanisme, par jugement du 10 juillet 2019. Dans ces conditions, ce certificat d'urbanisme n'a pu cristalliser au profit de M. A... les règles de l'ancien plan d'occupation des sols.

11. En second lieu, le certificat d'urbanisme délivré sur le fondement du a) de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme a pour effet de garantir à son titulaire un droit à voir toute demande d'autorisation ou de déclaration préalable déposée dans le délai indiqué examinée au regard des règles d'urbanisme applicables à la date de la délivrance du certificat. Parmi ces règles, figure la possibilité, lorsqu'est remplie, à la date de délivrance du certificat, l'une des conditions énumérées à l'article L. 153-11 du code l'urbanisme, d'opposer un sursis à statuer à une déclaration préalable ou à une demande de permis. Si l'omission de la mention d'une telle possibilité dans le certificat d'urbanisme peut être de nature à constituer un motif d'illégalité de ce certificat, elle ne fait pas obstacle à ce que l'autorité compétente oppose un sursis à statuer à une déclaration préalable ou à une demande de permis ultérieure concernant le terrain objet du certificat d'urbanisme. Lorsqu'un certificat d'urbanisme a été délivré sur le fondement du a) de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme et que, dans les conditions prévues à l'article L. 153-11 du même code, un sursis à statuer est opposé à la demande de permis de construire présentée par le bénéficiaire de ce certificat au motif que cette demande serait de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du plan local d'urbanisme dont l'élaboration est en cours, l'autorité compétente pour statuer sur la demande est fondée à faire application du nouveau plan local d'urbanisme si, à l'expiration du délai de sursis à statuer, ce nouveau plan est entré en vigueur.

12. L'annulation par jugement du 19 septembre 2017 du certificat d'urbanisme négatif opposé le 30 juillet 2015 à M. A..., au motif que le maire de Rochefort-du-Gard avait à tort déclaré l'opération projetée non réalisable, n'a pu faire obstacle par lui-même à la cristallisation des règles d'urbanisme dont bénéficiait M. A.... Toutefois lorsqu'un certificat d'urbanisme a été délivré sur le fondement du a) de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme et que, dans les conditions prévues à l'article L. 153-11 du même code, un sursis à statuer est opposé à la demande de permis de construire présentée par le bénéficiaire de ce certificat au motif que cette demande serait de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du plan local d'urbanisme dont l'élaboration est en cours, l'autorité compétente pour statuer sur la demande est fondée à faire application du nouveau plan local d'urbanisme si, à l'expiration du délai de sursis à statuer, ce nouveau plan est entré en vigueur. Dans ces conditions, et alors que le maire de Rochefort-du-Gard a légalement opposé un sursis à statuer à la demande de permis de construire déposée M. A... par une décision du 9 novembre 2015 devenue définitive, ce dernier ne peut se prévaloir de la cristallisation des droits nés de certificats d'urbanisme antérieurs et les règles du plan local d'urbanisme adoptées le 23 mars 2017 lui étaient applicables.

13. Il résulte de ce que précède que le permis tacite, qui autorise la construction d'une maison individuelle en zone N du plan local d'urbanisme adopté en 2017, ce qu'interdisent les dispositions citées au point 7, est entaché d'illégalité.

En ce qui concerne l'absence d'autorisation de défrichement :

14. Aux termes de l'article L. 425-6 du code de l'urbanisme : " Conformément à l'article L. 341-7 du nouveau code forestier, lorsque le projet porte sur une opération ou des travaux soumis à l'autorisation de défrichement prévue aux articles L. 341-1 et L. 341-3 du même code, celle-ci doit être obtenue préalablement à la délivrance du permis. ". Aux termes de l'article L. 341-1 du code forestier : " Est un défrichement toute opération volontaire ayant pour effet de détruire l'état boisé d'un terrain et de mettre fin à sa destination forestière. Est également un défrichement toute opération volontaire entraînant indirectement et à terme les mêmes conséquences, sauf si elle est entreprise en application d'une servitude d'utilité publique. La destruction accidentelle ou volontaire du boisement ne fait pas disparaître la destination forestière du terrain, qui reste soumis aux dispositions du présent titre. "

15. Il ressort des pièces du dossier que, si M. A... avait obtenu une autorisation de défrichement pour sa parcelle le 28 août 2015, celle-ci a été retirée à sa demande le 5 octobre 2016. Le permis de construire en litige, en date du 19 décembre 2017, est donc intervenu en l'absence d'autorisation de défrichement préalable, en méconnaissance des dispositions citées au point précédent. Si M. A... soutient désormais qu'une telle autorisation, qu'il avait pourtant sollicitée, n'était pas requise en l'espèce, il n'assortit pas son moyen de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé. S'il fait par ailleurs valoir que, par jugement du 26 mai 2021, le tribunal administratif de Nîmes a annulé l'arrêté du 12 octobre 2018 par laquelle le préfet du Gard a refusé de lui délivrer l'autorisation de défrichement qu'il sollicitait, cette circonstance reste par elle-même sans incidence sur la légalité du permis de construire en litige, qu'il appartient à M. A... de régulariser par la production d'une telle autorisation. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le permis tacite méconnaît les dispositions citées au point précédent de l'article L. 425-6 du code de l'urbanisme.

16. Le vice tiré de la méconnaissance des dispositions des articles N1 et N2 du règlement du PLU n'étant pas régularisable, le permis tacite né le 19 décembre 2017 doit être annulé.

Sur la légalité du refus de délivrance d'un certificat de permis tacite :

17. Le présent arrêt confirmant l'annulation du permis tacite dont bénéficiait M. A..., et ce permis tacite devant ainsi être considéré comme n'étant jamais intervenu, les conclusions de l'intéressé tendant à l'annulation du refus de délivrance d'un certificat de permis tacite ne peuvent qu'être rejetées.

18. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Rochefort-du-Gard, qui n'est pas partie perdante, verse à M. A... la somme qu'il demande au titre des frais non compris dans les dépens qu'il a exposés. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Rochefort-du-Gard au titre des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Rochefort-du-Gard au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à la commune de Rochefort-du-Gard et au préfet du Gard.

Délibéré après l'audience du 26 avril 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Danièle Déal, présidente de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

M. François Bodin-Hullin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 mai 2022.

Le rapporteur,

Thierry BesseLa présidente,

Danièle Déal

La greffière,

Fabienne Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et à la ministre de la transition écologique, en ce qui les concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 20LY03099


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20LY03099
Date de la décision : 17/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Suspicion légitime

Analyses

Collectivités territoriales - Dispositions générales - Contrôle de la légalité des actes des autorités locales - Déféré préfectoral - Délai du déféré.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Nature de la décision - Octroi du permis - Permis tacite.


Composition du Tribunal
Président : Mme DEAL
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : HEQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 07/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-05-17;20ly03099 ?
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