Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme D... C..., épouse A..., a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 23 novembre 2020 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 2007707 du 15 mars 2021, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 15 avril 2021, Mme C... épouse A..., représentée par Me Badescu, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 15 mars 2021 du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) d'annuler les décisions du préfet de l'Isère du 23 novembre 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", ou, subsidiairement, de procéder à un nouvel examen de sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour valant autorisation provisoire de travail ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son avocat d'une somme de 1 400 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué ne répond pas au moyen de l'administration tiré de l'absence de continuité de son séjour en France ;
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
- cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les articles 3 et 9-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- elle procède d'une erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les articles 3 et 9-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- elle procède d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par une ordonnance du 30 novembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 7 janvier 2022.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., épouse A..., de nationalité tunisienne, relève appel du jugement du 15 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère du 23 novembre 2020 rejetant sa demande de titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il ressort des termes mêmes du jugement attaqué que les premiers juges ont répondu aux moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation dont procèderait le refus de titre de séjour en litige. Ils n'étaient, en revanche, pas tenus de statuer sur l'ensemble des arguments avancés en défense pour contester ces moyens. Par suite, le jugement attaqué ne souffre d'aucune omission à statuer.
Sur le bien fondé du jugement attaqué :
3. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) ".
4. Mme C..., née le 18 avril 1998, est entrée le 6 novembre 2018 en France, où elle a épousé, le 15 juin 2019, M. A..., un compatriote titulaire d'une carte de résident. Si un enfant est né de leur mariage le 25 avril 2020, il est constant qu'à la date de la décision litigieuse, Mme C..., épouse A..., ne résidait ainsi que depuis deux ans sur le territoire français, où elle n'a jamais bénéficié d'un titre de séjour à l'exception du récépissé de sa demande, et que son mariage était particulièrement récent, sans qu'elle ne démontre la réalité d'une relation antérieure. Par ailleurs, elle ne se prévaut d'aucune insertion particulière. Enfin, Mme C..., épouse A..., n'est pas dépourvue d'attaches privées et familiales en Tunisie, où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt ans et où demeurent ses parents et sa fratrie. En outre, son époux, également de nationalité tunisienne, est en droit de s'y rendre régulièrement, nonobstant les difficultés, tenant notamment à l'activité professionnelle de celui-ci ou au contexte sanitaire, invoquées par Mme C..., épouse A.... Dans ces circonstances, et quelle que soit la décision qui pourrait être prise sur une éventuelle demande de regroupement familial, Mme C..., épouse A..., n'est pas fondée à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour et en l'obligeant à quitter le français, le préfet de l'Isère a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnu les stipulations précitées.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
6. Contrairement à ce que Mme C..., épouse A..., prétend, ni le refus de titre de séjour en litige, ni l'obligation de quitter le territoire français dont il est assorti n'ont nécessairement pour effet de la séparer de son enfant. Par ailleurs, il résulte de ce qui a été indiqué au point 4 du présent arrêt, que le père de son enfant est en droit de se rendre régulièrement en Tunisie. Dans ces circonstances et eu égard au jeune âge de son enfant, Mme C..., épouse A..., n'est pas fondée à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour et en l'obligeant à quitter le français, le préfet de l'Isère a méconnu les stipulations précitées de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
7. En troisième lieu, les stipulations du paragraphe 2 de l'article 3 et de l'article 9 de la convention relative aux droits de l'enfant créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux intéressés. Mme C..., épouse A..., ne peut donc utilement se prévaloir de ces stipulations.
8. Enfin, et pour les mêmes motifs que ceux figurant aux points 4 et 6, le préfet de l'Isère n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle de Mme C..., épouse A....
9. Il résulte de ce qui précède que Mme C..., épouse A..., n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
10. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles de son conseil tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme C..., épouse A..., est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C..., épouse A..., et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 12 avril 2022, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,
Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère,
Mme Sophie Corvellec, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 mai 2022.
La rapporteure,
Sophie CorvellecLe président,
Jean-Yves Tallec
La greffière,
Michèle Daval
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 21LY01215