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03/05/2022 | FRANCE | N°21LY01490

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 03 mai 2022, 21LY01490


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 31 mars 2021 par lequel le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et lui a fait interdiction de circuler sur le territoire français pendant une durée de dix-huit mois.

Par un jugement n° 2102303 du 6 avril 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 6 mai 20

21, M. A... B..., représenté par Me Hmaida, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 6 avr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 31 mars 2021 par lequel le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et lui a fait interdiction de circuler sur le territoire français pendant une durée de dix-huit mois.

Par un jugement n° 2102303 du 6 avril 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 6 mai 2021, M. A... B..., représenté par Me Hmaida, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 6 avril 2021 ;

2°) d'annuler cet arrêté du 31 mars 2021, en tant qu'il lui fait interdiction de circuler sur le territoire français pendant une durée de dix-huit mois ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à son conseil au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision d'interdiction de circuler sur le territoire français pendant dix-huit mois est entachée d'une erreur d'appréciation ;

- la décision d'interdiction de circuler sur le territoire français pendant dix-huit mois méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision d'interdiction de circuler sur le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'impossibilité qu'il aurait à se faire représenter ;

- la décision d'interdiction de circuler sur le territoire français pendant dix-huit mois méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant.

La requête a été communiquée au préfet du Rhône, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Par décision du 2 septembre 2021, le bureau d'aide juridictionnelle a rejeté la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. B....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Besse, président-assesseur ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant roumain né en 1976, s'est vu notifier à sa sortie de prison un arrêté, en date du 31 mars 2021, par lequel le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et lui a fait interdiction de circuler sur le territoire français pendant une durée de dix-huit mois. Par jugement du 6 avril 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. M. B... relève appel de ce jugement, en tant seulement qu'il a rejeté sa demande dirigée contre la décision lui faisant interdiction de circuler sur le territoire français pendant dix-huit mois.

2. Aux termes de l'article L. 511-3-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " L'autorité administrative peut, par décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français prononcée en application des 2° et 3° de l'article L. 511-3-1 d'une interdiction de circulation sur le territoire français d'une durée maximale de trois ans (...) / Les quatre derniers alinéas de l'article L. 511-3-1 sont applicables. ". Aux termes du cinquième aliéna de l'article L. 511-3-1 du même code alors en vigueur : " L'autorité administrative compétente tient compte de l'ensemble des circonstances relatives à sa situation, notamment la durée du séjour de l'intéressé en France, son âge, son état de santé, sa situation familiale et économique, son intégration sociale et culturelle en France, et de l'intensité de ses liens avec son pays d'origine (...) ".

3. En premier lieu, le préfet du Rhône, qui avait obligé M. B... à quitter le territoire français sans délai, en raison de la menace à l'ordre public qu'il représente, a assorti cette obligation d'une interdiction de circuler sur le territoire français d'une durée de dix-huit mois. Il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a été condamné le 16 avril 2019 par le tribunal correctionnel de Lyon à dix-huit mois d'emprisonnement dont dix avec sursis pour des faits de violences par personne en état d'ivresse suivies d'une incapacité supérieure à huit jours, puis le 6 avril 2020, par un arrêt de la cour d'appel de Lyon faisant suite à un jugement de décembre 2019, à deux ans d'emprisonnement dont dix mois avec sursis pour des faits de récidive de violences sur conjoint. Si le requérant fait valoir qu'il s'est constitué partie civile suite à une agression et que l'interdiction de circuler sur le territoire français litigieuse pourrait l'empêcher d'assister au procès, il conserve la possibilité de se faire représenter par un défenseur de son choix dans le cadre de cette affaire. M. B... fait valoir par ailleurs qu'une telle interdiction de circuler sur le territoire français est de nature à l'empêcher d'avoir des contacts avec sa fille, née en mars 2020, qui est placée auprès des services de l'aide sociale à l'enfance, alors que le juge des enfants lui a reconnu le 16 mars 2021 un droit de visite médiatisé. Toutefois, eu égard à la gravité des faits reprochés à l'intéressé, au fait qu'il n'est revenu en France qu'en 2017 après une mesure d'éloignement, qu'il ne démontre pas avoir cherché à établir des relations avec sa fille, alors par ailleurs qu'il ne conteste pas ne plus avoir de lien avec ses deux autres enfants vivant en France, le préfet du Rhône n'a pas entaché sa décision faisant interdiction à M. B... de circuler sur le territoire français pendant une durée de dix-huit mois d'une erreur d'appréciation.

4. En deuxième lieu, pour les motifs exposés ci-dessus, et alors que le juge judiciaire a interdit tout contact pendant deux années entre M. B... et sa compagne, la décision lui faisant interdiction de circuler sur le territoire français pendant dix-huit mois ne porte pas atteinte au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et ne méconnaît pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. "

6. Il ressort des pièces du dossier que l'enfant de M. B... a été placé à sa naissance, en mars 2020, auprès des services de l'aide sociale à l'enfance, son père étant incarcéré et sa mère, affectée d'un handicap mental sévère, n'étant pas en mesure de s'occuper d'elle. Même si le requérant s'est vu reconnaître à sa sortie de prison un droit de visite médiatisé, il ne ressort pas des pièces du dossier, dans ces circonstances particulières et en l'absence de lien entre l'enfant et le père, que la décision faisant interdiction à l'intéressé de circuler sur le territoire français pendant dix-huit mois méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant.

7. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 5 avril 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Danièle Déal, présidente de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

Mme Christine Psilakis, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 mai 2022.

Le rapporteur,

Thierry Besse

La présidente,

Danièle Déal

La greffière,

Fabienne Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

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N° 21LY01490


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21LY01490
Date de la décision : 03/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme DEAL
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : HMAIDA

Origine de la décision
Date de l'import : 17/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-05-03;21ly01490 ?
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